vendredi 19 avril 2024

Artistes engagés: Daniel Barenboim, Gustavo Dudamel, Fazil Say… Portraits d’artistes militants…

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Artistes engagés
Quand certains mélmanes ne conçoivent qu’une scène décorative, volontiers divertissante, d’autres sont plus enclins à vivre différament la culture. La globalisation et l’interdépendance de nos sociétés modernes ne peuvent éviter de nouvelles confrontations qui aiguisent et remodèlent aussi notre façon de penser la musique. Dans ces paysages recomposés, la musique a toute sa place. Elle oeuvre même à changer le monde, le réenchanter, lui donner un nouvel idéal. Déjà Beethoven rêvait d’une société fraternelle. Son chant est devenu hymne européen. De la musique engagée à la politique, il n’y a qu’un pas. Par politique, nous parlons d’action concrète. Pour Peter Sellars, la France d’après l’Occupation, désirant voir et entendre de la beauté, s’est dotée de nombreux festivals, ainsi sont nés Avignon, Cannes… et le premier d’entre eux, Aix en Provence. Contre la barbarie qui menace et conspire, l’art se fait arme victorieuse de l’esprit. Programmer Mozart dans une société affaiblie, quand il était de meilleur ton de jouer Puccini ou Verdi, tenait déjà d’un acte « révolutionnaire » ( le mot n’est pas de nous mais d’Edmonde Charles Roux, laquelle fut étroitement associée à la création du festival aixois porté par Gabriel Dussurget à partir de 1948)…

Humanisme militant
A l’opéra, nécessité de renouveler un genre trop décrié, trop poussiéreux, trop déconnecté du monde actuel, les metteurs en scène, chorégraphes, plasticiens, cinéastes redéfinissent les règles dramaturgiques. A torts ou à raisons. Pour le meilleur ou pour le pire. Nonobstant certains débordements visuels et scénographiques qui ont fait dire aux puristes, souvent conservateurs, qu’une « malscène » corrompait désormais toute production d’opéra, l’action de Gérard Mortier, par exemple, à Paris, restera pour nous dans les annales de la Maison Parisienne. Qu’il ait ouvert la salle aux nouveaux acteurs de la scène actuelle, grand bien en est sorti pour le genre lyrique: l’opéra reconnecté avec le monde, n’a jamais tant connu de record d’audience, ni suscité de débats. L’opéra a gagné ainsi son nouveau magnétisme comme art vivant.

Pour nous, la musique se vit dans l’action, dans la réflexion vivante d’un genre ouvert sur notre monde. Voici « nos » artistes engagés, porteurs d’espoir et de dépassement, ambassadeurs d’un humanisme militant. Ceux qui aujourd’hui, ou depuis de nombreuses années, proposent une nouvelle définition de l’acte musical. Daniel Barenboim, fondateur en 1999, du West Eastern Divan orchestra, le pianiste turc Fazil Say, ou bien encore, le jeune chef d’orchestre Gustavo Dudamel qui a lancé comme un défi réussi contre la fatalité, The Simon Boliver Youth orchestra of Venezuela…

Gustavo Dudamel

Comme de nombreux élèves du Sistema, Gustavo Dudamel ne pensait pas être emporté par le classique. Lui aussi, est issu des quartiers les plus défavorisés, et rien ne lui indiquait qu’il ferait carrière dans ce domaine. Une rencontre est décisive alors, celle avec José Antonio Abreu dont l’humanisme et la volonté d’imposer la musique classique comme facteur de progrès social, se révèle déterminante dans la maturation du jeune musicien : « La musique a changé ma vie. Lorsque je regarde ce que sont devenus les garçons de mon âge, je constate que beaucoup ont sombré dans la drogue et le crime. Mais pas ceux qui faisaient de la musique« , précise-t-il.
Il est né en 1981 à Barquisimento, capitale de l’état de Lara, au nord du Vénézuela, l’une des zones les plus pauvres du pays. Pour réponse à ce qui aurait pu être une fatalité sociale, l’activité des 125 orchestres de jeunes, des 57 orchestres d’enfants, des 30 orchestres professionnels, à l’échelle d’un pays de 22 millions d’habitants, relève le défi contre l’enfer de la drogue et de la criminalité.

Fazil Say

C’est un espiègle engagé, à l’âme brûlante, au jeu déterminé et chantant. Fazil Say, pianiste et compositeur, conserve enfouie et tenace, cette vocation à la réflexion et à la compréhension intime et profonde des choses. Autant de couleurs personnelles qui éclairent son jeu et sa façon de vivre la musique.. Il exprime tout le poids de la culture, arme vivante et pacifiste qui pourrait (enfin) faire basculer, en sensibilisant les esprits, l’évolution de son pays, la Turquie, vers… davantage de démocratie. On sait aujourd’hui combien l’adhésion des Turcs, au sein de la communauté européenne, suscite de débats passionnés… Chacun selon sa vision du monde. Ne pas évoquer ce contexte bouillant au regard de l’oeuvre du pianiste-compositeur reste une faute pour l’esprit.

Daniel Barenboim

Contre la haine et l’enfer de la guerre, un seul mot d’ordre : musique ! Ce mot lâché avec sérieux aurait pu tomber à l’eau, or il tombe à pic dans le contexte plus que tendu du conflit israélo-palestinien. Un homme relève le défi : contrer la fatalité des vendettas, éradiquer les foyers de violence. Réapprendre à vivre ensemble, en harmonie.
Le chef israélien Daniel Barenboim avec l’intellectuel palestinien Edward Saïd (décédé après le lancement du projet, en 2003), ont composé un duo exemplaire destiné à rompre la guerre entre frères ennemis. Leur initiative s’est pleinement réalisée lors du concert historique à Ramallah (en août 2005, dont les enregistrements CD et DVD son parus chez Warner), mais aussi en 2006, avec le nouveau concert diffusé en direct sur Arte, le 20 août, depuis l’Alhambra de Grenade. Pour se faire, est né l’orchestre des jeunes musiciens originaires des deux camps : le West-Eastern Divan Orchestra. Pour Daniel Barenboim, la musique indique une résolution non-militaire du conflit entre palestiniens et israélien. Depuis 2008, le chef d’orchestre est l’une des rares personnalités à posséder la double nationalité: israélienne et palestinienne…

Agenda

Le 2 août 2008 à 19h, en direct sur Internet, depuis le Festival de Verbier 2008: Fazil Say, piano. UBS Verbier festival orchestra, Paul McCreesh, direction

Le 11 août 2008 à 19h. Amman (Jordanie). En direct sur Arte. Richard Wagner, La Walkyrie, acte I. Avec René Pape, Waltraud Meier… West Eastern Divan Orchestra. Daniel Barenboim direction

Le 25 août à 20h. Salle Pleyel à Paris. Même programme.

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