Concert de clôture
Dans la forêt de Brama
Tourcoing, Auditorium du Conservatoire
Samedi 7 novembre 2009 à 20h30
Le programme du concert de clôture du 13e Festival International Albert Roussel s’articule autour du thème de l’Inde et de l’orientalisme vu par les compositeurs occidentaux. Pour l’occasion, la musique de Roussel résonnera dans l’Auditorium jouxtant la grande maison de son grand-père, maire de la ville de Tourcoing, et dans laquelle il passa son enfance. Outre la musique de Roussel, quelques raretés ponctuent la soirée, comme La Forêt de Brama, opéra inédit d’Eler (ouverture donnée en création mondiale) et Rupestre, de Suzanne Joly.
La Forêt de Brama d’Eler
André-Frédéric Eler (né probablement en Alsace comme Andreas-Friedrich Heller, 1764; mort à Paris, 21 Avril 1821). Se rendit jeune à Paris, où il suit avec succès les cours de l’ Institut National de Musique – futur Conservatoire – . Le 15 aout 1789, sa Scène française est chantée au concert Spirituel. Il fut
Bibliothécaire au Conservatoire de Paris de1795 à 1797, puis y enseigna l’accompagnement de 1798 à 1800, le solfège de 1800 à1801 et le contrepoint de 1816 à 1821. Il composa alors les nombreuses oeuvres pour instrument à vent, dont le contrepoint est remarquablement adapté aux possibilités techniques des
instruments et qui étaient aussi en partie conçues pour les élèves du Conservatoire. Il se pencha aussi pendant ses dernières années sur les compositeurs du XVIe siècle et publia une collection de sept volumes connus sous le nom de Collection Eler à la Bibliothèque du Conservatoire (aujourd’hui conservés au Département de la Musique de la BnF). Son oeuvre comprend également un concerto pour cor et orchestre, une symphonie concertante pour flûte, clarinette, hautbois, cor et orchestre, ainsi que quelques opéras en un acte : Apelle et Campaspe 1798, Le Chant des vengeances 1798 ( intermède et pantomime sur un texte de Rouget de Lisle), L’Habit de la Duchesse de Grammont , L’Habit du Chevalier de Grammont 1803.
Son opéra lyrique en 4 actes, La Forêt de Brama, dont le manuscrit complet est conservé à la BNF, constitue vraisemblablement son chef-d’oeuvre dans le genre qu’il n’eut pas le temps de faire représenter. C’est même l’un des premiers opéras français à se situer en Inde avant Lalla-Roukh, Les Pêcheurs de perles, le Roi de Lahore ou Lakmé. L’auteur du livret est une femme de lettres qui eut son heure de célébrité : Henriette Bourdic –Viot (née à Dresde en 1746, morte à La Ramière en 1802), polyglotte, musicienne, elle écrivit de nombreux poèmes disséminés dans l’Almanach des Muses ainsi qu‘un Eloge de Montaigne. Elle était en relation épistolaire avec Voltaire.
Le style de cet opéra, dont l’action se situe sur les « Rivages fortunés du Gange », se rapproche de ceux de Méhul, Cherubini, surtout Boieldieu, et certains thèmes cousinant avec le style rossinien. L’ouverture de l’opéra, restituée par Damien Top, est donnée en création mondiale.
5 of Millenium de Danceanu
Le compositeur et chef d’orchestre roumain, Liviu Danceanu Dãnceanu, né en 1954, étudie la composition auprès de Stefan Niculescu à l’Université de Bucarest et fut élève de Iannis Xenakis, Wlodzimerz Kotoriski et Paul Patterson. Il enseigne depuis 1990 à l’Université de Bucarest. C’est en 1985 qu’il fonde l’Ensemble Archaeus, consacré à la musique contemporaine qu’il dirige toujours. Il est
également directeur du Festival Zilele muzicii contemporane à Bacau. De 1991 à 1994 , Liviu Danceanu préside la section roumaine de la SIMC. Lui furent décernés notamment le Prix George Enescu de l’Académie Roumaine en 1989, le Prix de la critique Musicale en 1991 et le Prix de l’Union des Compositeurs Roumains (1988, 1990 et 1994) ainsi qu’une mention d’honneur au concours de composition Antidogma Musica à Turin en 1994. Il a composé plus d’une centaine d’oeuvres (symphoniques, vocales et de musique de chambre) et a publié des études, essais et critiques dans des revues spécialisées. Sa pièce 5 of Millenium est écrite pour cordes et gong.
Liviu Danceanu anime un atelier autour de sa musique le samedi après-midi au Conservatoire de Tourcoing de 14h00 à 15h30. Apprentis-compositeurs et mélomanes pourront ainsi découvrir les arcanes de cette oeuvre dévoilés par l’auteur lui-même.
Le Concerto pour piano de Roussel
Rarement donné de nos jours, l’opus 36 de Roussel fut composé de juillet à octobre 1927. Paul Dukas écrivait à son sujet le 8 juillet 1929 : « Je continue à mettre cet ouvrage au premier rang de ceux que vous avez écrits; l’Adagio surtout, qui me semble une de vos pages les plus significatives et qui va très
loin en profondeur d’expression… »
Dans sa biographie du compositeur, Dom Angelico Surchamp l’analyse ainsi : « Nulle recherche d’éclat spectaculaire, non plus que de développements superflus dans ce Concerto. Une création rigoureuse dont, avec le temps, l’on comprend mieux l’intransigeance et la grandeur.
L’allegro molto est austère. Il oppose des thèmes martelés, d’une violence agressive. C’est un véritable combat entre soliste et orchestre, mais un combat sur des thèmes de danses (surtout le second, Poco meno allegro, donné d’abord par le hautbois, puis la flûte et les bassons doublés par les cors.) C’est une page féroce, altière, l’Allegro barbaro de Roussel qui a rarement atteint à un tel déchaînement de violence. La conclusion : montée d’une gamme en octave et en triolets par le piano pour s’accorder un extremis à l’orchestre, résout heureusement le conflit qui, durant tout le mouvement, n’a pas connu de trêve véritable.
L’Adagio, sommet incontestable de l’œuvre, est unique dans toute notre musique occidentale. Le climat est créé en quelque dix mesures : sur une tenue à l’unisson des violoncelles et contrebasses, le piano installe un rythme étrange. L’impression d’immobilité, de hiératisme est extraordinaire. L’atmosphère est
maintenue, implacable, durant tout le mouvement. C’est un miracle de statisme et de calme.
L’Allegro con spirito présente, à la main droite seule, en monodie, le thème de danse, vigoureusement charpenté, sur lequel, à la façon d’un rondo, Roussel établit des variations aussi géniales que libres et audacieuses. L’écriture évoque un peu celle du fameux Troisième concerto de Prokofiev. Cette page est en tous cas excessivement difficile et requiert du soliste une grande virtuosité.
Roussel en Inde
Les images et les sensations collectées lors du voyage de noces que Roussel effectua à travers les Indes devaient rester gravées dans sa mémoire, nourrir son inspiration, se concrétiser quelques années plus tard, en 1912 dans les Evocations, triptyque symphonique et en 1918, dans la trame de son opéra, Padmâvatî à l’orchestration luxuriante. Il avait visité les ruines de Tchitor et le palais de Padmâvatî, princesse légendaire qui se suicida dans les flammes, en 1303, pour ne pas tomber entre les mains du sultan Alaouddin.
Les Suites d’orchestre tirées par Roussel de son opéra-ballet Padmâvatî reprennent les suites de danses des 1er et 2ème actes, aux atmosphères très intenses et riches d’images évocatrices. Tout d’abord: Prélude, danse guerrière, danse des femmes-esclaves, danses offertes au sultan et pour la seconde:
Prélude, danse funèbre de Kâli, danse de Kâli et Dourga, enlèvement de Padmâvatî.
Suzanne Joly
Pianiste et compositeur, Suzanne Joly, de nationalité française, est née à Oran en 1914. Dès l’âge de quatre ans, elle manifeste des dispositions pour la musique ; à six ans, elle compose sa première oeuvre pour piano. En 1927, elle arrive à Paris où elle fut élève pour le piano de Lazare Lévy et Antoinette Véluard pour l’écriture (harmonie, contrepoint, fugue et composition) de Maîtres tels que Noël Gallon, Roger Ducasse, Tony Aubin, et Olivier Messiaen. A partir de 1946, Suzanne Joly se fait entendre comme pianiste dans de nombreux concerts et récitals à Paris, en Province, en Suisse et à la radio. En tant que compositeur, la » Petite Suite » pour orchestre, la » Sérénade, la » Fantaisie Concertante « , pour piano et orchestre, date de sa première manière.
La » Fantaisie Concertante « , écrite entre 1944 et 1948, sera orchestrée définitivement en 1964, et créée par Raymond Chevreux avec les orchestres de Radio-Lyon, Radio-Nice, puis enregistrée sous la direction de Maurice Suzan à Radio-Lille, avec l’auteur au piano. C’est en 1952, alors qu’elle suit la classe d’esthétique et Analyse Musicale d’Olivier Messiaen, qu’elle écrit » Thème, Variations et Allegro Fugato » pour piano seul, qu’elle créera elle-même à la radio en 1956 et jouera par la suite maintes fois en concert.
Ici, l’auteur utilise les multiples ressources de l’instrument et aborde le monde des douze sons.
Ce mode d’écriture sera développé par la suite dans son » Tryptique » pour quatuor à cordes, créé en 1967 à l ‘O.R.T.F., par le Quatuor Parrenin, oeuvre en partie sérielle. Toutefois l’auteur précise qu’elle ne considère cette technique que comme un moyen parmi d’autres au service de l’expression musicale.
C’est à la mémoire de sa fille Danièle, décédée le 29 Septembre 1967, que fut écrite en 1968 » l’Ode à la Jeune Fille » dont le texte est de l’auteur. Cette oeuvre, pour voix de jeunes filles (ou de femmes), récitant et petit ensemble instrumental, fut créée le 14 Février 1978 en l’Eglise Saint Séverin à Paris, par la Maîtrise de Radio France et un Ensemble Instrumental sous la direction de Jean Barthe.
Suzanne Joly a toujours consacré une grande partie de son activité artistique à l’enseignement.
De 1960 à 1970, elle fut titulaire d’une classe de piano au Conservatoire Municipal du 14è arrondissement de Paris ; elle enseigna également à la Schola Cantorum.
Rupestre
Son mouvement pour orchestre Rupestre est inspiré d’une peinture du Tassili. Le titre doit être pris au sens de gravure, peinture sur des parois rocheuses, précise-t-elle. C’est une sorte de danse primitive, une évocation nostalgique des premiers âges. Nous sommes à l’aube des temps, le devenir de l’homme n’est pas encore inscrit.
Dans la première partie, un thème essentiellement masculin se présente en une période rythmique, de caractère sauvage, guerrier. La partie centrale développe un principe féminin (issus toutefois du thème masculin) mais transformé. Le rythme évoque celui d’une berceuse et voudrait traduite un état de sommeil qui précède la naissance des choses. Enfin, des accords attaqués ramènent la réexposition des éléments de la première partie, mais présentés d’une manière différente pour conclure dans l’allégresse générale. Par deux fois dans l’orchestration apparait une particularité : des battements de mains tiennent le rôle de percussion accompagnant un groupe d’instruments solistes , comme on le fait pour un groupe de danseurs.
Concert de clôture
Dans la forêt de Brama
Tourcoing, Auditorium du Conservatoire
Samedi 7 novembre 2009 à 20h30
Alain Raës, piano
Orchestre Philharmonique Mihaïl Jora (Roumanie)
Damien Top, direction
André-Frédéric Eler: La Forêt de Brama, ouverture en création mondiale
Liviu Danceanu: 5 of Millenium opus 98
Albert Roussel: Concerto pour piano opus 36
Albert Roussel: Padmâvatî opus 18, suites d’orchestre 1 et 2
Suzanne Joly: Rupestre
Informations et réservations.
Courriel: [email protected]. Renseignements: 09 53 63 32 08. Locations: Fnac, Carrefour, Géant au 08 92 68 36 22 (0,34 euros/minute). Entrée: 15 euros. Concert en présence de Suzanne Joly, de Liviu Danceanu et de la famille d’Albert Roussel