lundi 28 avril 2025

Philippe Jaroussky chante Caldara (Munich, 2010)Arte, dimanche 7 octobre 2012, 19h. Maestro

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télé, Arte
concert Philippe Jaroussky

Philippe Jaroussky

chante Antonio Caldara

Arte, Dimanche 7 octobre 2012, 12h
Maestro (2010, Munich)

En répétition avec la claveciniste Emmanuelle Haïm que l’on ne voit plus dans les sections de concert avec le Concerto Köln, le haute contre français Philippe Jaroussky s’engage en 2010, à dévoiler la passion lyrique de l’immense vénitien Antonio Caldara (1670-1736). Le compositeur éblouit la scène théâtrale à la fin du XVIIè, en particulier dans le quartier de la Fava à Venise: et jusqu’à Vienne où l’Empereur admirait la musique de l’Italien: complexité de l’ornementation et surenchère des effets dramatiques cependant jamais creux, et aussi (surtout) grande suavité des mélodies. Ce caractère profond et démonstratif convient idéalement au chant pétaradant du soliste qui en l’espace d’un récital passe des airs alanguis aux traits les plus martiaux, conquérants, virtuoses et aussi plus grâcieux. La réussite d’un programme baroque, surtout vocal, tient à la gestion des contrastes. D’autant que les instrumentistes réunis sur la scène ne sont que joueurs de cordes : ni flûtes, ni hautbois ni trompettes.


Et Caldara dans tout cela ?

Pour autant, le chanteur ne semble se soucier que de sa ligne vocale, ses arabesques habilement décochées… au mépris du texte. Bien peu de nuances accordées à l’émission du verbe: dans une série de vocalises poussées toujours plus vite, toujours plus haut et rapide, le vocaliste répond aux premières attentes d’un public venu surtout acclamer une performance. On serait en droit d’en attendre davantage car la situation dramatique, l’intonation et le style exigent plus de texte, plus d’intériorité, de simplicité et de mesure.

A l’époque les castrats, jouant sur les deux registres de leur voix (poitrine et tête), avaient certainement plus de couleurs et de diversité expressives à offrir… plus de souffle aussi. Comme pour mieux divertir, Jaroussky dans ce récital Caldara ajoute le sublime air de Polifemo de Porpora: vertiges d’un désir élastique qui vient sauver en fin de récital, l’asthénie ambiante plombant son récital munichois pourtant dédié à Caldara. Tout tient dans cette ambiguité: pourquoi chanter Porpora dans un programme destiné à ressusciter Caldara?

En terra incognita, puisque tous ces airs ne sont pas connus, le stantor exerce un droit de pionnier; les amateurs souligneront sa capaciter à surjouer, intensifier une ligne, renforcer la matière fluide d’une phrase rien que musicale; or justement cet art doit aussi servir le texte et éclairer une situation dramatique: évidemment le concert aurait gagné à être traduit (surtitrage des textes des aris)… car le beauté de la voix seule ne suffit pas caractériser, colorer, exprimer doutes et vertiges dans leur contexte. Sans vouloir bouder notre plaisir, l’écoute frise parfois l’ennui à force de monotonie dans le traitement de tous les airs. Tout est souvent systématique et abordé de la même façon: une standardisation vocale se dévoile contre toute attente.

Nonobstant, depuis Cecilia Bartoli et son premier disque révélant un Vivaldi inconnu, celui de l’opéra, tous les jeunes solistes après elle souhaite eux aussi expérimenter la révélation à défaut le défrichement; le bout du chemin et les apports sont divers; s’agissant de Philippe Jaroussky, le vocaliste séduit mais l’interprète se fait rare. La diva romaine reste inatteignable: son nouvel album dédié à Steffani (septembre 2012) nous le prouve encore: la chanteuse sait captiver justement par son chant et son sens du texte, d’une intacte intensité. Philippe Jaroussky a encore un long parcours à réaliser sur le sillon de sa prodigieuse aînée (qui l’a d’ailleurs invité dans ce disque Steffani). Gageons que ses prochains disques ne soient jalonnés de nouvelles conquêtes poétiques (plus proche du texte et d’une certaine simplicité stylistique ?). A suivre. Le disque de ce programme est paru en 2010 et ce concert munichois fait suite à l’enregistrement et à la publication du cd Caldara in Vienna.

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