André Cardinal Destouches (1672-1749)
Le Carnaval et la folie, 1703
France Musique
Jeudi 1er mai 2008 à 20h
Concert donné le 1er février 2008, Salle Favart-Opéra Comique à Paris
André-Cardinal Destouches
Le Carnaval et la Folie
Comédie-ballet en quatre actes et un prologue
sur un livret d’Antoine Houdar de la Motte d’après « Eloge de la Folie » d’Erasme
Paul Henry Vila : Carnaval
Mélodie Ruvio : Folie
Marduk Serrano Lopez : Momus
Reinoud van Mechelen : Plutus
Emmanuelle de Negri : Jeunesse
Marc Callahan : Jupiter
Marion Tassou : Vénus
Marc-André Pronovost : Chef des Matelots
Enrique Alberto Martinez Rivero : Professeur de Folie
Daniel Cabena : Un Musicien
Sorin Dumitrascu : Un Poète
Choeur, danseurs et Orchestre de l’Académie baroque européenne d’Ambronay
Hervé Niquet, direction
Comédie-ballet en quatre actes sur un livret d’Antoine Houdar de la Motte, l’ouvrage dirigée par Hervé Niquet est une production du festival d’Ambronay 2007, présenté comme le fruit des séances d’apprentisssage et de perfectionnement des élèves musiciens, de la 14ème Académie baroque Européenne d’Ambronay. Le Carnaval de Destouches fut probablement créé à Fontainbleau le 14 octobre 1703, c’est à dire dans le crépuscule austère du règne de Louis XIV. Repris dès 1704 à l’Académie Royale de musique, puis 7 fois jusqu’en 1755, la partition fut bel et bien un succès à son époque.
Carnaval aime Folie
La restitution orchestrale et musicale proposée par Niquet et ses troupes s’appuie sur l’édition de 1738: Destouches emploie, outre les solistes, un chœur à quatre parties et l’orchestre à la française, composé alors des quatre pupitres de cordes, flûtes, hautbois, bassons, percussions, trompettes, et une basse continue (viole de gambe, théorbes et clavecins). L’histoire n’est qu’un prétexte à un feu d’artifice, expressif, vocal et visuel: l’enjoué Carnaval aime Folie, coquette maîtresse de l’île… de la Folie. Lui faisant une cour assidue, il désire même l’épouser. Elle accepte, puis se dédit. Carnaval veut quitter l’île mais une tempête suscitée par Neptune l’en empêche. Dépité, l’amoureux écarté noie sa tristesse dans le vin. Surgit Momus qui en allié du pauvre bougre, déclare à la Folie que Carnaval ne l’aime plus. A ce jeu de bascule et de confusion sentimentale, de dissimulation et de faux semblants, la Folie s’enhardit et accepte les divertissements chantés et dansés préparé par Momus… divinité des jeux. Mais Carnaval ne l’entend pas ainsi: il demande au dieu Hiver de créer une tempête glaciale: la Folie s’en réjouit. Si Carnaval s’emporte encore c’est qu’il continue de l’aimer. Jupiter et Vénus paraissent pour unir les deux amoureux.
De fait, avant que Rameau ne traite du délire et de la folie à son tour, en un divertissement hallucinant qui fait la valeur de son opéra Platée, Destouches sait captiver par la frénésie et la surenchère des danses et tableaux de pur divertissement (menuets, danse, gavotte, passe-pieds, marches, bourrées rondeau, chaconne, gigue, ritournelle, … rythment la progression d’une action comique et légère… Le style de Destouches ne manque pas d’esprit ni de brio. Ce en quoi Hervé Niquet avait déjà convaincu dans un disque précédent dédié à un autre ouvrage lyrique du même auteur: Callirhoé. D’autant qu’à la tête d’un collectif de jeunes professionnels non encore véritablement aguerris aux dures lois de l’art théâtral et musical, la cohérence et le jeu d’ensemble emportent l’adhésion. Et les amateurs d’articulation « authentique » applaudiront là encore une prononciation chantante et colorée, propre au Grand Siècle, et décrêtée par Louis XIV, soi-même.
Illustration: Jean-Honoré Fragonard, jeune femme (DR)
