CD événement, critique. CECILIA BARTOLI : QUEEN OF BAROQUE (1 cd DECCA – 1991 – 2017)

baroque opera classiquenews review cd critique cd clic de classiquenews Cecilia-Bartoli-queen-of-baroque-critique-opera-decca-classiquenewsCD événement, critique. CECILIA BARTOLI : QUEEN OF BAROQUE (1 cd DECCA – 1991 – 2017) – L’impératrice de la vocalità baroque s’expose en couverture, telle une vraie souveraine, à Versailles ou à Vienne, fardée, maquillée, perruquée : la diva des divas baroques confirme par cette collections de mélodies qu’elle est bien indétrônable en matière de perles lyriques. Sur les terres des auteurs d’opéra du XVIIIè (moins du XVIIè), la signora Bartoli rayonne toujours. Le programme royal comprend 17 airs, tous investis, traversés par d’étonnants vertiges et contrastes émotionnels. Soit une compilation d’arias déjà connus et enregistrés, mais il a aussi le luxe de l’inédit : les 2 premiers extraits, jamais édités sont ici réalisés en « première mondiale » : (Trionfi del fato d’Agostino Steffani, puis Alessandro nell’ India de Leonardo Vinci).

 

 

 

Ardeur et gravité, véhémence et agilité

L’Alchimie BARTOLI à son zénith

 

 

CLIC_macaron_2014Le chant ardent, vibratile, très incarné et volubile (agilità du Steffani d’ouverture de 2012) s’affirme nettement par sa plasticité, sa véhémence, son agilité. De fait tout récital qui se respecte comporte un « sommet d’agilità » révélant et déployant la coloratoura et l’intensité dramatique de la prima donna : ainsi les deux arias les plus longs (enregistrés en 2009) soulignent la place de deux Napolitains dans cette arène d’excellence : Carlo Broschi (Artaserse : festival de pyrotechnie vocale, roulades et mélismes coulant à flot) et Niccolo Porpora : air déchirant d’Arminio « Parto, ti lascio, o cara » du Germanico, ample lamento d’expression tragique dont la couleur sombre sied particulièrement bien au mezzo velouté et tendu à la fois de « La Bartoli » : ses qualités introspectives comme de délire virtuose s’y accomplissent sans contraintes. Car le miracle opère toujours, fusionnant deux qualités ailleurs irréconciliables : le délire virtuose et la gravité tragique. Le cas Bartoli est condensé dans ses deux airs… avec certainement l’accomplissement des Haendel et du désormais égal, Steffani dont la cantatrice avait fait son compositeur fétiche dans un album demeuré célèbre (pour sa couverture aussi où elle paraissait en homme chauve, pistolet en main !). Le clou de cette alchimie volubile reste à notre avis, l’air de l’ange aux portes des enfers (« Disserratevi, o porte d’Averno », temps fort de l’oratorio la resurrezzione de Haendel) air de triomphe et d’imprécation spectaculaire d’une agilité sans pareille et d’une véhémence là encore… hallucinée : aucun doute, Bartoli est à son aise dans le théâtre des passions baroques. CD événement, CLIC de CLASSIQUENEWS Noël 2020. Durée : 1h18mn.

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CD événement, critique. CECILIA BARTOLI : QUEEN OF BAROQUE (1 cd DECCA – 1991 – 2017)

COMPTE-RENDU, critique. PARIS, le 15 déc 2019. Récital Cecilia Bartoli : FARINELLI (Musiciens du Prince / G Capuano).

farinelli cecilia bartoli fall septembre 2019 annonce cd review critique classiquenews DECCA cd critiqueCOMPTE-RENDU, critique. PARIS, le 15 déc 2019. Récital Cecilia Bartoli : FARINELLI (Musiciens du Prince / G Capuano). A Paris, la mezzo romaine Cecilia Bartoli incarne le légendaire Farinelli, accompagnée de ses « Musiciens du Prince » sous la baguette du chef baroque, Gianluca Capuano (lequel avait réalisé avec le duo Caurier / Leiser, un Couronnement de Poppée / Incoronazione du Poppea de Monteverdi, mémorable à l’Opéra de Nantes oct 2019).

La diva ne paraît pas grimée en homme barbu, – testostéronée telle qu’elle pose en couverture de son cd FARINELLI édité début novembre 2019 chez Decca… Dommage. Mais pour mieux exprimer la charge hautement dramatique de chaque rôle, la diva comédienne, sait changer de costumes selon les airs sélectionnés, profitant des « pauses » purement instrumentales, qui rythment aussi le récital parisien.

La majorité des épisodes lyriques sont extraits du cd Farinelli : ils ont tous été chanté par le divo au XVIIIè signés des compositeurs les plus importants dans l’histoire des castrats : Haendel, Porpora, Caldara Vinci, Hasse, les moins connus Caldara et Giacomelli. Castrat oblige, la manière napolitaine triomphe : toujours plus haut, toujours plus rapide ; la virtuosité bataille avec l’agilité ; la versatilité des sentiments, avec la souplesse parfois contorsionnée de la ligne vocale.

 

 

 

PARIS, BARTOLI, FARINELLI

 

 

 

Bartoli engage un récital passionnant avec ses moyens actuels : moins agiles, moins naturellement brillants, mais plus rauques parfois, avec une couleur sombre générale qui enrichit son médium et rend ses aigus d’autant plus intenses, voire tendus, toujours d’une fragilité maîtrisée, comme sont ses phrasés, et sa compréhension du legato, souverains. Travestie (Imeneo de Porpora), la chanteuse trouble par ce grain vocal d’une mâle et souple expressivité qui exprime l’enivrement amoureux.
Elle joue avec sa voix, mais jamais ne perd le fil dramatique ni le sens et le caractère de chaque personnage comme de chaque situation ; elle est, tragique et noble, Cléopâtre (Hasse et Haendel) ; tendre et d’une douceur caressante et pastorale (« Augeletti », Rinaldo de Haendel) ; saisissante et frissonnante dans l’ample prière sombre de « Sposa, non mi conosci » (Merope de Giacomelli, vraie révélation entre autres).
La future directrice de l’Opéra de Monaco (à partir de 2023) démontre l’intelligence vocale et dramatique, l’attention au texte, le souci de la cohérence et du sens de l’intonation que peu de divas actuelles maîtrisent avec autant de nuances. Aujourd’hui, l’évolution de la voix de la diva correspond au choix des airs de ce programme : Farinelli castrat soprano était connu pour sa couleur étonnamment sombre, riche et percutante dans les airs de langueurs funèbres, les prières tragiques et intérieures, supposant souffle et perfection de la ligne. Même constat et diagnostic pour Cecilia Bartoli dont l’intelligence du chant subjugue toujours. Jusqu’au jeu des instrumentistes dont la tenue (Concertos et Sinfonie) est impeccable, en fluidité comme en rebonds.
La caresse enveloppante « vivaldienne » de Merope de Broschi (Riccardo, frère de Farinelli qui s’appelait aussi Carlo Broschi) s’avère ici des plus bouleversantes, à la fois implorante et d’une tendresse déterminée.
Les interprètes sont riches en bis, à la mesure de leur complicité et de leur talent vers le public : tous communient enfin avec Haendel (Ode for St. Cecilia’s Day et surtout,  « Dopo notte » de l’opéra Ariodante), et l’époustouflante et trépidante aria de Porpora (Adelaide). Avec ses consœurs Vivica Genaux et récemment Ann Hallenberg, Cecilia Bartoli s’impose comme l’une des meilleures voix farinelliennes de l’heure. Un nouveau succès pour son dernier disque.

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COMPTE-RENDU, critique. PARIS, Philharmonie (Salle Boulez), le 15 déc 2019. Récital Cecilia Bartoli : FARINELLI (Musiciens du Prince / G Capuano)

LIRE aussi nos premières impressions critiques du cd FARINELLI / Cecilia BARTOLI (Decca)
http://www.classiquenews.com/cd-evenement-premieres-impressions-farinelli-cecilia-bartoli-1-cd-decca/

 

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VIDEO Farinelli Cecilia Bartoli

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CD, événement, premières impressions. FARINELLI : CECILIA BARTOLI (1 cd DECCA)

farinelli cecilia bartoli fall septembre 2019 annonce cd review critique classiquenews DECCA cd critiqueCD, événement, premières impressions. FARINELLI : CECILIA BARTOLI (1 cd DECCA). Annoncé début novembre 2019, c’est le cd de tous les défis pour la mezzo italienne qui s’affiche en double de Conchita Wurst, ou du Christ barbu … accusant le travestissement que suppose son emploi comme ses nouveaux « exploits » : retrouver la couleur vocale des castrats du XVIIIè, ces chanteurs castrés à Naples dont les effets de gorges ont ébloui les opéras baroques signés Porpora, Broschi, Haendel et autres… Sur les traces du castrat Carlo Broschi dit Farinelli (1705 – 1782), la diva Bartoli met l’accent sur la virtuosité, le timbre spécifique – ambivalent et droit-, la faculté à incarner un personnage… Ici, avec des moyens plus réduits, une émission moins brillante (et des aigus plus tendus), la diva romaine, Cecilia Bartoli réussit néanmoins à convaincre grâce à la justesse de l’intonation, la profondeur convaincante de ses incarnations, une fragilité dans la tenue du timbre. Son chant intense et sombre brille en particulier dans les emplois tragiques (Cléopâtre…). Un air nous semble se distinguer par sa force dramatique et la coloration tragique infinie que l’interprète est capable d’y déployer (« Lontan… Lusingato dalla speme », extrait du Poliphemo de Porpora : sorte de lamento de 8mn au coeur du programme) : la coloratoura se pare de mille nuances expressives qui colorent avec finesse, une incarnation qui soupire et sombre dans la mort et le renoncement. Un absolu irrésistible et l’un des joyaux de ce nouveau récital lyrique édité par DECCA.

 

 

premières impressions

divine CECILIA BARTOLI …
sur les traces de l’ange Farinelli

 

 

 

 

Bartolomeo Nazarie - Portrait of Farinelli 1734 - Royal College of Music LondonAinsi ressuscite le chant de Farinelli, ce maître chanteur qui jusqu’à la fin de sa vie sut envoûter les grands de son époque dont les souverains espagnols à Madrid alors que Domenico Scarlatti était le maître de clavecin atitré. Un âge d’or du beau chant permis aussi par l’inspiration d’un compositeur napolitain de première valeur, Nicola Porpora, -né en 1686, vrai rival de Handel à Londres dans les années 1730, et qui dans ce récital très attendu a la part belle : pas moins de 5 airs ici sur les 11, dont 3 sont extraits de Poliphemo ; n’est-il pas avec le frère du chanteur vedette – Riccardo Broschi, le compositeur préféré de Farinelli ? De toute évidence fidèle à son travail de défrichement, Ceilia Bartoli pousruit l’exhumation de signatures virtuoses pour l’opéra ; hier, il s’agissait de Steffani. Aujourd’hui, jaillit le diamant expressif et dramatique de Porpora, professeur de chant à Naples des castrats Farinelli, Senesino, Porporino…, adulé à Londres, maître de Haydn, mort oublié en 1768 (à 81 ans). La diva romaine sait rendre hommage à travers ce portrait vocal de Farinelli à Porpora, génie napolitain dans le genre seria.

Voici nos premières impressions avant la grande critique du cd FARINELLI à paraître le 8 novembre 2019.

1 – Porpora / Polifemo : air d’exaltation et de jubilation comme d’espérance amoureuse (éclairé par les trompettes victorieuses) où s’affirme l’agilité acrobatique de la voix coloratoure.

2 – Porpora / La Festa d’Imeneo : plus intérieur, comme enivré par un rêve amoureux, l’air rappelle la maîtrise du souffle et la lisibilité comme la tenue de la ligne vocale, aux couleurs d’une tendresse extatique / expression d’un ravissement (« Vaghi amori, grazie amate »), déjà entendue dans le film Farinelli.

3 – Hasse : Marc’Antonio e Cleopatra. La mezzo exprime les vertiges d’une amoureuse trahie, en fureur, prête à mourir sur le trône. Le portrait d’une Cléopâtre qui assène par vocalises et coloratoure ascensionnels, l’intensité de sa colère et l’ampleur de sa détermination,à la fois héroïque et déjà fatale. Dans cet emploi de femme forte, passionnelle, exacerbée, radicale, « La Bartoli » captive par son chien et son abattage dramatique. La justesse de sa couleur et du caractère vocal s’imposent naturellement.

FARINELLI-cecilia-bartoli-classiquenews-cd-critique-review-farinelli-cecilia-bartoli-fall-septembre-2019-annonce-cd-review-critique-classiquenews-DECCA-cd-critique4 – Porpora / Polifemo : « Lontan… lusingato dalla speme ». Voilà assurément comme on l’a dit précédemment, le joyau du programme (et qui nuance l’image d’un Porpora uniquement virtuose et acrobatique). Contraste oblige, à la fureur de Cléopâtre (de Hasse qui précède) répond la tendresse de cet air plus intérieur, dont la couleur est celle d’une âme touchée au cÅ“ur… tel un rossignol qui soupire. Ce positionnement vocal dans le medium grave et sombre s’amplifie encore dans l’air, long lui aussi plus de 8 mn de Giacomelli : « Mancare o Dio mi sento » (Adriano in Siria, plage 7).

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Notons parmi les autres perles de ce récital événement : La morte d’Abel de Caldara : « Questi al cor finora ignoti » / Ces cœurs inconnus jusqu’à présent… prière épurée comme une extase dans la mort et d’une couleur elle aussi sombre qui fait surgir le relief du texte.

HASSE : Marc Antonio e Cleopatra : « A Dio trono, impero a Dio » (plage 10). Le relief du recitatif et l’ampleur dramatique, la couleur tragique de l’air qui suit, exprime cette échelle des passions d’une irrépressible intensité qui va crescendo et qui s’accomplit, entre imprécation et combat, rage et ardeur hallucinée, dans l’architecture des vocalises, portées par la coloratoure de la mezzo romaine. Un parlé chanté : « Addio trono… » qui témoigne de la résistance de la reine à renoncer. Bartoli ne chante pas, elle incarne et exprime avec une intelligence du texte (ce que ne font pas la majorité de ses consœurs)

et la fin : Porpora : Polifemo : « Alto Giove », rendu célèbre par le même film Farinelli. Parce qu’il y faut maîtriser l’intensité et la longueur du souffle, une spécialité de Farinelli, outre sa couleur étonnamment sombre pour un castrat soprano). Sans omettre l’ambitus de la tessiture (jusqu’à 3 octaves et demi) et qui dans la bande originale du film cité, exigeait deux chanteurs (soprano et contre ténor). Cecilia Bartoli personnifie l’épaisseur du personnage ; creuse l’interrogation en suspension de la souveraine atteinte.

Un nouveau programme qui s’annonce d’autant plus réussi que support idéal aux lignes tragiques de la diva diseuse, si proche du texte, les instrumentistes d’Il Giardino Armonico, sous la direction de leur fondateur et directeur musical Giovanni Antonini, suivent les pas de la tragédienne qui articule, nuance en mille demi teintes graves, hallucinées, la charge émotionnelle de chaque texte. Un continuo essentiellement composé de cordes, où les cuivres et les bois sont rares. A suivre. Grande critique le jour de la parution du cd FARINELLI par CECILIA BARTOLI, annoncé le 8 nov 2019.

 

 

 

farinelli cecilia bartoli fall septembre 2019 annonce cd review critique classiquenews DECCA cd critique

 

 

 

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LIRE aussi notre annonce du cd FARINELLI par CECILIA BARTOLI

 

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 Farinelli jeune (DR)

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CD événement, annonce. FARINELLI par CECILIA BARTOLI (DECCA, 8 nov 2019)

CD événement, annonce. FARINELLI par CECILIA BARTOLI (DECCA, 8 nov 2019)… Le nouveau disque de la mezzo romaine CECILIA BARTOLI est dédié au castrat légendaire Farinelli, soliste d’exception, champion de la troupe de Porpora à Londres dans les années 1730, au grand dam de Haendel son rival qui ne pouvait lui compter que sur le lustre virtuose du castrat Caffarelli… Après des récitals titres défendus par ses confrères Jaroussky, surtout Vivica Genaux ou Ann Hallenberg, vraies tempéraments pour ce répertoire riche en acrobaties vocales, Cecilia Bartoli prolonge dans ce nouveau programme « FARINELLI » (annoncé le 8 novembre 2019), son précédent album intitulé SACRIFICIUM (2009) où la diva dénonçait le sort de milliers de garçons à Naples, soumis à l’épreuve ignoble et dangereuse de la castration.
Après la dénonciation (2009), voici le temps de la … jubilation (soit 10 ans plus tard), celle incarnée par celui qui incarne l’âge d’or du beau chant napolitain du XVIIIè et qui fut adulé tel un dieu vivant à la Cour de Madrid où à l’invitation de la Reine Isabelle, Farinelli chantait uniquement pour le souverain Philippe V, dépressif et malade.. (deux airs de l’Artaserse de Hasse… chaque soir) puis pour Ferdinand VI, sa voix ayant gagné en profondeur et gravité, arborant moins d’artificielle virtuosité.

farinelli cecilia bartoli fall septembre 2019 annonce cd review critique classiquenews DECCA cd critique10 ans après SACRIFICIUM… Sur la cover de l’album, Cecilia Bartoli paraît travestie en homme mûr et brun, latin, barbu… ce qui n’a pas manqué de susciter de vives réactions… La diva italienne a semé le trouble parmi ses fans, certains en mal de références plus anciennes, n’hésitant pas à comparer son visage à celui du chanteur travesti autrichien Conchita Wurst. Alors Cecilia farinellisée serait-elle plus Wurst ou christique ? Vaine polémique pour celle qui s’exhiba crâne chauve et pistolet dégainé quand il fallait légitimement ressusciter le génie du compositeur baroque Agostino STEFFANI, (CD « MISSION » 2012) ; s’agissant aussi d’une diva habituée à se travestir comme actrice dans maintes productions lyriques… En réalité, son nouveau look barbu syriaque n’a rien à voir avec les portraits officiels de Farinelli, plutôt très soigné, perruqué, poudré… De toute évidence, la cantatrice n’en est pas à sa dernière transformation. Ce qui compte reste la qualité et la pertinence de sa lecture des airs pour Farinelli, là où tant d’autres chanteurs se sont risqués. Vivaldienne et Gluckiste, Haendélienne et Steffanienne, la diva de tous les défis, relèvera-t-elle celui de Farinelli ? Réponse dans notre prochaine critique à venir dans le mag cd dvd livres de classiquenews, d’ici début novembre 2019. Et peut-être avant, en avant-goût, nos premières impressions du cd reçu, avant la grande critique développée… A suivre…

 

 

 

 

 

Programme annoncé : 12 airs des opéras de Brischi, Porpora, Giacomelli, Caldara, Hasse…

‘Nell’attendere mio bene’ from Polifemo by Porpora

‘Vaghi amori, grazie amate’ from La festa d’imeneo by Porpora

‘Morte col fiero aspetto’ from Marc’Antonio e Cleopatra by Hasse

‘Lontan… Lusingato dalla speme’ from Polifemo by Porpora*

‘Chi non sente al mio dolore’ from La Merope by Broschi

‘Come nave in ria tempesta’ from Semiramide regina dell’Assiria by Porpora

‘Mancare o Dio mi sento’ from Adriano in Siria by Giacomelli

‘Si, traditor tu sei’ from La Merope by Broschi*

‘Questi al cor finora ignoti’ from La morte d’Abel by Caldara

‘Signor la tua Speranza… A Dio trono, impero a Dio’

from Marc’Antonio e Cleopatra by Hasse

‘Alto Giove’ from Polifemo by Porpora

* world premiere recording

 

 

farinelli cecilia bartoli fall septembre 2019 annonce cd review critique classiquenews DECCA cd critique

 

 

 

A propos de Farinelli et l’art des castrats…
LIRE aussi sur Classiquenews

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CD SACRIFICIUM (DECCA, 2009)
http://www.classiquenews.com/cecilia-bartoli-sacrificium2-cd-decca/

CD MISSION : Agostino STEFFANI (DECCA, 2012)
http://www.classiquenews.com/cecilia-bartoli-chante-agostino-steffani1-cd-mission-decca/

CD, compte rendu critique. FARINELLI, a portrait / un portrait, par Ann Hallenberg (Aparte, Live in Bergen, 2011)
http://www.classiquenews.com/cd-compte-rendu-critique-farinelli-a-portrait-un-portrait-par-ann-hallenberg-aparte-2011/

CD. Franco Fagioli : Arias for Caffarelli (1 cd Naïve)
http://www.classiquenews.com/cd-franco-fagioli-arias-for-caffarelli-1-cd-naive/

CD. Philippe Jaroussky. Airs de Porpora pour Farinelli (1 cd Erato)
http://www.classiquenews.com/cd-philippe-jaroussky-airs-de-porpora-pour-farinelli-1-cd-erato/

 

 

 

 

 

Portrais d’époque de Farinelli

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Il n’y a pas de rapport direct entre le visuel barbu choisi par Cecilia Bartoli et les portraits historiques du castrat napolitain Farinelli, plutôt connu pour son visage poupin et glabre…

 

 

 

FARINELLI portrait classiquenews Jacopo_Amigoni_-_Retrato_de_Carlo_María_Broschi,_Farinelli_-_Google_Art_Project

 

Bartolomeo Nazarie - Portrait of Farinelli 1734 - Royal College of Music London

Portrait de Farinelli (Carlo Broschi) – DR

 
 

GSTAAD / SAANEN. Cecilia Bartoli, le 23 août 2019. VIVALDI II

bartoli-cecilia-cd-vivaldi-II-decca-concert-anniersary-30-decca-cecilia-bartoli-critique-cd-cd-reviewGSTAAD / SAANEN. Cecilia Bartoli, le 23 août 2019. VIVALDI II. La diva romaine revient à ses premiers amours vivaldiennes… Ce vendredi 23 août commence la dernière série (magistrale) d’événements musicaux au sein du Gstaad Menuhin Festival : à 19h30, nouveau programme défendu par CECILIA BARTOLI (église de Saanen). Les Saisons de Vivaldi dialoguent avec un choix d’airs d’opéras du Prêtre Rosso…

Avec «Les Musiciens du Prince», que Cecilia Bartoli a créé en 2016 avec Jean-Louis Grinda, directeur de l’Opéra de Monte-Carlo, la diva romaine explore de nouveaux sons, toujours au service de sa fougue et de sa passion exploratrice, qu’elle soit Baroque comme ici, ou romantique… Bien sûr il y est question de Vivaldi, un compositeur que la cantatrice dévoilait avec une candeur gourmande et inspirée il y a … 20 ans. A Saanen, ce 23 août, place donc aux airs d’opéras, et aussi à l’inusable et atemporel sommet concertant au XVIIIè, Les Quatre Saisons, déjà estimé par JS Bach qui s’était procuré la partition, avec celle des autres concertos pour violon du Pretre Rosso (500 pièces composées). Le premier recueil, L’Estro armonico op. 3, paraît en 1711 à Amsterdam, et fait immédiatement sensation. Vivaldi est alors professeur de violon à l’Ospedale della Pietà, une institution vénitienne pour jeunes filles pauvres, orphelines ou abandonnées. Les Saisons appartiennent à un recueil plus tardif, intitulé Il Cimento dell’armonia e dell’invenzione – littéralement «le combat de l’harmonie (la raison) et de l’invention (l’imagination)» : comment l’inspiration furieuse dans le cas de Vivaldi peut-elle s’arranger des contraintes de l’écriture ? Harmonie et Invention… ? Vivaldi résoud l’équation en sublimant les deux. Ni plus ni moins. Car il a tout : sensibilité du peintre, curieux des atmosphères et justesse de l’écriture, à la fois virtuose, dramatique, poétique…
Cecilia Bartoli souligne le génie du Vivaldi lyrique : lequel a écrit pas moins de 40 ouvrages. Sans omettre la cinquantaine de cantates et sérénades, une centaine de sonates et plusieurs oratorios. Le Vivaldi compositeur d’opéras paraît sur le tard, en 1713, année de sa nomination comme imprésario (c’est à dire «administrateur») du teatro Sant’Angelo ; en découle 94 opéras, un nombre qu’il affirme avoir atteint comme créateur pour la scène. Depuis ses débuts, la prêtresse vivaldienne Cecilia Bartoli chante la langue éruptive, rythmique, énergique d’un musicien qui sut embraser les cœurs, ceux du public, grâce au chant de ses divas et castrats… Le programme reprend les airs de son dernier cd VIVALDI II, paru en, CLIC de CLASSIQUENEWS de novembre 2018

LIRE notre critique du cd CECILIA BARTOLI / VIVALDI II :
https://www.classiquenews.com/cd-evenement-critique-cecilia-bartoli-vivaldi-ii-decca/
bartoli-cecilia-cd-vivaldi-II-decca-concert-anniersary-30-decca-cecilia-bartoli-critique-cd-cd-reviewExtrait de la critique du cd VIVALDI II par Cecilia Bartoli :… « La diva en 2018 prolonge les qualités de 1999 : une sorte de souplesse surexpressive qui par la force des choses est devenue naturelle, tel un ruban vocal à la fois martelé et suave. Ainsi comme nous l’avions déjà observé dès début novembre (premières impressions du cd VIVALDI / BARTOLI 2018), la mezzo déploie une belle diversité de nuances propres à l’articulation et à la caractérisation de chaque : comme l’écrivait le 6 novembre 2018 notre rédacteur Lucas Irom : « D’emblée, en ouverture l’air agité du début de ce programme proclame sans fioritures ni hésitation la furià assumée de la partition, – cordes fouettées comme une crême liquide et souple ; voix très incarnée et engagée, laquelle a certes perdu de son élasticité comparée à 1999, avec des aigus parfois courts, mais dont l’économie des moyens (intelligence expressive) et la gestion de la ligne expressive architecturent le premier air de Zanaida (Argippo : « Selento ancora il fulmine ») avec un brio franc, naturel, contrasté et vivace, riche en vertiges et accents mordants dans la première section ; alanguis et murmurés dans la centrale, exprimant jusqu’à la hargne voire la frénésie hallucinée de cet appel à la vengeance. Plus loin, l’air de Caio d’Ottone in villa (1713 : un ouvrage traversé par un souffle pastorale inédit) qui exprime la blessure d’un coeur trahi face à la cruauté de son aimée, est abordé avec une infinie tendresse, aux lignes amples et fluides ; la couleur vocale d’une torpeur triste mais ardente est idéalement soutenue, avec un éclairage intérieur qui renseigne tout à fait la douleur presque lacrymale du cœur en souffrance. Qui a dit que Vivaldi n’était que virtuosité mécanique ? C’est un peintre du coeur humain parmi le splus inspirés… autant que BACH ou Haendel. Cecilia Bartoli enflamme les esprits dans le registre cantabile, ici suivant les pas du castrat créateur Bartolomeo Bartoli. » Par Lucas Irom (nov 2018)

https://www.classiquenews.com/cd-evenement-critique-cecilia-bartoli-vivaldi-ii-decca/

 

 

 

 

Infos pratiques :
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SAANEN, église, ven 23 août 2019, 19h30

 

 
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RESERVEZ VOTRE PLACE

CECILIA BARTOLI, mezzosopran


LES MUSICIENS DU PRINCE – MONACO
ANDRÉS GABETTA, Violon & Konzertmeister

 

 

 

 

Programme :
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Antonio Vivaldi (1678–1742)
Violinkonzert E-Dur op. 8 Nr. 1 RV 269
«Der Frühling» – 1. Satz 4’

«Quell’augellin», Arie der Silvia aus der Oper «La Silvia» RV 734 5’
«Non ti lusinghi la crudeltade», Arie des Lucio aus der Oper «Tito Manilo» RV 738 8’
«Gelosia, tu già rendi l’alma mia», Arie des Caio aus der Oper «Ottone in villa» RV 729 4’

Violinkonzert E-Dur op. 8 Nr. 1 RV 269
«Der Frühling» – 3. Satz 4’

«Vedrò con mio diletto»,
Arie des Anastasio aus der Oper «Il Giustino» RV 717 5’

Violinkonzert g-Moll op. 8 Nr. 2 RV 315
«Der Sommer» – 1. Satz 5’

«Sol da te mio dolce amore»,
Arie des Ruggiero aus der Oper «Orlando furioso» RV 728 8’

Violinkonzert g-Moll op. 8 Nr. 2 RV 315
«Der Sommer» – 2. & 3. Satz 5’

«Si lento ancora il fulmine»,
Arie der Zenaida aus der Oper «Argippo» RV 697 4’

«Zeffiretti che sussurrate»,
Arie der Ippolita
aus der Oper «Ercole sul Termodonte» RV 710 9’

Violinkonzert F-Dur op. 8 Nr. 3 RV 293
«Der Herbst» – 1. Satz 5

«Ah fuggi rapido»,
Arie des Astolfo
aus der Oper «Orlando furioso» RV 728 3’

Violinkonzert F-Dur op. 8 Nr. 3 RV 293
«Der Herbst» – 3. Satz 3’

«Gelido in ogni vena»,
Arie des Farnace
aus der Oper «Farnace» RV 711 12’

Violinkonzert f-Moll op. 8 Nr. 4 RV 297
«Der Winter» – 1. Satz 3’

«Se mai senti spirarti sul volto»,
Arie des Cesare
aus der Oper «Catone in Utica» RV 705 10’

Violinkonzert f-Moll op. 8 Nr. 4 RV 297
«Der Winter» – 2. & 3. Satz 5’

Cecilia Bartoli & Friends : un portrait de la diva romaine

bartoli-mezzo-soprano-critique-opera-concert-annonce-classiquenews-Cecilia-Bartoli-AlcinaARTE. Dim 3 mars 2019. 23h40. Cecilia Bartoli. BARTOLI & Friends. Né à Rome le 4 juin 1966, la quinqua Bartoli peut être fière de sa carrière, marquée par la jeunesse virtuose et défricheuse, passionnée par le Baroque et muse de l’opéra romantique italien. Elle a démontré l’étendue de ses talents : du XVIIè montéverdien, au opéras belliniens et rossiniens, dévoilant un bel canto, articulé, habité, aussi captivant que celui de La CALLAS… c’est dire. On n’oubliera pas non plus son incursion chez Berlioz, égérie, ambassadrice du désir berliozien, celui suscité par la vénération pour la jeune actrice Hariett Smithson (qui deviendra son épouse) et qui lui transmet le virus de Shakespeare. Mûre, riche d’une expérience passionnante qui s’est écrite en jalons discographique surtout édité par Decca, la mezzo coloratoure ne cesse d’étendre encore les champs de ses explorations : un récent Vivaldi acte II, a confirmé son sens de la sculpture du mot

Le seul documentaire qui lui avait jusque-là été consacré date étrangement de vingt-six ans, alors que la jeune mezzo-soprano colorature débutait à peine sa prodigieuse carrière. Un quart de siècle plus tard, ce film, tourné à l’aube de ses 50 ans, retrace son extraordinaire parcours. Le réalisateur Fabio De Luca a suivi l’incandescente cantatrice italienne, née à Rome en 1966, dans tous les théâtres d’Europe où elle se produisait, sur scène comme dans les coulisses. Dans ce portrait intime, l’artiste, interprète majeure de Rossini, Vivaldi et Mozart, ses compositeurs fétiches, mais aussi inlassable exploratrice musicale, se livre en évoquant les étapes et les rencontres qui ont marqué sa vie. Un hommage à l’une des plus grandes divas actuelles, nourri aussi des témoignages des musiciens qui l’ont accompagnée, de Daniel Barenboim à Gustavo Dudamel en passant par Antonio Pappano, Martha Argerich ou encore Philippe Jaroussky. Cecilia Bartoli comme on ne l’a encore jamais entendue…

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ARTE. Bartoli & Friends, Dim 3 mars 2019. 23h40. Cecilia Bartoli. BARTOLI & Friends – Documentaire de Fabio De Luca (France/Suisse, 2018, 54mn)

SALZBOURG, Festival de Pentecôte 2019 : 7-10 juin 2019. Voci celesti

salzburg salzbourg logo 2016 0104_festspiele_023SALZBOURG, Festival de Pentecôte 2019 : 7-10 juin 2019. Voci celesti – heavenly voices / Voix célestes, avec ce titre générique, le Festival de Pentecôte de Salzbourg poursuit sa collaboration avec la mezzo Cecilia Bartoli, une pause de musique baroque dans la cité de Wolfgang et qui occupe l’affiche de Salzbourg le 2ème week end de juin, soit du jeudi 7 au dimanche 10 juin 2019. Dans son album dédié, intitulé Sacrificium (octobre 2009, LIRE ici notre crtiique du cd Sacrificium / http://www.classiquenews.com/cecilia-bartoli-sacrificium2-cd-decca/.

sacrificium cecilia bartoli cd critique annonce classiquenews dossier castrats par cecilia bartoli salzbourg pentecote 2018 withsun 2019Cecilia Bartoli y rendait il y a 10 ans déjà un hommage appuyé aux victimes de la castration, les divos, castrats adulés, fruit de l’école napolitaine au XVIIIè, et dont le chant légendaire, à en croire tous les témoignages et les récits d’époque, était digne de louanges. Leur gloire se poursuit encore aujourd’hui, et nombre de divas féminines donc (mezzo, altos : Cecilia Bartoli, Vivica Genaux, Ann Hallenberg aujourd’hui) ou les contre ténors actuels dont les Fagioli, Cencic, et le plus récemment adulé Jakob Orlinski…) tentent d’égaler l’agilité, la musicalité, la puissance. Ils avaient comme nom à l’époque de Haendel et de Porpora : Giacomelli, Caffarelli, surtout Farinelli, Senesino… mais aussi Porporino, Carestini, Balatri… Leur fabuleuse virtuosité, le trouble de ses voix aigues dans des corps virils, le decorum qui encadre chaque prestation… continuent encore de fasciner et inspirent toujours les chanteurs contemporains.

 

 

 

Salzbourg : Cavalleria Rusticana pour le festival de Pâques

 

 

 

Parmi les temps forts de cette nouvelle édition à Salzbourg, l’opéra de Haendel, ALCINA les 7 et 9 juin 2019 (avec Cecilia Bartoli dans le rôle-titre ; Sandrine Piau en Morgana… Les Musiciens du Prince / Gianluca Capuano, direction), suite logique des deux productions lyriques précédemment présentées in loco, sorte de fil rouge de la programmation (Giulio Cesare in Egitto et Ariodante) ; Polifemo de Nicolo Porpora (Cencic, Petrou : le 8), La Morte d’Abele du vénitien Caldara (Julie Fuchs, Christophe Dumaux, Lea Desandre, Nuria Rial, Il canto di Orfeo, Bachchor Salzburg /GL Capuano, direction : le 9), Stabat Mater de Pergolesi avec C Bartoli, Franco Fagioli, le 10 juin, 11h)… etc…

 

 

 

 

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VOIR toute la programmation du Festival de Pentecôte de Salzbourg, sur le site du Festival de Salzbourg / Salzburg Whitsun Festival : 7 – 10 June 2019

https://www.salzburgerfestspiele.at/en/tickets/calendar?season=6

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sacrificium cecilia bartoli cd critique annonce classiquenews dossier castrats par cecilia bartoli salzbourg pentecote 2018 withsun 2019CD critique. Cecilia Bartoli: Sacrificium (2 cd DECCA, 2009). En un double album particulièrement soigné sur le plan éditorial, les enregistrements réalisés en février et mars 2009 en Espagne à Valladolid éclairent en particulier l’acrobatie vocale coloratura de l’écriture de Nicola Porpora (1686-1768), maître essentiel de la musique pour castrats au XVIIIè siècle. Ambassadrice de choc et de charme pour la cause des castrés devenus chanteurs, Cecilia Bartoli ajoute les manières d’autres compositeurs dont les opéras sérias mettaient en scène les divins “musici†dans des airs de virtuosité dramatique, taillés pour leur divin gosier… ainsi 2 airs de Carl Heinrich Graun (circa 1703-1759), extraits de ses ouvrages Demofoonte et Adriano in Siria (1746) qui touchent par leur tendresse digne et blessée; mais aussi paraissent Leonardo Leo (1694-1744), Leonardo Vinci (circa 1696-1730), Francesco Araia (1709-1770)… soit 11 airs enflammés entre tendresse hallucinée et rage expressionniste, atteignant des cimes vocales vertigineuses. LIRE notre critique complète du cd de Ceclia Bartoli / SACRIFICIUM (Decca, 2009)

 

CD événement, critique. CECILIA BARTOLI / VIVALDI II (Decca)

bartoli-cecilia-cd-vivaldi-II-decca-concert-anniersary-30-decca-cecilia-bartoli-critique-cd-cd-reviewCD événement, critique. CECILIA BARTOLI / VIVALDI II (Decca). 20 ans après son premier album, légendaire, historique, dédié à la furià du Pretre Rosso, Antonio Vivaldi le Vénitien (maître de choeur à l’Ospedale de la Pietà), « La » Bartoli, mezzo romaine à l’agilité expressive irrésistible, récidive et publie en novembre 2018, un second opus VIVALDI, avec ensemble sur instruments d’époque. En 2018, ce nouveau cycle d’inédits et de perles lyriques oubliées, accomplit-il un second prodige ? Va-t-il susciter le même engouement (et les mêmes ventes, historiques en 1999 : 700 000 exemplaires alors achetés) ?

 
 
 

LIRE notre dépêche annonçant les projets cd de Cecilia Bartoli dont ce nouvel album VIVALDI 2018
http://www.classiquenews.com/cd-decca-news-les-3-nouveaux-cd-de-cecilia-bartoli-rossini-camarena-vivaldi-ii/

En moins d’une heure, le nouveau cd collectionne les arias vivaldiens, avec fureur et virtuosité, ou intériorité et pudeur, selon la règle souveraine des contrastes. On note moins d’airs de pure bravoura, démontrant l’énergique coloratoura dont Bartoli est devenue un emblème contemporain en particulier dans le répertoire baroque… et jusqu’au bel canto bellinien.

 
 
 

LIRE notre article «  premières impressions du cd VIVALDI / BARTOLI 2018 » (6 nov 2018)
http://www.classiquenews.com/cd-evenement-premieres-impressions-bartoli-vivaldi-ii-decca/

vivaldi opera giustinoLa diva en 2018 prolonge les qualités de 1999 : une sorte de souplesse surexpressive qui par la force des choses est devenue naturelle, tel un ruban vocal à la fois martelé et suave. Ainsi comme nous l’avions déjà observé dès début novembre (premières impressions du cd VIVALDI / BARTOLI 2018), la mezzo déploie une belle diversité de nuances propres à l’articulation et à la caractérisation de chaque : comme l’écrivait le 6 novembre 2018 notre rédacteur Lucas Irom : « D’emblée, en ouverture l’air agité du début de ce programme proclame sans fioritures ni hésitation la furià assumée de la partition, – cordes fouettées comme une crême liquide et souple ; voix très incarnée et engagée, laquelle a certes perdu de son élasticité comparée à 1999, avec des aigus parfois courts, mais dont l’économie des moyens (intelligence expressive) et la gestion de la ligne expressive architecturent le premier air de Zanaida (Argippo : « Selento ancora il fulmine ») avec un brio franc, naturel, contrasté et vivace, riche en vertiges et accents mordants dans la première section ; alanguis et murmurés dans la centrale, exprimant jusqu’à la hargne voire la frénésie hallucinée de cet appel à la vengeance. Plus loin, l’air de Caio d’Ottone in villa (1713 : un ouvrage traversé par un souffle pastorale inédit) qui exprime la blessure d’un coeur trahi face à la cruauté de son aimée, est abordé avec une infinie tendresse, aux lignes amples et fluides ; la couleur vocale d’une torpeur triste mais ardente est idéalement soutenue, avec un éclairage intérieur qui renseigne tout à fait la douleur presque lacrymale du cœur en souffrance. Qui a dit que Vivaldi n’était que virtuosité mécanique ? C’est un peintre du coeur humain parmi le splus inspirés… autant que BACH ou Haendel. Cecilia Bartoli enflamme les esprits dans le registre cantabile, ici suivant les pas du castrat créateur Bartolomeo Bartoli.

 
 
   
 
 

BARTOLI 2018
Une voix qui s’est durcie et resserrée, avec des aigus durs, mais…

Des phrasés toujours aussi magiciens

 
 
   
 
 

Parmi les arias les plus longs sélectionnés par Cecilia Bartoli, celui avec violon solo obligé, l’air de Persée : « Sovente il sole » (Andromeda liberata) demeure le clou de ce programme riche en contrastes et ferveur dramatique. La mezzo démontre sa maîtrise du cantabile rond et sombre, capable aussi d’une puissance émotionnelle inouïe, car Vivaldi, invente ici un chant traversé par le souffle de la nature, évoquant orage et tumulte mais aussi célébrant le mystère du sublime naturel. Dans cette analogie entre le cœur qui désire et se passionne, et la contemplation de la nature changeante, miroitante, naît un sentiment déjà … romantique. La justesse de l’écriture vivaldienne, ses accents et mélodies proche du caractère à la fois contemplatif et tendre du texte, ont un impact singulier. D’autant que soucieuse de l’énoncé du verbe, dont elle fait une véritable poésie chantante, la diva éclaire chaque section de la partition avec une sensibilité là encore introspective qui convainc totalement.
Dommage à notre avis que les instrumentistes autour d’elle ne partagent pas telle vision de l’implication et des couleurs du sentiment. Seule réserve dans cette collection d’incarnations très réussies. Car ce que Bartoli sait exprimer est moins l’éclatante et mécanique technicité virtuose, que l’introspection d’un Vivaldi… préromantique ? Voilà qui ne manque pas de saveur… »

Nous n’en dirons pas davantage, sauf évidemment, une maîtrise intacte malgré l’oeuvre des années (20 ans ont passé) dans l’émission des phrasés (toujours très convaincants) révélant un souci délectable du texte. La couleur et le caractère de chaque situation sont idéalement compris et magnifiquement incarnés. Brava signora Bartoli.

 
 
   
 
 

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CD événement, critique. CECILIA BARTOLI / VIVALDI II (1 cd Decca – 58 mn).

 
 
 
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Détail du programme :

 
 
 

Argippo, RV 697
1 « Se lento ancora il fulmine », Zanaida

Orlando furioso, RV 728
2 « Sol da te, mio dolce amore », Ruggiero

Orlando furioso RV Anh. 84 (version 1713-1714, attribuée à Ristori)
3 « Ah fuggi rapido », Astolfo

Il Giustino, RV 717
4 « Vedrò con mio diletto », Anastasio

La Silvia, RV 734
5 « Quell’augellin che canta », Silvia

Ottone in villa, RV 729
6 « Leggi almeno, tiranna infedele », Caio

La Verità in cimento, RV 739
7 « Solo quella guancia bella », Rosane

Andromeda liberata, RV Anh. 117
8 « Sovvente il sole », Perseo

Tito Manlio, RV 738
9 « Combatta un gentil cor », Lucio

Catone in Utica, RV 705
10 « Se mai senti spirarti sul volto », Cesare

Cecilia Bartoli, mezzo-soprano
Ensemble Matheus / Jean-Christophe Spinosi, direction musicale

1 CD Decca 2018
58mn

 
 
 

CD événement, premières impressions. BARTOLI / VIVALDI II (Decca)

bartoli-cecilia-30-ans-decca-3-nouveaux-cd-cd-news-review-on-classiquenews-ROSSINI-box-Vivaldi-2-camarenaCD événement, premières impressions. BARTOLI / VIVALDI II (1 cd Decca). Presque 20 ans après son premier opus événement dédié à Vivaldi (1999), la mezzo romaine Cecilia Bartoli revient à ses premières amours et déclare à nouveau sa flamme baroque pour le génie dramatique et lyrique d’Antonio Vivaldi. Annoncé le 23 novembre prochain, l’album a séduit manifestement notre équipe de rédacteurs qui ont déjà pu écouter le programme dans sa totalité… Il en ressort que la diva confirme son excellent tempérament dramatique chez celui qui peine à convaincre encore les directeurs d’opéras : bien rares sont à présent les opéras de Vivaldi ou les festivals qui « osent » programmer ses ouvrages lyriques. Une situation qui est difficile à expliquer sinon par le manque d’audace des programmateurs, et aussi le manque de chanteurs capables comme « La Bartoli » de réussir en virtuosité, comme en intonations ciselées. Car il ne suffit pas de savoir techniquement bien chanter… il faut encore exprimer et transmettre ce supplément d’âme qui confère à chaque aria, son épaisseur voire son mystère émotionnel. De toute évidence, même accompagnée par un continuo et un chef parfois trop durs ou trop lisses, Cecilia Bartoli, 30 ans après, affirme toujours une étonnante santé vivaldienne… En témoignent ces 3 airs qui selon notre rédacteur Lucas Irom, demeurent emblématiques d’un programme ambitieux, très demandeur vocalement… qui en compte 10. Voici en avant première, un extrait de la critique complète qui sera éditée le jour de la parution de l’album BARTOLI / VIVLADI II :

bartoli-cecilia-cd-vivaldi-II-decca-concert-anniersary-30-decca-cecilia-bartoli-critique-cd-cd-review… « D’emblée, en ouverture l’air agité du début de ce programme proclame sans fioritures ni hésitation la furià assumée de la partition, – cordes fouettées comme une crême liquide et souple ; voix très incarnée et engagée, laquelle a certes perdu de son élasticité comparée à 1999, avec des aigus parfois courts, mais dont l’économie des moyens (intelligence expressive) et la gestion de la ligne expressive architecturent le premier air de Zanaida (Argippo : « Selento ancora il fulmine ») avec un brio franc, naturel, contrasté et vivace, riche en vertiges et accents mordants dans la première section ; alanguis et murmurés dans la centrale, exprimant jusqu’à la hargne voire la frénésie hallucinée de cet appel à la vengeance. Plus loin, l’air de Caio d’Ottone in Villa (un ouvrage traversé par un souffle pastorale inédit) qui exprime la blessure d’un coeur trahi face à la cruauté de son aimée, est abordé avec une infinie tendresse, aux lignes amples et fluides ; la couleur vocale d’une torpeur triste mais ardente est idéalement soutenue, avec un éclairage intérieur qui renseigne tout à fait la douleur presque lacrymale du cÅ“ur en souffrance. Qui a dit que Vivaldi n’était que virtuosité mécanique ?

Parmi les arias les plus longs sélectionnés par Cecilia Bartoli, celui avec violon solo obligé, l’air de Persée : « Sovente il sole » (Andromeda liberata) demeure le clou de ce programme riche en contrastes et ferveur dramatique. La mezzo démontre sa maîtrise du cantabile rond et sombre, capable aussi d’une puissance émotionnelle inouïe, car Vivaldi, invente ici un chant traversé par le souffle de la nature, évoquant orage et tumulte mais aussi célébrant le mystère du sublime naturel. Dans cette analogie entre le cœur qui désire et se passionne, et la contemplation de la nature changeante, miroitante, naît un sentiment déjà … romantique. La justesse de l’écriture vivaldienne, ses accents et mélodies proche du caractère à la fois contemplatif et tendre du texte, ont un impact singulier. D’autant que soucieuse de l’énoncé du verbe, dont elle fait une véritable poésie chantante, la diva éclaire chaque section de la partition avec une sensibilité là encore introspective qui convainc totalement.
bartoli-cecilia-vivaldi-edition-rossini-box-edition-critique-cd-cd-review-by-classiquenews-oct-2018Dommage à notre avis que les instrumentistes autour d’elle ne partagent pas telle vision de l’implication et des couleurs du sentiment. Seule réserve dans cette collection d’incarnations très réussies. Car ce que Bartoli sait exprimer est moins l’éclatante et mécanique technicité virtuose, que l’introspection d’un Vivaldi… préromantique ? Voilà qui ne manque pas de saveur….” A suivre.

Prochaine critique complète le jour de la sortie de l’album le 23 novembre 2018. 

CD, coffret événement, annonce. CECILIA BARTOLI : ROSSINI EDITION

BARTOLI-CECILIA-ROSSINI-box-2018-review-announce-annonce-sur-classiquenews-2018-decca-newsCD, coffret événement, annonce. CECILIA BARTOLI : ROSSINI EDITION . 2018 marque le 30e anniversaire de la collaboration entre la mezzo romaine de tous les records, Cecilia Bartoli, et le label des voix, Decca Classics ; c’est ainsi l’une des complicités artistiques plus prospères dans l’histoire de la musique classique enregistrée. Cet anniversaire coïncide avec un autre, celui des 150 ans de la disparition de Gioacchino Rossini, le compositeur qui plus qu’aucun autre a marqué la carrière de Bartoli. On se souvient que la jeune diva alors à ses débuts (au début des années 1980) excellait dans le baroque italien, avec Vivaldi, et aussi le bel canto, élégantissime et virtuose… de Rossini. Ses incarnations des rôles de Cendrillon, Rosina restent mémorables.

Pour l’occasion, l’intégralité des enregistrements Rossini de Cecilia Bartoli – audio et vidéo – est réunie en un coffret deluxe, enrichi d’inédits. Soit 15 cd + 6 dvd, en édition limitée, qui composent ainsi un coffret exhaustif, témoignant de «  l’authenticité, de la maîtrise, de la passion et de la perfection propres à la plus brillante des primissimas donnas rossiniennes… Rien de moins. La technicité mitraillette de la diva exprimait alors la vitalité et la pétulance rafraîchissante attendue dans chaque rôle féminin rossinien qu’elle a abordé.
L’enregistrement inédit de la transcription pour orchestre par Salvatore Sciarrino de la cantate Giovanna d’Arco, sous la direction de Riccardo Chailly, complète l’ensemble ainsi compilé.
Le livret trilingue de 200 pages comprend de nombreux essais des spécialistes du bel canto et du théâtre de Rossini, notamment la directrice de la Fondazione Rossini, qui a également mis à disposition une riche iconographie originale, en complément aux photos d’archives de Decca.

 

 

 

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Bartoli-Rossini-Edition-packshot-240x240CD, coffret événement, annonce. CECILIA BARTOLI : ROSSINI EDITION / Sortie : 21 septembre 2018 • Label : DECCA. Prochaine critique développée dans le meg cd dvd livres de CLASSIQUENEWS

 

 

 

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LIRE aussi notre dépêche précédente actualités de CECILIA BARTOLI / rentrée 2018 : Rossini, Vivaldi II, tremplin à Javier Camarena (récital Garcia : «  Contrabandista  »)

 

 

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En savoir plus sur http://www.clubdeutschegrammophon.com/albums/rossini-edition/#l3psZ2RVbsq1k1DZ.99

Cecilia Bartoi chante NORMA

bartoli_4783517_norma_12PARIS, TCE. Cecilia Bartoli chante Norma de Bellni. 12, 14, 16, 18 octobre 2016. Automne Bellinien en Europe. Les grandes divas ressuscitent le bel canto romantique italien. Sonya Yoncheva chante Norma elle aussi à Londres (Royal Opera House, 12-26 septembre 2016) : voir à Paris la production de Norma par Cecilia Bartoli (né à Rome en 1966), créée au disque puis à la scène (festival de Salzbourg, Monte-Carlo). La tradition du XIXè lyrique a imposé peu à peu les sopranos éthérées, claires dans le rôle titre conçu par Bellini ; mais ce dernier a bel et bien réécrit le rôle pour la tessiture et les moyens vocaux de son égérie, Maria Malibran, mezzo, formidable actrice par son médium corsé et agile. Une caractéristique que notre mezzo romaine a bien signalé et qui lui inspire son choix de chanter aujourd’hui le rôle, emblématique du romantisme lyrique italien. Rappelons nous en 2006, il y a 10 ans déjà, Cecilia Bartoli avait fait de même pour le rôle de La Somnambule / Sonnambula, également réécrit par Bellini pour un mezzo lyrique et dramatique. C’est peu dire que « La Bartoli » caractérise et nuance chaque mot, sculptant le verbe lyrique comme si le chant était une pâte apte à être colorée, ciselée; incarnée. Le style, la localité chaude et fluide, agile et expressive, le legato et le sens des phrasés affirment aujourd’hui une Norma de choc qui fait les veaux soirs du TCE – Théâtre des Champs Elysées à Paris, pour 4 dates d’octobre : 12, 14, 16 et 18 octobre 2016.
La mise en scène signée par le duo Caurier / Leiser transpose l’action antique romaine et gauloise dans l’Italie des années 1940, où pèse l’atmosphère grave et noire du nazisme en Europe ; occupation imposée qui révèle les tempéraments, résistants ou complaisants. La vision musicale défendue par Cecilia Bartoli éclaire la partition d’un regard neuf, bénéficiant d’une couleur vocale différente pour Norma, des timbres des instruments d’époque de l’orchestre requis. Les duos entre les deux femmes, pourtant rivales, mais finalement solidaire, Adalgisa et Norma, y gagnent une vérité renforcée, subjuguante.

 

 

 

Paris, TCE, Théâtre des Champs Elysées
Cecilia Bartoli chante Norma de Bellini (1831)
4 représentations parisiennes
MERCREDI 12 OCTOBRE 2016, 19h30
VENDREDI 14 OCTOBRE, 19h30
DIMANCHE 16 OCTOBRE, 17h
MARDI 18 OCTOBRE, 19h30
2h30 dont un entracte

RESERVEZ VOTRE PLACE

Diego Fasolis,  direction
Patrice Caurier, Moshe Leiser,  mise en scène

Cecilia Bartoli,  Norma
Rebeca Olvera,  Adalgise
Norman Reinhardt,  Pollion
Péter Kálmán,  Orovèse
Rosa Bove,  Clotilde
Reinaldo Macias,  Flavius
I Barocchisti
Coro della Radiotelevisione svizzera, Lugano

 

 

 

PRETRESSE TRAHIE
Norma, est prêtresse à la lune et fille du druide Oroveso, mariée secrètement au Consul romain Pollione mais honteusement trahie par lui, alors qu’elle a eu deux fils du romain. Mais l’homme est faible et lui préfère à présent une jeunette plus adorable (Adalgisa, elle aussi prêtresse gauloise).
Bellini_vincenzo_belliniLa tendresse du rôle, son caractère noble et énigmatique, sa moralité aussi font du personnage de Norma, sublime vertueuse, l’un des plus complexes et admirable du répertoire romantique italien. Bellini et son librettiste Romani excellent aussi à peindre l’amitié entre les deux femmes, toutes deux liées à Pollione, mais inspirées par un idéal de loyauté des plus respectables. Adalgisa jure d’infléchir le coeur de Pollione pour qu’il revienne auprès de Norma et ses deux garçons (duo magique Norma / Adalgisa : « Si, fino all’ore », acte II). Ainsi c’est dans la mort et les flammes, que Norma et Pollione se retrouvent unis pour l’éternité. Car comme le public depuis la création de l’oeuvre en 1831, le romain a succombé finalement devant la grandeur morale et sacrificielle de son ancienne compagne… Sur les traces de la créatrice de Norma, Giuditta Pasta, Sonya Yoncheva et Cecilia Bartoli endossent ainsi à l’atome 2016, l’un des rôles qui pourraient bien davantage affirmer leur étonnante subtilité vocale comme leur instinct dramatique.

CD. LIRE aussi notre compte rendu critique complet du cd La Somnambule / La Sonnambula de Bellini (L’Oiseau Lyre)

Cecilia Bartoli, musicienne de cour…

bartoli_3MONTE CARLO : le 8 juillet 2016, 1er concert des Musiciens du Prince et Cecilia Bartoli. Un nouvel ensemble est né portant les couleurs monégasques. Prenez un opéra : Monte Carlo; son directeur, engagé, promoteur : Jean-Louis Grinda. Un orchestre nouvellement formé à partir de musiciens sur instruments d’époque : ainsi nommé Les Musiciens du Prince… Quelques sponsors bien connus pour leur action vers la musique classique. Mais au fait qui est le Prince ? Albert II de Monaco et sa sœur, Caroline. Les deux soutiennent ainsi à hauteur de 350 000 euros, le nouvel ensemble dont la mezzo romaine, Cecilia Bartoli, qui est aussi directrice artistique du Festival de Pentecôte de Salzbourg, a eu l’idée. Ce 8 juillet 2016, dans la Cour d’honneur du Palais de Monaco, orchestre et diva donneront ainsi leur premier concert, inaugurant une tournée à venir en Europe. Au programme les musiques de cour de l’ère baroque à l’heure où les monarchies mélomanes régnaient en Europe. « J’assumerai cette grande responsabilité avec tout mon enthousiasme et toute mon énergie et je ferai de mon mieux pour représenter, grâce à la musique, les couleurs de Monaco dans le monde entier », indique Cecilia Bartoli sur le site des Musiciens du Prince.

Au programme de la soirée inaugurale du 8 juillet à Monaco : Cecilia Bartoli interprète le opéras de Haendel et aussi quelques partitions de Cour signées par le compositeur monégasque Honoré François Marie Langlé (1741-1805). Puis Les Musiciens du Prince
réalisent une tournée avec le même programme dans toute l’Europe (dont Paris le 17 novembre 2016 et Bruxelles, le 23) ; sans omettre La Cenerentola de Rossini – en version de concert, en février 2017 (tournée dans sept villes d’Europe dont Versailles les 24 et 26 février sous la baguette de Diego Fasolis avec entre autres La Bartoli, entourée de Alessandro Corbelli, Carlos Chausson…) ; puis Ariodante de Handel et La donna del lago de Rossini à Salzbourg en juin 2017 (Festival de Pentecôte). Ce dernier opéra devrait faire l’objet d’un enregistrement à paraître chez Decca. Sur le papier, le projet a cours jusqu’en 2021. Bonne chance au nouvel ensemble. A suivre sur classiquenews.

 

Cecilia Bartoli chante Iphigénie

Cecilia Bartoli chante la vocalità suave de SteffaniSalzbourg. Gluck : Iphigénie en Tauride. Les 19,22,24,26,28 août 2015. Après Norma, Cecilia Bartoli chante pour Salzbourg 2015, l’Iphigénie de Gluck, la seconde en vérité qui recueille l’ensemble des audaces inouïes dont fut capable le formidable Chevalier à Paris. Réformateur de l’opéra, et à ce titre, champion défendu par Rousseau, Gluck réinvente le langage de l’opéra des Lumières à l’époque où Mozart édifie ses propres drammas giocosos (Les Noces de Figaro, Don Giovanni, Cosi fan tutte). Gluck fait évoluer l’opéra seria hérité des Napolitains, vers le drame théâtral où la continuité de l’action, le spectaculaire des scènes, l’esthétisme saisissant des tableaux priment sur la seule virtuosité des chanteurs. Le style frénétique de Gluck, son adresse mélodique, sa science du coloris orchestral imposent un nouveau modèle lyrique au tournant des années 1770, c’est à dire quand meurt Louis XV et que Marie-Antoinette, devenue Reine de France, peut inviter à la Cour française, son cher professeur de musique… apprécié à l’époque où elle n’était que princesse à Vienne.
Aucun des compositeurs étrangers invités à Paris, sous Louis XVI et Marie-Antoinette ne composeront sans assimiler la leçon du maître, sans se confronter à son théâtre : Vogel, Gossec, les Italiens Sacchini et Piccinni… Chacun prend à son compte l’énergie, la vitalité expressive des figures léguées ; ainsi pourront naître les femmes fortes, hier enchanteresses baroques, à présent vraies figures d’amoureuses torturées dont l’humanité continue de nous toucher ; ainsi Armide, Médée et donc Iphigénie.

En 1779, Gluck lègue à la France le sommet de son génie lyrique… que sauront comprendre Berlioz et Wagner.

En Tauride, Iphigénie dessine une tragédie noire et psychologique…

Sur un livret de Nicolas Guillard, la tragédie en 4 actes (le modèle en 5 actes hérité de Lully est révisé sous l’impulsion et le nouveau goût de Marie-Antoinette), permet à la soprano d’alors, Rosalie Levasseur, d’affirmer son tempérament dramatique hors du commun, quand Joseph Legros créait à ses côtés, Pylade, le 18 mai 1779 aux Tuileries. L’opéra noir, sanglant, exprime surtout la colère et la cruauté des dieux qu’il faut assagir et apaiser.

Au I, Iphigénie, prêtresse de Diane, craint pour sa race : elle a vu dans ses cauchemars, Agamemnon, Clytemnestre, Oreste (le père, ma mère, le frère…), tous frappés par la folie ou le meurtre. Et c’est le roi Thoas, souverain des Scythes lui-même qui surgit habité par de même funestes augures (il serait assassiné par un étranger…). Il est décidé de sacrifier aux dieux, les deux étrangers qui viennent de faire naufrage sur les côtés de Tauride.

Au II, les deux étrangers révèlent leur identité : Oreste (baryton) qui vient de tuer sa mère pour venger sa sÅ“ur Electre, et son compagnon, Pylade. S’apprêtant à les sacrifier, Iphigénie se rapproche de son frère Oreste qui a révélé ses origines mycéniennes et dévoilé les visions d’horreur qui hantent ses nuits… Mais la prêtresse ne l’a pas reconnu.

Au III,  Iphigénie accepte d’informer sa soeur restée à Mycenes, Electre, qu’elle est devenue parmi les scythes en Tauride, la prêtresse de Diane : l’un des étrangers réalisera cette mission épargnant ainsi sa vie;  alors qu’Oreste était désigné, c’est Pylade qui ira rejoindre Electre à Mycenes.
Ce dernier jure de revenir en Tauride pour sauver Oreste.

Au IV, alors qu’elle s’apprête à le sacrifier, Iphigénie reconnaît son frère Oreste;  mais le roi scythe Thoas surgit, il veut tuer lui-même celui qui allait être sacrifié. .. heureusement Pylade l’en empêche : il tue Thoas. Diane paraît et rétablit la loi : son culte sera remis aux grecs,  Oreste sera roi de Mycenes et Iphigénie libre de suivre son frère.

GLUCKAprès un menuet douceâtre, la partition d’Iphigenie débute par une formidable tempête annonçant l’Otello de Verdi et exprimant ici le désordre intérieur (accents brûlant des flûtes en panique) qui règne dans l’esprit de la prêtresse de Diane, de Thoas et bientôt d’Oreste. Gluck  emprunte à ses opéras antérieurs nombre de matériel  musical pour sa seconde Iphigénie. C’est pour mieux peindre l’horreur absolue qui règne dans le cerveau des trois protagonistes;  les cordes frénétiques annoncent déjà l’orage et la tempête qui ouvre la Walkyrie de Wagner,  lui-même comme Berlioz, grand admirateur du Chevalier.
Trouble et d’une rare profondeur dans l’opéra tragique neoclassique,   l’opéra de Gluck ose exprimer un sentiment d’amitié amoureuse entre les deux guerriers grecs, Pylade et Oreste. C’est dailleurs la seule touche sensible d’un ouvrage voué au drame le plus noir, à l’expression réaliste de la fatalité humaine. De ce point de vue, l’acte II est le plus saisissant dramatiquement et psychologiquement – avec sommet du génie théâtral de Gluck,  l’enchaînement entre le délire obsessionnel d’Oreste croyant voir sa mère qu’il a tué,  et Iphigénie, la jeune prêtresse de Diane, paraissant alors sans reconnaître  son frère … la violence des passions ici exprimée annonce Wagner et Strauss dont la musique traduit ce qui n’est pas dit mais pensé. Dans le III, les deux amis se déchirent comme deux amants pour savoir qui se sacrifiera pour sauver l’autre. .. qui a dit que Gluck ignorait la force psychologique de l’orchestre, son aptitude à exprimer la psyché des héros? Jamais Gluck ne fut autant Gluck que dans Iphigénie en Tauride : sa profonde connaissance du coeur humain appliqué aux nécessités dramatiques du théâtre réalise ici le sommet de sa carrière parisienne. Un chef d’oeuvre assurément et aussi pour les chanteurs (Iphigénie, Oreste, Pylade), de nouveaux défis comme acteurs et volcalistes.

Salzbourg. Gluck : Iphigénie en Tauride. Les 19,22,24,26,28 août 2015. Avec Bartoli, Olvera, Maltman, Villazon, M. Kraus. Diego Fasolis, direction. Patrice Caurier et Moshe Leiser, mise en scène.

Festivals, contrats. Salzbourg, festival de Pentecôte. Cecilia Bartoli directrice artistique jusqu’en 2021

bartoli cecilia salzbourgFestivals, contrats. Salzbourg, festival de Pentecôte. Cecilia Bartoli directrice artistique jusqu’en 2021. La cantatrice romaine, mezzo défricheuse chez Decca, a signé le renouvellement de son contrat comme directrice artistique du festival de Pentecôte de Salzbourg (Salzburg Whitsun Festival) jusqu’en … 2021. Cecilia Bartoli a édité deux récents albums consacrés chacun à des compositeurs oubliés pourtant valeureux  « Mission » malgré son visuel crâne rasé ciblait la résurrection d’Agostino Steffani, un compositeur diplomate égal de Handel ; et le dernier « St-Petersburg » rend service aux auteurs italiens employés par les Tsarines au XVIIIè (Araia, Raupach, Manfredini, aux côtés du plus célèbre Cimarosa). En 2014, elle a chanté Desdemona dans Otello de Rossini avec un feu vocal plutôt convaincant…

otello BartoliCette année du 22 au 25 mai 2015, le festival de Pentecôte à Salzbourg, historiquement orienté vers les répertoire baroques et classiques, affiche Handel en version de concert et Gluck dans une nouvelle production : au programme de mai 2015 : Diego Fasolis et I Barrochisti jouent 2 opéras. Le premier est le temps fort de l’édition de Pentecôte 2015 : Iphigénie en Aulide de Gluck les 22 et 25 mai 2015 (mise en scène : Patrice Caurier et Moshe Leiser, avec Cecilia Bartoli), c’est l’opéra qui impose à Paris le chevalier Gluck à partir d’avril 1774 ; le second opéra, en version de concert, le chef d’oeuvre Semele de Handel (avec Cecilia Bartoli) ; puis récital Handel par Philippe Jaroussky et Nathalie Stutzmann (le 24 mai) ; enfin un gala de clôture comprenant une distribution exceptionnelle dont Anna Netrebko, Juan Diego Florez (Purcell, Gluck, Haydn, Offenbach, le 25 mai, la billetterie est fermée, le concert est déjà complet).

salzbourg logoAvec le recul, rien de neuf à la Pentecôte à Salzbourg : il reste curieux que Cecilia Bartoli toujours innovatrice en matière de programme discographique (et dans les concerts de la tournée qui suivent ou entourent la sortie de ses nouveaux cd) n’ait proposé aucun réel événement d’envergure à Salzbourg en 2015. Pause artistique ou essoufflement précoce ? Outre un manque de souffle et de renouvellement artistique, l’événement risque aussi de devenir élitiste au regard de sa confidentialité et du prix moyen des places. A l’époque du numérique et des medias nouveaux, les festivals qui prendront l’initiative de l’e-diffusion sauront se régénérer. Mais cela ne suffit, il faut encore que leur programmation produise de réels événements musicaux. Dans ce sens, le choix des metteurs en scène, Caurier/Leiser, déjà vus antérieurement pour un Giulio Cesare assez encombré et fourre-tout, pourrait emplomber l’avenir du festival de Pentecôte, sauf si les deux scénographes se renouvellent totalement. A suivre d’ici mai 2015.

 

VISITER le site du festival de Pentecôte de Salzbourg

 

 

 

 

 

Crédit photographique : Markus Hinterhäuser, directeur artistique du festival estival de Salzbourg et Helga Rabl-Stadler, Présidente du festival de Salbourg encadrent Cecilia Bartoli, directrice artistique du festival de Pentecôte de Salzbourg. © SF/J.Stix

DVD. Poulenc : Dialogues des Carmélites (Rhorer, Py, 2013) – 1 dvd Erato

poulenc dialogues des carmelites dvd erato py rhorer piau petibon gensDVD. Poulenc : Dialogues des Carmélites (Rhorer, Py, 2013). Le transfert de cette production admirable vocalement et scéniquement est comme sublimé encore par le choix des plans serrés sur les visages, insistant sur le travail d’acteurs de chaque chanteuse : un approfondissement rare qui se révèle d’une crédibilité cinématographique rendant cette réalisation proche d’un long métrage : la progression de plus en plus tragique jusqu’aux exécutions finales n’en est que plus haletante. Il est vrai que le plateau vocal réunit la crème des chanteuses francophones actuelles : Piau (qui n’a certes pas l’âge de Constance mais n’en exprime pas moins sa juvénilité fragile et désespérée), Petibon (d’une criante vérité dans le rôle protagoniste de Blanche de la Force, l’aristocrate convertie marchant vers son martyre), enfin Gens (digne et bouleversante Lidoine). Hors sujet, Lehtipuu – outré, caricatural- et la Prieur de Plowright, vocalement hors style et dépassé. Dommage, car l’unité et la cohérence de l’ensemble s’en trouvent déséquilibrées.  Au service d’un drame scéniquement millimétré, le chef Rhorer qui a déposé sa baguette historiquement informée pour conduire l’opulent Philharmonia Orchestra, trouve la fluidité et le mordant nécessaires, une vision elle aussi qui dans la fosse affirme une excellente intelligence expressive.  Sans les erreurs du casting, ce dvd méritait évidemment un CLIC de classiquenews. Le duo Piau / Petibon fonctionne à merveille : touchant et bouleversant même par leur fragilité et leur humanité.

Poulenc : Dialogues des Carmélites (Rhorer, Py, 2013) – 1 dvd Erato. Sophie Koch (Mère Marie de l’Incarnation), Patricia Petibon (Blanche de La Force), Véronique Gens (Madame Lidoine), Sandrine Piau (Soeur Constance de Saint Denis), Rosalind Plowright (Madame de Croissy), Topi Lehtipuu (Le Chevalier de La Force), Philippe Rouillon (Le Marquis de La Force), Annie Vavrille (Mère Jeanne de l’Enfant Jésus), Sophie Pondjiclis (Soeur Mathilde), François Piolino (Le Père confesseur du couvent), Jérémy Duffau (Le premier commissaire), Yuri Kissin (Le second commissaire, un officier) & Matthieu Lécroart (Le geôlier). Philharmonia Orchestra & ChÅ“ur du Théâtre des Champs-Elysées, Jérémie Rhorer, direction. Olivier Py, mise en scène. Enregistré sur le vif en 2013, Paris, TCE.

Cecilia Bartoli chante les Italiens en Russie

BARTOLI-cecilia-cd-decca-new-dc-st-peterburg-saint-petersbourg-DECCA-review-complete-reviewParis, TCE. Récital Cecilia Bartoli : 1er, 7 novembre 2014, 20h. Paris reçoit la diva romaine qui présente le programme de son dernier album discographique : “St-Petersburg”. En chantant Araia, Raupach, Manfredini aux côtés du plus connu Cimarosa, “La Bartoli” dévoile de nouveaux tempéraments lyriques qui a leur époque avaient convaincre les Impératrices russes à Saint-Petersbourg. Voici le premier volet de feuilleton Cecilia Bartoli : St-Petersburg. Feuilleton 1/3. Quels sont les oeuvres ressuscitées ? Quels en sont les compositeurs et le goût des impératrices qui les ont favorisés ? CLASSIQUENEWS s’intéresse au nouvel album de Cecilia Bartoli intitulé “ St-Petersburg “. Feuilleton en 3 volets…  Volet 1 : présentation générale du programme St Petersburg. A partir des archives méconnues du Théâtre Marinsky, Cecilia Bartoli a sélectionné un corpus lyrique de 11 mélodies inédites révélant le statut privilégié des compositeurs italiens dans le goût musical de 3 impératrices russes et non des moindres. Les perles ainsi révélées témoignent de la forte attraction de l’art occidental dans la Saint-Pétersbourg impériale au XVIIIème siècle.  La ville créée sur les marais par Pierre Ier démontre l’ambition d’un Russie forte et puissante qui veut s’imposer sur l’échiquier européen… A la suite de la politique proeuropéenne de Pierre Ier, les Tsarines Anna Ivanovna (1730–40), Élisabeth Petrovna (Élisabeth Ière, 1741–1762) etCatherine II (« la Grande », 1762–1796) se tournent elles aussi vers l’Europe afin d’enrichir la vie culturelle de leur vaste pays : elles y font entendre les musiques les plus applaudies et les plus modernes à leur époque, preuve d’un goût raffiné et sûr. Alors que L’Europe des Lumières goûte surtout les idées des philosophes français (Catherine II écrit en français à Voltaire à la fin du siècle), la musique favorite reste surtout italienne. Les femmes de pouvoir cultivent un goût audacieux dans la suite du Tsar Pierre Ier, lequel à sa mort en 1725, laisse un empire occidentalisé dont Saint-Petersbourg est l’emblème le plus prestigieux.

 

 

 

3 impératrices au goût européen et… italien

 

Catherine la grande_Pietro_Antonio_Conte_Rotari,_Portrait_de_la_grande-duchesse_Catherine_AlekseïevnaSa nièce, Anna, impératrice à partir de 1730, développe les arts à grande échelle. Elle fait venir à la cour impériale des musiciens italiens et allemands, et avec eux l’opéra, l’opéra-bouffe, le ballet. En 1741, par un coup d’État pacifique, Élisabeth 1ère (fille d’un second mariage de Pierre le Grand) s’empare du pouvoir détenu par l’héritier désigné d’Anna, son petit-neveu Ivan, encore nourrisson. Elisabeth 1ère prend la cour de France comme modèle, et, grande admiratrice du théâtre français, s’engage également en faveur de la musique avec passion. Elle chante dans le chœur de sa propre chapelle, développe la musique profane, met sur pied le premier opéra chanté en russe (La forza dell’amore e dell’odio de Francesco Araia, créé au Palais d’hiver, en 1736). Le successeur immédiat d’Élisabeth est son neveu Pierre, esprit dérangé et malingre qui est bientôt écarté par sa femme, celle-ci accède au anna-ioannovna-anna ivanovna 1730-1740pouvoir sous le nom de Catherine II. Durant les trente-quatre années de son long règne (1762-1796), Catherine la Grande (photo ci-contre), interlocutrice de Louis XV et Louis XVI, poursuit le travail de ses prédécesseurs (en particulier l’œuvre de Pierre Ier) et fait de l’Empire russe une puissance mondiale de premier ordre.  Au début, peu musicienne (dans son enfance elle aurait dit-on, utilisé un clavicorde pour fabriquer un toboggan… !!), Catherine invite à Saint-Pétersbourg les musiciens de renommée internationale ; écrit des livrets d’opéra… les premiers théâtres d’opéra russes voient le jour durant son règne.

elisabeth petrovna 1741-1762Elizabeth_of_Russia_by_V.EriksenCherchant à restituer à travers trois portraits d’impératrice, selon leur goût musical propre,  l’évolution de la faveur européenne, surtout italienne à la Cour de Saint-Petersbourg, la mezzo romaine Cecilia Bartoli choisit les œuvres les plus emblématiques de chaque compositeurs invités ou joués en Russie : Francesco Araia (1735–1759), Hermann Friedrich Raupach (1759–1761), Vincenzo Manfredini (1761–1763) et Domenico Cimarosa (1787–1791). EN LIRE +

 

 

 

 

 

BARTOLI-cecilia-cd-decca-new-dc-st-peterburg-saint-petersbourg-DECCA-review-complete-reviewBartoli on stage : 13 dates d’une tournée incontournable, au programme : les 11 airs inédits de l’album St-Petersburg

I Barocchisti · Diego Fasolis

October 22, 2014 Berlin, Konzerthaus

26 octobre 2014 : Amsterdam, Het Concertgebouw

28 octobre 2014 Cologne, Philharmonie

1er & 7 novembre 2014 Paris, Théâtre des Champs-Élysées, 20h

10 novembre 2014 Mannheim, Rosengarten

13 novembre 2014 Brussels, Palais des Beaux-Arts

15 novembre 2014 Baden-Baden, Festspielhaus

17 novembre 2014 Essen, Philharmonie

19 novembre  2014 Hamburg, Laeiszhalle

22 novembre 2014 Regensburg, Audimax der Universität

24 novembre 2014 Prague, Rudolfinum

26 novembre 2014 Munich, Herkulessaal

28 novembre 2014 Vienna, Konzerthaus

CD. St Petersburg par Cecilia Bartoli. Feuilleton 2/3 : Araia et Raupach à la Cour impériale de Russie

BartolispCD. St Petersburg par Cecilia Bartoli. Feuilleton 2/3 : Araia et Raupach à la Cour impériale de Russie. Dans ce nouveau feuillton développé à l’occasion du nouvel album de Cecilia Bartoli (intitulé St Petersburg, parution le 13 octobre 2014), classiquenews précise le sujet du programme musical défendu par la diva romaine Bartoli. Nouveau album, nouvelles découvertes… Après avoir éclairer notre connaissance sur les castrats napolitains, en en dénonçant la pratique historique d’émasculation des jeunes garçons au nom d’un art d’excellence (cf. son album également édité par Decca, intitulé à juste titre ” Sacrificium “, 2009), voici révélés l’Å“uvre et le style des compositeurs napolitains principalement jusqu’en 1750, à la Cour de Russie : Araia puis Raupach, dans les années 1730 puis 1740 et 1750, pour les Tsarines Anna et Elisabeth,- donc avant l’avènement du règne de Catherine la Grande (Tsarine en 1762),  livrent plusieurs joyaux lyriques en rapport avec le goût européen des Impératrices à l’époque des Lumières. Contemporains de Vivaldi, Bach, Haendel et Rameau, Aria et Raupach  (contemporain aussi du compositeur élégantissime Steffani que la diva a auparavant dévoilé dans son album ” Mission “,  2012) cultivent le style du Baroque tardif déjà classique et galant, affirmant la suprématie des Italiens surtout napolitains à la Cour Impériale… Classiquenews, dans ce feuilleton 2, (après le volet 1 qui offrait une présentation générale du projet St Petersburg par Cecilia Bartoli), souligne la valeur artistique des compositeurs ainsi ressuscités, d’autant plus vivaces et captivants qu’ils sont défendus par la furià expressive et ciselée de la diva, qui la quarantaine rayonnante, s’engage derechef pour un nouveau répertoire – certes qu’elle connaît bien, mais qui dans son prolongement jusqu’à Saint-Petersbourg (St Petersburg) présente de nouveaux défis : vocaux, dramatiques, linguistiques (Bartoli y chante pour la première fois en russe). dans ce nouveau feuilleton, CLASSIQUENEWS présente 5 airs du récital St Petersburg de Cecilia Bartoli qui compte 11 inédits.

 

 

 

CD. St Petersburg par Cecilia Bartoli (2/3)

Araia et Raupach à la Cour impériale russe …

 

st-petersburg-versailles-russe-jardin-xviiiSt Petersburg à l’heure napolitaine … Comme dans le reste des Cours éclairées d’Europe, la Russie “façonnée” par Pierre Ier se met à la page de la culture moderne, celle bientôt des Lumières où règne le parler français et le chanter italien. Versailles depuis Louis XIV dicte les manières et l’art de vivre décoratif et architectural, mais les italiens règnent sur l’opéra : aucune cour ne peut prétendre à un certain statut prestigieux si elle ne cultive pas son propre opéra italien : est-ce un hasard si les compositeurs germaniques : Haydn, Mozart et avant eux, Haendel ou Hasse se soient mis à l’italien ? Seule la France préservant sa singularité nationale cultive sa propre tradition (qu’incarne alors le savant autant qu’expérimental Rameau, de 1733 à 1764). Dans son album St Petersburg, la mezzo romaine Cecilia Bartoli s’intéresse à la nombreuse colonie des compositeurs italiens qui ont travaillé pour la Cour impériale Russe : Galuppi, Paisiello, Cimarosa ou Sarti, et même  Giuseppe Verdi, dont La forza deldestino est créé en 1862 au Théâtre impérial de Saint-Pétersbourg. La diva remonte encore plus loin dans le temps : en particulier à l’âge des bâtisseurs, dans ce premier XVIIIè baroque et exubérant qui saisit par sa science expressive et caractérisée .Si Pierre Ier fonde la grande Russie moderne, c’est surtout Catherine II, “la Grande” qui au temps des Lumières (1762-1796) favorise particulièrement l’opéra italien. Jusqu’à Glinka et son opéra national “Une vie pour le Tsar” (1836), l’opéra en Russie reste surtout italien. Cecilia Bartoli éclaire la période de l’histoire russe où au XVIIIème, les compositeurs baroques italiens ont particulièrement compté.

 

 

3 Tsarines pro européennes …
anna-ioannovna-anna ivanovna 1730-1740Trois impératrices au goût proche se distinguent alors, dévoilant la faveur d’une sensibilité occidentale et culturellement européenne, en particulier italienne : Anna Ivanovna ou Anne Ière (1730–1740, portrait ci contre), Élisabeth Ière (1741–1761) enfin la plus prestigieuse, Catherine II  dite “la Grande” (1762–1796). Chacune prolongent le grand dessein de Pierre Ier : bâtir une nation russe puissante et moderne qui favorise aussi un certain art de vivre. Anna a vécu surtout en Courlande (Lettonie de l’Ouest), se désintéressant de la vie traditionnelle russe. Élisabeth Petrovna, fille de la seconde épouse de Pierre le Grand, née en Courlande, est éduquée à la française. Catherine quant à elle, née en Poméranie (Stettin) est allemande : elle demeure toute sa vie fortement influencée par les tendances artistiques venues d’Europe. Le fondateur de Saint-Petersbourg n’a pas le temps d’enraciner une riche vie culturelle locale : c’est l’Å“uvre des trois impératrices qui lui succèdent.

     

 

 

Anna Ivanovna  et Francesco Araia

 

anna-ivanovna-tsarine-cecilia-bartoli-st-petersburg-decca-cdA la tsarine Anna Ivanovna revient l’installation d’une troupe italienne d’opéra à Saint- Pétersbourg. En font partie,  le violoniste et compositeur Domenico Dall’Oglio, élève probable  de Vivaldi et de Tartini. Dans le courant des années 1730, Anna favorise l’essor de la vie musicale à Saint-Petersbourg : en 1732, elle créée la première Académie de musique en Russie, tout en Å“uvrant à la professionnalisation de l’orchestre de la Cour. Jugée sévèrement par les historiens, le règne d’Anna, trop dispendieux voire “décadent”, invite le compositeur napolitain Francesco Araia (1709-1770) comme premier compositeur de la cour, après le refus de Nicolo Porpora.  Après sa création milanaise en 1734, l’opéra La forza dell’amore e dell’odio est représenté en 1736 au Théâtre du Palais d’Hiver : c’est le premier opéra italien représenté en Russie. Le livret italien est alors traduit en russe.

BartolispCecilia Bartoli a choisi d’incarner Minerve qui s’adressant à son père, au bord tragique de la mort, s’épanche dans un air de plus de 7mn (Vado a morir : je vais mourir… ) : contemporain du dernier Vivaldi, l’ouvrage d’Araia déploie une somptueuse étoffe instrumentale plutôt sombre et grave, que le chant tendu, éruptif, souvent incandescent de la mezzo réinscrit dans la déploration digne et blessée (Plage 1).
Est ce parce qu’elle ne souhaitait pas mettre surtout en avant la pure virtuosité, mais bien en premier choix, la langueur funèbre et noire que Cecilia Bartoli a choisi ainsi d’ouvrir son récital St Petersburg dans la pudeur affligée d’un air très introspectif ? La décision est juste. Ceux qui aime leur diva dans les cascades acrobatiques seront néanmoins satisfaits (et ce dès l’air qui suit : le chant rageur conquérant d’Hercule aux portes des enfers extraits de l’Alceste de Raupach, devenu dans le livret de l’écrivain russe Alexander Sumarokov : Altsesta, premier opéra chanté en russe…, plage 2).

Chaque représentation d’un opéra d’Araia souligne un temps fort du calendrier dynastique : la fête de la tsarine, le couronnement, puis chaque jour anniversaire de l’intronisation. Entre temps, ballets, oratorios, concerts innombrables donnés pour grands banquets hebdomadaires et surtout les bals. De nombreux chÅ“urs sont constitués à partir de chanteurs venus de toute la Russie.

BartolispEmblématique de la veine seria, solennel mais aussi tendre et carressant : le style d’Araia transparaît davantage dans l’extrait de Seleuco (livret de Giuseppe Bonecchi) : son écriture très brillante (avec hautbois obligé dès l’ouverture puis dialoguant avec la voix soliste qu’il ne cesse pendant tout l’air de plus de 10 mn, d’accompagner, de commenter, de doubler…), préfigure les Haydn et Mozart de la génération suivante. Cecilia Bartoli chante l’air d’apaisement voire d’extase pastorale de Démétrius (Demetrio) où les sentiments entre crainte et espérance, d’un berger amoureux perdu dans les bois la nuit venue, s’éveille aux sons de la mystérieuse et imprévisible nature : prétexte à une série de coloratoure impressionannte, dialoguée avec le hautbois omniprésent (Plage 7).

Les représentations d’opéras sont les moments les plus solennels du calendrier musical officiel : Araia est principalement joué, ainsi en est il jusqu’aux années 1750, exception faite donc de l’opéra La Clémence de Titus (hommage aux Politiques éclairés) de Hasse, représenté donc à Moscou en 1742, pour le couronnement de l’Impératrice Elisabeth et pour lequel Dall’Oglio, musicien faisant partie de la troupe italienne favorisée par Anna Ivanovna-, et son confrère Luigi Madonis, composent le prologue. En un air avec flûte obligée, colorant l’épisode en teintes pastorales, l’air de Rutenia est un appel à la paix intérieure : “nous sommes fatigués de pleurer, nous sommes las de souffrir”…

     

 

 

Elisabeth mélomane, l’arrivée de Raupach en 1755…

 

elizabeta-petrovna-elizabeth-1ere-de-Russie-cecilia-bartoli-st-petersburg-cd-deccaTrès différente d’Anna, Elisabeth n’en poursuit pas moins la politique musicale proitalienne, en particulier napolitaine : l’Impératrice succombe comme tous les rois et princes européens au culte des castrats, invention proprement napolitaine. Ainsi en 1755, pour la création à Saint-Petersbourg, de l’opéra Alessandro nell’Indie d’Araia, décidément très en faveur, Elisabeth fait venir le castrat Carestini, favori de Haendel dont il chanta tant de rôles majeurs dans ses opéras serias. La même année, Elisabeth autorise la création du premier opéra en langue russe Tsefal i Prokris (“Céphale et Procrisâ€). L’Å“uvre est décisive car son livret est écrit par l’écrivain russe Alexandre Soumarokov… d’inspiration pastorale, l’opéra est chanté par de jeunes solistes provenant des chÅ“urs russes fondés par Anna. En 1755 aussi, arrive de Stralsund, Hermann Friedrich Raupach (1728-1778), comme claveciniste de l’Orchestre de la cour. Très vite, Raupachest sollicité comme compositeur : ainsi en 1758, Rapauch livre son nouvel opéra : Altsesta, Alceste, drame écrit par Soumarokov également et chanté lors de sa création dans le palais d’été de Peterhof, par des enfants chanteurs issus des chÅ“urs russes de la Chapelle impériale. Le succès auprès de l’Impératrice est total : Raupach gagne de nouveaux galons : il succède en 1759 à Araia, congédié par Elisabeth.

BartolispComme Araia ainsi dévoilé, Raupach occupe une place importante dans le récital de Cecilia Bartoli : sa furià d’agilité, dramatique frénétique (prégluckiste) s’affirme surtout dans le premier air sélectionné extrait de l’Alceste russe de Sumarokov de 1758 : Cecilia Bartoli incarne la stature déterminée, conquétante du héros Hercule. Chantant pour la première fois en russe, la diva évoque l’entrée du libérateur du couple Admète/Alceste, dans la gueule des enfers : la série d’acrobatie vocale exprime l’ardente énergie d’un héros prêt à en découdre (“j’y entrerai et là, tout, je torublerai”). Hercule entend défendre l’intégrité d’Alceste décidée à remplacer son époux Admète aux Enfers. La vitalité des cordes, les accents des trompettes guerrières, convoquant dans cet air de bravoure exacerbée, le lustre des futurs exploits militaires, composent un air saisissant, exigeant virtuosité et dramatisme, soit un souffle illimité… que Cecilia Bartoli, soucieuse de caractérisation juste et habitée, défend avec une intensité rare (plage 2).
BartolispL’opera seria exalte la grandeur morale des protagoniste tout en soignant dans le déroulement dramatique, l’arche tendue et vive des contrastes : le second extrait sélectionné par Cecilia Bartoli, d’après le premier opéra russe, Altsesta, est l’air le plus long du récital, lui aussi d’une langueur et d’une gravité toute napolitaine (courbe ondulante et grave des cordes rappelant Pergolèse et Scarlatti entre autres) : écho de l’air de minerve d’Aria lui aussi frappé du sceau de la mort souveraine, l’air d’Alceste : “ Je vais à la mort et je n’ai pas peur … impose le tempérament vocal d’une héroïne prête à l’ultime sacrifice pour sauver son époux, le Roi Admète. Ici pas de vent ou bois ou cuivres obligés mais la seule vague suspendue des cordes, baignant l’air chanté en russe, dans une atmosphère sombre et apaisée à la fois : Alceste reste sereine dans sa décision fatale. Car c’est son amour absolue qui la guide… au delà de toute souffrance, au delà de toute révolte. Cecilia Bartoli a manifestement choisi cet air pour son amplitude introspective, les qualités de caractérisation intérieures qu’il exige (plage 3).
Le dernier air soulignant la maîtrise de Raupach dans le style napolitain seria est extrait de Siroe, re di Persia : d’après un livret de Métastase, Laudice exprime la dignité de sa posture morale : l’air est de détermination et de bravoure, exigeant vocalises déferlantes, sur un tapis orchestral qui exprime la houle marine soumise aux vissicitudes du vent inconstant. Le déchainement des éléments faisant métaphore des passions qui animent le cÅ“ur et l’âme de la soliste (plage 4).

st-petersburg-cecilia-bartoli-vue-palais-roseAraia comme Raupach s’illustrent parfaitement dans le modèle baroque tardif de l’opéra seria avec airs da capo. Si la virtuosité vocale est particulièrement exigée, le chromatisme nouveau annonce déjà la sensibilité classique et galante.  Comme dans les cours d’Europe, après l’engouement pour les roucoulades virtuoses des castrats, et pour l’opera seria napolitain, la Cour impériale Russe s’enthousiasme pour les comédies italiennes, en particulier quand en 1757, la troupe d’opéra de Giovanni Battista Locatelli joue les commedie italiennes à la Cour (entre autres celles de Galuppi), dans les cercles privés et les théâtres public… Vincenzo Manfredini, jeune et fringuant kapellmeister de la troupe, est remarqué et entre à la Chapelle impériale, au moment où Pierre, nouvel héritier nommé par Elisabeth, devient Tsar (Pierre III) à la mort de la Tsarine en 1761. Manfredini devient de facto, le nouveau compositeur officiel après Raupach. Mais c’est une toute autre histoire qui s’écrit alors… à suivre dans notre prochain feuilleton 3/3 : le goût et les réformes de la Grande Catherine, les compositeur Manfredini, Galuppi, Cimarosa.

Lire aussi notre volet 1/3 : présentation générale du nouveau cd de Cecilia Bartoli

Nouveau cd. Cecilia Bartoli : St-Petersburg. Feuilleton 1/3

BARTOLI-cecilia-cd-decca-new-dc-st-peterburg-saint-petersbourg-DECCA-review-complete-reviewNouveau cd. Cecilia Bartoli : St-Petersburg. Feuilleton 1/3. Quels sont les oeuvres ressuscitées ? Quels en sont les compositeurs et le goût des impératrices qui les ont favorisés ? CLASSIQUENEWS s’intéresse au nouvel album de Cecilia Bartoli intitulé “ St-Petersburg “. Feuilleton en 3 volets…  Volet 1 : présentation générale du programme St Petersburg. A partir des archives méconnues du Théâtre Marinsky, Cecilia Bartoli a sélectionné un corpus lyrique de 11 mélodies inédites révélant le statut privilégié des compositeurs italiens dans le goût musical de 3 impératrices russes et non des moindres. Les perles ainsi révélées témoignent de la forte attraction de l’art occidental dans la Saint-Pétersbourg impériale au XVIIIème siècle.  La ville créée sur les marais par Pierre Ier démontre l’ambition d’un Russie forte et puissante qui veut s’imposer sur l’échiquier européen… A la suite de la politique proeuropéenne de Pierre Ier, les Tsarines Anna Ivanovna (1730–40), Élisabeth Petrovna (Élisabeth Ière, 1741–1762) et Catherine II (« la Grande », 1762–1796) se tournent elles aussi vers l’Europe afin d’enrichir la vie culturelle de leur vaste pays : elles y font entendre les musiques les plus applaudies et les plus modernes à leur époque, preuve d’un goût raffiné et sûr. Alors que L’Europe des Lumières goûte surtout les idées des philosophes français (Catherine II écrit en français à Voltaire à la fin du siècle), la musique favorite reste surtout italienne. Les femmes de pouvoir cultivent un goût audacieux dans la suite du Tsar Pierre Ier, lequel à sa mort en 1725, laisse un empire occidentalisé dont Saint-Petersbourg est l’emblème le plus prestigieux.

 

 

 

3 impératrices au goût européen et… italien

 

Catherine la grande_Pietro_Antonio_Conte_Rotari,_Portrait_de_la_grande-duchesse_Catherine_AlekseïevnaSa nièce, Anna, impératrice à partir de 1730, développe les arts à grande échelle. Elle fait venir à la cour impériale des musiciens italiens et allemands, et avec eux l’opéra, l’opéra-bouffe, le ballet. En 1741, par un coup d’État pacifique, Élisabeth 1ère (fille d’un second mariage de Pierre le Grand) s’empare du pouvoir détenu par l’héritier désigné d’Anna, son petit-neveu Ivan, encore nourrisson. Elisabeth 1ère prend la cour de France comme modèle, et, grande admiratrice du théâtre français, s’engage également en faveur de la musique avec passion. Elle chante dans le chÅ“ur de sa propre chapelle, développe la musique profane, met sur pied le premier opéra chanté en russe (La forza dell’amore e dell’odio de Francesco Araia, créé au Palais d’hiver, en 1736). Le successeur immédiat d’Élisabeth est son neveu Pierre, esprit dérangé et malingre qui est bientôt écarté par sa femme, celle-ci accède au anna-ioannovna-anna ivanovna 1730-1740pouvoir sous le nom de Catherine II. Durant les trente-quatre années de son long règne (1762-1796), Catherine la Grande (photo ci-contre), interlocutrice de Louis XV et Louis XVI, poursuit le travail de ses prédécesseurs (en particulier l’œuvre de Pierre Ier) et fait de l’Empire russe une puissance mondiale de premier ordre.  Au début, peu musicienne (dans son enfance elle aurait dit-on, utilisé un clavicorde pour fabriquer un toboggan… !!), Catherine invite à Saint-Pétersbourg les musiciens de renommée internationale ; écrit des livrets d’opéra… les premiers théâtres d’opéra russes voient le jour durant son règne.

elisabeth petrovna 1741-1762Elizabeth_of_Russia_by_V.EriksenCherchant à restituer à travers trois portraits d’impératrice, selon leur goût musical propre,  l’évolution de la faveur européenne, surtout italienne à la Cour de Saint-Petersbourg, la mezzo romaine Cecilia Bartoli choisit les œuvres les plus emblématiques de chaque compositeurs invités ou joués en Russie : Francesco Araia (1735–1759), Hermann Friedrich Raupach (1759–1761), Vincenzo Manfredini (1761–1763) et Domenico Cimarosa (1787–1791).

Aria francescoLe napolitain Francesco Araia est le premier compositeur dont on joua un opéra en Russie (La forza dell’amore e dell’odio, au Palais d’hiver, en 1736). Il compose surtout le premier opéra sur un livret russe (Tsefal i Prokris,  – Céphale et Procris-, représenté pour la première fois en 1755). Cecilia Bartoli chante deux airs d’Araia, l’un d’eux étant emprunté à l’ouvrage pionnier La forza dell’amore e dell’odio.  Araia eut pour successeur le claveciniste et compositeur allemand Hermann Friedrich Raupach… qui fut au service de l’impératrice pendant deux ans seulement : son style classique n’écarte pas un dramatise très intense. Malheureusement, la part de ses oeuvres parvenues est bien mince. Cecilia Bartoli a choisi deux airs de son opéra russe Altsesta, les premiers airs que Cecilia Bartoli chante en russe !

Le jeune Vincenzo Manfredini dont figurent ici trois extraits de l’opéra Carlo Magno, notamment le chÅ“ur animé et victorieux qui termine le disque, occupe son poste en Russie… moins de deux ans. Nommé par Pierre, le prédécesseur éphémère de Catherine, ne lui rendit sans doute pas service sur le plan professionnel ! C’était pourtant un compositeur de grand talent dont Cecilia Bartoli dévoile le tempérament taillé lui aussi pour l’expression des passions et le théâtre. Autre révélation du programme conçu par Cecilia Bartoli : La Clémence de Titus de Johann Adolf Hasse … qui précède La Clémence de Mozart datée de 1791, de près de cinquante ans. Écrit pour le couronnement de la tsarine Élisabeth, en 1742, le prologue réunit l’écriture de deux compositeurs italiens actifs en Russie : Domenico Dall’Oglio (probablement un élève de Vivaldi et de Tartini) et le violoniste Luigi Madonis.

cimarosa domenicoEnfin Domenico Cimarosa, – seul auteur encore connu de nos jours-, passe quatre ans à la cour de Saint-Pétersbourg avant de s’installer à Vienne où il entre au service de l’empereur du Saint-Empire romain germanique, Léopold II. Catherine II avait beau s’intéresser à la littérature et au théâtre français, Cimarosa qui travaille d’arrache-pied et donne naissance à un flot constant de musique de premier ordre, ne reste pas en Russie. L’air retenu dans le programme, issu de La vergine del sole, comporte un solo de clarinette particulièrement brillant. Catherine avait bel et bien perdu un compositeur de qualité… Le fonds des archives de la bibliothèque du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg est particulièrement riche et comprend une collection mésestimée de perles lyriques depuis le XVIIème jusqu’au XIXème… la partition originale de La Force du destin de Verdi, représentée pour la première fois à Saint-Pétersbourg en 1862 y figure entre autres. Pour son projet  « St Petersburg », Cecilia Bartoli retrouve Diego Fasolis et son ensemble I Barocchisti, complices précédents pour la redécouverte des opéras d’Agostino Steffani.

Cecilia Bartoli : St Petersburg. 1 cd Decca, sortie internationale le 13 octobre 2014.

 

 

 

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Tracklisting : programme du cd St-Petersburg :

1. Francesco Domenico Araia (1709-1770): La forza del amore e dell’ odio – ‘Vado a morir’

2. Hermann Raupach (1728-1778): Altsesta – ‘Razverzi pyos gortani, laja’

3. Hermann Raupach: Altsesta – ‘Idu na smert’

4. Hermann Raupach: Siroe, re di Persia – ‘O placido il mare’

5. Domenico Dall’Oglio (1699-1764), Luigi Madonis (1690-1767): prologue to La clemenza di tito (Hasse) – ‘De’ miei figli’

6. Vincenzo Manfredini (1737-1799): Carlo Magno – ‘Fra’ lacci tu mi credi’

7. Francesco Domenico Araia: Seleuco – ‘Pastor che a notte ombrosa’

8. Hermann Raupach: Altsesta – ‘Marcia’

9. Vincenzo Manfredini: Carlo Magno – ‘Non turbar que’ vaghi rai’

10. Domenico Cimarosa (1749-1801): La vergine del sole – ‘Agitata in tante pene’

11. Vincenzo Manfredini: Carlo Magno – ‘A noi vivi, donna eccelsa’

 

 

 

BARTOLI-cecilia-cd-decca-new-dc-st-peterburg-saint-petersbourg-DECCA-review-complete-reviewBartoli on stage : 13 dates d’une tournée incontournable, au programme : les 11 airs inédits de l’album St-Petersburg

I Barocchisti · Diego Fasolis

October 22, 2014 Berlin, Konzerthaus

26 octobre 2014 : Amsterdam, Het Concertgebouw

28 octobre 2014 Cologne, Philharmonie

1er & 7 novembre 2014 Paris, Théâtre des Champs-Élysées, 20h

10 novembre 2014 Mannheim, Rosengarten

13 novembre 2014 Brussels, Palais des Beaux-Arts

15 novembre 2014 Baden-Baden, Festspielhaus

17 novembre 2014 Essen, Philharmonie

19 novembre  2014 Hamburg, Laeiszhalle

22 novembre 2014 Regensburg, Audimax der Universität

24 novembre 2014 Prague, Rudolfinum

26 novembre 2014 Munich, Herkulessaal

28 novembre 2014 Vienna, Konzerthaus

 

Illustrations : Catherine II la Grande, Anna Ivanovna, Elisabeth Ière, Araia, Cimarosa … (DR) 

CD. ” St-Petersburg ” : le nouveau cd de Cecilia Bartoli à paraître le 13 octobre 2014

BARTOLI-cecilia-cd-decca-new-dc-st-peterburg-saint-petersbourg-DECCA-review-complete-reviewCD. le nouveau cd de Cecilia Bartoli : St Petersburg, – Saint-Petersbourg-, à paraître le 13 octobre 2014.  Comme une reine de la glace, en impératrice des neiges, Cecilia Bartoli 2015, couronnée de fourrure immaculée, s’annonce à nouveau défricheuse et curieuse, audacieuse et passionnante. Son nouveau cd intitulé ” St Peterburg ” (Saint-Petersbourg) paraîtra le 13 octobre 2014. Il s’agit d’un programme inédit, parcours inédit à travers l’Empire Russe… à l’époque où le goût officiel, celui de 3 impératrices pro occidentales se tournent avec curiosité vers l’opéra italien.  Comment l’opéra italien est-il arrivé à la Cour de Saint Pétersbourg ? Qui étaient les compositeurs fétiches des tsarines Anne 1ère, Elisabeth 1ère et Catherine II ? Telles sont quelques unes des questions auxquelles la diva romaine apporte les réponses attendues en musique par son chant rayonnant, articulé, ciselé. La ville fondée par Pierre le Grand, créée de toutes pièces sur les marais affiche une influence explicitement occidentale et néoclassique… Soit 11 premières mondiales en provenance de « Saint Petersburg », – perles méconnues des archives du Mariinsky-, composées par 5 compositeurs dont les trois pionniers Dall’Oglio, Araia, surtout Raupach, puis Manfredini, aux côtés du plus célèbre Cimarosa saisissent par leur tempérament et leur engagement dramatique …:

Programme :
1. F. D. Araia (1709-1770 : La forza del amore e dell’ odio – ‘Vado a morir’
2. H. Raupach (1728-1778 : Altsesta – ‘Razverzi pyos gortani, laja’
3. H. Raupach : Altsesta – ‘Idu na smert’
4. H. Raupach : Siroe, re di Persia – ‘O placido il mare’
5. D. Dall’Oglio (1699-1764), L. Madonis (1690-1767 prologue de La clemenza di tito (Hasse) – ‘De’ miei figli’
6. V. Manfredini (1737-1799) :  – ‘Fra lacci tu mi credi’
7. F. D. Araia : Seleuco – ‘Pastore che a notte ombrosa’
8. H. Raupach : Altsesta – ‘Marcia’
9. V. Manfredini : Carlo Magno – ‘Non turbar que’ vaghi rai’
10. D. Cimarosa (1749-1801 La vergine del sole – ‘Agitata in tante pene’
11. V. Manfredini : Carlo Magno – ‘A noi vivi, donna eccelsa’

 

 

Cecilia Bartoli à Saint-Petersbourg

 

Catherine la grande_Pietro_Antonio_Conte_Rotari,_Portrait_de_la_grande-duchesse_Catherine_AlekseïevnaAprès les compositeurs dédiés aux castrats napolitains (Sacrificium) puis un excellent programme (Mission) ressuscitant un génie musical baroque, égal oublié de Handel, Agostino Steffani, Cecilia Bartoli s’intéresse à l’automne 2014, au goût européen de trois impératrices russes à l’époque des Lumières, soit au plein XVIIIème siècle.
Pour la première fois, Cecilia Bartoli dévoile quelques pépites de la musique baroque défendues par les Tsarines russes du XVIIIème : les impératrices Anna, Elizabeth et Catherine la Grande. Inspirées par l’Europe des Lumières, les souveraines ont favorisé plusieurs compositeurs italiens et germaniques, livrant pour la cour impériale de Saint-Petersbourg, plusieurs ouvrages oubliés. La diva y chante en italien mais aussi en russe une collection de pièces lyriques qu’elle a sélectionnées elle-même au sein des Archives de la Bibliothèque Mariinsky de Saint-Petersbourg. Plusieurs d’entre elles n’avaient plus guère été relues depuis 200 ans. Dans “Saint-Petersburg”, nouveau programme d’inédits, la mezzo romaine est accompagnée par l’ensemble sur instruments anciens  I Barrochisti, dirigé par Diego Fasolis, ses partenaires familiers déjà présents dans son précédent album, Mission, révélant langueur et passion d’Agostino Steffani.

En concert les 1er et 7 novembre 2014 au Théâtre des Champs-Elysées à Paris.

Tentez de gagner un exemplaire du nouvel album de Cécilia Bartoli : Saint-Pétersbourg.

 

Prochaine critique complète de l’album cd Saint-Petersbourg de Cécilia Bartoli à venir dans le mag cd dvd livres de classiquenews.com

 

 

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CD. le nouveau cd de Cecilia Bartoli : Saint-Petersburg, à paraître le 13 octobre 2014

BARTOLI-cecilia-cd-decca-new-dc-st-peterburg-saint-petersbourg-DECCA-review-complete-reviewCD. le nouveau cd de Cecilia Bartoli : Saint-Petersburg, à paraître le 13 octobre 2014.  Comme une reine de la glace, en impératrice des neiges, Cecilia Bartoli 2015, couverte de fourrure immaculée, s’annonce à nouveau passionnante. Son nouveau cd intitulé ” St Peterburg” paraîtra le 13 octobre 2014. Il s’agit d’un programme inédit, parcours inédit à travers l’Empire Russe… à l’époque où le goût officiel, lceui de 3 impératrices pro occidentales se tournent avec curiosité vers l’opéra italien.  Comment l’opéra italien est-il arrivé à la Cour de Saint Pétersbourg ? Qui étaient les compositeurs fétiches des tsarines Anne Ière, Elisabeth Ière et Catherine II ? Telles sont quelques unes des questions auxquelles la diva romaine entend apporter des réponses. Soit 11 premières mondiales en provenance de « Saint Petersburg », – perles méconnues des archives du Mariinsky-, composées par 5 compositeurs dont les trois pionniers Dall’Oglio,  Araia, surtout Raupach, puis Manfredini, aux côtés du plus célèbre Cimarosa…:

Programme :
1. F. D. Araia (1709-1770 : La forza del amore e dell’ odio – ‘Vado a morir’
2. H. Raupach (1728-1778 : Altsesta – ‘Razverzi pyos gortani, laja’
3. H. Raupach : Altsesta – ‘Idu na smert’
4. H. Raupach : Siroe, re di Persia – ‘O placido il mare’
5. D. Dall’Oglio (1699-1764), L. Madonis (1690-1767 prologue de La clemenza di tito (Hasse) – ‘De’ miei figli’
6. V. Manfredini (1737-1799) :  – ‘Fra lacci tu mi credi’
7. F. D. Araia : Seleuco – ‘Pastore che a notte ombrosa’
8. H. Raupach : Altsesta – ‘Marcia’
9. V. Manfredini : Carlo Magno – ‘Non turbar que’ vaghi rai’
10. D. Cimarosa (1749-1801 La vergine del sole – ‘Agitata in tante pene’
11. V. Manfredini : Carlo Magno – ‘A noi vivi, donna eccelsa’

 

 

Cecilia Bartoli à Saint-Petersbourg

 

Catherine la grande_Pietro_Antonio_Conte_Rotari,_Portrait_de_la_grande-duchesse_Catherine_AlekseïevnaAprès les compositeurs dédiés aux castrats napolitains (Sacrificium) puis un excellent programme (Mission) ressuscitant un génie musical baroque, égal oulbié de Handel, Agostino Steffani, Cecilia Bartoli s’intéresse à l’automne 2014, au goût européen de trois impératrices russes à l’époque des Lumières, soit au plein XVIIIème siècle.
Pour la première fois, Cecilia Bartoli dévoile quelques pépites de la musique baroque défendues par les Tsarines russes du XVIIIème : les impératrices Anna, Elizabeth et Catherine la Grande. Inspirées par l’Europe des Lumières, les souveraines ont favorisé plusieurs compositeurs italiens et germaniques, livrant pour la cour impériale de Saint-Petersbourg, plusieurs ouvrages oubliés. La diva y chante en italien mais aussi en russe une collection de pièces lyriques qu’elle a sélectionnées elle-même au sein des Archives de la Bibliothèque Mariinsky de Saint-Petersbourg. Plusieurs d’entre elles n’avaient plus guère été relues depuis 200 ans. Dans “Saint-Petersburg”, nouveau programme d’inédits, la mezzo romaine est accompagnée par l’ensemble sur instruments anciens  I Barrochisti, dirigé par Diego Fasolis, ses partenaires familiers déjà présents dans son précédent album, Mission, révélant langueur et passion d’Agostino Steffani.

En concert les 1er et 7 novembre 2014 au Théâtre des Champs-Elysées à Paris.

Tentez de gagner un exemplaire du nouvel album de Cécilia Bartoli : Saint-Pétersbourg.

 

Prochaine critique complète de l’album cd Saint-Petersbourg de Cécilia Bartoli à venir dans le mag cd dvd livres de classiquenews.com

 

 

 

DVD. Rossini : Otello (Bartoli, Zurich, 2012)

rossini otello bartoli osborn tang zurich 2012DVD. Rossini : Otello (Bartoli, Tang, Zurich, 2012). Cecilia Bartoli fait toute la valeur de cette production zurichoise enregistrée ici lors de sa première présentation en 2012 avant sa reprise récente à Paris (TCE, avril/mai 2014). La mezzo est Desdemona, soulignant combien avant Verdi, le profil des protagonistes est finement ciselé sur le plan musical. L’amoureuse victimisée saisie par la jalousie dévorante du maure y paraît dans toute l’étendue du mythe romantique. A l’aune du ténébrisme shakespearien, soulignons comme une arche progressive, l’intensité d’une voix furieuse au I et II, jusqu’à la prière intérieure, déchirante du III. Les contrastes sont éblouissants, l’intelligence dramatique fait feu de tout bois avec un raffinement expressif et vocal, indiscutable. Sa stature tragique s’impose sur scène, à l’écran et de toute évidence en objet uniquement sonore : sans la réalisation scénique et visuelle, sa Desdemona marquerait de la même façon les esprits et les oreilles.

Pour Bartoli et rien que pour elle …

A ses côtés, l’Otello d’Osborn est honnête malgré des aigus plutôt serrés ; plus vibrant et palpitant, donc libre dramatiquement, le Rodrigo de Camarena. Moins évident et naturel le Iago de Rocha, plus contraint et poussé. Evidemment, la mécanique seria rossinienne n’échappe pas au chef Muhai Tang mais son manque de « laisser respirer », ses absences de suspensions sur le fil du verbe languissant ou frénétique, marque les limites d’une direction pointilleuse, étrangère à tout souffle embrasé. Heureusement les instruments d’époque de La Scintilla (l’orchestre sur instruments anciens de l’Opéra de Zurich) apporte une couleur spécifique, très à propos avec le souci linguistique de l’excellente Bartoli.

Moins inspiré qu’auparavant, le filon jusque là poétique Caurier et Leiser dessine un drame vénitien sans aucune ombre ni finesse : une succession de gags et d’idées gadgets qui rétrécisse le mythe romantique et passionnel, en fait divers vériste, misérabiliste, d’une austérité asphyxiante qui atteint les idées même de l’actualisation. Pas sûr que l’image lolita addicted à la bière de Desdemona renforce ou éclaire le jeu de la diva romaine qui n’a pas besoin de tels détails anecdotiques pour sortir et déployer sa fabuleuse furià lyrique (on atteint un comble de ridicule quand la chanteuse s’asperge de bière : mais bien sûr pour rafraîchir son tempérament embrasé ??!!)… L’intelligence eut été d’éviter de tels écarts. Décidément, pour Bartoli et rien que pour elle.

Gioachino Rossini (1792-1868): Otello ossia Il Moro di Venezia. Cecilia Bartoli, John Osborn, Peter Kalman, Javier Camarena, Edgardo Rocha, Liliana Nikiteanu, Nicola Pamio, Ilker Arcayürek. Orchestra La Scintilla. Muhai Tang, direction (1 dvd Decca).

Paris. Théâtre des Champs-Elysées, le 7 avril 2014. Gioacchino Rossini : Otello. John Osborn, Cecilia Bartoli, Edgardo Rocha, Barry Banks. Jean-Christophe Spinosi, direction musicale. Moshe Leiser et Patrice Caurier, mise en scène

otello BartoliOtello ou Desdémone ? Trois ans et demi après une exécution de concert avec les forces lyonnaises, le Théâtre des Champs-Elysées accueille à nouveau l’Otello rossinien, mais cette fois en version scénique, dans une production venue de l’Opéra de Zurich.
Emmenée avec fougue par Cecilia Bartoli, qui incarne la tendre et fière Desdémone, cette mise en scène – immortalisée par un DVD – permet à la diva italienne sa première apparition depuis longtemps dans la capitale avec un rôle complet. La salle est comble, l’atmosphère électrique.
Evacuons d’emblée le sujet délicat : la direction de Jean-Christophe Spinosi et son orchestre en mauvaise forme.
Trac de cette première représentation ou manque de répétitions, on déplore un Ensemble Matheus à la sonorité sèche et acide, sans galbe ni volupté, et aux vents défaillants, notamment des cors naturels multipliant les ratés. A sa tête, le chef paraît peiner à trouver le pouls de cette musique, la cantilène rossinienne ne se déployant jamais pleinement, le rubato des grandes cantilènes semblant souvent problématique à soutenir. Seule la dernière scène, à l’écriture regardant vers l’avenir, multipliant les traits inquiétants, prend d’un coup une force dramatique absente jusqu’ici, mettant en lumière les tensions qui sourdent et ne demandent qu’à éclater.
La mise en scène imaginée par Moshe Leiser et Patrice Caurier fonctionne parfaitement, situant l’action à une époque moderne indéterminée et mettant l’accent sur le racisme dont est victime Otello, propos parfaitement d’actualité.
De l’antichambre d’une salle de réception officielle où les rancœurs à l’encontre du général Maure se déversent, à un café où le combattant solitaire retrouve un semblant de paix à l’ombre de ses racines, tout dans la scénographie fait sens, pour culminer dans la chambre de Desdémone avec un affrontement final presque bestial, d’un grand impact scénique.
Opéra de ténors, cette œuvre en requiert pas moins de trois. Le plus sinueux, le perfide Iago, semble convenir idéalement au timbre très particulier de Barry Banks, par ailleurs vaillant et aux aigus acérés.
Le Rodrigo d’Edgardo Rocha éblouit par son accroche haute et le rayonnement de sa voix, incarnant avec fougue cet amant déçu, mais demeure prudent dans les agilités qu’il détimbre souvent et négocie prudemment. Plutôt que Rossini, on imagine davantage ce jeune ténor dans le répertoire bellinien – il ferait un magnifique Arturo dans les Puritains – et donizettien – Nemorino dans l’Elixir doit lui convenir à merveille –.
Fidèle interprète du rôle-titre, John Osborn affronte crânement une tessiture impossible, et s’il n’est pas le baritenore exigé par la partition, sa performance est à saluer bien bas, tant la voix sonne avec franchise, l’aigu avec aisance et la vocalisation avec naturel. En outre, il se montre particulièrement à l’aise dans cette production qu’il connaît bien, et offre une très belle prestation de comédien.
Aux côtés de l’excellent Elmiro de Peter Kalman et d’un Doge très crédible de Nicola Pamio, l’Emilia de Liliana Nikiteanu, toute de tendresse maternelle, demeure la seule part de douceur dans cet univers exclusivement masculin, dur et inflexible.
Très attendue dans cette Desdémone, Cecilia Bartoli se déchaîne et s’en donne à cœur joie sans pourtant jamais tirer la couverture à elle, faisant admirer avec maestria l’évolution du personnage tout au long de la soirée, portée par une détermination sans faille. Toutes les difficultés du rôle sont surmontées comme autant de défis, et si sa vocalisation aspirée nous laisse toujours aussi perplexes, on ne peut que s’incliner devant un air du Saule littéralement murmuré et flottant en apesanteur, démontrant l’art d’une très grande musicienne.
Une soirée inégale, mais qui aura permis au public parisien de renouer avec cet ouvrage trop peu joué et pourtant digne de figurer aux côtés de son homonyme verdien.

Paris. Théâtre des Champs-Elysées, 7 avril 2014. Gioacchino Rossini : Otello. Livret de Francesco Maria Berio d’après la tragédie éponyme de William Shakespeare. Avec Otello : John Osborn ; Desdemona : Cecilia Bartoli ; Rodrigo : Edgardo Rocha ; Iago : Barry Banks ; Elmiro : Peter Kalman ; Emilia : Liliana Nikiteanu ; Le Doge : Nicola Pamio ; Un gondolier : Enguerrand de Hys. Chœur du Théâtre des Champs-Elysées ; Chef de chœur : Gildas Pungier. Ensemble Matheus. Direction musicale : Jean-Christophe Spinosi. Mise en scène : Moshe Leiser et Patrice Caurier ; Décors : Christian Fenouillat ; Costumes : Agostino Cavalca ; Lumières : Christophe Forey

DVD. Rossoni : Le comte Ory (Cecilia Bartoli, 2011)

ory-rossini-bartoli-dvd-decca-2011-caurier-leiserDVD. Rossini : Le Comte Ory (Bartoli, Tang, 2011). Zurich, décembre 2011. La diva Bartoli casse désormais son image en se mettant en péril, parfois dans des mises en scènes ” décalées ” et pseudo “branchées ” dont le souci apparent (mais déficiant) du théâtre et du sens n’empêche pas comme ici un manque d’idées justes (même foire aux effets anecdotiques dans la mise en scène du Giulio Cesare à Salzbourg l’année dernière…). Les metteurs en scène Patrice Caurier et Mosche Leiser nous ont habitué à plus de finesse, moins de gadgets. Néanmoins, très inspirée, la Bartoli (qui chantait hier le page Isolier) fait une comtesse Adèle délirante ; la diva souligne le délire de la bourgeoise bien comme il faut, trop heureuse de pouvoir enfin se libérer des bienséances, son frère étant parti en croisade… En bête de scène, il faut bien avouer que la mezzo romaine nous régale : facétie, virtuosité, pétulance… un festival de présence scénique et vocale. Il y a de la complexité dans ce Rossini scabreux et souvent imprévisible qui se joue des formes conventionnelles, ce que laisse s’épanouir le jeu inspiré de la diva insatiable et inventive. A ses côtés, son époux à la ville, le baryton Oliver Widmer (Raimbaud, le compagnon d’Ory) ne gâche pas le tableau. Seul le ténor Javier Camarena manque de finesse et d’assurance vocale. Reste que le transfert de l’intrigue de l’opéra créé en 1827, dans la France Gaulliste nous laisse perplexe. La transposition demeure artificielle. Pas sûr que les scénographes relèvent la barre avec leur Otello rossinien (avec Bartoli aussi) qui s’empare du TCE à Paris en avril 2014.
Cette production est sur le plan musical et vocal une alternative au dvd paru précédemment avec Juan Diego Florez et Diana Damrau, couple éblouissant de finesse et de délire sans limites…  dans une production nettement plus lisible et dramatiquement prenante (Virgin classics).

Rossini : Le Comte Ory.  2 dvd Decca.

CD.Bellini : Bartoi chante La Sonnambula (2006)

Cecilia Bartoli ressuscite La Sonnambula dans sa version pour mezzo, 2 cd Decca, “L’oiseau-Lyre”. Amina version mezzo. Nouvelle version pour Amina. La mezzo Bartoli fait valoir un feu sombre et subtil dans le rôle-titre a contrario des versions célébrées voire légendaire pour sopranos. Voilà une réalisation exemplaire et audacieuse qui devrait susciter un vrai débat interprétatif sur le chant bellinien…

Bartoli Cecilia_Sonnambula_bellini_oiseau_lyreAprès une intégrale Virgin Classics défendue de façon vocalement “traditionnelle” (version pour soprano) par Natalie Dessay et son partenaire Francesco Meli (enregistré en 2006 sous la baguette de Evelino Pido, 2 cd Virgin classics), voici enfin cette “autre” intégrale du chef d’oeuvre romantique de Bellini, argumenté de façon nouvelle et originale par la mezzo Cecilia Bartoli. Il s’agit pour la diva romaine d’un accomplissement, au sein de son hommage au chant de Maria Malibran, qui comme Giuditta Pasta, son aînée, incarnait au XIXème siècle, à l’époque de Bellini, la perfection vocale: c’est d’ailleurs pour La Pasta puis Maria Malibran que le compositeur composa le rôle spécifique d’Amina (en 1831). C’est pourquoi nous voici a contrario de la tradition lyrique depuis l’après guerre où les sopranos se sont imposées depuis, dans le rôle-titre, en présence d’une lecture originale, un retour aux sources esthétiques de la partition: Bartoli partage avec ses prestigieuses idoles, Pasta et surtout Malibran, ce timbre sombre et opulent, rond et fruité dont la couleur grave et tragique est taillée pour La Sonnambula.
Cecilia Bartoli excelle dans cette version de la gravité hallucinée où virtuosité, souffle, accentuation, projection du texte, incarnation psychologique sont irréprochables. Quand certains verront application, tension, manque de naturel, nous reconnaissons ce scrupule ô combien délectable et jubilatoire de la cantatrice qui fait de chacune de ses incarnations une réalisation philologique, musicalement indiscutable et sur le plan du style et de l’interprétation, une découverte stimulante…. qui depuis le disque comme ici, appelle naturellement la scène.

Chant suspendu

Le chant de Bartoli montre combien la diva a réfléchi le rôle, son évolution en cours de représentation: certes amoureuse innocente, mais aussi blessée, humilié, affectée par le terrible secret de sa nature somnambulique. Il y a un dédoublement de la personnalité chez Amina frappant -héroïne sincère et aussi victime de forces inconscientes-, qui frappe chez Bartoli: la chanteuse sait constamment colorer chaque mot dans une soie hallucinée, entre intensité consciente et rêverie crépusculaire. Ce chant embrasé, incandescent, inscrit au plus près du mot et du souffle, façonne une conception spécifique qui fait de chaque air d’Amina, la réalisation d’un caractère suspendu, flottant, évanescent qui n’appartient pas à notre monde mais à celui des spectres. Au demeurant, l’action pourrait être celle d’un rêve tant son essence onirique jaillit de la lecture.
Lui donne la réplique le meilleur ténor bellinien de l’heure: parler du style de Juan Diego Florez (en Elvino) le fiancé (psychologiquement sommaire) permet d’envisager ce bel canto limpide, solaire et surtout tendre et naturel propre à Bellini. Le duo “Prendi: l’anel ti dono” offre une superbe leçon de beau chant italien romantique, porté par deux âmes amoureuses et pures. L’opéra est vu à travers le regard du Conte Rodolfo (tout aussi convaincant Ildebrando d’Arcangelo), qui s’avère être le père et le défenseur d’Amina, celui qui dévoile la double nature insomniaque et somnambulique de la jeune femme, injustement accusée.

La précision et la justesse défendue par tous les protagonistes, restitue ce caractère parfois plus élégiaque que dramatique, d’une partition tournée davantage vers l’effusion extatique et la contemplation que le coup de théâtre. De Bellini, les admirateurs aimaient ce flottement suspendu et lunaire de l’action.  Cecilia Bartoli que beaucoup chercheront par manque d’ouverture à comparer avec les versions pour sopranos, atteint pleinement son objectif: sa Sonnambula offre une toute autre approche esthétique du rôle. La distribution idéalement choisie aux côtés de la diva italienne, accompagné par l’orchestre sur instruments anciens de l’Opéra de Zürich, La Scintilla, porte bien son nom: en affinité avec la ciselure de chaque voix, les musiciens scintillent par leur franchise millimétrée, sous la baguette du baroqueux Alessandro de Marchi, passé maître dans l’art de la rhétorique musicale.

A l’écoute de l’album, l’oreille captivée rêve de redécouvrir les bénéfices de l’approche sur la scène…. avec les mêmes solistes. Intégrale dépoussiérante, aboutie, stimulante. Indiscutable et audacieux apport. Viva Bartoli!

Vincenzo Bellini: La Sonnambula. Avec Cecilia Bartoli (Amina), Juan Diego Florez (Elvino), Liliana Nikiteanu (Teresa), Ildebrando d’Archangelo (Il Conte Rodolfo), Gemma Bertagnoli (Lisa), Peter Kalman (Alessio)… Chor des Opernhauses Zürich. La Scintilla. Alessandro de Marchi, direction

Illustration: Cecilia Bartoli devant le portrait peint de Maria Malibran, son modèle vocal (DR)

Télé, Arte. Cecilia Bartoli chante Steffani. Mercredi 26 décembre 2012, 18h40

concerts filmés

Cecilia Bartoli chante Steffani

Arte, mercredi 26 décembre 2012 à 18h40

Steffani le sensuel. Bartoli_steffani_mission_decca_dvd_arte_versaillesTournée au château de Versailles (salon d’Hercule, salle basse, chapelle royale…), cette série d’airs d’opéras révèle le génie lyrique du compositeur oublié Agostino Steffani (1654-1728). La diva romaine Cecilia Bartoli chante Steffani dans le palais baroque des rois de France, en particulier dans la galerie des glaces ou dans le bosquet de la colonnade (Å“uvre maîtresse signée Lenôtre en 1679)… sur le plan musical, la cantatrice retrouve les musiciens du disque Mission paru en septembre 2012: Diego Fasolis et I Barocchisti; les enchaînements sont soignés (air de fureur d’Ermolea puis prière plus tendre d’Alcide (La Cerasta) justement sous les lustres et face aux miroirs historiques (l’une des rares prises directes réalisées in situ); la mezzo s’implique pour nous dévoiler la flamme amoureuse d’un précurseur de Haendel, indiscutablement doué. Avouons notre réserve quant aux airs martiaux (où la voix redouble d’acrobaties coloratoures comme une trompette), l’écriture n’y est guère innovante, tout au plus conforme au premier XVIIIè; mais quand Cecilia évoque la torpeur voire l’extase amoureuse, ressuscitant Niobe, Anfione (le fameux air des Sphères amies, où sur un tapis de cliquetis discrets, la voix évoque l’harmonie céleste…), surtout Sabina (Sphères palpitantes, véritable appel au sommeil attendri par les deux flûtes), l’ivresse et la justesse expressive enchantent.

Cecilia Bartoli chante Steffani

Extase à Versailles


Steffani à Versailles, l’idée est plus que pertinente: elle se justifie même car le diplomate compositeur joua du clavecin devant Louis XIV… A voce sola (mais accompagnée par un théorbe quand le luth véritable aurait été plus adapté et historiquement plus juste), la prière introspective comme une berceuse d’Amami (Niobe) prend tout son sens dans l’écrin des boiseries à la capucine de la salle des chantres attenant à l’orgue de la chapelle royale… Même accomplissement total, dans la magie du cadre, pour cette ” Nuit amie” d’Alcibiade, où l’endormissement le dispute au rêve et à l’enchantement. On rêve demain d’écouter enfin un opéra de Steffani (Niobe, Sabina, Alcibiade?)… à l’Opéra royal.

1 heure de pure délectation musicale dont deux duos avec Philippe Jaroussky. DVD événement de décembre 2012.

Mission. Cecilia Bartoli chante les musiques d’Agostino Steffani. Diego Fasolis, I Barocchisti. 1 dvd Decca 074 3604. Airs d’opéras, Stabat Mater (extrait)…

Prochain défi artistique pour Cecilia Bartoli: Norma de Bellini (version pour Maria Malibran, mezzo). Avec Rebeca Olvera, John Osborn, Michele Pertusi… Orchestra La Scintilla. Giovanni Antonini, direction. Festival d’été de Salzbourg, les 17, 20, 24, 27 et 30 août, Haus für Mozart.

 

CD, critique. Cecilia Bartoli: Sacrificium (2 cd Decca, 2009)

sacrificium cecilia bartoli cd critique annonce classiquenews dossier castrats par cecilia bartoli salzbourg pentecote 2018 withsun 2019CD critique. Cecilia Bartoli: Sacrificium (2 cd DECCA, 2009). En un double album particulièrement soigné sur le plan éditorial, les enregistrements réalisés en février et mars 2009 en Espagne à Valladolid éclairent en particulier l’acrobatie vocale coloratura de l’écriture de Nicola Porpora (1686-1768), maître essentiel de la musique pour castrats au XVIIIè siècle. Ambassadrice de choc et de charme pour la cause des castrés devenus chanteurs, Cecilia Bartoli ajoute les manières d’autres compositeurs dont les opéras sérias mettaient en scène les divins “musici” dans des airs de virtuosité dramatique, taillés pour leur divin gosier… ainsi 2 airs de Carl Heinrich Graun (circa 1703-1759), extraits de ses ouvrages Demofoonte et Adriano in Siria (1746) qui touchent par leur tendresse digne et blessée; mais aussi paraissent Leonardo Leo (1694-1744), Leonardo Vinci (circa 1696-1730), Francesco Araia (1709-1770)… soit 11 airs enflammés entre tendresse hallucinée et rage expressionniste, atteignant des cimes vocales vertigineuses.

La diva romaine ajoute également en un 2è cd, les 3 airs les plus significatifs et les plus intenses de la littérature pour castrati/musici: l’époustouflant “Son qual nave” extrait d’Artaserse (1734) du frère de Farinelli, Riccardo Broschi (circa 1698-1756), monument de vocalises tissé pour la voix légendaire de… Farinelli… enfin, le nom moins célèbre “Ombra mai fu (Serse de Haendel, 1738) et “Sposa, non mi consci”, de Merope de Geminiano Giacomelli (circa 1692-1740): sombre prière d’Epitide frappé par le destin, proche de l’accablement et de l’anéantissement des forces vitales… En plus d’une étendue de registres surprenante, ayant gagné de superbes graves aux côtés de ses aigus décochés et brillantissimes (écouter ici les extrêmes des registres dans Qual farfalla de Porpora), Cecilia Bartoli apporte une science nuancée du verbe qui lui permet de colorer par le sentiment autant que par la puissance et l’agilité, chacun des airs sélectionnés.

En presque 1h40 de rêve vocal et de voyage parthénopéen à remonter le temps, la magicienne Bartoli, à l’agilité de souffle et d’expression souveraine, s’impose sans rivale. Son beau chant devient aussi architecture du sentiment et du sens: c’est là que se glisse et s’affirme l’apport capital de la cantatrice, réfléchie, déterminée, pugnace, outre son habituel tempérament dramatique pour défricher, surprendre… séduire et convaincre. Si le chant des castrats demeure un mythe, l’approche de la diva assoluta Bartoli réalise un tour de force qui ajoute à la fascination de ce phénomène d’ivresse lyrique.

CLIC D'OR macaron 200L’édition dite “deluxe” en 2 cd comprend une notice documentaire très argumentée qui permet de comprendre la démarche de la cantatrice admirative de ses prédécesseurs baroques à Naples. L’album en hommage aux castrats sacrifiés sur l’autel de la perfection vocale, contient ainsi “le précis du castrat”, véritable somme encyclopédique qui présente classés par entrées alphabétiques, de très nombreux articles sur le monde des castrats: compositeurs, villes, opération, anecdotes, évidemment chanteurs parmi les plus légendaires dont Caffarelli, Farinelli, Senesino… mais aussi Porporino, Carestini, Balatri… auquel un article biographique est dédié.

Gravure événement (donc élue ” CLIC ” de CLASSIQUENEWS) dont la sortie officielle est annoncée au 5 octobre 2009.