Vertiges symphoniques assurés ! L’OPMC / ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE MONTE-CARLO nous régale ce dimanche 15 juin prochain (Auditorium Rainier III, 18h) en proposant un programme ambitieux associant entre autres deux massifs spectaculaires de l’écriture symphonique (et concertante) : le Concerto n°2 de Chostakovtich dont 2025 marque le 50ème anniversaire de la mort ; puis fresque autobiographique qui hisse une existence à l’échelle de l’épopée : Une vie de héros de l’immense Richard Strauss…
Concerto pour piano n°2 de CHOSTAKOVITCH : POUR MAXIME…
Près de 25 ans après son premier Concerto (1933), Chostakovitch compose son Deuxième concerto pour piano à l’intention de son fils Maxime. Volontiers plus léger, voire « insouciant », le compositeur par égard à la jeunesse du soliste (19 ans), semble écarter l’ironie mordante et la satire glaçante qui lui sont coutumières. Panache, esprit fanfaron, soliloque d’une franche clarté les deux mouvements extrêmes permettent d’exposer un dialogue ardent, vif (groupe des vents dont les flûtes engageant presque acide cependant), entre orchestre et piano. Même l’Andante, explicitement intérieur, n’écarte pas une gravité inquiète… cela, sans proportion avec les accents tragiques de la Symphonie n° 11, créée quelques mois plus tard.
Amorcé telle une comptine, le premier Allegro martèle un épisode martial (scansions de la caisse claire) où le piano percussif, déterminé, trépidant, bouillonnant, affirme sa marche expressionniste comme hallucinée, porté par un orchestre d’une énergie croissante comme prêt à en découdre… Ample sarabande, l’Andante central déploie à l’inverse, une cantilène toute feutrée, d’une délicatesse infinie, intériorité triste, nostalgique dont le repli grave, le lyrisme sombre regardent vers le dernier postromantique : Rachmaninov…
Le finale (Allegro) renchérit sur l’élan percussif du premier mouvement, avec une motricité décuplée, comme ivre ainsi que le suggèrent la polka et ses contretemps heurtés. Le pianiste y multiplie les éclats virtuoses dans lesquels Chostakovitch a glissé non sans humour, les études de Hanon, étudiées par son fils pour perfectionner son jeu.
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Dimanche 15 juin 2025, 18h
MONACO, AUDITORIUM RAINIER III
Concert symphonique : Hommage à Chostakovitch
RÉSERVEZ VOS PLACES directement sur le site de l’OPMC ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE MONTE-CARLO : https://opmc.mc/concert/hommage-a-chostakovitch-15-juin-2025/
Alexander GLAZOUNOV
Valse de concert n°1 en ré majeur, op. 47
Dmitri CHOSTAKOVITCH
Concerto pour piano n°2 en fa majeur, op. 102
Richard STRAUSS
Ein Heldenleben (Une vie de héros), TrV 190, op. 40
Durée approximative du concert: 1h45 avec entracte
RICHARD STRAUSS : UNE VIE DE HÉROS
Ein Heldenleben, TrV 190, op. 40 – 1899
Après Don Quichotte (1898), Une vie de Héros, opus 40, met un terme au cycle grandiose des poèmes symphoniques que l’auteur porte à son paroxysme expressif, tout en absorbant les formes et les pistes de la modernité. Richard Strauss s’essaie avec liberté et invention à expérimenter une très large palette de possibilités instrumentale, certes circonscrit dans le « cadre » fixé par son sujet, ici une auto proclamation, une sorte de journal autobiographique, une manière de double musical. Son esprit facétieux autant qu’épique donne matière à un foisonnement de l’écriture qui n’est pas seulement « descriptive » : il est aussi purement instrumental, expérimental, toujours évocatoire… A l’époque de la Seconde Symphonie « Résurrection » de Mahler, également autobiographique, Strauss semble animé par une même aspiration spirituelle qui lui inspire ce mouvement spéculatif, expiatoire, démonstratif sur sa propre carrière. Il a trente cinq.
Evoquant les épisodes d’une épopée domestique, six morceaux s’enchaînent formant une ample sonate organisée par un ciment thématique (onze thèmes distincts) dont le style a été considéré comme le plus classique des poèmes composés, regardant vers Beethoven ou Berlioz. Photo : le chef Juraj Valcuha / DR.
L’oeuvre dédiée à Willem Melgelberg et à l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam est créée le 3 mars 1899 sous la direction de l’auteur, suscitant l’enthousiasme du public.
1. « Der held », le héros. Au commencement telle une autoproclamation dont la critique éreintée, malgré le succès immédiat de l’oeuvre jusqu’à l’hystérie (selon les témoignage de Romain Rolland), a reproché le narcissisme volontaire, Strauss se présente avec une emphase lyrique pleinement assumée : c’est l’avènement du héros victorieux et conquérant, défiant l’univers et les hommes, dans la tonalité de mi bémol majeur, celle du triomphe.
2. « Des Helden Widersacher » : il s’agit d’un scherzo caricatural dans lequel l’auteur épingle les « ennemis duhéros » : ces critiques gavés de fausses et étroites certitudes à l’esprit arrogant et pincé. Flûte, hautbois puis tuba insistent sur la tonalité sarcastique de la pièce où malgré de vains assauts contraires, le héros triomphe toujours.
3. « Des Helden Gefährtin », la compagne du héros est madame Strauss soi-même : personnalité versatile et capricieuse s’il en est, comme l’indique le violon solo. Agitations, disputes? tout se calme bientôt en un long adagio amoureux, pacifié.
4. « Des Helden Walstatt » : l’emportement guerrier des trompettes installent « le combat du héros » : les adversaires du deuxième chapitre, reparaissent. Volée de projectiles (flûte piccolo), fracas des armes affrontées (cuivres) : la guerre brossée par un Strauss qui veut en découdre enthousiasme Rolland qui reconnaît « la plus formidable bataille jamais peinte en musique! ». L’envolée martiale s’achève sur un nouveau chant de victoire (exaltant si majeur).
5. « Des Helden Friedenswerke » expriment les « oeuvres de paix du héros » : aspiration mystique, conscience philosophique qui citent les poèmes antérieurs, « Don Juan » et « Zarathoustra » (aux cors à la noble puissance), mais encore, « Mort et Transfiguration », « Don Quichotte » : l’auteur fait face à son oeuvre et s’expose à une sorte de bilan personnel et rétrospectif.
6. Après un court intermède tragique, c’est « la retraite du héros et l’accomplissement » ( Des helden weltflucht und vollendung) : cor bucolique, puis thème de la résignation, enfin, renoncement exprimé en une lente berceuse. Au terme du cycle des épreuves, le héros assume le sens de toute une vie pleinement acceptée.
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