Falvetti: Nabucco, 1683. AlarconAmbronay, le 14 septembre 2012 à 20h30

Chef en résidence à Ambronay, Leonardo Garcia Alarcon poursuit un parcours semé d’irrésistibles redécouvertes. Après Il Diluvio Universale (partition oubliée de 1682, révélée en septembre 2010), voici en septembre 2012, un nouvel inédit prometteur présenté à Ambronay en première mondiale : Nabucco (1683), lui aussi composé par l’illustre Michelangelo Falvetti (1642-1692), compositeur inspiré à Palerme à la fin du XVIIème.

Avec Il Diluvio Universale, Falvetti ressuscitait en une langue flamboyante, expressive, orientale: la Sicile a toujours balancé entre Occident et Orient. Falvetti élève du romain Tozzi, lui-même maître de chapelle de la Cathédrale de Messine, devient prêtre (Don révérend Michelangelo Falvetti) et s’affirme dans le milieu musical messin grâce à un tempérament singulier: à Messine, il cotoie Bernardo Storace, le violoniste Mealli auquel il dédie plusieurs recueils de pièces purement instrumentales (Sonates).

Le frontispice d’Il Diluvio indique qu’en 1682, Falvetti est nommé maître de chapelle de la Cathédrale de Messine. L’oeuvre reste indissociables des événements politiques terribles qui soumettent les siciliens: Charles II a réprimé très durement la résistance des habitants de Messine vis à vis de l’occupation espagnole.

Quand le vice roi Comte de Santiesteban nomme Falvetti, maître de chapelle à Messine, il désigne et rend hommage à un fidèle sujet de Charles II, totalement dévoué à l’occupant. Le compositeur met toute son éblouissante virtuosité (effectifs choraux spectaculaires, orchestration raffinée, style concertant flamboyant…) au service du roi espagnol: si, dans Il Diluvio, l’humanité implorante (à travers le duo Rad et Noé) risque l’anéantissement, c’est pour mieux souligner l’autorité du roi d’Espagne sur ses sujets siciliens… Quand Noé implore Dieu, ce sont tous les siciliens qui soumis supplient la grâce du Roi d’Espagne pour les épargner. Spectaculaire et hautement symbolique, le tempête instrumentale et l’engloutissement par noyade des hommes révoltés restent le moment le plus fort de l’oratorio ainsi révélé.

Avec Nabucco (également créé à la Cathédrale de Messine), il en va différemment, même si l’on retrouve les qualités d’Il Diluvio; le Dialogue à 6 voix de 1683, dont la partition est conservée à Naples, souligne la place singulière de Falvetti dans l’histoire de l’oratorio sicilien et plus largement dans l’histoire de l’oratorio italien.

Nabucco, nouveau drame biblique

Nabucco (Nabuchodonosor II) est un roi conquérant contre les égyptiens et les phéniciens, créateur des fameux jardins suspendus et surtout, vainqueur des juifs … qu’il a déportés jusqu’à Babylone. L’arrogance du souverain paraît sans limite: se déclarant l’égal de Dieu, il est frappé par la foudre. Juste châtiment d’une ambition démesurée qui montre la terrifiante et pathétique vanité des hommes aveuglés par leur soif de pouvoir… En plus des tableaux épiques qui empruntent à l’épopée biblique, Falvetti et son librettiste Vincenzo Giattini caractérisent les profils psychologiques du drame: Nabucco, le préfet Arioco; le prophète Daniel, les figures féminines: Anania et Azaria… Entre l’oratorio et le dramma per musica, Nabucco emprunte sa langue poétique et musicale à l’opéra. A travers le peuple soumis mais digne ne faudrait-il pas voir la résistance des italiens contre l’occupation espagnole?
Falvetti retrouve l’inspiration d’Il Diluvio, magnifiée sous la baguette de Leonardo Garcia Alarcon qui ajoute en plus des percussions de Keyvan Chemirani, les timbres moyen-orientaux du ney et du duduk. L’écriture de Falvetti resplendit de nouveau entre passion et jubilation, occident et orient.

Nabucco, oratorio de Michelangelo Falvetti (1642-1692).

Livret de Vincenzo Giattini.

Nabucco, roi des Chaldéens : Fernando Guimarães, ténor

Daniele, prophète : Alessandro Meerapfel, basse

Arioco, préfet des milices : Fabián Schofrin, contre-ténor

Anania : Caroline Weynants, soprano

Azaria et Idolatria (Idolâtrie) : Mariana Flores, soprano

Misaele : Magdalena Padilla Osvaldes, soprano

Eufrate (Le Fleuve Euphrate) : Matteo Bellotto, basse

Superbia (Orgueil) : Capucine Keller, soprano

Keyvan Chemirani, percussions

Kasif Demiröz, ney

Cappella Mediterranea

Chœur des Chaldéens : Chœur de Chambre de Namur

Leonardo García Alarcón, direction

France Musique diffuse Nabucco de Falvetti le 29 septembre 2012 à 19h30.