Georg Friedrich Haendel
Belshazzar, 1744
Arte
Mercredi 23 juillet 2008 à 21h50
(en léger différé depuis le Grand Théâtre de Provence)
Les apparences sont trompeuses: si Jérusalem est dévastée et les juifs déportés comme esclaves à Babylone, Daniel annonce au roi Belshazzar, vainqueur des Perses, la chute de la cité mésopotamienne. Au cours d’un festin indécent, où le vin qui est versé aux invités, est contenu dans les vases que Nabuchodonosor a dérobé au Temple de Jérusalem, lieu haï d’une nation scélérate, un prodige divin s’accomplit et surprend les convives: la main de Dieu paraît à Belshazzar et inscrit sur le mur du palais, trois mots énigmatiques « Mané, Thécel, Pharès » que le prophète juif Daniel interprète comme les sanctions de Dieu contre les Babyloniens blasphémateurs: Belshazaar sera tué, Babylone anéantie, le royaume décimé. Le père de Belshazzar, Nabuchodonosor a déplacé plusieurs centaines de juifs jusqu’à Babylone, leur infligeant sévices et humiliations. Terrifié par la prédiction, Belshazzar panique: ses dernières actions précipite sa chute.
Composé en 1744 (comme Ercules), l’oratorio de Haendel s’appuie sur le texte de Jennens qui complète les sources du livre de Daniel avec les écrits d’Hérodote et de Xénophon, offrant une peinture précise et vivante de l’Antiquité biblique. En dramaturge né, le compositeur sait traiter ses personnages avec profondeur et variété émotionnelle. Dès le début, la mère du roi Belshazzar, Nitocris, prédit la fin du royaume car tout ici bas est vain et mortel. Le tumulte musical qui résulte du traitement (par le choeur) des peuples affrontés (babyloniens présomptueux mais aveugles, juifs austères et critiques, perses agressifs) porte de façon continue la tension d’un ouvrage parmi les plus intéressants de Haendel.
Mettre en scène un oratorio haendélien peut être synonyme de contre sens: pourquoi enliser ou contraindre la portée (et le souffle) de la musique par un cadre scénique quand Haendel lui-même avait abandonné l’opéra et ses codes contraignants, écartant le cadre du seria pour la liberté suggestive autant qu’édifiante de l’oratorio? Au grand effet orchestral et choral, sans compter les airs solistiques magnifiques, devra répondre une mise en scène claire et prenante, en particulier quand le choeur exprime tour à tour les peuples bibliques affrontés (babyloniens corrompus, juifs emprisonnés, soldatesque perse inflexible…)… Difficile contrainte de la vraisemblance et de la cohérence qui doit surhausser la partition musicale en une action scénique digne de ce nom. Qu’en sera-t-il réellement de cette production en provenance du Staatsoper de Berlin (créée en juin 2008)?
Oratorio en 3 actes de Georg Friedrich Haendel
Direction musicale : René Jacobs
Avec l’Akademie für Alte Musik Berlin
Et Riass Kammerchor
Belsahazzar : Kenneth Tarver
Nitrocis : Rosemary Joshua
Cyrus : Bejun Mehta
Daniel : Kristina Hammarström
Gobrias : Neal Davies
Mise en scène : Christof Nel
Réalisation : Don Kent
Coproduction : Arte France, Bel Air Media
Illustration: Rembrandt, le banquet de Belshazzar (DR)