lundi 16 juin 2025

Toulouse. Cloître des Jacobins, le 22 septembre 2011. Liszt, Debussy, Taneyev, Moussorgski … David Kadouch, piano

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Les soirées du festival Piano aux Jacobins se suivent et ne se ressemblent pas et il y en a pour tous les goûts ou presque. David Kadouch qui vient de faire paraître chez Decca un premier cd Schumann plus que convaincant, a du succès et son jeu ravit une partie du public et irrite une autre. Il fait partie des dompteurs du grand animal sauvage qu’est le piano et se bat avec lui, imposant une victoire écrasante. Ainsi dès les variations de Liszt sur un air de Bach les choses sont clairement énoncées. Puissance, maîtrise, précision rythmique sont d’une force écrasante. L’attitude tendue du jeune pianiste, qui va jusqu’à frapper du pied, jamais ne se relâche. C’est le signe d’un engagement sans faille dans la bataille. Les doigts sont des marteaux et le piano est un instrument de percussion sonore, voir tonitruant. Cette page de Liszt que d’autres enveloppent d’un certain lyrisme évocateur de ses origines, est ici martiale et arrogante. Les deux préludes de Debussy deviennent des morceaux symphoniques requérant des phalanges athlétiques. Les fées, exquises danseuses pour Claude de France, sont fortes et même robustes et le vent d’ouest ne laisse rien sur son passage et ne parle que de fureur. Mais quel beau pianiste au geste impeccable qui fait sonner les harmonies et tient le tempo !


Puissant athlète

Le prélude et fugue du rare Taneyev tient de l’exercice de style. Les moyens techniques, requis par celui qui fut le professeur de Scriabine, sont inouïs. David Kadouch arrive au terme de sa partie épuisé, mais heureux : il est sorti vainqueur du labyrinthe en tuant le monstre de la technique par KO. Démonstration réussie pour le jeune virtuose.

En deuxième partie la magnifique partition de Moussorgski, Les tableaux d’une exposition, va sous ces doigts audacieux, sonner magnifique et puissante. Même la promenade devient une attaque impérieuse. Toute la partition ne souffrira pas autant du combat mené par David Kadouche. La richesse mélodique, harmonique et rythmique de cet enchaînement de pièces variées, très habiles, brille de milles feux. Les histoires sont lointaines et partout le beau piano, techniquement impeccable est mis en valeur. Point de chant mélancolique dans il vecchio castello, point d’humour dans les poussins, ni de fraîcheur dans les Tuileries, rien de fantastique dans Gnomus, ni de terreur dans les catacombes… partout du grand piano !
La Grande porte de Kiev verra le triomphe de l’instrument Roi promu au rang d’orchestre symphonique. La construction est parfaite, les plans tous présents, les effets puissants tous réalisés. Beau technicien, David Kadouch, rassuré sur ce point, gagnerai l’assentiment d’une partie du public en recherchant la délicatesse de toucher de certains de ses maîtres comme Perraia, Pollini ou Barenboim, leurs subtiles nuances et leur capacité à faire oublier parfois que l’instrument est de percussion. Cette ivresse de jeunesse est celle d’un grand virtuose fier de ses moyens (à juste titre). La musique dans sa complexité demande autre chose, une vision et une capacité d’évocation poétique ce soir absentes.

Toulouse. Cloître des Jacobins. 22 septembre 2011. Frantz Liszt Liszt (1811-1886) : Variations sur Weinen, Klagen, Sorgen, Zagen, S.179 ; Claude Debussy (1862-1918) : Préludes extraits ; Serge Taneyev ( 1856-1915) : Prélude et Fugue en sol dièse mineur, op.29 ; Modest Moussorgski ( 1839-1881) : Les Tableaux d’une exposition. David Kadouch, piano.

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