dimanche 15 juin 2025

Gluck: Orphée et Eurydice, version Berlioz 1859Angers Nantes Opéra, du 22 au 22 mars 2012

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Gluck


Orphée et Eurydice
, 1774
version Berlioz, 1859
Nouvelle Production

Angers Nantes opéra
Du 2 au 22 mars 2012

Nantes, Théâtre Graslin
vendredi 2, dimanche 4, mardi 6, vendredi 9, dimanche 11 mars 2012

Angers, Grand théâtre
dimanche 18, mardi 20, jeudi 22 mars 2012

Opéra en trois actes.
Livret italien de Raniero de’ Calzabigi, traduit en français par Pierre-Louis Moliné, revu par Hector Berlioz.
 Créé au Burgtheater de Vienne, le 5 octobre 1762, puis, pour la version française, à l’Académie Royale de musique de Paris, le 2 août 1774. Version révisée par Hector Berlioz, créée au Théâtre Lyrique de Paris, le 18 novembre 1859.
Direction musicale: Andreas Spering. 
Mise en scène: Emmanuelle Bastet
. Orchestre National des Pays de la Loire.
Nouvelle Production Angers Nantes Opéra 
[Opéra en français avec surtitres]


Orphée version Berlioz (1859)

Créé au Burgtheater de Vienne, le 5 octobre 1762 (sous son titre italien : Orfeo avec un castrat dans le rôle-titre) puis, dans sa seconde version française (avec ténor dans le rôle-titre) à l’Académie Royale de musique de Paris, le 2 août 1774, la partition de Gluck marque doublement à Vienne puis Paris, à 10 années d’intervalle, l’histoire de l’opéra à l’époque des Lumières.


La nouvelle production présentée par Angers Nantes Opéra, temps fort de sa saison lyrique 2011/2012
, s’intéresse à l’autre version romantisée, révisée par Hector Berlioz (aidé par le jeune Saint-Saëns), créée au Théâtre Lyrique de Paris, le 18 novembre 1859.

Paris, 1859. C’est l’époque où Gluck et sa réforme théâtrale insuffle un retour esthétique pour le classicisme: les romantiques inspirés par l’équilibre et l’épure formelle? Gluckiste de la première heure (tout autant que shakespearien), Berlioz se passionne totalement pour une forme dramatiquement unifiée, où chant et musique ne sont développés que s’ils servent tension et urgence de l’action. Chœurs, orchestre, airs chantés composent une fresque à la fois dépouillée et sublime qui emporte l’adhésion des spectateurs. A l’époque où Berlioz s’intéresse au théâtre de Gluck, le compositeur français conçoit son épopée lyrique: Les Troyens (1858-1859), pendant français de la Tétralogie wagnérienne. Passionné par l’idée d’un théâtre total, Berlioz redéfinit le genre du grand opéra romantique en lui ajoutant une couleur Shakespearienne associée (imbrication très fine des tableaux diversifiés au risque de rompre l’unité psychologique) à la leçon de Virgile (pureté de la langue, force poétique du verbe, et a contrario de la scène shakespearienne, absence d’action et de mouvement). Quand Berlioz livre « sa » version de l’Orphée de Gluck, il pense avoir fixé un modèle théâtral et lyrique.

Direction musicale :Andreas Spering

Mise en scène: Emmanuelle Bastet

Scénographie et costumes : Tim Northam

Lumière : François Thouret

Avec:
Julie Robard-Gendre, Orphée

Hélène Guilmette, Eurydice

Sophie Junker, l’Amour

Choeur d’Angers Nantes Opéra
— Direction Sandrine Abello —
Orchestre National des Pays de la Loire
Nouvelle Production

Orphée, de Gluck à Berlioz
La vision d’Emmanuelle Bastet
Emmanuelle Bastet n’en est pas à son premier opéra pour Angers Nantes Opéra: Lucio Silla de Mozart, présenté en mars 2010, avait marqué les esprits par l’unité de sa réalisation scénique et l’esthétisme intimiste du déploiement visuel: c’est un même travail sur le raffinement scénographique, et l’expression pudique mais intense et sincère des passions qui porte sa nouvelle production deux ans plus tard à Nantes et à Angers. Le mythe d’Orphée, si sombre et solitaire à son commencement devrait y puiser une épaisseur renforcée et une signification finale… lumineuse.

Les sources qui nous parlent d’Orphée et nourrissent le mythe sont diverses: récits orphiques, Euripide, puis Ovide. C’est à toutes les époques, un mythe fondateur et tragique. L’Amour fou d’Orphée qui descend aux enfers pour sauver son aimée, morte par le poison d’un serpent, fascine. Mais le voyage aux Enfers reste l’épisode finale de sa vie qui auparavant et par ailleurs, est très riche.

Avant les Enfers et ses noces avec Eurydice, Orphée est cet aventurier compagnons des Argonautes. Artiste, musicien, chanteur (Offenbach le fait violoniste dans son Orphée aux enfers), enchanteur et solaire, héros positif, proche d’Apollon, il enchante, parle aux animaux car la beauté de sa voix, sa harpe sont très attractives; sa geste indique un moyen de connaissance et de civilisation, mais aussi de sublimation et donc de transgression car il pénètre les Enfers. Infléchissant la loi des dieux, il sait toucher et adoucir l’inflexible Pluton. Outre la force du sujet, les oeuvres que Orphée a suscité chez les compositeurs sont tout autant capitales et puissantes.

Gluck, après Monteverdi, compose un manifeste sur la modernité de la musique; sans évoquer son union avec Eurydice ni rappeler les conditions de sa mort soudaine, le Chevalier favori de Marie-Antoinette, commence par l’épisode des enfers; l’opéra débute par les funérailles d’Eurydice quand Monteverdi joue sur l’effet de la mort de la jeune femme; Gluck part de la mort d’Eurydice en une vaste scène de déploration, il souligne la culpabilité tragique d’Orphée.
De solaire et humain, porté par une indéfectible ardeur amoureuse (Monteverdi), le héros gluckien devient surtout sombre et « maudit », figure romantique par excellence; figure de l’artiste souffrant, être déchiré, moins solaire que véritablement humain: il se lamente, se plaint; désespère.
Tel est sa figure au commencement du théâtre gluckiste.

Mais Orphée est cet amoureux passionné qui in fine connaît une fin heureuse: il devient solaire et lumineux à la fin. Telle est la propre vision de Gluck qui transforme le mythe : des ténèbres vers la lumière, Orphée a une 3è chance, après la mort d’Eurydice laquelle meurt une seconde fois, car il se retourne malgré la loi de Pluton, mais les dieux sont touchés à nouveau par le beau chant du musicien, et le héros si humain, donc troublant, obtient de retrouver Eurydice.


Un rêve éveillé ?
la vision d’Emmanuelle Bastet

La version présentée par Angers Nantes Opéra interroge le thème de la transgression qui modifie l’immuable et la tragédie; Que nous offre à voir l’opéra de Gluck? N’est ce pas un rêve éveillé? Orphée est-il fou et rêve-t-il? L’artiste s’autorise à pénétrer dans les mondes parallèles de l’imaginaire. Eurydice ne paraît qu’à la fin; avant, elle n’est qu’évoquée comme une absence obsessionnelle; une figure de la perte; jusqu’aux retrouvailles au III.

Eurydice s’incarne dans l’esprit d’Orphée comme une idée fantasmée, moins une femme; c’est une personnification de la femme idéale, comme peut l’être l’immortelle bien-aimée chère dans le cœur solitaire de Beethoven, ou l’aimée inaccessible fantasmée par Berlioz dans le diptyque symphonique: Episode de la vie d’un artiste (Symphonie fantastique puis Lelio ou le retour à la vie); quand Eurydice s’incarne après l’attente, Orphée ne la retrouve pas comme il la souhaitait; comme il ne cesse de la rêver depuis le début de l’ouvrage, il y a un malentendu entre le désir de l’artiste et la réalité de la femme retrouvée…

Depuis Ovide ou Virgile jusqu’aux artistes contemporains, Orphée fascine les siècles qu’il traverse. Sans doute parce que ce fils du roi de Thrace et de la muse Calliope, cet aède qui reçoit une lyre des mains d’Apollon, cet enchanteur qui charme la nature aux accents de sa musique et de sa voix, ce conteur inspiré dans lequel s’incarne la souveraine action de la musique et du chant, cet aventurier qui partage le voyage des Argonautes, émeut les sirènes, adoucit les monstres infernaux avant d’être déchiqueté par les Bacchantes, il est l’archétype même du poète et de l’artiste. 
 »En plein XVIIIe siècle, Christoph Willibald Gluck mêle à jamais le destin d’Orphée à celui d’Eurydice, cette nymphe que le jeune poète vient d’épouser et qui meurt aussitôt dans ses bras, cet amour devenu parfait depuis que le sort l’en a privé et qu’il tente en vain d’arracher au Pays des Ombres. Du mythe, embelli à l’extrême par sa musique, Gluck ne retient que cette descente aux Enfers, cette passion rêvée qui se dénoue à l’abri du réel et se perd dans les brumes apaisantes de l’art. Près d’un siècle plus tard, tout en révisant l’oeuvre fidèlement, Hector Berlioz en fait l’illustration toute romantique d’un amour maudit qui n’a d’autre vie que dans la mort et le regret » précise la metteuse en scène Emmanuelle Bastet. Production événement.
grand reportage vidéo


Classiquenews
accompagne l’élaboration de la nouvelle production d’Orphée et Eurydice
présentée à partir du 2 mars par Angers Nantes Opéra
. Dans ce
premier volet, découverte et fabrication des costumes (lignes, couleurs
des costumes pour l’acte III, les champs-élysées… sources
d’inspiration, style, essayage), première installation de la machinerie,
vision d’Orphée… entretien avec Emmanuelle Bastet, mise en scène; Tim
Northam, scénographie et costumes; Jean-Paul Davois, directeur général
d’Angers Nantes Opéra. Gluck: Orphée et Eurydice à Angers Nantes Opéra, du 2 au 22 mars 2012. Voir notre reportage vidéo complet 1

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