Enfance du fils d’un industriel fixé près de Saint-Etienne; élève au Conservatoire de Paris dans les classes de Laurent, Savard, Bazin, Reber; puis lauréat avec le soutien d’Ambroise Thomas du fameux Prix de Rome en 1863 (à 21 ans avec sa cantate David Rizzio)… le documentaire édité par Melba dès 2000 n’omet pas les étapes décisives qui expliquent le génie musical de Jules Massenet (né en 1842) dont 2012 (le 13 août précisément) marquera le centenaire de la mort.
Les nombreuses personnalités interrogées éclairent l’éclosion de son écriture, ses premiers succès (La Grand’tante, Don Cézar de Bazan…), ce goût régulier pour les sujets à controverse qui soulignent une inspiration audacieuse toujours très personnelle et qui n’hésite pas à flirter avec la polémique (Marie-Magdeleine refusée par Pasdeloup mais défendue avec quelle conviction par Pauline Viradot; …). Génie lyrique, Massenet s’affirme ainsi à l’opéra, créant de sublimes portraits de femmes, d’abord sacrées puis, après Marie Magdeleine et La Vierge (entre autres), les héroïnes tragiques et sublimes: Manon, Hérodiade, Thaïs… et précisément Esclarmonde, personnage hallucinant au wagnérisme assumé (comme peut-l’être plus tard Gustave Charpentier son élève) que le compositeur conçoit pour la diva américaine qui fut une muse et peut-être davantage… Sybil Sanderson. A l’extrême fin du XIX et pour l’Opéra Garnier de Monte-Carlo, Massenet sait encore se renouveler avec les opéras ultimes que sont Le jongleur de Notre-Dame, Don Quichotte, Cherubin, Roma…
Au total 25 opéras, tous aussi divers et caractérisés qui puissamment originaux, témoignant d’un fort tempérament dramatique dont l’influence se fait directe auprès de ses nombreux élèves (et non des moindres): Gustave Charpentier déjà cité, Reynaldo Hahn, Chausson, Enesco, Koechlin, Magnard, d’Ollone, Pierné, Rabaud, Schmitt… toute une génération de compositeurs à l’aube du XXè qui sauront retenir ce souffle dramatique prenant, l’art de la délicatesse mélodique (dans le sillon d’un Gounod), la virtuosité tendre et séduisante, mais aussi un vérisme à la française dont Puccini, Leoncavallo, Mascagni retiendront également la leçon magistrale.
Parmi les personnalités apportant leur contribution à cette évocation vivante de Massenet, sa descendante actuelle propriétaire du château Massenet à Egreville (Seine-et-Marne) et trop fugace devant la caméra, celle qui fut une ambassadrice fervente et si convaincante dans la résurrection d’Esclarmonde, Dame Joan Sutherland qui témoigne aux côtés de son époux le chef Richard Bonynge… lequel parait également en « répétition piano » avec la soprano Camilla Illing en préparation pour le cd édité par Melba et dédié à plusieurs figures féminines des opéras de Massenet (Amoureuses, coup de coeur de la rédaction cd de classiquenews.com en 2008)… En version anglaise non encore traduite en français (mais une nouvelle édition soustitrée en français est annoncée pour le centenaire Massenet 2012), ce documentaire s’avère incontournable grâce à la richesse des extraits sonores et la qualité des témoins réunis devant la caméra (outre Dame Joan Sutherland, Richard Bonynge, saluons également la contribution du pianiste Noël Lee, Manuel Rosenthal, Yves Cuénod, Thomas Hampson… Ne manque que l’irremplaçable Renée Fleming, récente diva incomparable pour Manon et Thaïs). 1 dvd Melba (52 mn, 2000).
