COMPTE-RENDU, concert. TOULOUSE, le 13 déc 2019. J.WILLIAMS. J.HORNER H.ZIMMER. L.SCHIRFIN. ONCT. T.SOKHIEV.


SOKHIEV-582-594-Tugan-Sokhiev---credit-Marc-BrennerCOMPTE-RENDU, critique, concert. TOULOUSE, le 13 déc 2019. WILLIAMS, ZIMMER, SCHIRFIN. ONCT. Tugan SOKHIEV. Lors de ces deux concerts salle comble, déclarés complets depuis des lustres, un complexe est tombé. Il est permis d’aimer la musique symphonique la plus complexe et de trouver le même plaisir musical dans la décontraction et le bonheur de l’enfance en plus avec la musique hollywoodienne. Contrairement à l’an dernier où les deux concerts étaient thématiques avec uniquement la musique de Star Wars associant des tubes et des pages plus rares, cette fois Tugan Sokhiev a choisi le plaisir pur de faire entendre les musiques des films les plus connus. Le concert n’a pas été très long mais quel voyage il nous a fait faire et quelle richesse ! Avec la même science de la construction du programme, avec des humeurs variées et une sorte d’apothéose pour le final, s’est construite un festival d’émotions. Ainsi enchaînés : Jurassik Park, Mission Impossible, Titanic, Star Wars Les Sept mercenaires, Retour vers le futur, Hook, E.T. et Indian Jones pour finir en apothéose le départ pour le voyage en haute mer de Pirates des Caraïbes. Photo Tugan Sokhiev (service de presse Capitole Toulouse DR)  

 

   

 

 

Le Père Noël à Toulouse :

quand Tugan Sokhiev fait son cinéma

 

 

 

Avec le même soin du détails, comme de la dramaturgie de la partition, c’est comme si ces musiques tant aimées et bien connues sortaient d’une sorte de brouillard, d’une boite un peu oxydée, pour vivre à l’air libre leurs splendeurs sonores, en irradiant de bonheur. Fidèles à eux-mêmes, les musiciens de l’orchestre ont brillé. Ils ont été enthousiastes, soignant chaque instant et sachant devenir dans les moments solistes, et ils sont nombreux, de véritables …divas. Les cuivres ont caracolé sans complexes ; les cors ont soufflé la grandeur ou exprimé des sentiments intimes ; les trompettes ont fouetté le sang et les violons ont ouvert le ciel de plages laiteuses, de volutes sublimes ou de thèmes piquants. Les violoncelles ont su faire pleurer de beauté, comme les bois, tous magiques. Les percussions ont été mises a rude épreuve et le brio a été permanent. Le piano, la batterie et la guitare électrique (Mission Impossible) ont tenu le public en haleine avec un swing incroyable.

Tugan Sokhiev a fait l’enfant, heureux d’avoir à sa main un super orchestre sachant tout jouer de la plus belle manière. Ils semblait s’émerveiller lui-même du pouvoir d’évocation de la musique sous ses doigts, qui suggérait histoires et images. Ces compositeurs de musiques de films américains, avec en maître tutélaire John Williams, ont tous un véritable don. La richesse des partitions n’est pas en comparaison du répertoire « dit symphonique classique ». Il se dégage de tels concerts un bonheur et une énergie incroyable. Et le rajeunissent du public est également un élément important. Sentir le plaisir de ses voisins quand arrive son thème préféré, procure le frisson à la salle entière. Pour ma part je reste un inconditionnel de Star Wars de John Williams mais cette année Pirates des Caraïbes de Hans Zimmer et Mission Impossible de Lalo Schifrin l’ont rejoint au Walhalla. 
Vivement au autre cinéma de Tugan Sokhiev l’an prochain !  Pour nous, il a carte blanche. Car cela ferait croire au père Noël !  

 

   

 

 

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COMPTE-RENDU, critique, concert. Toulouse. Halle-aux-Grains, les 12 et 13 décembre 2019. John Williams : Jurassik Park, Star Wars, Hook, E.T. , Indiana Jones ; Lalo Schifrin : Mission Impossible ; James Horner : Titanic ; Elmer Bernstein : Les Sept Mercenaires ;  Alan Silvestri : Retour vers le futur ; Hans Zimmer : Pirates des Caraïbes. Orchestre National du Capitole de Toulouse. Tugan Sokhiev direction.

 

 

   

 

 

COMPTE-RENDU, concert. TOULOUSE, le 7 déc 2019. F. LISZT. D. CHOSTAKOVITCH. L. DEBARGUE, ONCT. T. SOKHIEV.

DEBARGUE-_-Lucas_Debargue-582-594COMPTE-RENDU, concert. TOULOUSE, le 7 déc 2019. F. LISZT. D. CHOSTAKOVITCH. L. DEBARGUE, ONCT. T. SOKHIEV. Le concert a permis de constater combien le jeune pianiste Lucas Debargue a tenu les promesses que son jeu virtuose avait fait deviner. En effet nous l’avions entendu en 2016 à Piano aux Jacobins puis en 2018 à La Roque d’Anthéron. Nous disions notre admiration et l’attente de la maturité pour gagner en musicalité. Nous y sommes et pouvons affirmer que Lucas Debargue a atteint un bel équilibre aujourd’hui. Ce premier concerto de Liszt, compositeur-virtuose célèbrissime est représentatif de ses excès de virtuosité comme de son génie rhapsodique. Les moyens pianistiques et la musicalité au sommet sont nécessaires pour soutenir l’intérêt tout du long. En effet souvent la virtuosité seule sert le propos et la musique s’évanouit. Il faut également tenir compte de la personnalité de Tugan Sokhiev à la tête de son orchestre. Le chef Ossète est un fin musicien et un grand admirateur des solistes invités, lui qui toujours est attentif à les mettre en valeur. Il a admirablement dirigé ce concerto. Lucas Debargue souriant, a dominé avec naturel l’écriture si complexe de sa partie de piano, tandis que le chef équilibrait à la perfection les plans de l’orchestre, tenant dans une main de velours des tempi médians mais capables d’un rubato élégant. Les moments chambristes nombreux ont été magnifiquement interprétés par un soliste attentif et des musiciens survoltés. Ce concerto proteïforme a gagné en cohérence et en musicalité dans la belle interprétation de ce soir. La délicatesse du toucher et les fines nuances de Lucas Debargue ont été une merveille. Son jeu de la main gauche a semblé particulièrement puissant dans les passages très exposés. L’aisance digitale de Lucas Debargue, la beauté de ses mains, sont un spectacle fascinant. Il a été ovationné par le public, a tenu à saluer avec le chef comme pour dire combien leur entente était réussie et il a offert deux bis : un peu de Scarlatti et, nous a-t-il semblé, une partition de son cru car ce jeune homme fort doué est également compositeur.

chostakovitch-compositeur-dmitri-classiquenews-dossier-portrait-1960_schostakowitsch_dresdenLa deuxième partie du concert a été très éprouvante, car la tension douloureuse déployée par Tugan Sokhiev dans son interprétation de la 8 ème symphonie de Chostakovitch a été vertigineuse. Le long lamento des cordes, dans un à-plat froid et désolé tient du cinématographique. Le désert de glace autour des goulags était présent. Le train fou qui avance dans la neige vers la mort un peu plus tard. Le ricanement de militaires fantomatiques aussi. Les moments de fureur n’ont été que des moments permettant d’extérioriser le même désespoir et la dérision des musiques militaires, une autre variation de la désespérance humaine. Le largo en forme de marche à la mort sur une allure de passacaille tient du génie noir, le plus noir. Comme une marche dont personne ne reviendra plus. Le final cherche à se révolter mais finit dans une désolation particulièrement insupportable que Tugan Sokhiev lie au silence qui suit avec une autorité sidérante. Les solistes de l’orchestre ont été très exposés, chaque famille dans un ou plusieurs soli, parmi les plus exigeants. Distinguons la trompette solo à la présence inoubliable de René-Gilles Rousselot et le cor anglais si mélancolique de Gabrielle Zaneboni ; pourtant chaque instrumentiste a été merveilleux : le cor, la flûte, le piccolo, la clarinette, le hautbois, le violon, l’alto ou le violoncelle. Et les sept percussionnistes ont été très présents. Sans oublier les contrebasses si expressives . Sous cette splendeur sonore de chaque instant, vraiment s’est dissimulé le désespoir le plus tragique. Ce n’est vraiment pas la symphonie la plus facile de Chostakovitch, c’est un long réquisitoire, le plus terrifiant peut être, contre les abjections du régime communiste, en raison du peu de moments de révolte, comparés à l’ampleur de la désolation contenue dans ces pages.
Un Grand moment que les micros, nous a t-on-dit, vont immortaliser pour Warner.
Ces symphonies de Chostakovitch à Toulouse sont chaque fois un moment très apprécié, c’est une bonne idée de les enregistrer sur le vif au fur et à mesure.

Compte-rendu concert. Toulouse.Halle-aux-grains, le 7 décembre 2019. Frantz Liszt (1811-1886) : Concerto pour piano et orchestre n°1 en mi bémol majeur S.124 ; Dmitri Chostakovitch (1906-1975) : Symphonie n°8 en ut mineur op.65 ; Lucas Debargue, piano ; Orchestre National du Capitole. Tugan Sokhiev, direction.

LIRE aussi notre critique compte rendu du concert de Lucas Debargue aux Jacobins :
www.classiquenews.com/compte-rendu-concert-a-edition-de-piano-aux-jacobins-toulouse-cloitre-des-jacobins-le-13-septembre-2016-mozart-ravel-chopin-liszt-lucas-debargue-piano/

COMPTE-RENDU, concert. Toulouse. Halle-aux-grains, le 14 septembre 2019. S. RACHMANINOV. S. PROKOFIEV. B. ABDURAIMOV. Orch.Nat.TOULOUSE. T. SOKHIEV.  

RACHMANINOV-operas-elako-le-chevalier-ladre-classiquenews-dvd-rachmaninov-troika-rachmaninov-at-the-piano-1900s-1378460638-article-0COMPTE-RENDU, concert. Toulouse. Halle-aux-grains, le 14 septembre 2019. S. RACHMANINOV. S. PROKOFIEV. B. ABDURAIMOV. Orch.Nat.TOULOUSE. T. SOKHIEV. La rentrée de l’Orchestre du Capitole de Toulouse est toujours un événement attendu. Cette année il a semblé un instant que le public venu si nombreux n’allait pas pouvoir entrer dans la vaste Halle-aux-Grains. Mais tout c’est bien passé ; l’orchestre a pu s’installer au centre d’un public serré, attentif et heureux. Il n’est plus très bien vu de dire les qualités de cette salle de concert depuis qu’un projet de nouvel auditorium a pris vie. Mais l’un n’empêche pas l’autre et certes cette salle a ses limites mais elle a aussi de vraies qualités. Ce soir la température idéale a permis de sortir de la torpeur de la ville et de se préparer au concert. Cette présence du public de toutes parts permet à l’Orchestre de bien sentir sa présence.

Capitole de Toulouse…
Somptueuse ouverture de saison

Et tous les points du vues sur l’orchestre ont leur intérêt. Y compris dos à l’orchestre où le chef est vu de face. Après un été passé à beaucoup écouter de concerts en plein air (période des festivals de l’été), il est réconfortant de bénéficier de l’acoustique de la Halle-au-Grains. Acoustique sèche et qui permet une écoute analytique de détails; qui demande à l’orchestre beaucoup d’efforts mais qui met en valeur ses grandes qualités. De même le pianiste peut oser des nuances subtiles car tout s’entend. Nous avons donc eu une interprétation absolument merveilleuse du deuxième concerto de Rachmaninov. Le jeune pianiste Behzod Abduraimov, est connu des toulousains et apprécié. Son jeu est flamboyant, nuancé, coloré et très précis. Il démarre le concerto en dosant parfaitement les premiers accords dans un crescendo généreux ; la réponse de l’orchestre est d‘emblée parfaitement équilibrée, permettant de ne pas perdre une note du pianiste. Quelle différence avec ce même concerto entendu à La Roque d’Anthéron cet été, voir notre compte rendu critique : Concerto pour piano n°2 de Rachmaninov par Lukas Geniusas, le 8 aout 2019.
L’Orchestre du Capitole est en pleine forme, concentré et d’allure détendue. La musique coule avec une énergie maitrisée mais généreuse. Tugan Sokhiev est aux petits soins pour le pianiste, il regarde constamment le jeune homme afin de suivre son jeu. Il régule chaque instrumentiste demandant à plusieurs reprises aux violons de jouer moins fort. Le résultat est très, très beau. Et cette rare alchimie réunissant la musicalité du pianiste, du chef et de l’orchestre se produit miraculeusement ce soir. Le piano est souverain, le geste du chef est minimaliste mais il semble s’adresser à chacun ; les musiciens de l’orchestre sont capables de moments solo d’une rare perfection et réagissent à chaque inflexion de Tugan Sokhiev qui dirige de tout son corps semblant danser. Le concerto de Rachmaninov si galvaudé par le cinéma retrouve sa place de chef d’œuvre absolu du genre concerto symphonique. Un régal de chaque instant que le public déguste en sachant le prix fabuleux que représente le fait d’être là ce soir.

sergei-prokofievLa deuxième partie du concert me permet de vivre un grand moment très attendu. Je me souviens d’un concert de 2003 dans lequel Tugan Sokhiev avait ébloui en dirigeant les deux suites de Roméo et Juliette de Prokofiev. Ce soir le bonheur est complet car le choix du chef est de jouer intégralement la deuxième suite et de poursuivre avec deux moments de la première suite qui lui permettent de terminer sur l’extraordinaire mort de Tybalt. L’âpreté du début fixe chacun à son siège. La violence, la puissance de destruction des Capulet et des Montaigu est aveuglante. La pureté de Juliette, la douleur de Roméo au tombeau sont des moments de théâtralité inoubliables. Cette partition est magnifique, chaque mesure trouve sa fonction dans cette dramaturgie implacable sous la direction très inspirée d’un Tugan Sokhiev en état de grâce. Et l’orchestre lui aussi semble halluciné et pris dans une musique d’une profondeur abyssale. La modernité de la partition a été reprochée à Prokofiev par les Soviets, c’est à juste titre car la musique fait prendre conscience de la puissance des totalitarismes, ici familiaux. Impossible sans en dénaturer le souvenir d’en dire davantage tant chaque seconde a été un enchantement.
Les gestes de Tugan Sokhiev sont d’une beauté envoûtante. Il devient beaucoup plus minimaliste mais si précis, si charismatique que le résultat musicale est sidérant d’évidence. Les instrumentistes se surpassent : le cor, les bois, le saxophone, les harpes, le célesta, les percussions, mais également les cuivres graves ont des moments de beauté absolue. Les cordes sont sublimes et de précision et d’ampleur de phrasés. Et la virtuosité diabolique des violons en a laissé sans voix plus d’un dans le public. Une apothéose d’union parfaite entre Tugan Sokhiev et son orchestre. Le départ du chef dans quelques années n’est plus refoulé. Sa biographie dans le programme permet à présent de lire tous les orchestres que ce génie de la baguette a dirigé et je crois bien qu’aucun continent ne l’a pas invité. Donc le monde entier le demande, et il est toulousain, quelle chance d’être là ce soir !!!

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COMPTE-RENDU, concert. Toulouse. Halle-aux-grains, le 14 septembre 2019. Sergueï Rachmaninov (1873-1943) : Concerto pour piano n°2 en ut mineur Op.18 ; Sergueï Prokofiev (1891-1953) : Roméo et Juliette suites d’orchestre n° 2 et n° 1 Op. 68 Ter et bis ; Orchestre National du Capitole de Toulouse. Behzod Abduraimov, piano ; Tugan Sokhiev, direction.

COMPTE-RENDU, concert. MONTPELLIER, le 13 juillet 2019. SIBELIUS, CHOSTAKOVITCH, MOUSSORGSKI-RAVEL. T Sokhiev.

SOKHIEV-582-594-Tugan-Sokhiev---credit-Marc-BrennerCOMPTE-RENDU, concert, MONTPELLIER, Festival Radio France, Occitanie, Montpellier, Le Corum, le 13 juillet 2019. SIBELIUS, CHOSTAKOVITCH, MOUSSORGSKI-RAVEL, Bertrand Chamayou, David Guerrier, Tugan Sokhiev. La thématique retenue pour cette 35ème édition du Festival Radio France, Occitanie, Montpellier – « Les musiques du Nord » – nous vaut la programmation de Finlandia, de Sibelius, qui ouvre le concert. Le sixième et dernier mouvement de la « Musique pour la célébration de la presse », alors soumise au régime tsariste, deviendra un an plus tard, en 1900, ce qui passe pour l’hymne officieux de la Finlande. La page est bien connue, brève, contrastée, propre à emporter l’auditoire à travers son finale puissant, glorieux. L’évocation de l’immensité des paysages que la Finlande a en partage avec ses voisins, à laquelle succède la partie héroïque, avec cuivres et percussions, est remarquablement conduite par Tugan Sokhiev, dont on connaît l’énergie, comme le lyrisme et l’aisance dans ce répertoire. L’orchestre National du Capitole de Toulouse y brille de tous ses feux. Illustration : Tugan Sokhiev © M Brenner)

Suit le Concerto pour piano et trompette de Chostakovitch. C’est pour le public le plaisir de retrouver Bertrand Chamayou, fidèle du Festival, et David Guerrier, l’hyperdoué trompettiste (mais aussi corniste, tubiste etc.) insatiable musicien. Regrettons au passage que Chostakovitch ne lui ait pas réservé un authentique rôle concertant, limitant ses interventions aimablement décoratives, goguenardes, diablement virtuoses, à trois des quatre mouvements. L’œuvre, hybride de la tradition et du modernisme (relatif) du Leningrad de 1933, porte en germe la riche production du compositeur de 27 ans. Son matériau est pauvre et le traitement qu’il lui réserve ne présente d’intérêt qu’à travers le piano (que Chostakovitch tiendra à la création), et le grotesque dont il pimente le propos. La mélodicité de la valse lente du deuxième mouvement peut séduire, mais c’est l’entrain, l’esprit potache de l’ensemble qui dominent. Le jeu des solistes, leur complicité justifierait à lui seul la programmation de l’œuvre, où les cordes de l’orchestre, pleinement engagées, donnent leur meilleure interprétation.

Le public s’est massivement déplacé par les célébrissimes Tableaux d’une exposition. Il n’aura pas été déçu. A l’égal du concert de la veille, où Kristjan Järvi nous offrait une relecture inspirée de l’Oiseau de feu, celle que nous propose Tugan Sokhiev de la page pianistique la plus spectaculaire de Moussorgski, orchestrée par Ravel, nous enthousiasme. L’orchestre sait se montrer tendre, rêveur, désinvolte, joueur, plaintif, courroucé, véhément, accablé, prendre les couleurs les plus riches, et nous emporter dans le tableau final (la Grande porte de Kiev). Par-delà l’énergie fantastique qu’il insuffle à tous, c’est dans le dessin des phrasés propres à chacun des pupitres et dans des plans qu’excelle le grand chef russe. Une leçon qui ne laisse aucun doute : Tugan Sokhiev a maintenant imprimé durablement sa marque à l’orchestre, confirmant son excellence, tout particulièrement dans ce répertoire scandinave et russe.

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COMPTE-RENDU, concert, MONTPELLIER, Festival Radio France, Occitanie, Montpellier, Le Corum, le 13 juillet 2019. SIBELIUS, CHOSTAKOVITCH, MOUSSORGSKI-RAVEL, Bertrand Chamayou, David Guerrier, Tugan Sokhiev. Crédit photographique © Pablo Ruiz

COMPTE-RENDU, concert. TOULOUSE, le 10 Juin 2019. BORODINE, RACHMANINOV, MOUSSORGSKI. Chœurs du Capitole. Orch Nat du Capitole. G.Magee. T.SOKHIEV

SOKHIEV-maestro-chef-toulouse-capitole-presentation-critique-par-classiquenews-sokhiev_c_marc_brennerCOMPTE-RENDU, concert. TOULOUSE, Halle-aux-Grains, le 10 Juin 2019. A. BORODINE. S. RACHMANINOV. M. MOUSSORGSKI/M.RAVEL. Chœurs du Capitole. Orchestre National du Capitole. G.Magee. T.SOKHIEV, direction. Ce concert très attendu n’a pas permis à la vaste Halle-aux-Grains d’accueillir tout le public venu demander une place. C’est donc dans une salle bondée avec une ambiance électrique que le concert a débuté. La Cantate le Printemps de Rachmaninov pour baryton et chœur est un hymne à l’amour et au renouvellement perpétuel de la vie. Elle contient un très beau message de paix et de pardon. L’orchestration est subtile avec un éveil de la nature d’une sensualité envoutante. Tugan Sokhiev dirige à mains nues et semble obtenir de tous une musique aussi belle qu’émouvante. Le Chœur du Capitole est profond dans d’admirables nuances. Le baryton Garry Magee au chant subtile et à la voix naturellement belle fait un beau portait d’homme amoureux meurtri qui pardonne. Mais nous savons quel Eugène Onéguine il a su être au Capitole. Il offre des interventions parfaites qui nous ont semblé trop courtes. Illustration : Tugan Sokhiev © M Brenner.

 

 

 

Sommet de musicalité à Toulouse

Puis les danses Polovtsiennes du Prince Igor avec chœur sont une merveille de beauté et de grâce trop rarement donnée. La danse des jeunes filles permet aux femmes du chœur d’offrir nostalgie et délicatesse, tandis que les hommes sont d’une vivacité et d’une énergie bien dosées. Pour la danse finale, le chœur mixte fait merveille. Tugan Sokhiev dirige avec gourmandise ces pages superbes et richement orchestrées.
La deuxième partie du concert offre une œuvre phare que l’orchestre et son chef jouent avec succès dans le monde entier. L’enregistrement par ces même interprètes en 2006 chez Naïve est une référence. Le concert de ce soir renouvelle cette magie et l’augmente car l’orchestre du Capitole a des couleurs plus profondes et plus lumineuses. L’équilibre entre le son français et russe est inégalable de charme et d’émotion. La trompette solo qui ouvre la promenade demande un culot incroyable au soliste, Hugo Blacher est tout simplement merveilleux dans une émotion palpable partagée. Tout ira ensuite comme par enchantement : les tableaux sont pleins de vies et défilent, la promenade est pleine d’esprit dans ses transformations.
Chaque instrumentiste soliste donne sa vie et les gestes de Tugan Sokhiev disent la musique et les mini drames contenus dans la partition avec une beauté de chaque instant. Ses mains semblent créer le son, agençant avec un air gourmand couleurs et nuances dans une narrativité sans cesse relancée. La délicate mélancolie du vieux châteaux, la puissance de la marche du bétail, l’humour du ballet des coquilles d’œuf et la noirceur des catacombes, tout est parfaitement suggéré. Ainsi ce voyage se poursuit dans une atmosphère de beauté et d’émotions délicates avant que d’arriver au final triomphant qui dans un crescendo irrésistible nous entraine dans la Russie éternelle de nos rêves. La Grande porte de Kiev est aussi grandiose et majestueuse que possible. Tugan Sokhiev dose à la perfection les nuances pour terminer dans un fortissimo enthousiasmant. Quel admirable concert associant une œuvre très rare, des danses célèbres rarement donnée et un must absolu pour un orchestre virtuose. Tugan Sokhiev a une maturité artistique inouïe tout en gardant ce contact chaleureux et simple avec les musiciens de son orchestre comme avec son public. Public toulousain sous son charme tant cet homme semble incarner totalement la Musique.
Le triomphe fait par le public obtient un bis mystérieux tout en émotion : la délicate orchestration par Debussy de la première Gymnopédie de Satie !
C’était le dernier concert de la saison dirigé par Tugan Sokhiev qui atteint un nouveau sommet de musicalité avec ses musiciens toulousains. Les retrouver à la rentrée sera un grand moment.

 

 

 

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Compte rendu concert. Toulouse. Halle-aux-Grains le 10 juin 2019. Alexandre Borodine (1833-1887) : Le Prince Igor : Danses Polovtsiennes ; Sergueï Rachmaninov (1873-1943) : Le printemps, Op.20 ; Modeste Moussorgski ( 1839-1881) Orchestration de Maurice Ravel : Tableaux d’une exposition ; Garry Magee, baryton ; Choeurs du Capitole, chef de chœur : Alfonso Caiani ; Orchestre National du Capitole de Toulouse ; Tugan Sokhiev, direction.

 

 

 

COMPTE-RENDU, concert. TOULOUSE, le 12 avril 2019. ATTAHIR. CHOSTAKOVITCH. R.Camarinha. R. Capuçon. Orch Nat Capitole. T. SOKHIEV

COMPTE-RENDU, concert. TOULOUSE, Halle-aux-Grains, le 12 avril 2019. B. ATTAHIR. D. CHOSTAKOVITCH. R.Camarinha. R. Capuçon. Orchestre National du Capitole. T.SOKHIEV, direction. En apparence rien que de l’habituel avec ce concert d’abonnement. En fait au même moment, l’Orchestre du Capitole est également dans la fosse de l’Opéra pour l’extraordinaire Ariane et Barbe Bleue de Dukas dont nous avons rendu compte dans ces colonnes. Ainsi le projet d’agrandir l’orchestre est advenu permettant cette offre généreuse au public de la ville rose.

Quelle puissance musicale à Toulouse !

SOKHIEV-582-594-Tugan-Sokhiev---credit-Marc-BrennerDeux magnifiques orchestres en un. De son côté, Tugan Sokhiev a dirigé un véritable marathon le mois dernier avec l’orchestre du Bolchoï et avec le succès que l’on sait. Les retrouvailles à Toulouse ont été absolues, naturelles et faites de la fusion musicale que nous connaissons entre le chef et l’orchestre dans leurs meilleurs moments. A présent, Chostakovitch est un compositeur que l’orchestre connaît bien et dans lequel il excelle. La symphonie n°6 a été un moment de pure merveille, le chef semblant obtenir tout ce qui est possible de son orchestre. Tout a semblé évident et facile et nous avons été entraîné dans cet univers si riche et émouvant comme par enchantement.
Chostakovitch vivait une période difficile et troublée avec sa nation. Victime de critiques et de menaces de mort, il a cherché une sorte d’apaisement avec cette Symphonie. Apaisement très relatif à bien y regarder. La Symphonie en trois mouvements est construite en un immense crescendo, accelerando aux allures faciles parfois même simplistes. Tugan Sokhiev a interprété avec finesse, laissant entendre tout ce que le sous texte a de grotesque et de violemment moqueur. Le final virtuose semblant presque une course à l’abîme. Le piccolo a tout particulièrement participé à ce mélange de tendresse et de moquerie.

Les solistes de l’orchestre ont tous été magnifiques et ont longuement été applaudis. Le public sait apprécier la musique de Chostakovitch, y prend un grand plaisir. Voilà un bonheur que nous devons à Tugan Sokhiev et à l’énergie que l’orchestre du Capitole sait déployer avec la même générosité que le chef.

ATTAHIR-benjamin-portrait-annonce-concert-orchestre-national-de-lille-par-classiquenews-Benjamin-Attahir-Nouveau-Siecle-credit-Ugo-Ponte-ONLEn première partie une création mondiale de Benjamin Attahir a tenu de l’événement riche en promesses. Benjamin Attahir connaît bien l’orchestre et la ville rose. Il a composé une vaste pièce très belle et permettant de très intéressants moments solistes comme des riches moments rythmiques. Des couleurs originales ont irisé l’orchestre. Deux solistes ont été invités par le compositeur. Le violoniste Renaud Capucon qui connaît bien l’orchestre et participe souvent à ses tournées, a bénéficié d’une partie complexe dont il s’est tiré avec panache et une fine musicalité. Le cas de la soprano Raquel Camarihna est différent. Sa voix peu sonore et peu capable ce soir d’harmoniques, a été confidentielle dans la vaste Halle-aux-Grains. L’écriture dans le médium ne l’a pas favorisée. Le plus grand élément de déception est venu de sa diction inaudible même dans le final empli de la plus délicate poésie avec un solo diaphane de Capuçon. La longueur de la pièce et sa beauté gagneront à être confiées à une voix plus large et une véritable diseuse sinon une tragédienne, réellement capable de communiquer la beauté du texte, car elle a juste été suggérée ce soir. Entre les Nuits d’été, le poème de l’amour et de la mer et surtout Shéhérazade, cette « Je/Suis /Ju/Dith » pourra alors trouver la place qui lui revient. Quoi qu’il en soit ce concert a été particulièrement prestigieux ce soir. Et ravi, le public, a semblé en prendre toute la mesure.

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Compte- Rendu concert. Toulouse. Halle-aux-Grains, le 12 Avril 2019. Benjamin Attahir (né en 1989) : Je/Suis/Ju/ Dith – Un grain de figue, séquence 2 sur un thème de Lancelot Hamelin pour soprano, violon et orchestre. Création mondiale. Dimitri Chostakovitch ( 1906-1975) : Symphonie n°6 en si mineur op. 54. Raquel Camarinha, soprano ; Renaud Capuçon, violon ; Orchestre National du Capitole de Toulouse. Tugan Sokhiev, direction.

COMPTE-RENDU, concert. TOULOUSE, le 13 mars 2019. RACHMANINOV. Choeur du Théâtre BOLCHOà / V. Borisov

COMPTE-RENDU, concert. TOULOUSE, Halle-aux-Grains, le 13 Mars 2019. P.I. TCHAIKOVSKI.  S. RACHMANINOV. Choeur du Théâtre BOLCHOà de Moscou. V. Borisov. Point d’orgue des Musicales Franco-Russes, les trois concerts des forces du Bolchoï, comme en résidence à Toulouse, ont motivé un public nombreux dès ce premier concert du seul Choeur du Bolchoï. Un programme d’un grande cohérence et d’une grande intelligence a fait la par belle à des oeuvres de la charnière entre les XIX ème et le XX ème siècles. La tradition vocale en Russie est millénaire mais a connu son apogée en cette époque.  Les exactions du communisme n’ont pas osé éteindre ce feu sacré d’amour pour le chant choral aussi riche en musique sacrée que profane.

 

 

La majesté du Choeur du Bolchoï enchante Toulouse

 

 

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La tradition a été conservée par les moines mais également les simples chanteurs, et tel un Phénix revit une nouvelle splendeur.  Ce voyage d’une rare émotion a été parfaitement dirigé par Valery Borisov, très strict dans sa gestuelle. Il a obtenu une perfection inouïe de ses 50 choristes. Dès le premier numéro (Vêpres de Rachmaninov), les superbes nuances, quasi abyssales, ont profondément marqué le public. Sans véritablement pouvoir juger ce qui se déroulait, une succession de beautés sonores a véritablement submergé l’audience. Les nuances sont précises et profondément creusées et les couleurs sont quasiment dignes des icônes les plus vives dans des lumières variées. Les voix russes sont extrêmement timbrées, différentes et complémentaires, elles offrent un son de pupitre, plein de chair et de force. Les basses célèbres pour leur gravité sépulcrale sont fidèles à leur réputation ! Les sopranos sont d’une puissance et d’une rondeur de son, supersoniques. Les ténors très présents, sont comme des flèches dardées et les alto dans une rondeur de timbre envoûtante, donnent un appui incroyable aux sopranos pour planer haut.
De nombreux moments ont permis de découvrir des choristes dignes des solistes le plus compétents avec des timbres très différents et un engagement parfois hypnotique. Ainsi chaque voix pouvait être reconnue mais dans un ensemble parfaitement musical et une union parfaite. Les forte sont apocalyptiques et ont tonné dans la vaste Halle-aux-Grains comme rarement. Mais c’est surtout la qualité des sons  piano qui est oeuvre d’art incroyable. Un son si piano et si timbré, si riche en harmoniques, si émouvant par son mélange de fragilité et de force,  est inoubliable.
Les toulousains aiment le chant choral; ils ont su particulièrement, par leurs applaudissements nourris, remercier les choristes russes, tous d’un niveau de solistes (un tiers est venu saluer au final comme solistes à un moment ou un autre) sans oublier leur chef Valery Borisov ; dans une main de fer, il sait obtenir des moments de tendresse bouleversants.  Comme sur un petit nuage la plus grande partie du public s’est réjoui  de la suite de ce festival Franco-Russe … soit d’autres sommets annoncés avec deux opéras en version de concert ou le chœur allait jouer sa partie parfaitement.

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COMPTE-RENDU, concert. TOULOUSE, Halle-aux-Grains, le 13 Mars 2019. Ouevres  A Capella de Piotr Illich .Tchaikovskï (1840-1893) : Liturgie de Saint Jean Chrisostome op.40 (extraits). Serge Rachmaninov (1873-1943) : Vêpres op. 37 ( extraits) et autres oeuvres russes sacrées ou profanes « A Capella ». Choeur du Théâtre BOLCHOà de Moscou. Chef de Choeur : Valery Borisov.

Photo du chœur  : © Damir-Yusupov

 

 

COMPTE-RENDU, opéra. TOULOUSE, Halle-aux-Grains, le 15 mars 2019. TCHAÃKOVSKI : La dame de Pique. Bolchoï / T. SOKHIEV

COMPTE-RENDU, opéra. TOULOUSE, Halle-aux-Grains, le 15 mars 2019. TCHAÃKOVSKI : La dame de Pique. Bolchoï / T. SOKHIEV. Et si la version de concert dans ces conditions exceptionnelles était la perfection pour les opéras ? C’est un peu ce qui me paraît évident ce soir en écoutant et en vivant cette Dame de Pique dont la richesse symphonique est desservie dans une fosse. Tugan Sokhiev avait  dirigé la Dame de Pique au Capitole en février 2008, avec un immense succès personnel pour sa parfaite compréhension de toutes les facettes de cet opéra complexe. La mise en scène avait semblé plus discutable à certains.  Ce soir avec ses forces du Bolchoï, le maestro va encore plus loin et nous entraîne encore plus avant dans la compréhension de cet opéra magnifique. L’orchestre du Bolchoï est  incroyablement coloré, puissant, compact. Les solistes n’ont peut être pas tous la délicatesse de ceux du Capitole, mais quelle puissance expressive est la leur ! Plus puissant et parfois plus sauvages, les musiciens moscovites sont pris par le feu absolu qui émane de la direction de Tugan Sokhiev. Le chÅ“ur qui nous avait enchanté la veille, est ce soir encore plus nombreux (presque le double) et sans partitions. Il s’amuse et il est facile de deviner que sur scène, ils ont maintes fois joué ces personnages du chÅ“ur.

 

 

Le Bolchoï à Toulouse
Une Dame de Pique historique !

 

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Car dès la première scène, les groupes sont multiples, et les dames chantent le chœur d’enfants avec des voix plus blanches et une légèreté étonnante quand ont connait leur puissance. En ce qui concerne les chœurs, deux moments opposés montrent sa qualité et sa ductilité, en même temps que le génie de la direction de Tugan Sokhiev. Le final du premier tableau de l’acte 2 (arrivée de la tsarine) et si imposant et noble que la présence de la Grande Catherine semble vraie. Tant d’ampleur, de puissance, de largeur s’oppose en tout au dernier chœur d’hommes de l’opéra dans sa compassion pour Hermann mourant. Cette émotion de sons pianos si riches harmoniquement, si timbrés et à la limite de la fragilité des voix, produit un effet  émotionnel puissant en négatif de la puissance sonore précédente. Entre ces deux niveaux extrêmes, toute les palettes musicales et émotionnelles contenues dans la partition enveloppent le public, le fait évoluer et changer.
La direction inspirée de Tugan Sokhiev, qui dirige en chantant tout par coeur, se donne totalement à la géniale musique de Tchaïkovski, la servant avec passion.

La distribution est sans faux pas, excellente pour des raison différentes. La Liza d’Anna Nechaeva est un fleuve vocal : puissance, homogénéité de timbre, souffle large, timbre émouvant. Son médium charnu et son grave sonore sont parfaits et les aigus lumineux. En Pauline, Elena Novak offre une générosité vocale et musicale qui donne envie de l’entendre dans biens d’autres rôles. Le Prince Yeletski d’Igor Golovatenko a toute la noblesse et l’émotion dans sa voix qui rendent ces interventions inoubliables, du lyrisme de son air à la puissance de la scène finale. Nikolay Kazanskiy en Tomski a une voix agréable et un chant plein d’empathie. La Comtesse d’Anna Nechaeva, dans un timbre d’une belle plénitude et une noblesse naturelle, chante à la perfection une partie complexe que souvent des divas sur le retour ne phrasent pas aussi délicatement. C’est un vrai régal et son extraordinaire tempérament dramatique donne toute la puissance à son personnage qui redevient central. En Hermann, le ténor Oleg Delgov renoue avec les attentes de Tchaïkovski qui voulait pour son héros une voix plus lyrique que dramatique. En effet la fausse tradition de donner ce rôle à une énorme voix ne tient pas compte de l’italianité que Tchaïkovski attendait de son ténor et c’est plus gênant si l’on prend en compte la fragilité mentale extrême du personnage. L’intelligence d’Oleg Delgov force l’admiration tant il fait comprendre la complexité de son personnage. Il a semblé plus dépendant de la partition quand tous ses collègues savaient leur rôle par cœur, mais son Hermann restera dans les mémoires. Le final en particulier a été bouleversant. Il faut préciser que Tugan Sokhiev a terminé épuisé ayant donné au final une dimension métaphysique bouleversante rendant lumineux le rapport au destin et à l’inévitable de la mort pour chacun. Je n’ai jamais entendu ni en disque ni sur scène un dernier tableau si élevé en terme de philosophie en musique et de spiritualité. L’émotion qui a gagné la salle a été si intense que la dernier geste du chef  a maintenu un très long silence recueilli avant que les applaudissements et le cris enthousiastes ne remplissent la Halle-aux-Grains. Immense succès que nous devons aux « Grands Interprètes », partenaires de cette remarquable première Musicale Franco-Russe pour ce concert idéal. Tugan Sokhiev comprend et vit cette partition comme personne. Les forces moscovites survoltées, une distribution entièrement russe, un public subjugué, …tout a concouru à faire de cette soirée un voyage inoubliable en terre de l’âme russe, du rapport au destin, de ses effets inéluctables et tragiques.

 

 

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COMPTE-RENDU, Opéra. TOULOUSE, Halle-aux-Grains, le 14 mars 2019. Piotr Illich TCHAIKOVSKI (1840-1893) : La Dame de Pique, Opéra en trois actes et sept tableaux, version de  concert.  Avec :  Oleg Dolgov, Hermann ;  Nikolay Kazanskiy, Tomski ; Igor Golovatenko, Prince Yeletski ; Ilya Selivanov, Tchekalinski ; Denis Makarov, Sourine ; Ivan Maximeyko, Tchaplitski / Le maître des cérémonies ; Aleksander Borodin, Narumov ; Elena Manistina, La Comtesse ; Anna Nechaeva, Liza ; Agunda Kulaeva, Pauline ; Elena Novak, La gouvernante ; Guzel Sharipova, Prilepa / Macha ; Orchestre et Chœur du Théâtre du Bolchoï de Russie , chef de chœur Valery Borisov ;  Tugan Sokhiev, direction. Illustration : © H Stoeklin pour classiquenews 2019

 
 

COMPTE-RENDU, concert . TOULOUSE, le 28 fév. 2019. BRAHMS. DEBUSSY. TCHAÃKOVSKI. Orch Capitole, Sorokin, Penas, Lee,  T. SOKHIEV.

Tugan sokhiev direction dorchestre toulouse france russie festival 2019 compte rendu critique par classiquenewsCOMPTE-RENDU, Concert . TOULOUSE, Halle-aux-Grains, le 28 fév. 2019. BRAHMS. DEBUSSY. TCHAÃKOVSKI. BORODINE. STRAVINSKI. Orch National du Capitole, N.Sorokin , B. Penas, E. Lee,  T. SOKHIEV, direction. C’est la 3ème année que Tugan Sokhiev et l’Orchestre National du Capitole proposent à Toulouse une Académie de direction d’orchestre.  Le concert du soir permet aux chefs candidats de diriger devant le public dans des conditions optimales. Puis Tugan Sokhiev dirige la deuxième partie du concert. La salle de la Halle-aux-Grains est pleine et le succès public est au rendez-vous de cet enseignement éclairant. Les séances de l’académie sont publiques et j’ai pu passer la journée de mercredi à assister à cette aventure extraordinaire.

 

Le concert de l’Académie d’Orchestre de Toulouse, une belle transmission !

 

Trois jeunes chefs se succèdent dirigeant les même oeuvres à tour de rôle sur les trois jours. Les progrès sont notables chez chacun avec plus ou moins de visibilité. Les explications de Tugan Sokhiev durant les « leçons » sont incroyablement simples et profondes mettant au coeur de sa transmission, le rapport entre les musiciens et le chef, et le respect de la partition mais surtout la place de la musique. Ainsi la technique et la connaissance de la partition sont vite mises de coté pour aborder le mystère de l’alchimie qui peut exister entre un chef et les musiciens de l’orchestre. L’importance du regard posé sur chaque instrumentiste, les gestes qui doivent parler en même temps à divers groupes, les bras pour les cordes et les mains pour la petite harmonie par exemple. Ainsi il va amener chacun à comprendre comment aller plus loin.

Par exemple ce long moment pendant lequel il demande de regarder le hautbois pour obtenir la plus belle phrase et jusqu’à la dernière note alors que le jeune chef regarde au début, puis vite va ailleurs pensant à la suite. Ou comment il prend le bras d’un autre pour montrer la souplesse et la largeur qu’il souhaite lui proposer, ou comme le troisième doit par ses gestes, obtenir plusieurs caractères différents dans la même phrase.

Et ce credo immuable :  le chef doit proposer à l’orchestre sa version musicale de l’œuvre, et la rendre lisible par ses gestes car chaque musicien pourrait proposer la sienne et l’orchestre le dévorerait s’il ne savait pas où il veut aller précisément. Ainsi l’angoisse des jeunes chefs en devenir va  petit à petit faire place au plaisir de faire de la musique avec cet orchestre si magnifique. Car il faut dire combien les musiciens jouent le jeu avec patience et engagement en conservant une qualité sonore inaltérable.



sorokine nikita chef maestro jeune chef toulouse academie direction tugan sokhiev direction classiquenews review compte renduNIKITA SOROKINE… Le concert du soir  a permis  au jeune Nikita Sorokine, 27 ans, originaire de Russie, actuellement dans la classe d’orchestre d’Alain Altinoglu à Paris, de diriger le premier mouvement de la quatrième symphonie de Brahms. Il est venu à bout avec panache de cette partition particulièrement complexe et ses sourires ont montré comment il a su dépasser ses appréhensions pour entrer dans le grand plaisir de faire de la musique avec des musiciens  d’exemption.

penas bastien chef maestro classiquenews toulouse acadmeie direction orchestre tugan sokhiev compte rendu critique review classiquenewsBASTIEN PENAS… Le plus jeune du groupe, est Bastien Penas  25 ans, originaire de Bordeaux, actuellement dans la classe d’orchestre à Toulouse. Il a dirigé avec beaucoup de poésie Après midi d’une Faune de Debussy. Tugan Sokhiev lui avait fait remarquer la veille qu’il avait su rapidement se connecter avec l’orchestre. C’est celui qui lors de ce concert final a été le plus proche des musiciens et Sandrine Tilly à la flûte lui a offert une introduction d’une grande suavité, quasi murmurée.

LEE earl chef maestro conducting academy review classiquenews toulouse tugan sokohiev Earl-LeeEARL LEE… En troisième oeuvre le chef américain originaire de Corée, Earl Lee a dirigé le premier mouvement de la quatrième symphonie de Tchaikovsky. Plus âgé, il a 35 ans, il est déjà habitué à diriger l’orchestre de Pittsburgh en tant qu’assistant. Son autorité est plus appuyée mais il n’a pas su aller au devant des musiciens avec le regard totalement engagé que lui a suggéré Tugan Sokhiev, dirigeant parfois les yeux fermés ou presque, il a su proposer une version personnelle de cet extraordinaire mouvement d’ouverture de la symphonie du destin.

SOKHIEV-maestro-chef-toulouse-capitole-presentation-critique-par-classiquenews-sokhiev_c_marc_brennerMAESTRO SOKHIEV… En deuxième partie de concert, le Maestro pédagogue Tugan Sokhiev à mains nues, a dirigé un voyage dans les Steppes de Borodine, périple évocateur et hédoniste laissant ses musiciens s’exprimer librement dans des moments solistes absolument somptueux. Puis avec un drame constamment renouvelé, il a offert une interprétation exaltante de l’Oiseau de feu de Stravinski avec un début venimeux à la beauté sulfureuse avant d’évoluer vers une beauté plus sensuelle et un final grandiose. Pour conclure cette belle édition de l’Académie d’Orchestre 2019, la direction complice et l’admiration réciproque du chef et de ses musiciens a été un véritable bonheur. Deuxième temps forts des Musicales Franco-russes, ce concert a été très applaudi faisant la joie d’un public rajeuni et conquis. Tugan Sokhiev ayant insisté sur l’importance à ses yeux de la transmission et du partage d’expérience, a réussi son pari : proposer à Toulouse quelque chose d’unique en Europe.

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Compte rendu concert. Toulouse. Halle-auGrains, le 28 février 2019. Johannes Brahms ( 1833-1897) : Symphonie n°4 en mi mineur, ext. ; Claude Debussy (1862-1918) :  L’après midi d’un faune ; Piotr Illich Tchaïkovski ( 1840-1893) : Symphonie n°4 en fa mineur, ext. ; Alexandre Borodine (1833-1887) : Dans les steppes de l’Asie Centrale ; Igor Stravinski (1882-1971) : L’Oiseau de feu ; Orchestre National du Capitole de Toulouse. Nikita Sorokine, Bastien Penas, Earl Lee, Tugan Sokhiev : Direction.

COMPTE-RENDU, opéra. TOULOUSE, le 22 fév 2019. BERLIOZ : Damnation de Faust. Laho, Relyea… Tugan Sokhiev.

COMPTE-RENDU, opéra. TOULOUSE, Capitole, le 22 fév 2019. BERLIOZ : Damnation de Faust (version de concert). Laho, Koch, Relyea, Véronèse. Chœur et Orchestre National du Capitole. T SOHIEV. C’est la troisième fois que Tugan Sokhiev dirige cette œuvre à la Halle-aux-Grains depuis 2010. Il aime la musique de Berlioz et cette Damnation tout particulièrement. Dans le cadre de cette première saison des Musicales Franco-Russes et pour en assurer l’ouverture « en grand », il nous était promis beaucoup…Et nous devons admettre que le pari fut tenu. Tugan Sokhiev a progressé encore dans sa compréhension de Berlioz. Il assume la richesse des parties orchestrées touffues, comme la délicatesse des moments magiques (les Sylphes).

 

 

 

 
Une Damnation grandiose

 

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Le discours dramatique était déjà là en 2010 dans un souffle puissant. Il est ce soir plus nuancé et plus subtilement construit. Chaque numéro conserve une conception dramatique s’articulant précisément avec le précédent comme le suivant. Le drame avance, l’humour est présent rendant plus pathétique, la mélancolie de Faust puis le désespoir de Marguerite. L’Orchestre du Capitole est royal. Les bois hallucinants de présence et de liberté (la flûte de Sandrine Tilly) , les cordes sublimes :  altos ambrés (et quel solo de Dominique Mujica), violons de lumière et violoncelles de mélancolie. Et le cor anglais de Gabrielle Zaneboni, double de l’âme de Marguerite, ne peut s’oublier. Le Chœur du Capitole et la Maîtrise sont d’une présence dramatique parfaite avec une puissance enviable et de très belles nuances. Juste une diction plus audible aurait été appréciable. Mais quelle présence dans chaque intervention !
La distribution, défi redoutable, est absolument parfaite. Marc Laho est un Faust noble et élégant (photo ci dessus) d’une ligne vocale princière. Le timbre est magnifique, rond et chaud. La terrible tessiture (dépassant le contre-ut ) ne se remarque pas, il est à l’aise sur tout son ambitus ! Et le texte est vécu avec beaucoup d’intensité ; il est dit avec beaucoup d’intelligence.  Méphistophélès est un rôle plus complexe encore car il a plusieurs facettes. Le canadien John Relyea a la présence attendue, et la voix parfaite. Longue tessiture et timbre riche en harmoniques, sa voix se déploie sans effort et sa diction est également un régal; il campe un diable tour à tour moqueur, séduisant et inquiétant. Le rôle très court de Brander exige pourtant un chanteur-diseur hors pair. Julien Véronèse est parfait lui aussi : voix sonore et texte clair. Sophie Koch que le public a eu le plaisir de retrouver n’était pas prévue et elle remplace la défaillance de sa consoeur. Le public toulousain connaît bien et aime Sophie Koch qui a offert nombres de personnages marquants au Capitole dont une Margaret du Roi d’Ys inoubliable, un Néron étonnant, un Octavian élégant, une Dorabella de rêve. Elle offre ce soir une extraordinaire Marguerite proche de l’idéal. D’abord une présence illuminée de l’intérieur et une sorte de modestie caractéristique du personnage. La voix est superbe de timbre, et surtout projetée avec naturel et élégance. La diction est absolument limpide. L’art du chant est délicat mais sans effets et toujours d’une musicalité délicieuse.
Le duo avec Marc Laho est une apothéose de naturel élégant. Son grand air «D’amour l’ardente flamme» est phrasé merveilleusement, habité jusqu’au bout des phrases et Tugan Sokhiev sait animer avec art comme assouplir la pulsation. Un grand moment de musique comme suspendu hors du temps.
Le final avec cette cavalcade diabolique, ces choeurs incroyablement puissants, est nuancé à souhait avec des contrastes terribles comme Berlioz les a souhaités. Orfèvre d’une puissance incroyable, Tugan Sokhiev maîtrise la construction saisissante en un crescendo que rien ne retient et qui aboutit sur des coups de boutoir. Méphisto constate son échec avant cette apothéose céleste que le chœur de femmes puis la maîtrise du Capitole avec une lumière délicate, nous offrent avec bonté et pureté. L’orchestration éthérée de Berlioz ainsi réalisée tient vraiment du miracle attendu.
Chef inspiré, orchestre somptueux, chœurs puissants, et solistes aussi bons chanteurs que parfaits diseurs, le sacre de Berlioz promis a bien eu lieu. Quelle œuvre somptueuse ! Vivat Berlioz, Vivat Toulouse, Vivat Sokhiev ! Cette saison Franco-Russe débute au firmament ! Et la suite est prometteuse… sera-t-elle à la hauteur de nos espérances ? A suivre.

 

 

 

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COMPTE-RENDU, opéra. TOULOUSE. Halle-aux Grains, le 22 février 2019. Hector Berlioz (1803-1869) : La Damnation de Faust, légende dramatique en 4 parties. Marc Laho, Faust ; Sophie Koch, Marguerite ; John Relyea, Méphistophélès ; Julien Véronèse, Brander ; Chœur et Maîtrise du Capitole, chef de chœur, Alfonso Caiani ; Orchestre National du Capitole de Toulouse ; Tugan Sokhiev, direction. Photo : © P.Nin

TOULOUSE, Semaine RUSSE : Tugan Sokhiev à la barre

Sokhiev_Tugan_Tugan-Sokhiev2-credit-Mat-HennekFRANCE MUSIQUE, Semaine Russe : 11-15 mars 2019. Le Bolchoï à l’honneur avec le chef TUGAN SOKHIEV en guest star. La chaîne radiophonique dédie 7 jours à la musique russe et en particulier l’école du Bolshoi, fleuron de la tradition musicale de Russie. Brillant chef de sa génération, Tugan Sokhiev, directeur musical du Capitole de Toulouse, partage sa vie musicale entre deux institutions : en France, l’Orchestre du Capitole dont il a fait depuis plus de 10 ans – à la suite de Michel Plasson – l’une des phalanges françaises les plus célébrées dans le monde ; et en Russie, le légendaire Théâtre du Bolchoï. L’interprète incarne cette double excellence.
En liaison avec la première édition des « Musicales franco-russes » à Toulouse, France Musique met l’accent sur l’activité et l’éclat de la musique russe. Trois semaines de concerts, de master class, la naissance d’une Académie de direction d’orchestre… et point d’orgue du festival, deux opéras en version de concert réunissant les forces du Bolchoï et Tugan Sokhiev : France Musique en diffuse les temps forts sur son antenne. La chaîne « salue cet événement avec une antenne aux couleurs musicales franco-russes, comme une âme en partage »… (Prochain compte rendu à venir sur classiquenews).

Toute la semaine du 11-15 mars 2019 de 14h à 16h :
Arabesques, Petite histoire du « Grand ». En effet, le mot « Bolchoï », nom mythique de la musique et de la danse, signifie « le Grand ». Le « Grand Théâtre » de Moscou est ainsi au cœur d’une semaine évoque les presque deux cents ans d’existence de l’institution légendaire. Tchaïkovski, Moussorgski, Rachmaninov, en sont les auteurs les plus joués aujourd’hui, évoquant aussi les tourbillons de l’histoire russe en savourant le génie de ses plus grands interprètes.

Jeudi 14 mars, 7h30
Tugan Sokhiev, chef d’orchestre, est l’invité de Musique Matin (à partir de 7h) ; le chef présente la première édition des Musicales franco-russes de Toulouse, dédiées aux artistes des deux pays afin de renforcer les liens historiques et d’amitié entre la France et la Russie, ainsi que le dialogue culturel et les échanges artistiques.

Vendredi 15 mars, 20h
Le concert de 20h : soirée en direct à la Halle aux Grains de Toulouse. A la tête du Chœur et de l’Orchestre du Théâtre du Bolchoï, Tugan Sokhiev dirige en version de concert l’opéra Ivan le Terrible de Rimski-Korsakov.

Puis Dimanche 2 juin 2019, 20h
La Dame de Pique de Tchaïkovski, enregistrée à la Halle aux Grains le jeudi 14 mars 2019

Compte-rendu, concert. Toulouse, le 9 nov 2018. Franck. Liszt. Várjon. Sokhiev.

78356-tugan-sokhiev-c-mat-hennekCompte rendu concert. Toulouse. Halle-aux-Grains, le 9 novembre 2018. Franck. Liszt. Dénes Várjon. Orchestre National du Capitole de Toulouse. Tugan Sokhiev. César Franck est à l’honneur dans ce concert avec le sensationnel poème symphonique, le chasseur maudit, et sa symphonie en ré mineur. Etant données les qualités de ces deux partitions il est bien dommage de les entendre si rarement. Le poème symphonique est grandement théâtralisé par la direction pleine de constates de Tugan Sokhiev. Il obtient de son orchestre des effets musicaux puissants. La narrativité vivante qui irrigue la partition s’en trouve magnifiée. Chaque instrumentiste participe activement à l’aventure de ce malheu

Trop rare au concert,
César Franck magnifié à Toulouse

reux chasseur. Cette très belle partition trouve là des interprètes inspirés. En fin de concert la symphonie en ré mineur va bénéficier d’une très intéressante direction. Arrivant à garder une belle énergie jusqu’aux ultimes mesures Tugan Sokhiev qui déjà en 2009 l’avait dirigé in loco n’a pas fondamentalement changé ses partis pris. Les plans sont ciselés, les nuances subtilement amenées et les instrumentistes encouragés à donner le meilleur d’eux même. C’est en fait la qualité de l’orchestre qui a permis d’aller plus loin, avec la majesté des grandes phrases, les nuances forte plus puissantes, les cuivres plus nuancés et les violons bien plus solides et éclatants. Les bois restent magiques avec en particulier au cor anglais, si important dans le deuxième mouvement, Gabrielle Zaneboni dont la délicatesse et la musicalité sont un rêve. Le final de la symphonie atteint des somment de hauteur dans une paissance jupitérienne assumée.
Encadré par ces deux chefs d’œuvres le deuxième concerto pour piano de Liszt pâlira un peu.
Pourtant le jeu aussi virtuose que musical de Dénes Várjon est parfait et comme à son habitude Tugan Sokhiev est un partenaire délicat très à l’écoute du soliste. Les musiciens avec de très beaux soli vont loin dans leurs propositions et Tugan Sokhiev les laisse libres de suivre le soliste dans les moments chambristes. Le chaleureux chant du violoncelle de Sarah Iancu permet des épanchements lyriques avec Dénes Várjon.  Pourtant ce concerto restera comme en retrait par rapport aux deux autres œuvres de César Franck. Dénes Várjon avec son jeu puissant et clair a été très applaudi.  Il a offert deux bis bien agréables de Bartók et Schumann.
L’orchestre du Capitole et son chef au retour de leur mémorable concert à Paris ont su renouveler leur incommensurable joie à faire de la musique ensemble. Un bien beau concert qui a surtout mis en valeur le compositeur, belge naturalisé français, César Franck.
Mais avant de quitter la scène, une sorte de  tradition lors de la prise de retraite d’un musicien de l’orchestre a pris un tour particulièrement émouvant. Le violoncelliste Christopher Waltham a été honoré par Tugan Sokhiev avec l’habituel bouquet de fleurs mais cette  fois le futur retraité a également fait un cadeau au chef (un livre ou un album) et fait un petit discours très émouvant. Cette vie, vraie et conviviale, est une grande qualité de cet orchestre et illustre la relation forte entre les musiciens et Tugan Sokhiev.

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Compte rendu concert. Toulouse ; Halle-aux-Grains, le 9 novembre 2018 ; César Franck (1822-1890) : Le chasseur maudit, poème symphonique ; Symphonie en ré mineur ; Frantz Liszt (1811-1886) : Concerto pour piano n°2 en la majeur ; Dénes Várjon, piano ; Orchestre National du Capitole de Toulouse ; Tugan Sokhiev, direction. Photo © C-Mat-Hennek

Compte-rendu, concert. Paris. Philharmonie, le 5 nov 2018. Chen. Chostakovitch. Moreau / Sokhiev.

Compte-rendu, concert. Paris. Grande salle de la philharmonie, le 5 novembre 2018. Qigang Chen. Dimitri Chostakovitch. Edgar Moreau, violoncelle. Orchestre National du Capitole de Toulouse. Tugan Sokhiev. Salle pleine à la Philharmonie ce soir pour la création d’une œuvre de Qigang Chen, compositeur sino-français que le public adore. L’Orchestre National du Capitole de Toulouse et son chef Tugan Sokhiev avaient déjà donné ce même concert deux jours auparavant dans leur ville de Toulouse. Le sublime solo de trompette qui ouvre « avenir d’une illusion » a été joué avec beaucoup de délicatesse par Hugo Blacher. La direction précise et souple du chef a fait merveille dans ce moment de magie qui a progressivement ouvert les oreilles des auditeurs vers des sonorités de plus en plus corsées.

  
 
 

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Toulouse et Paris main dans la main : que de félicité !

  
 

La poésie qui se dégage de cette ouverture est celle d’un matin, à la sortie des songes qui voit se lever le soleil et toute la nature se réveiller. Mais également qui met en mouvement toute l’intelligence et la sensibilité humaine. Après de sublimes aplats, une formule mélodico rythmique très courte, comme un appel,  est passée d’un instrumentiste à l’autre.  Tout l’orchestre s’est ainsi vu stimulé pour petit à petit se superposer et grandir. L’ostinato du piano d’une précision horlogère débute la construction du final qui voit s’empiler petit à petit tous les instruments de l’orchestre pour terminer dans une puissance rarement atteinte par un orchestre symphonique. Les qualités de la composition de Qigang Chen sont multiples et méritent vraiment une écoute attentive pour être toutes mises en valeur. Une création de cette qualité est très rare. Le temps va permettre d’en comprendre toute la beauté et la subtilité mais déjà le charme opère en une écoute unique.  L’association de l’Orchestre du Capitole et de la Philharmonie de Paris, commanditaires de cette magnifique composition, ne peut qu’être louée.  Cette belle création a été faite d’abord à Toulouse puis Paris, avec le même succès. Il y a une magnifique transparence dans l’orchestration de Cheng que la direction très inspirée de Tugan Sokhiev rend merveilleusement bien, grâce aux qualités de délicatesse de l’orchestre de Toulouse. Hugo Blacher avec son solo de trompette sublime ouvre avec émotion cette belle partition. Et bien des solistes lui emboîtent le pas avec les mêmes qualités, il faudrait tous les citer… Qigang Chen est le compositeur sino-français que le monde entier admire, et cela se comprend aisément. Le public parisien a semblé adorer cet « Itinéraire d’une illusion ». Il faut dire qu’une création avec des musiciens si virtuoses et un chef si précis et musical à la fois ne peut qu’apporter toute satisfaction. Une création de cette qualité tord le cou aux idées reçus sur l’inécoutable trop souvent mis en exergue par d’autres compositions contemporaines.  Il est possible d’écrire une partition facile d’écoute et de grande complexité, la preuve en est donnée ce soir avec éclat.

  
 
 

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Tout en modestie, le jeune Edgar Moreau rentre ensuite en scène avec son violoncelle ; il s’installe sur son estrade. La complicité avec Tugan Sokhiev est palpable. Dès son délicat  premier coup d’archet, nous savons que ce prodigieux interprète va rendre hommage au génie de Chostakovitch. Ce deuxième concerto si complexe et difficile a été commandé par Rostropovitch, c’est dire ! Il est impossible de décrire l’admirable osmose qui existe entre le soliste et l’orchestre. Tugan Sokhiev a les yeux partout et ne laisse jamais rien au hasard. La précision de sa direction est implacable tout en laissant de grandes plages de legato pour le soliste. Il est partout,  à la fois suspendu aux gestes du violoncelliste et encourageant chaque musicien de l’orchestre. Et les moments solistes dans l’orchestre sont nombreux ! Les nuances sont creusées de façon sublime ; les couleurs du violoncelle s’harmonisent avec celles de l’orchestre. Voilà une très belle interprétation de ce concerto. Le succès est grandiose, partagé entre l’orchestre, le chef et ce soliste si attachant. Edgar Moreau a une maîtrise technique impeccable, totalement mise au service de la musicalité la plus délicate.

Nous avions déjà entendu à deux reprises la magnifique interprétation toulousaine de la Cinquième symphonie de  Chostakovitch et nous nous faisions une fête de la déguster dans la magnifique acoustique de la Philharmonie de Paris. Il est certain que le public toulousain peut admirer son orchestre sous la direction de son chef dans la  Halle-aux-Grains mais vraiment ce n’est pas le même orchestre que nous pouvons entendre à Paris. J’ai déjà souvent écrit combien cette acoustique est merveilleuse mais vraiment c’est lorsque l’Orchestre du Capitole de Toulouse joue dans de belles acoustiques comme à Paris, qu’il sonne magnifiquement bien. Les  nuances infimes  peuvent être développées et les forte ici sont généreux sans risque de saturation et sans jamais la moindre violence. Car c’est une caractéristique de la direction de Tugan Sokhiev de toujours développer très progressivement les nuances et de garder une petite marge pour le dernier forte. Toute la puissance contenue dans la symphonie, la provocation, la moquerie, voir la méchanceté ont trouvé dans cette interprétation toute leur place. Le final avec cette construction implacable a amené le public à véritablement exulter.
Un magnifique concert dont la dimension historique est relayée sur le net, sur le site de la Philharmonie de Paris Live. La partition de Qigang Chen mérite d’être connue et Chostakovitch n’est jamais assez joué ; d’autant que là, il est interprété d’une admirable façon.

  
 
 

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Compte rendu concert. Paris. Grande salle de la philharmonie, le 5 novembre 2018. Qigang Chen (Né en 1951) : l’avenir d’une illusion ; Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Concerto pour violoncelle n° 2 et Symphonie  n°5 ; Edgar Moreau, violoncelle ; Orchestre National du Capitole de Toulouse ; Tugan Sokhiev, direction.

  
 
 

Compte-rendu,concert.Toulouse,Halle-Aux-Grains,le 29 avril 2016. Berlioz: Roméo et Juliette.Tugan Sokhiev,direction.




Quelle soirée! Ce n’est pas la première fois que Tugan Sokhiev dirige cette admirable partition,car il l’a donnée en février à Berlin ; toutefois il se dégage de son interprétation toulousaine, une vitalité et une urgence dramatique qui a quelque chose de la fougue romantique assumée qui convient parfaitement à la tragédie la plus aimée de Shakespeare.Il me semble que cette adaptation de la pièce de Shakespeare, en une forme inouïe nommée symphonie dramatique mais qui dure près de deux heures, avec son mélange baroque de genres est la plus aboutie de toutes les illustrations musicales ou opératiques de cette tragédie. La poésie conservée de cette histoire d’amour et de cette histoire de guerre si édifiante, la liberté laissée à l’auditeur pour construire son propre monde et partager les émotions de Roméo et Juliette, de cette haine dévastatrice et folle si présente encore aujourd’hui, … tout cela produit un moment rare.

 

 

 

Chapeau bas!


Tugan Sokhiev éblouit dans Berlioz amoureux inspiré par Shakespeare : splendide Roméo et Juliette à Toulouse

 

toulouse-tugan-sokhiev-582-classiquenews-compte-rendu-critique-Roméo-et-Juliette---crédit-Joachim-Hocine

 

 


Tugan Sokhiev aime Berlioz et il le prouve une nouvelle et belle fois! Après ce même Romeo et Juliette donné à Berlin en février 2016, il a dirigé le Requiem au Bolschoï, et s’apprête à conduire dans ce même théâtre, la Damnation de Faust en juillet prochain. Il aime et comprend la partition fleuve de Berlioz comme peu le savent. Car dès les premières mesures de la fugue lancée par les alti, nous somme pris dans une aventure dont personne de sortira tout à fait le même. La beauté de la partition est fulgurante, son intelligence et sa modernité aussi. La partie centrale est cette incroyable scène d’amour à l’orchestre, plus belle que tous les duos d’opéra du monde tant Berlioz fait chanter son orchestre. Ce bijou central a été dirigé si admirablement par Tugan Sokhiev, suivi comme si leur vie était en jeux par tout son orchestre et le chœur, que le temps suspendu, a permis un retour en soi pour les amoureux de l’amour. Si ce moment crucial et central demeurera dans ma mémoire je crois qu’il est impossible de décrire tout ce qui fait la beauté et la richesse de cette symphonie dramatique. La forme est si originale et si habile à nous conduire vers la poésie de Shakespeare que je ne prendrai que deux exemples.

L’utilisation des voix solistes est d’une invention incroyable. La mezzo-soprano dans un moment qui tient à la fois du récitatif et de l’air, dans un légato à l’élégance suprême accompagné surtout par la harpe, incarne la sympathie et la bonté, la foi en l’humanité, en la poésie. Elle s’adresse au public ainsi :



Quel art, dans sa langue choisie,
Rendrait vos célestes appas ?
Premier amour ! N’êtes-vous pas
Plus haut que toute poésie ?
Ou ne seriez vous point,
dans notre exil mortel,
Cette poésie elle-même,
Dont Shakespeare lui seul eut le secret suprême
Et qu’il remporta dans le ciel !

Si d’autres textes français chantés peuvent toucher ou trop souvent faire sourire voir rire,le texte d’Emile Deschamps est d’une grande qualité tout du long. Son patient travail avec Berlioz semble porter les fruits d’une modestie de ses mots face au génie né à Stradford-upon-Avon, qui du coup révèle la poésie par la musique, faisant pour quelques temps taire la guerre entre parole et musique. 
Lors de ce qui s’apparente à un deuxième couplet, la manière dont Berlioz fait chanter sotto voce les violoncelles, est admirable de suggestion de la chaleur de la passion amoureuse naissante.
La mezzo-soprano québécoise Julie Boulianne est absolument parfaite. Voix au timbre profond mais sans vibrato large, jeunesse de couleur, et diction fluide permettent d’adhérer à son empathie pour les héros. Son souffle long et ses phrasés admirablement élégants sont d’un idéal de chant français trop peu souvent atteint.
Le ténor a une très courte intervention et son air fuse. L’art avec lequel le ténor français Loïc Félix, arrive à garder toute l’élégance de Mercucio dans son chant prestissimo est un vrai régal. Pas une syllabe qui ne soit claire comme le cristal, le tout dans un chic incroyable et avec une voix au timbre de miel. C’est un très beau passeur pour le songe de la reine Mab qui ne peut s’oublier. 
Ainsi l’originalité avec laquelle sont traitées les voix soliste permet toutefois aux interprètes de briller. Le dernier à intervenir pour l’immense final est la voix grave de Frère Laurent. Cette page opératique, véritable dialogue entre le personnage et le choeur, est la seule concession au vieil opéra, mais à quel niveau de perfection! L’exhortation à la paix, obtenue de longue lutte par le moine est un bras de fer vocal admirablement écrit par Berlioz qui ne met pas en danger son chanteur face à la vaste foule mais lui permet par une écriture habile de dominer le chœur de plus de 80 personnes. Patrick Bolleire, plus baryton que basse a l’autorité nécessaire mais peut être pas le charisme de beauté de timbre qu’un José van Dam a su y mettre. La voix est franche d’émission et la diction suffisamment précise pour en imposer et obtenir ce fabuleux serment de paix.
Tugan Sokhiev a su porter haut ce final en terme de tension dramatique et d’espoir. N’avons nous pas toujours et toujours besoin de cette paix ? 

Le choeur est lui aussi utilisé de manière particulière par Berlioz. Petit chœur ou grand chœur. A capella ou à peine accompagné par la harpe, soutenu par un orchestre immense ou final dramatique puissant. Il tient à la fois du chœur antique et moteur actif du drame. Le chœur catalan Orfeon Donostiarra, admirablement préparé par son chef, José Antonio Sainz Alfaro, a rendu hommage au génie de Berlioz dans toutes ses facettes. Porté par la direction sensible à main nue de Tugan Sokhiev, il a su donner en émotion, distance descriptive ou sentiments humains tout ce qui construit la dramaturgie de l’œuvre. Seul petit regret la diction n’a pas permis de tout comprendre.Mais quelle splendeur sonore!

L’orchestre du Capitole a été merveilleux, impossible de décrire chaque moment superbe des solistes. Les violons ont été royaux autant dans les piani et les phrasé aériens, les effets magiques de la reine Mab, que dans la violences déchirante du final avec des traits comme des coups d’épée. Les violoncelles amoureux ont été voluptueux. Un exemple de l’orchestration inouïe de Berlioz: cette plainte dans la scène du tombeau portée par quatre bassons, le cor anglais et les cors alternativement. Cela construit une sonorité lugubre et belle, fascinante en sa lumière noire et inoubliable.
Berlioz peut compter sur un chef et un orchestre de toute première grandeur. Tugan Sokhiev et l’Orchestre National du Capitole ont été magnifiques ce soir. Chapeau bas! Grande soirée Berlioz et bel hommage aussi à Shakespeare.

 

 




Compte-rendu,concert.Toulouse,Halle-Aux-Grains,le 29 avril 2016.Hector Berlioz(1803-1869): Roméo et Juliette, symphonie dramatique,op.17; paroles d’Emile Deschamps. Julie Boulianne,mezzo-soprano; Loïc Félix,ténor; Patrick Bolleire,basse; Choeur Orfeon Donostiarra (chef de chœur: José Antonio Sainz Alfaro); Orchestre National du Capitole de Toulouse. Tugan Sokhiev,direction.

 

 

Compte rendu, concert. Toulouse, le 4 mars 2016. Azagra, Beethoven… Vadim Gluzman, Tugan Sokhiev

Dès les premiers accords de prélude du jeune compositeur hispanique la qualité de la composition rejoint celle de l’interprétation et le public a été conscient de vivre un grand moment. Cette création, commande de l’orchestre du Capitole prouve combien l’orchestre et son chef sont engagés dans la défense de la musique contemporaine. La grande sagesse du compositeur David Azagra permet aux oreilles de se détendre et d‘accepter une partition lyrique qui se déploie avec générosité. L’appel à une énergie supérieure est perceptible et crédible  mais la nostalgie de certains moments n’est pas sans évoquer le cor anglais  de Tristan et Yseult de Wagner. La beauté de l’orchestre est un enchantement, de couleurs et de nuances subtiles.

 
 
 

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De son côté, le concerto pour violon de Beethoven avec l’interprétation de Vadim Gluzman restera comme un moment de bonheur total proche de l’inouï.  Ecoutant avec gourmandise l’introduction de l’orchestre, ce musicien d’exception cherche à se couler dans le son de l’orchestre. Cest ainsi qu’avant son entrée, il joue avec le tutti des premiers violons comme pour faire corps avec la musique de l’orchestre et le tempo. La direction vivante et fougueuse de Tugan Sokhiev obtient de très beaux phrasés des musicien et des nuances variées. Le romantisme de la partition s ‘exprime par la générosité du son qui se déploie avec puissance. L’orchestre sera tout du long un partenaire très présent pour le soliste . Il faut dire combien Vadim Gluzman obtient de son Stradivarius une sonorité hédoniste et généreuse … laquelle semble flotter au dessus de tout.  Même dans les forte, le violon plane dans la lumière  et n’est jamais éteint. Ses coups d‘archets sont parfois étonnants car ils vivifient des moments trop connus. Il est admirable de sentir combien cette partition de Beethoven retrouve dans cette interprétation une vivacité, un élan bien souvent perdu sous une trop complaisante tradition. Ici le chef et le soliste, main dans la main, semblent dépoussiérer la partition et lui rendre l’audace qu’elle contient. Le mouvement lent est un chant d‘amour paisible et radieux et le final une danse de la vie splendide. Cette interprétation sensible et vivante restera dans les mémoires de tous spectateurs privilégiés de la Halle-aux-Grains comme des auditeurs de Radio Classique en direct ou les spectateur de Mezzo à venir.

Pour entretenir la relation d’amour du public avec Vadim Gluzman, il revient avec un extrait pour violon seul des sonates et partitas de Bach. Même sous un tonnerre d‘applaudissement, il a bien fallu laisser partir celui qui est tout simplement l‘un des plus grand violonistes du moment.

Pour  terminer ce magnifique concert la beauté et la puissance de la partition de Bela Bartok a représenté un pur moment de grâce. Le début de cette suite du Prince de bois fait penser à une sorte de création du monde avec l’utilisation si richement évocatrice des instruments les plus graves pianissimo. L’Or du Rhin de Wagner n’est pas loin. L’effet est sidérant mais la suite de cette pièce est tout à fait incroyable. L’orchestre est gigantesque qui utilise même deux saxophones. Il est demandé aux musiciens une concentration incroyable avec en particulier des rythmes fort complexes. Cette musique a quelque chose d’athlétique dans cette exigence de maitrise instrumentale totale et cette capacité à rendre naturels des rythmes d’une complexité inénarrable.
La manière dont Tugan Sokhiev dirige est un pur bonheur partagé. Souriant et heureux, il semble organiser jusqu’au moindre détail de cette formidable partition. Chaque instrumentiste est à la fête et semble donner tout ce qu’il peut pour participer à la fête. Les nuances sont richement creusées et le crescendo final est presque insoutenable de puissance. La beauté de la direction de Tugan Sokhiev, celle de ses gestes comme de toute sa manière d‘être, font merveille. Un seul regret : dommage que nous n’ayons pu profiter du ballet dans son intégralité, car nous savons quel chef de théâtre est Tugan Sokhiev et combien il aurait su lui rendre justice. Car la partition est la moins connue et la moins jouée des pièces dramatiques de Bartok. En effet l’opéra le Chateau de Barbe Bleue a trouvé son public, et récemment à Toulouse, mais également le Mandarin Merveilleux est plus joué que ce Prince de bois. Tugan Sokhiev nous avait  offert une suite d’orchestre sensationnelle  à Toulouse déjà en 2008. Ce soir pourtant il semble particulièrement maitriser la complexité de l’oeuvre avec joie et aisance. La maturité  est magnifique et l’entente si belle avec l’orchestre du Capitole porte ses plus beaux fruits, comme une corbeille en forme de corne d ‘abondance. Ce concert a uni des musiciens de grand talent et des compositeurs au génie souverain. Le jeune Azagra n’a pas démérité ce qui laisse augurer de bien belles compositions à venir.

Toulouse ; La Halle-aux-grains, le 4 mars 2016 ; David Azagra (né en 1974) : Prélude, création mondiale ; Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Concert pour violon et orchestre en ré majeur, op.61 ; Béla Bartók (1881-1945) : Le prince de bois, suite d ‘orchestre op.13 sz .60 ; Vadim Gluzman , violon ; Orchestre national du Capitole de Toulouse; Direction : Tugan Sokhiev.

Compte rendu, concert. Concert du Nouvel An à Toulouse. Le 1er janvier 2016. Tchaikovski, Bellini, Chostakovitch… Tugan Sokhiev…

Sokhiev_Tugan_Tugan-Sokhiev2-credit-Mat-HennekSalle comble ce 1er janvier 2016 pour le deuxième concert du nouvel an. La veille au soir les musiciens avaient offert le même programme aux toulousains. Un public rajeuni, et expressif a ovationné les artistes après chaque pièce. Cette relation de plaisir et de confiance entre musiciens, solistes, chef et public a été le moteur d’une alchimie sophistiquée. Car ce programme qui en apparence comprend des pièces « faciles » est en fait exactement construit pour mettre en valeur toutes les facettes de la musique et la subtilité des instrumentistes. Thème général russe certes, avec un joyau belcantiste en son sein du plus sensibles des compositeurs de bel canto italien : Vincenzo Bellini (Concerto pour hautbois). Cela fonctionne à merveille et la délicatesse, la longueur de souffle, l’élégance et la beauté sonore du hautboïste ont apporté une instant de magie fraiche et nuageuse au milieu de couleurs flamboyantes et de rythmes irrésistibles. Car si le hautbois d’Alexeï Ogrintchouk est fêté dans le monde entier, le soliste et chambriste inestimable a semblé pendre un plaisir immense lors de l’interprétation des arabesques, volutes et phrases planantes du concerto de Bellini sous la direction lyrique de Tugan Sokhiev. L’entente a été admirable entre les musiciens. L’humour et la malice du final prestissimo ont renforcé encore une complicité exquise.

 

 

 

Concert du Nouvel An : Sokhiev, Maestro Crescendo !

Les extraits des principaux ballets de Tchaïkovski ont été un enchantement sous la direction si idiomatique de Tugan Sokhiev. Nous avons toujours loué ses interprétations de Tchaïkovski dont il a régalé Toulouse à l’opéra comme au concert.   Même en extraits si précis, le charme de la théâtralité opère, chaque extrait est situé dans l’histoire du ballet. En état de grâce le chef a dirigé tout le concert sans baguette dans un don complet de sa personne. Gestes expressifs de danseur, d‘escrimeur, de cavalier, de torero, sourire aux lèvres, yeux noirs ou malicieux, le spectacle de cette gestuelle à l’esthétisme rare a été un enchantement à lui seul. Musicalement les instrumentistes ont tous brillé, explosant de virtuosité et de beauté sonore. La direction si souple de Tugan Sokhiev obtient pourtant une précision rythmique incroyable. Les phrasés sont larges et toujours chantants, les couleurs variées tour à tour éblouissantes ou mordorées, les nuances portées par les mains si expressives du chef atteignent des sommets. Au point que Tugan Sokhiev peut être proclamé « Maestro Crescendo ».

La deuxième partie du concert quitte Tchaïkovski pour Katchaturian et sa Danse du sabre si prompte à mettre en valeur les percussions. Mais ce sont peut être les danses de Chostakovitch qui seront les plus irrésistibles en raison d’un humour incroyable de l’orchestration. Le trombone à coulisse de « Tea for two » ayant la palme,  indiscutablement. Le final par la (trop) courte suite de 1909 de l’Oiseau de Feu de Stravinski élargit l’espace sonore avec un crescendo final éblouissant de force maitrisée. Maestro Crescendo oui vraiment, merci Tugan Sokhiev pour ce programme si stimulant permettant de commencer l’année en pleine énergie !

Pris au piège de son succès, alors qu’un premier  bis a été donné (la vocalise de Rachmaninov ayant permis le retour du hautboïste sublime), puis la marche de Radetzky (Johann Strauss père) mettant le public sous la direction du chef avec un charisme incroyable, une partie du public a houspillé Tugan en  lui faisant comprendre qu’il n’était pas d ‘accord avec la fin du concert, lorsque celui ci voulait partir. Avec un « on ne m’a jamais fait cela », bousculé, mais heureux, Tugan Sokhiev est revenu diriger, musiciens et public pour la reprise de la fameuse marche de Radetzky : un Grand moment de complicité et de partage. Avec un tel chef, un si bel orchestre  et un pareil public, l’année musicale s’annonce …. fabuleuse à Toulouse.

Compte Rendu Concert. Toulouse. Halle-aux-Grains, le 9 décembre 2015 ; Wolfgang Amadeus Mozart ( 1756-1791) : Symphonie concertante pour vents en mi bémol majeur KV.297b ; Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Symphonie n° 10 en mi mineur op.93 ; David Minetti, clarinette ; Olivier Stankiewicz, hautbois ; Jacques Deleplanque, cor ; Estelle Richard, basson ; Orchestre National du Capitole de Toulouse. Tugan Sokhiev, direction.

Ce concert a été ouvert dans la bonne humeur, l’élégance et la musicalité la plus subtile. La Symphonie concertante pour instruments à vents de Mozart est une œuvre très belle, aux proportions parfaites et à l’équilibre idéal entre solistes et orchestre. L’originalité de l’association de la clarinette, du hautbois, du cor et du basson dans un orchestre classique bien étoffé en fait une œuvre symphonique enrichie et non un orchestre accompagnant des solistes. Les quatre compères sont tous solistes de l’Orchestre du Capitole (ou l’ont été). Cela se voit par une complicité et une écoute, rares et émouvantes, et cela s‘entend par un même phrasé, une même vision de la musique. Les trois mouvements passent comme un rêve avec des moments d’émotions, de joie, d’humour.

Au sein de l’Orchestre du Capitole, se distinguent plusieurs tempéraments solistes

Quels Artistes !

Sokhiev_Tugan_Tugan-Sokhiev2-credit-Mat-HennekLa très belle introduction orchestrale dirigée avec amour par Tugan Sokhiev permet aux solistes de se sentir accueilli pour développer leurs extraordinaires qualités de son, de phrasé et de nuances. Quand la beauté prend ainsi le devant tout paraît évident. La sonorité mozartienne de la clarinette de David Minetti nous est connue, lui qui est un interprète si inspiré du Concerto de Mozart, qui sous la baguette de Tugan Sokhiev nous avait déjà enchanté. Beauté du son, longueur de souffle, nuances piano irréelles, cet artiste a tout d’un musicien d‘exception, le compter dans l’orchestre du Capitole est une chance, nous le savons. Le hautbois d’Olivier Stankiewicz est plus rare dans l’orchestre ces temps ci,  il joue outre-Manche dit-on. Ce soir sa complicité avec l’orchestre, le chef et ses collègues est source de bonheur partagé. Et quelle sonorité !  Ce hautbois rond au son plein et fin à la fois, qui sait nuancer et phraser à la perfection est une vraie bénédiction. Cette musicalité succulente avec cette rondeur de son évoque quelque dessert à la pêche. Quand nombres d‘orchestre et même de haut rang ont des hautbois trop citronnés.

De son côté, Jacques Deleplanque, fait les beaux soirs de l’orchestre dans des soli de cor toujours admirables. Ce soir, même si il a un peu bataillé avec «  sa tuyauterie » entre ses interventions, non sans humour. Il a su prouver que le cor est aussi fin et précis que les bois, rivalisant de rondeur avec le hautbois, de chaleur avec la clarinette, de profondeur avec le basson. Cet artiste qui a été remarqué très jeune par Boulez, est soliste internationalement connu, il est également  professeur à Paris. Estelle Richard, petite benjamine de l’orchestre est basson solo depuis 2011. Son aplomb, la délicatesse de son jeu, sa sonorité toujours chaude et rayonnante ont su assurer un tapis de velours épais dans les dialogues quand la légèreté de sa virtuosité et sa grâce dans les soli ont été remarquables. Et toujours ces phrasés complices entre tous. Dans le final, le jeu de duel à fleuret moucheté entre les quatre solistes a été un moment d’humour et de joie partagée inoubliable. Après un final enthousiasmant, le public ravi fait un triomphe à ces musiciens si complices. Le bis qui a toute la saveur mozartienne est en fait la cassation d’un contemporain :  Johann Georg Lickl,  autre ravissant joyau de complicité. Que du bonheur !

Parcours de la terreur

La deuxième partie du concert a complètement changé d‘atmosphère avec un orchestre grandement enrichi. Après la lumière et le joie, le malheur et l’enfer. La dixième symphonie de Chostakovitch est un cri, une déclaration de guerre à la barbarie. Staline est mort et Chostakovitch si tourmenté par la censure stalinienne, se sent enfin libre d‘exprimer ce qu’il ressent depuis tant d‘années noires. La douleur est ce soir présentée avec rigueur et puissance par Tugan Sokhiev. La lugubre plainte des contrebasses et cordes dans le grave qui ouvre la Symphonie et évolue longuement, gagne en force et en puissance d’horreur. L’ampleur du son jusqu’au fortissimo glace le sang. Ce long premier mouvement agit comme le parcours d’un champ de ruine et de mort, celui dont les hommes sont capables hier comme aujourd’hui. Une telle désolation est difficilement supportable quand la beauté du son de chaque pupitre, chaque solo (clarinette, flûte, basson et contre-basson, cuivres) exalte la douleur et la maitrise de la construction par le chef est si exacte, avec des silences si habités. Tugan Sokhiev est dans son élément et ce n’est pas la première fois que le public ressent combien son interprétation est idiomatique. Le mouvement Vivace qui suit, ajoute par sa frénésie à l’horreur comme si la mécanique bien huilée de la persécution s’emballait. Les instrumentistes rivalisent de virtuosité dans le tempo d‘enfer choisi par le chef. Dans la troisième partie Tugan Sokhiev met en valeur la construction du morceau autours du thème (signature musicale DSCH – (NDLR : pour Dmitri SCHostakovitch- : ré, mi bémol, ut, si), comme des ricanements sarcastiques. La danse est à la fois grotesque et enthousiasmante dans sa force de persuasion. Danser au bord du gouffre mais danser avec folie… Les deux derniers mouvements enchainés sont comme une revisitation en accéléré de ce parcours de la terreur. On ne peut à l’écoute de cette musique éviter de penser à notre époque en sa violence sourde. Non, nous ne sommes pas à l’abri … freinera t-on cette course à l’abîme ?

Les instrumentistes atteignent un degré de concentration extrême, poussés à bout par un chef galvanisé. Comme chaque fois, Sokhiev sait construire le crescendo jusqu’à la fin dans un effet théâtral saisissant.

Le public comme choqué est intarissable d ‘applaudissements. Un tel voyage de la joie au désespoir n’est pas banal. Quelle force émane de la musique lorsqu’elle est défendue ainsi ! Bravo et merci  à tous. Artistes comme politiques qui investissent avec justesse dans la culture. La salle était à nouveau pleine ce soir et le public jeune confirme son amour des concerts. Soirée pleine d’espoir, d’accomplissement, très encourageante.

Compte-rendu concert. Paris,Philharmonie 1.Le 24 nov 2015; Beethoven, Rimski-Korsakov,D.Fray,piano.Tugan Sokhiev

Sokhiev_Tugan_Tugan-Sokhiev2-credit-Mat-HennekLa Philharmonie de Paris a fait grand bruit avant son inauguration en 2014 et depuis a une programmation exemplaire en termes de diversité autant que d’excellence et une fréquentation qui en impose. La beauté du bâtiment de Jean Nouvel dont les abords ne sont pas tout à fait terminés séduits par une présence originale. Monter les escalators et pousser la porte de la salle réserve une surprise de taille. Ce n’est pas la seule largeur de la salle qui impressionne mais sa beauté, son originalité, sa gourmandise. Rien de symétrique mais des courbes, des rubans, des corbeilles. Des couleurs de dessert à base des trois chocolats, noir, lait et blanc ; des caramels, de la crème de lait ou fouettée ; du croquant, du miel. Cette douce beauté, dans des éclairages chauds, créée une sorte d’intimité familière et offre une visibilité parfaite. L’oreille est à la fête avec une précision incroyable permettant d’entendre le son le  plus infime et une élégante réverbération qui permet même après le forte le plus sonore un très court écho qui donne espace et vie. Probablement la plus belle acoustique de l‘Hexagone pour les grandes formations et l’une des meilleures de la planète.

C’est dans ce vaste vaisseau plein d’un public nombreux que l’Orchestre du Capitole a offert une concert très applaudi. Le pianiste David Fray originaire du Sud-Ouest était le concertiste. Tugan Sokhiev, l’orchestre et lui se connaissent bien. Pourtant le jeune pianiste est entré sur scène tendu et n’a pu se détendre que lors du deuxième mouvement. Sa sensibilité et la délicatesse de son jeu trouvent dans la direction de Tugan Sokhiev un partenaire idéal. La salle permettant de doser très finement les nuances l’exposition de l’orchestre a mis la barre très haute en une véritable symphonie de couleurs et nuances et un phrasé d’une noble élégance. L’entrée du piano a été tout en délicatesse et musicalité. Le dialogue a été osmotique avec un orchestre d’une beauté de chaque instant. Le mouvement lent a été le moment de grâce attendu, dialogue de pure poésie. L’énergie du final, les jeux de  réponses entre l’orchestre et le soliste, la joie partagée ont été une apothéose vivifiante. Le jeune pianiste a offert en bis une pièce de Schubert en forme de mélodie hongroise d’une grande délicatesse.

En deuxième partie, Tugan Sokhiev nous fait voyager dans les contes de mille et une nuits. Son interprétation du poème symphonique Shéhérazade de Rimski-Korsakov est théâtrale et poétique. Le souffle de l’Orient le plus idéalisé a soufflé. Le violon solo de Geneviève Laurenceau a été parfait de sensualité et de virtuosité avec des sonorités pures et aériennes. Chaque famille de l’orchestre a brillé par une présence ardente et une délicatesse de timbres et de nuances que la salle a magnifiées. La direction souple de Tugan Sokhiev, son plaisir partagé avec son orchestre révèlent une qualité d‘échange rare. Le public y a été sensible qui a ovationné la phalange toulousaine et son chef. Quand on sait la valeur des orchestres récemment invités dans cette salle (dont le Philharmonique de Berlin)  on mesure le succès artistique de cette équipe Toulousaine.

Une remarque sur la qualité de la salle qui permet à l’orchestre de développer des nuances que leur habituelle Halle-aux-Grains mange ou sature. Il me semble que les qualités de l’orchestre du Capitole ne se révèlent qu’à 75% dans la Halle-aux-Grains. Espérons que le projet de la nouvelle salle verra le jour rapidement à Toulouse afin que le public mesure encore mieux la qualité de son Orchestre qui a ce soir enthousiasmé les Parisiens. Il y va de l’avenir d’un projet artistique de grande valeur.  Ce serait dommage que le public toulousain ne bénéficie pas des meilleurs concerts de Son Orchestre !

Compte-rendu concert. Paris. Grande salle Philharmonie 1.Le 24 novembre 2015;  Ludvig van Beethoven (1770-1827) : Concerto pour piano n°3 ; Nikolaï Rimski-Korsakov (1844-1908) : Shéhérazade, suite symphonique ; David Fray, piano ; Orchestre National du Capitole de Toulouse ; Direction : Tugan Sokhiev.

Compte rendu, concert. Toulouse. Halle-aux-Grains, le 12 juin 2015 ; Wolfgang Amadeus Mozart (1751-1791) : Don Giovanni, K.527 , ouverture; Ludwig Van Beethoven (1770-1827) : Concerto pour piano et orchestre n°3 en do mineur, OP.37 ; Félix Mendelssohn (1809-1847) : Symphonie n°4 « Italienne », OP.90 ; Inon Barnatan, piano ; Orchestre National du Capitole de Toulouse ; Direction : Tugan Sokhiev.

Public, politique, culture : tous unis autour de Tugan Sokhiev, un chef dont la qualité de la baguette s’affirme fédératrice… 

Merveilleuse alacrité !

Sokhiev_Tugan_Tugan-Sokhiev2-credit-Mat-HennekDans une époque où la plainte sans fin et l’esprit maussade en boucle sont la règle, ce n’est pas sans surprise que le public de la Halle-aux Grains a vu le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, le sourire aux lèvres, monter sur scène. La Municipalité veux fêter avec éclat les dix ans du chef Tugan Sokhiev à la tête de l’Orchestre du Capitole. Cette médaille d’or de la Ville, que le maire lui a remis, vient donc officialiser les choses. Avec modestie et bonhommie Tugan Sokheiv a simplement remercié et dit que cette médaille appartenait autant aux musiciens de l’orchestre que lui, et même à l’équipe municipale pour son indéfectible soutien dans des temps incertains…Il est si bon et rare de vivre un accord si évident entre politiques, public, artistes. Sans plus tarder Tugan Sokhiev a saisi sa baguette pour diriger l’ouverture de Don Giovanni. Le souffle du drame a aussitôt ému, avant que la gaité de la fugue ne dissipe ces brumes de l‘âme. En quelques minutes, Tugan Sokhiev et son orchestre précis et virtuose ont permis de vivre tout le drame et la farce de cette somptueuse partition. Passant du romantisme le plus sombre à la vivacité la plus enjouée, tout en maintenant une tension constante, nous n’avons pu que regretter que le Capitole n’offre pas d’avantage de productions lyrique à un chef si doué pour le théâtre.

Inon Barnatan est un jeune pianiste prodige que les Toulousain ont déjà pu entendre au festival de septembre, Piano aux Jacobins. Remarquable musicien, ce jeune talent a su offrir une version de toute beauté dans le Troisième Concerto de Beethoven. Avec une palette de nuances riches, des sonorités variées, un toucher d’une grande délicatesse, la musique diffuse à tout moment. Très à l’écoute de l’orchestre il a constamment cherché à harmoniser sa sonorité à celles de l’orchestre. Cette science de l’écoute est ravissante et permet des moments de grande musicalité quand un chef comme Tugan Sokhiev, attentif et vigilant aux équilibres, dispose d’un orchestre si précis. L’entente a été parfaite et l’oeuvre si égalitaire entre le soliste et l’orchestre, a sonné magnifiquement, avec force et finesse. L’évidence qui s’est dégagée de cette interprétation a tenu de la magie. L’idée m’est venue qu’Inon Barnatan a dans son jeu quelque chose de la poésie et de la délicatesse des Elfes avec une sorte de sagesse sereine.

Le bis qu’il a donné en a été une belle illustration avec des nuances d’une infinie délicatesse et un toucher sensible permettant un legato de rêve dans un extrait de la cantate BWV 208 de Bach dans une transcription signée Egon Petri.

En deuxième partie de concert, la belle affinité entre Tugan Sokhiev et la musique de Mendelssohn a de nouveau semblé une évidence. La Symphonie Italienne est si solaire, si enthousiasmante et si entrainante que les sourires du chef et des musiciens ont été bienvenus. L’alacrité domine cette interprétation qui met en lumière toute les finesses de cette partition. Les nuages et une mélancolie fugace ont été rendus mais sans lourdeur. C’est la vivacité des tempi, la délicatesse des phrasés, la finesse des nuances  qui ont soutenu une narrativité entrainante. Un très beau concert de fin de saison Toulousaine pour Tugan Sokhiev, devant une Halle aux Grains pleine à craquer et en liesse. C’est un programme idéal pour célébrer les 10 ans d’un accord parfait et heureux.

Compte rendu, concert. Toulouse. Halle-aux-Grains, le 5 février 2015 ; Hector Berlioz (1801-1869): Grande Messe des Morts (Requiem), OP.5 ; Bryan Hymel, ténor ; Orfeon Nodostiarra, chef de choeur : José Antonio Sainz Alfaro ; Orchestre National du Capitole de Toulouse ; Direction : Tugan Sokhiev.

BerliozOeuvre immense et fondamentale, le Requiem de Berlioz provoque toujours une grande attente chez le public tant l’œuvre est ambitieuse. Héritage de la longue danse, pleine de méfiance, entre l’état et la religion catholique, cette Grande Messe des Morts a été une commande officielle. Certes au plus grand compositeur français du moment, mais athée affiché. Toutefois en homme plein de spiritualité, Hector Berlioz était sensible à l’histoire de
la musique religieuse dont il a souvent utilisé des thèmes comme le Dies Irae dans la Symphonie Fantastique, ou la marche des pèlerins dans Harold en Italie. L’ambiguïté baigne donc cette commande, comme notre histoire de France elle même avec, des liens entre le pouvoir et la religion qui ont pourtant toujours trouvé un parfait accord pour envoyer la chair à canon du champ de bataille au paradis sans état d‘âmes. Commande pour célébrer la révolution de 1830, la Grande Messe des Morts,  a ensuite été récupérée pour les soldats morts. La création a eu lieu en décembre 1837 aux Invalides. Hector Berlioz lui même a entretenu des légendes autours de la création déplaçant vers le spectaculaire tout ce que cette oeuvre contient en fait d’intime et de personnel. Jusque dans le choix du texte latin, sans Libera me, ni Pie Jesu, Hector Berlioz a choisi le sombre et le manque d‘espoir que la mort lui évoque. L’oeuvre, est parfois prise dans cet éclairage spectaculaire quand une partie du public et de la critique veulent avant tout du bruit et de la fureur dans l’interprétation en comptant le nombre de timbales ou mesurant les décibels du Dies Irae.

L’interprétation de ce soir a été avant tout d’intelligence, de finesse et de musicalité. Le théâtre de la mort y est plein de silence et de nuances pianissimo comme Berlioz l’exigea. La beauté de la partition, ses audaces d’orchestration, sa magie des nuances développées de l’infime au terrible, la rutilance et le mordoré des couleurs instrumentales, la sublime capacité du choeur à offrir toutes sortes de nuances et de couleurs ont fait de ce concert un très bel instant de musique. Les intentions de Berlioz sont respectées par Tugan Sokhiev qui semble avoir compris le compositeur sans se laisser séduire par le bruit et la fureur. Loin de ce chef intègre la recherche d‘effets pour l’effet ! Mais au contraire une mise au service de la partition de tout son talent.

Il semble à ce stade de sa carrière que Tugan Sokhiev n’a plus à démontrer sa science de la direction. Il a posé sa baguette au bout de quelques minutes, semblant totalement confiant dans les forces dirigées. Malgré une spatialisation complexe des orchestres de cuivres comme souhaitée par Berlioz aux quatre points cardinaux de la salle, aucun décalage n’est venu gâcher l‘harmonie obtenue par cette direction souple et précise à la fois. Un regard dans le dos, un petit geste de la main ont permis aux cuivres de s’insérer dans le tutti avec la nuance exacte quand le début était trop fort. L‘hommage à rendre a ces musiciens des cuivres est ému tant leur concentration et leur engagement ont permis des moments de grâce infinie. L’association des flutes et des trombones a été magique. Direction subtile, permettant à la musique si riche et savante de Berlioz de libérer une charge émotionnelle faite d’introspection et de retenue, autant que de fureur et de colère, de peur et de terrassement.

Tout l’orchestre a été d’une concentration totale et d’une perfection instrumentale qui laisse sans voix. L’Orfeon Nodostiarra, chœur transpyrénéen fidèle aux Toulousains depuis l‘ère Michel Plasson, a été merveilleusement préparé par José Antonio Sainz Alfaro. Les beaux gestes de Tugan Sokhiev à mains nues, ont sculpté un son d’une beauté confondante. Le pupitre des ténors souvent mis a l‘épreuve a été bouleversant de lumière et de fines nuances piano comme de force et de brillance dans des fortissimi jamais brutaux. Les soprani ont su garder chaire et âme dans des pianissimi de rêve. Le dialogue avec le ténor solo a été un moment de grâce. Ce choeur riche a été à la hauteur de cette partition si exigeante avec un moment a capella de pur enchantement. Le ténor solo a une intervention à froid tardive et d’une difficulté de tessiture non négligeable.   Bryan Hymel est non seulement une voix vaillante à la beauté de timbre rare mais c’est surtout un musicien délicat aux phrasés de rêve. Il a su nuancer sa partie sans la moindre dureté, gardant une aisance souriante jusque dans les aigus meurtriers. Un  grand moment de chant mais surtout de musique pure.

La Halle-aux Grains a été un écrin parfait pour cette version si musicale de la vaste Messe des Morts d‘Hector Berlioz. Tugan Sokhiev particulièrement inspiré et heureux a obtenu des forces rassemblées toute la musicalité dont ils sont capables, orchestre, soliste et chœurs. La subtilité de la partition a été magnifiée par des geste sculptants et orants. Biens des mouvements ont été enchainés sans relâcher la tension.
Tugan Sokhiev a permis de rendre limpide la construction parfaite de cette oeuvre immense. Et c’est dans cette construction d‘ensemble  parfaitement comprise que les moments de fureur ont pris leur place sans exagération mais sans faiblesse.
Un grand art musical a plané très haut ce soir à Toulouse. Le lendemain les forces Toulousaines se sont confrontées à l’acoustique encore inconnue de la Philharmonie de Paris. C’est très audacieux mais le succès sur place à Toulouse est de bon augure. Le public a chaviré pour cette oeuvre comme rarement tant toutes ses beautés ont été offertes ce soir.

Compte rendu, concert. Toulouse. Halle aux Grains, le 18 septembre 2014. Piotr Illich Tchaïkovski (1840-1893) : Concerto pour piano et orchestre n°1 en si bémol majeur, op. 23 ; Antonin Dvorak (1841-1904) : Symphonie n°9 en mi mineur « du Nouveau Monde » op.95 ; Behzod Abduraimov, piano ; Orchestre National du Capitole de Toulouse . Tugan Sokhiev, direction.

Behzod Abduraimov piano concertComme jamais, cette rentrée de l’Orchestre était très attendue. Salle comble et demandes de place non satisfaites sur petits papiers à l’entrée de la Halle aux Grains le prouvent. Ce n‘est pas seulement le programme comprenant deux Å“uvres phares du répertoire mais surtout une véritable impatience à retrouver notre orchestre et son chef qui a motivé cette fièvre. Comment ne pas le deviner, la liaison entre la ville, l’orchestre et son chef est à son zénith. Tugan Sokhiev dirige à Berlin et Moscou en plus de Toulouse ! Chacun mesure et la chance qui est la nôtre, et un prochain départ qui devient une évidence. Donc c’est la fête de la rentrée de l’orchestre et Catherine D’Argoubet a comme de bien entendu artistement choisi le pianiste complice de Piano aux Jacobins pour ce concert double. Signalons d’ailleurs que le jeune prodige Ouzbeke, Behzod Abduraimov, (notre photo) se produira aussi au Cloître des Jacobins mercredi 25 septembre en solo. Le premier Concerto de Tchaïkovski créé à Boston a toujours eu un succès publique considérable. Son début si puissant est inoubliable. Dans un tempo très retenu, Tugan Sokhiev, qui a le geste rare, donne une tension aux premiers accords qui relayés par le pianiste construit une interprétation à la théâtralité assumée. Suivant à la lettre les indications du compositeur, Tugan Sokhiev offre un vrai « Allegro non troppo et molto maestoso » ce qui permet au pianiste de nuancer considérablement son jeux. Le temps donné à la partition pour se déployer lui donne toute la puissance requise ; la tendresse n’en devient que plus émouvante. Les attitudes de Behzod Abduraimov sont celles d’un jeune homme passionné ne faisant qu’un avec son instrument, tour à tour le dominant, le caressant ou lui chantant la beauté de la vie. La délicatesse de certains touchers est très inhabituelle dans ce concerto virtuose qui permet des effets lisztiens extravertis. L‘écho délicat dont il est capable dans la cadence, les subtiles nuances et les sonorités variées promettent beaucoup et le concert de mercredi nous permettra d’approfondir la connaissance d’un interprète que je devine sensible et poétique plus que puissant et tonitruant. Savoir résister au coté démonstratif du Concerto n’est pas donné à tout le monde. Dans le deuxième mouvement, – Andantino simplice-, Tugan Sokhiev suit l‘indication à la lettre laissant flûte, bois et cors dialoguer en toute liberté avec le soliste qui se révèle très à l‘écoute des musiciens de l‘orchestre. La flûte de Sandrine Tilly fait merveille dans cette mélodie nocturne relayée par le violoncelle ambré de Sarah Iancu dans un beau dialogue avec le piano délicat de Behzod Abduraimov. La partie centrale plus rhapsodique et fantastique est délicatement nuancée et le retour du tendre thème au hautbois, cors et clarinette, est pure beauté des songes.

Sokhiev_Tugan_Tugan-Sokhiev2-credit-Mat-HennekLa battue modeste de Tugan Sokhiev laisse beaucoup de liberté aux musiciens. Le final caracole et la précision de l’orchestre fait merveille. Dans un gant de velours mais avec une tenue ferme du tempo, les gestes précis de Tugan Sokhiev dynamisent le mouvement, relançant l’intérêt. La vélocité des doigts de Behzod Abduraimov fait merveille mais sans jamais renoncer à de fines nuances. Le final enthousiasmant termine avec brio et le public après de nombreux rappels obtient un bis qui permet de deviner les qualités lyriques pleines de délicatesse du pianiste. Le nocturne de Tchaïkovski habilement choisi promet beaucoup en tous cas. La Symphonie du Nouveau Monde poursuit ce voyage d’Europe centrale aux Amériques. Grande œuvre, magnifiée par un grand chef et un grand orchestre : le public a été gâté. Sur Medici Tv, il est possible de réécouter cette superbe interprétation qui permet à tout l’Orchestre du Capitole de briller. Nuances bien creusées, puissance maitrisée, phrasés délicats et construction rigoureuse de tous les plans caractérisent cette interprétation. Tugan Sokhiev dirige avec bonheur une partition qui grâce à lui ne manque ni d’espace ni de couleurs. Le théâtre est présent et le public est transporté dans un beau voyage au final enthousiasmant. Le mouvement lent avec cette cantilène extatique du cor anglais ouvre un instant de pure poésie. La soliste, Grabielle Zaneboni, a un legato magique. Dvorak donne de beaux instants à chaque famille de l’orchestre et de magnifiques soli. Chaque musicien est engagé totalement et semble heureux. L‘orchestre est somptueux à chaque instant, capable de rendre à cette œuvre si célèbre des moments de surprise.
Le final a lui seul comble le plus exigeant par la délicatesse de sa construction. Un grand et beau concert d‘ouverture qui promet une saison magnifique. Le public qui l‘avait deviné, a été présent !

Compte rendu, concert. Toulouse. Halle aux Grains, le 18 septembre 2014. Piotr Illich Tchaïkovski (1840-1893) : Concerto pour piano et orchestre n°1 en si bémol majeur, op. 23 ; Antonin Dvorak (1841-1904) : Symphonie n°9 en mi mineur « du Nouveau Monde » op.95 ; Behzod Abduraimov, piano ; Orchestre National du Capitole de Toulouse . Tugan Sokhiev, direction.

Compte rendu, concert. Toulouse.Halle-aux-grains, le 4 juin 2014 ; Dimitri Chostakovitch (1906-1975): Katerina Ismaïlova,suite,op.114a; Piotr Illich Tchaïkovski (1840-1893) : Variations sur un thème rococo pour violoncelle et orchestre, op.33; Symphonie n°6 en si bémol mineur, op.74 « Pathétique »; Narek Hakhnazaryan, violoncelle; Orchestre National du Capitole de Toulouse; Direction:Tugan Sokhiev.

TchaikovskiAvant dernier concert de la saison toulousaine 2014 pour Tugan Sokhiev ; il a également été programmé à la Salle Pleyel à Paris, le lendemain. Belle audace parisienne car c‘est peut être le plus beau concert de la saison Toulousaine, pourtant riche en moments forts. Dès les premières mesures sombres au basson, l ‘auditeur est saisi par la puissance d’évocation des interludes du Chostakovitch magnifique orchestrateur. Ces très courts interludes de l ‘opéra lady Macbeth de Mzensk rebaptisé Katerina Ismaïlova sous les coups de la censure, mis en suite par le compositeur lui-même dans deux versions, font un effet particulièrement puissant. Le sens du grotesque, l’ écoeurement et le dégout de l’héroïne deviennent troublants. Humiliée et obligée de se venger pour survivre, l ‘héroïne qui a tant déplu à Staline a une existence qui ressemble à tant de vies communes…

Le troisième interlude le plus long et le plus sombre rend palpable cette montée du dégout et de la haine nourrie dans la conscience aiguë du grotesque de l ‘existence. L ‘Orchestre du Capitole est à présent rompu au style de Chostakovitch et les très courts moments solos permettent a chacun de briller. La précision rythmique, les nuances terriblement développées et la richesse de l ‘orchestration exigent beaucoup de l ‘orchestre qui est impeccable. La direction de Tugan Sokhiev privilégie l ‘énergie forcée et la puissance d’un grotesque faussement festif. Riches couleurs, nuances extrêmes et rythme précis claquent au visage et saisissent chacun.

Entre musiciens au sommet

Quel contraste ensuite lorsque l ‘orchestre s’allège dans une formation classique et accueille le violoncelliste soliste. Son nom, même s’il est quasi imprononçable mérite d’ être retenu. De tous le jeunes talents qui gagent avec des doigts d’ or les plus prestigieux prix, Narek Hakhnazaryan n ‘a rien à envier avec sa victoire au XIV° concours international Tchaïkovski. Il a une technique inouïe mais surtout une musicalité rare. Les variations rococo sont un chef d ‘oeuvre de Tchaïkovski qui rend hommage à Mozart, comme dans la pastorale de la Dame de Pique, avec beaucoup d ‘esprit.
L‘orchestration est légère et variée. L ‘équilibre entre le soliste et l ‘orchestre a été parfaitement mis en place par le chef. Dans cet écrin de toute sécurité, la voix du violoncelliste Narek Hakhnazaryan peut donc s’épanouir sereinement en se jouant des difficultés techniques totalement maîtrisées. En éveil constant et dégustant les dialogues avec l ‘orchestre, le jeune violoncelliste devient parfait chambriste. Les dialogues avec la subtile flûte de Sandrine Tilly sont délectables tout particulièrement. La communion entre le soliste, le chef et les musiciens est parfaite. Le public se régale de ces variations qui se succèdent avec art dans l‘arrangement maintenant habituel du créateur Fitzenhagen.

Narek-Hakhnazaryan-cello2-Armenia tchaikovski competition prix  2011-1Le charme du jeune Narek Hakhnazaryan est irradiant. Il joue avec son instrument semblant en faire ce qu‘il veut. Les couleurs, les nuances, la délicatesse des phrasés sont admirables. L ‘instrument dont il joue, un Techler de 1698, lui permet de garder sur tous les registres la même qualité de son. Le grave est aussi plein que l ‘aigu ; il n’y a pas de différence de registre. Une belle solution de continuité dans les harmoniques sur toute la tessiture offre un son toujours magnifiquement timbré, soyeux et doux. Cela fait merveille dans les dialogue sur-aigus aériens avec la flûte. Les doubles et triples cordes sonnent faciles et belles. Une telle générosité en musicalité est remarquable chez un si jeune artiste. La connivence avec Tugan Sokhiev est totale, les échanges de regards complices sont incessants. Le succès est tonitruant et le violoncelliste Arménien offre deux bis a son public conquis. Le premier déconcerte autant qu’il charme et émeut. La voix chantée du soliste se mêle à des doubles cordes semblant venir de l‘ancêtre de l ‘instrument, la viole de gambe, comme des origines orientales de la musique classique. L‘émotion qui nait plonge donc dans les racines de l’humanité, puis le style se modernise, devient plus violent et va même jusqu’à évoquer le tango. Il s’agit non d‘une vraie improvisation mais d’une composition d’un Italien né en 1962 Giovanni Sollima,intitulée Lamentatio. Narek Hakhnazaryan en fait un moment de pur plaisir du coeur dansant. Pour terminer sur une ambiance plus apaisée, le choix d’une sarabande pour violoncelle seul de Bach avec des ineffables doubles cordes, un son de rêve et une souplesse envoûtante… Tout ceci promet un jour une intégrale émouvante des suites de Bach et une carrière éblouissante à suivre sans faute.

2ème Symphonie de Tchaïkovski
Destin certes, mais pas de soumission sans danser ni vivre

En deuxième partie de concert la très célèbre sixième symphonie de Tchaïkovski confirme la compréhension quasi mystique qu’a Tugan Sokhiev de son compatriote. Quand si souvent cette symphonie est écrasée sous un Fatum monolithique, Tugan Sokhiev va très loin dans la douleur mais garde des moments de tendresse et de danse se souvenant du bonheur. Dès les premières mesures, pianissimo dans les abysses du basson (extraordinaire Estelle Richard) et des cordes graves l‘émotion est poignante.L’ Adagio est tout habité de silences tristes et l’angoisse se déroule évoluant lentement vers l’Allegro non troppo. Le tempo mesuré du chef permet une lisibilité de tous les détails mais c’est la vision d‘ensemble qui est remarquable. Chaque mouvement avance et s’inscrit dans un tout . La rigueur du tempo permet à cette partition d ‘éviter tout laissé aller et l’entrée du thème sentimental des violons a beaucoup d’allure. Les reprises et développements permettent aux couleurs magnifiques de l ‘orchestre de chatoyer. Les fortissimi sont spectaculaires et les nuances pianissimo de la Clarinette de David Minetti sont très belles et porteuses d ‘émotion. Après ce début marqué par une angoisse envahissante le mouvement se termine par une terrible course à l ‘ abîme toute pleine de précision instrumentale. Les cuivres graves particulièrement présents, sont magnifiques.Les deux mouvements suivants, dans les choix de Tugan Sokhiev, vont convoquer la danse et d ‘avantage de bonheur. Allégeant le Fatum, il suggère que chaque destin n’est pas uniquement soumission. L’allegretto con grazia est une valse qui permet de rêver au bonheur enfui près avoir été tenu. Certes sous cette légèreté le rythme incessant de la timbale dans la partie centrale signe l ‘éloignement du bonheur mais son retour comme une réminiscence est pleine de douceur. L’ Allegro molto vivace est plein d’ esprit comme dans les ballets de Tchaïkovski et l ‘avancée inexorable de ce scherzo vers une sorte de marche a aussi quelque chose de plaisant dans son enthousiasme. La légèreté de structure des cordes, l ‘élasticité des pizzicati apportent de l ‘air aux moments plus denses. Ce mouvement animé se termine sur un fortissimo qui autorise certains spectateurs à applaudir ruinant l ‘effet voulu par le compositeur qui termine sa symphonie sur un adagio lamentoso. Car si le centre de la symphonie a permis aux mouvements de danse de s’inviter et au bonheur d’exister le final semble encore plus déchirant. Tugan Sokhiev étire le tempo et remplit les silences de sombres pensées. Tchaïkovski qui trouvait dans sa symphonie des allures de Requiem refusant d’en composer un, a en effet construit ce long mouvement final comme un adieu déchirant. Le pianissimo dans le grave des cordes et le basson refermant la symphonie comme elle avait été ouverte. Les contrebasses ont été tout du long admirables et méritent une mention spéciale (chef de pupitre Bernard Cazauran).
Cette interprétation très personnelle est très bien construite et la lisibilité de la structure générale s’appuie sur des phrasés pensés et comme insérés dans un tout. En évitant le monolithe dramatique, le destin devient plus humain et la vie des deux mouvements centraux rend le final encore plus écrasant. Tugan Sokhiev et ses musiciens admirables toute la soirée, ont offert une vibrante interprétation de la sixième symphonie de Tchaïkovski en en révélant toutes les richesses.

Ce concert a été diffusé en direct sur le net et peut être encore visionné. N’hésitez pas à vous faire votre idée car il a été en plus magnifiquement filmé sur Arte concert.

Compte rendu, opéra. Toulouse.Théâtre de Capitole, le 14 mars 2014. Pietro Mascagni (1863-1945): Cavalleria Rusticana; Ruggero Leoncavallo (1858-1919): Paillasse. Nouvelle production du Capitole. Yannis Kokkos: mise en scène. Tugan Sokhiev, direction

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Si l’association de Cavalleria et Paillasse ne brille certes pas par l’originalité, il faut reconnaitre que l’efficacité du dispositif toulousain est totale. Impossible de résister à Toulouse à cette version magnifique des deux opéras en un acte. Il est certain que le concision et la concentration obtenue par cette contrainte ont mobilisé le meilleur génie de chacun des compositeurs dont aucun des autres opéras n’a obtenu le succès de ce duo étrange. Et lorsque tous les moyens sont utilisés le résultat est là. Cavalleria Rusticana ouvre la soirée avec, dès les premières mesures de son magnifique prélude, la certitude de vivre un grand moment de musique. L’orchestre a des sonorités d’une plénitude symphonique inhabituelle au fond d’une fosse. Les cordes en particulier sont brillantes autant qu’émouvantes dans les longues phrases de Mascagni.

 
 

Mascagni : Bravo, bravissimo ! …

 

Tugan Sokhiev est un orfèvre qui tout au long de la soirée a à coeur de rendre le drame autant que la beauté plastique des partitions. C’est dans Cavalleria que sa direction précise et souple fait merveille offrant toutes les beautés de la partition, ciselées et irrésistibles jusque dans la manière d’assumer une forme de grandiloquence. Portés par une telle beauté, les artistes chantent avec une grande élégance et une tenue inhabituelle dans ce répertoire. Le Turrido de Nikolai Shukoff est époustouflant de présence et l’acteur sait rendre le tourment qui habite ce rôle plus complexe qu’il n’y parait. Vocalement le ténor a des moyens considérables (ceux d’un véritable heldenténor) qu’il adapte parfaitement à l’opéra italien. Face à lui la Santuzza d’Elena Bocharova a un jeu plus conventionnel mais surtout un engagement vocal si considérable qu’elle évoque un peu la projection droite et volcanique dont était capable Fiorenza Cossoto. Leur duo est marqué par une théâtralité associant un jeu très physique et un engagement vocal sans limites. Aucun des deux chanteurs, ne ménageant pourtant jamais sa voix, n’est pris en défaut. La Mamma Lucia d’ Elena Zilio est à la fois présente vocalement dans les ensembles, ce qui face aux héros aux voix de stentor n’est pas rien, et très émouvante dans ces très courtes interventions face à Santuzza et Turridu. André Heyboer en Alfio est capable de rendre perceptible toute l’humanité de son personnage un peu sacrifié. Vocalement il sait tenir face à toute les exigences du rôle avec une voix pleine et sûre. La Lola de Sarah Jouffroy est aguicheuse à souhait.
L’orchestre durant tout l’opéra a une place très importante offrant un miroir à l’âme si tourmentée de Santuzza. La beauté sonore est totalement captivante ainsi que le drame dont Tugan Sokhiev met en valeur chaque instant. L’Intermezzo restera longtemps dans les mémoires. La production de Yannis Kokkos qui assure mise en scène, décors et costumes, est très cohérente respectant les didascalies. La Sicile archaïque et religieuse est présente avec une église très écrasante et des escaliers habiles pour les mouvements de foule. Un travail très respectueux qui mobilise le drame a chaque moment.

Les mêmes éléments de décors sont utilisés pour Paillasse, la place de l’église servant de scène pour les saltimbanques. Là c’est l’engagement dramatique et théâtral de Tugan Sokhiev qui porte la partition à l’incandescence du drame le plus implacable. La folie meurtrière qui s’empare de Canio, obligé de jouer son tourment privé sur scène arrache des larmes dans son implacabilité. Le ténor géorgien Badri Maisuradze, habitué du Bolchoï, a tout à la fois une voix puissante et parfaitement maitrisée et un engagement scénique quasi viscéral qui convient parfaitement à ce personnage si malheureux, incapable de résister à sa violence. La performance vocale est à la hauteur de son jeux. La Nedda de Tamar Iveri est un papillon pris au filet qui n’arrivera pas à s’ échapper malgré son courage et sa détermination. La composition de la cantatrice, habituée aux rôles nobles et tristes, la rend méconnaissable de légèreté. Son art vocal lui permet avec délicatesse de vocaliser comme d’exprimer puissamment ses sentiments et sa révolte. En Tonio, Sergey Murzaev est très troublant capable de la plus grande vilénie comme d’un émotion noble dans le prologue.
C’est vraiment le théâtre qui domine Paillasse dans cette interprétation qui avance inexorablement vers le drame final. Avec cette éternelle question du jeu social si difficile à tenir dans les moments de tourments personnels, le théâtre dans le théâtre pirandellien dans Paillasse fait toujours son effet fulgurant. Les très belles lumières nocturnes de Patrice Trottier s’ajoutent à la cohérence du travail de Yannis Kokkos. Les choeurs dont la maîtrise sont très efficaces dans leurs courtes interventions et d’une belle présence scénique.

 

Drame et passions se sont développés avec puissance pour un public pris par les beautés de ces partitions envoûtantes. Chacune a retrouvé une noblesse irrésistible sous la baguette de Tugan Sokhiev dans une production belle et respectueuses des éléments consubstantiels aux mélodrames. Un grand succès pour cette production capitoline !

Toulouse.Théâtre de Capitole, le 14 mars 2014. Pietro Mascagni (1863-1945): Cavalleria Rusticana; Ruggero Leoncavallo (1858-1919): Paillasse. Nouvelle production du Capitole. Yannis Kokkos: Mise en scène, décors et costumes; Patrice Trottier : Lumières; Anne Blancard : Dramaturgie. Avec : Elena Bocharova, Santuzza; Sarah Jouffroy, Lola; Nikolai Schukoff, Turiddu ; André Heyboer, Alfio; Elena Zilio, Mamma Lucia; Badri Maisuradze, Canio ; Tamar Iveri, Nedda; Sergey Murzaev, Tonio; Mikeldi Atxalandabaso, Beppe ; Mario Cassi, Silvio. Chœur et Maîtrise du Capitole, Alfonso Caiani direction; Orchestre national du Capitole. Tugan Sokhiev, Direction musicale.

 

Illustration : © P. Nin 2014

 
 

Compte rendu, opéra. Toulouse.Halle-aux-Grains, le 3 février 2014. Modest Moussorgski (1839-1891) : Boris Godounov (version 1869). Ferrucio Furlanetto, Boris… Tugan Sokhiev, direction.

Le sacre lumineux de Tugan Sokhiev. Il est incontestable que les astres protègent Tugan Sokhiev et confirment ses choix. Pouvait-il imaginer en choisissant de diriger en février 2014 Boris à Toulouse, Paris et en Espagne qu’il viendrait d’être nommé directeur musical du Bolchoï ? Tugan Sokhiev porte dans ses veines une absolue passion pour l’âme slave. Il a éduqué le public toulousain depuis ses débuts en lui proposant des interprétations vibrantes des symphonies, opéras et ballets russes. Ce soir, soir de fièvre sur scène et dans le public, tout se jouait de la légitimité de Tugan Sokhiev qui n’a pas encore 40 ans car nombreux sont ceux qui le considère comme l’un des plus grands chefs actuels, avec un potentiel encore méconnu mais perceptible.  Le chœur basque, l’Orfeon Donostiarra,  mi professionnel mi amateur est bien connu des toulousains. Le voir s’installer sur scène rappelle tant de bons souvenirs, Requiem de Verdi et de Brahms en particulier, et promet beaucoup. Le rituel de l’entrée des musiciens de l’orchestre permet de découvrir la formation du soir car à présent l’orchestre est assez nombreux pour permettre deux concerts le même soir et de varier les musiciens. Tout le monde s’installe et tous attendent l’entrée du chef.

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Simple, concentré et souriant Tugan Sokhiev adresse un regard circulaire à ses musiciens, choristes et chanteurs. Il ne prend pas sa baguette et dirige à main nue cette vaste partition. On ressent immédiatement son amour pour une musique âpre, sauvage, abrupte dans ses nuances et riches d’accords surprenants de modernité. La direction de Tugan Sokhiev est de tout son corps, son engagement est total mais ce sont ces mains qui créent le son, le sculptent, le malaxent. La beauté de cette direction est faite danse, énergie, émotion canalisée. Il a des yeux partout et donne chaque entrée, murmurant souvent le texte russe (surtout celui du chœur). Il semble connaître la partition par cœur et préparer chaque moment étonnant pour surprendre le public. Ainsi la disposition habile des cloches saisi de stupeur plus d’un dans la salle. Chaque chanteur, choriste ou soliste est accompagné dans ses lignes, chaque instrumentiste concerné par cette direction enveloppante. Chacun donne donc le meilleur de lui-même et le résultat est ahurissant. La rigueur alliée à la souplesse caractérisant la direction de Tugan Sokhiev apporte une étonnante clarté dans cette partition si sombre dont la structure nous apparaît dans toute sa beauté.

La version des origines, interprétée sans entractes ( deux heures qui semblent légères) rend justice à la cohérence artistique intègre de Moussorgski et il est perceptible qu’il a dû lui couter d’ajouter l’acte polonais pour le « grand rôle féminin » et les ballets qui en affadissant le propos. Cet opéra est en fait un monument d’histoire et d’intelligence. Le pouvoir, ici en Russie (chez un homme qui veut devenir Tsar par tous les moyens) détruit l’âme. Mais de tous temps et partout dans le monde l’homme ne peut s’empêcher de courir à sa perte morale en cherchant toujours plus de pouvoir. Boris va juste un peu trop loin et sa chute concerne en fait tous les puissants. Ses remords sont celles d’un homme qui retrouve une introspection qui l’humanise à nouveau.
Pour ce Boris, ce vrai Boris de Moussorgski, Tugan Sokhiev a réuni une distribution sans faiblesse. C’est toutefois Ferruccio Furlanetto qui, sans entracte rappelons le, incarne scéniquement et vocalement toute la richesse de ce rôle. La voix est grande, la projection parfaite, la matière vocale est noble. Le vibrato est parfaitement contrôlé et le legato digne du bel canto. La rondeur de la voix, les couleurs et la gestion de la dynamique des nuances donnent une leçon de chant permanente. La diction est limpide et l’engagement de l’artiste qui chante par cœur est total. Il n’est pas surprenant avec de si grandes qualités, que la basse italienne ait conquis le public si exigeant du Mariinski comme du Bolchoï dans ce rôle écrasant.  L’intelligence de cette interprétation permet une véritable évolution psychologique toute en finesse du personnage délirant qui est au final si humain . Si humain en confondant la recherche de pouvoir et d’amour.
Il n’est pas possible sans lourdeurs de parler de chaque chanteur. Tous ont été engagés de toutes leurs forces dans cette soirée. Avec ou sans partitions… Distinguons la basse Ain Anger, Pimène de la plus belle autorité morale. Comme Fulanetto, il est un grand Philippe II. A coté des ces sommets qui permet d’entendre deux des plus grandes basses du moment il faut distinguer les ténors qui avec la lumière de leurs timbres apportent un contraste bienvenu. L’innocent de Stanislav Mostovoi est saisissant d’émotion. Marian Talaba est un jeune ténor prometteur et son engagement dans le rôle de Grigori est notable. Anastasia Kalagina est une Xénia touchante  avec un beau métal dans le timbre. Sarah Jouffroy et Hélène Delalande ajoutent leur féminité dans cet univers si noir avec efficacité. Alexander Teliga en Varlaam est également inoubliable de présence.
Le Chœur Orfeon Donostiarra est imposant en nombre et peut donc impressionner dans les scènes grandioses. Mais c’est dans les moments plus divisés que la beauté des pupitres s’exprime le mieux, tant dans les choeurs d’hommes que de femmes.
Le public a été embarqué dans un voyage dans l’espace et le temps. Géographiquement, en Russie. Dans les temps d’avant les lumières humanistes. C’est peut être le voyage intime de l’homme de pouvoir qui se réveille à l’humanité de sa condition qui est le voyage le plus édifiant. La version noire, âpre et sauvage des origines a retrouvé sa splendeur ce soir. En version de concert sans entracte, rien ne distrait le public de son théâtre intérieur.
Tugan Sokhiev, maître d’oeuvre de ce projet offre une vraie réhabilitation du chef d’ouvre de Moussorgski. Un enregistrement serait bienvenu pour se souvenir de cette merveilleuse interprétation et en analyser les détails. Paris et l’Espagne vont bénéficier de cette émotion musicale inouïe, made in Toulouse.

Toulouse. Halle-Aux-Grains, le 3 février 2014. Modest Moussorgski (1839-1891) : Boris Godounov, version originale de 1869. Version de concert. Ferruccio Furlanetto : Boris ; Anastasia Kalagina : Xénia ; Ain Anger : Pimène ; Vasily Efimov : Missail ; Stanislav Mostovoi : L’Innocent ;  John Graham-Hall : Prince Shuisky ;  Garry Magee : Andrei Tchelkalov ;  Pavel Chervinskiy : Nikitch, Mityukha ;  Alexander Teliga : Varlaam ; Marian Talaba : Grigori ; Svetlana Lifar : Fiodor ; Sarah Jouffroy : La Nourrice de Xeni ;   Hélène Delalande : L’Aubergiste ;  Vladimir Kapshuk : Un Boyard ; ChÅ“ur Orfeon Donostiarra : chef de chÅ“ur, José Antonio Sáinz Alfaro. Orchestre National du Capitole de Toulouse ; Tugan Sokhiev : direction.

Illustration : © P. Nin

Tugan Sokhiev nommé directeur musical du Bolchoï à Moscou

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Tugan Sokhiev nommé directeur musical du Bolchoï à Moscou

 

Sokhiev_Tugan_Tugan-Sokhiev2-credit-Mat-HennekLe chef d’orchestre d’origine Ossète Tugan Sokhiev (36 ans) qui continue de faire les beaux soirs du Capitole de Toulouse (en tant que directeur musical depuis 2008) vient d’être nommé directeur musical du Théâtre du Bolchoï à Moscou. Sa prise de fonction est immédiate mettant fin à une série de scandales et d’incidents malheureux survenus au Bolchoï dont les derniers rebondissements restent le renvoi du danseur étoile Nikolaï Tsiskaridzé (accusé d’avoir organisé l’attaque à l’acide du directeur artistique), puis le départ précipité de son ancien directeur musical Vassili Sinaïski (66 ans) en décembre 2013. Le contrat de Tugan Sokhiev au Bolchoï est d’une durée de quatre ans, soit jusqu’en 2018.