mardi 6 mai 2025

Emilio De’Cavallieri: Rappresentatione di Anima e di Corpo. France Musique, le 29 août 2009 à 20h. Direct

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Emilio De’Cavalieri


(c. 1550-1602)


Rappresentatione di Anima e di Corpo, 1600

France Musique

Samedi 29 août 2009 à 20h

En direct de Sablé
par L’Arpeggiata. Christina Pluhar, direction

Dernier direct d’importance offert par France Musique à l’été 2009,
L’oratorio des origines, celles de la nouvelle langue baroque, à l’aube du Seicento, et dans le domaine sacré, avant que Monteverdi n’ose son premier brûlot théâtral, Orfeo de 1607. Voici, à Rome, en 1600, l’autre ouvrage premier signé
Cavallieri fils…

Oeuvre Jubilaire à Rome

Passionnantes les oeuvres dites des « époques transitoires », où « tout se joue ». Entre le ballet ambitieux, La Pellegrina pour les noces de Ferdinand de Médicis avec Christine de Lorraine 1(1589) et l’Orfeo mantouan de Monteverdi (1607 donc), un intervalle artistique se précipite, non sans produire des ouvrages de première qualité et tout autant visionnaires. L’ouvrage de Cavallieri en fait assurément partie. Surintendant des arts à Florence sous Ferdinand de Medicis, Cavallieri, dont le père fut l’ami (voire plus) de Michel-Ange (Tommaso da’Cavalieriservit de modèle pour le Christ apollinien de son Jugement Dernier dans la Chapelle Sixtine)., s’impose par nécessité et sous la rivalité des Peri et Caccini florentins, à Rome dès 1599.
Sa Rappresentazione est commandée pour le fastueux Jubilé de 1600 destinée à la congrégation des Oratoriens de Philippe de Néri. Au coeur de la Contre-Réforme et de la nouvelle culture sacrée (prônée par l’église baroque triomphante), l’ouvrage doit marquer les esprits, les éduquer autant que le séduire.
Donné au Jubilé (qui remplace le Carnaval), le dialogue entre l’âme et le corps, éternel dilemme des âmes coupables, se déploie ici mais dans une forme totalement nouvelle.
Le texte de Manni, qui se déroule sur terre, dans le ciel, aux enfers…, convoque d’autres personnages, nourrissant l’intrigue et les rebonds dramatiques, comme dans la partie 2, l’étonnante conversation entre l’Intelligence, le Discernement, les âmes bienheureuses, les âmes damnées.
Sur le plan de l’ écriture, Cavallieri assimile parfaitement les accents expressifs du recitar cantando d’origine florentine, dont il précise même les ornementations. Fidèle à sa liberté mordante, sa connaissance du texte et ses options musicales propice à en relever les perles expressives, Christina Pluhar rétablit à sa façon un continuo somptueux (palette de cordes frottées, grattées, pincées…) qui est lui-même un commentaire et une explication simultanée de l’action chantée et articulée. C’est un véritable opéra sacré pour lequel en outre l’auteur utilise pour la première fois, la mention de recitar cantando.

Dans le disque magnifique qu’elle a enregistré chez Alpha, la magicienne baroqueuse, experte des chaconnes, passacailles et basses obstinées, a su aussi choisir ses chanteurs. Lascif Marco Beasley, éclatante âme de Johanette Zomer … Discernement pertinent et percutant de MacLeod, Visse mémorable en Plaisir, Ange à l’avenant de Nuria Rial… autant de tempérament vocaux qui portés et fusionnés avec l’architecture palpitante de l’instrumentarium requis, savent sculpter un texte, restituer ses élans troubles, ses passions humaines si déchirantes.

A Sablé, la directrice de L’Arpeggiata regroupe de jeunes chanteurs dont certains n’ont pas encore tout compris des nuances d’une articulation naturelle et précise (en particulier Céline Scheen…), dans le souffle, au diapason de la respiration de l’âme et du coeur (sprezzatura).
Il en reste aujourd’hui la grâce des inflexions musicales, un tapis foisonnant instrumental qui se fait déclamation musicale, une direction amoureuse, maternelle, visionnaire qui sait envoûter ses publics… Voici le grand art romain baroque, en son aube jaillissante qui malgré le sérieux du sujet, captive, envoûte, séduit, terrasse… Spasmes auditifs garantis. Âmes sensibles s’abstenir.

Sur France Musique, en direct du Centre Culturel de Sablé, dans le cadre du festival de Sablé,
et en simultané avec l’Union européenne de radios

Emilio De’Cavalieri (c. 1550-1602)
Rappresentatione di Anima e di Corpo (Rome, 1600)

Céline Sheen : Anima
Fulvio Bettini : Tempo, Corpo
Jan van Elsacker : Intelletto
João Fernandes : Consiglio
Hubert Claessens : Mondo

Choeur et orchestre L’Arpeggiata
Direction, théorbe, guitare baroque, harpe baroque : Christina Pluhar

Illustration: Emilio da’Cavallieri (DR), Christina Pluhar (DR)

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