Qu’ont en commun Caldara, Cherubini, Cimarosa, Galuppi, Gassmann, Hasse, Jommelli, Leo, Myslivecek, Paisiello, Pergolesi, Piccini, Sarti, Traetta, Vivaldi ? Déjà le fait de défendre, chacun spécifiquement, la brillante colonie d’écritures réalisant ce pasticcio improbable dont l’assemblage et la conception (sans récitatifs) sont bien contemporains et relèvent d’un goût prononcé pour l’aria. italien Les 16 compositeurs ainsi sélectionnés ont diversement traité le thème de l’Olympisme, valeur à l’honneur de l’été 2012 et que Naïve sait régénérer par cette savante et très originale compilation.
Pasticcio métastasien
Tous ont mis en musique le livret de l’Olimpiade de Pietro Metastasio, soit le poète emblématique de l’esthétique du seria amoureux et héroïque toujours hautement moral à l’opéra, tout au long du XVIIIè siècle; si toute partition d’une seule main peut parfois faiblir, aucune réserve à ce brillant aréopage de manières et de sensibilités baroques et néoclassiques qui par leur diversité et leur placement au long du parcours olympique, savent relancer la tension dramatique. Les écritures sont évidemment intéressantes; seule réserve: la faiblesse des contrastes dans l’enchaînement des caractères d’une pièce à l’autre: tout tend à une unicité grise sur le plan dramatique.
Les 24 airs, duo (un seul hélas) et choeurs de l’opéra qui suit ainsi le canevas de Métastase profitent néanmoins des styles contrastés et caractérisés des compositeurs réunis, italiens en majorité, tous du XVIIIè: chacun de 1733 à 1784 a composé son Olimpiade. Il s’en suit une succession d’arias de solistes, souvent galants, alanguissements émotionnels (Mentre dormi de Vivaldi par la mezzo Franziska Gottwald, toute en murmures), extases suspendues de sentiments dits ou tus auxquels l’imagination bondissante de l’orchestre Baroque de Venise apporte variété et couleurs (n°6 du CD1: suavité élégiaque d’Aristea: très solide et musicale Ruth Rosique dans un air haletant signé Paisiello).
Saluons aussi le belle intensité du ténor américain Nicholas Phan (qui sait défendre ailleurs les modulations suspendues et poétiques de Britten).
Nerf, nervosité toute en galbe musclé pour les airs de CD2, de Jommelli (très développé aria de Megace: Lo seguitai felice.. par Romina Basso avec cor et haubtois à la fête)) et surtout Cherubini (Air de Megacle: Se cerca, se dice par la même Romina Basso, toujours étonnamment proche du texte, engagée, ardente); c’est enfin, Galuppi et le moins connu Davide Perez (conviction triomphante d’Argene, très incarnée par Karine Gauvin)… Même découverte toute sertie d’élégante suavité avec l’air unique de
Cimarosa: Non so donde viene… où le ténor Nicholas Phan déjà cité, fait valoir la
séduction de son chant de grâce.
Même s’il s’agit d’Olympiades, l’esprit individuel prévaut largement: moins tenue d’équipe (unique duo concluant l’acte I: Megacle/Aristea: Ne’giorni tuoi felici de Florian Leopold Gassmann qui y entrelace avec fièvre, les serments croisés de deux âmes amoureuses et languissantes) que succession d’actes déclaratifs et souvent purement virtuoses et démonstratifs pour chaque chanteur…
Tout cela est habilement réalisé, porté par un plateau inspiré, à la recherche de caractérisations… Reste que l’enchaînement des airs confine à la mécanique expressive, les climats entre chaque épisode étant jusqu’à l’orchestration, -preuve d’une esthétique élégante européenne-, d’une égalité de ton et de caractère. Les instrumentistes savent vaillamment diversifier leur partie; seule la direction du chef manque comme souvent dans ce répertoire d’une vraie compréhension des dynamiques, des contrastes, des nuances… d’autant plus absentes que les instrumentistes en demanderaient visiblement davantage côté caractérisation. L’originalité du propos, la diversité qualitative des sélections retenues méritent la meilleure écoute. Les fans d’opéra métastasien seront comblés.
L’Olimpiade: The opera. Pasticcio contemporain. Airs des opéras Olimpiade d’après Metastasio de Hasse, Leo, Sarti, Galuppi, Jommelli, Cherubini, Cimarosa, Vivaldi, Myslivicek, Traetta, Pergolesi, Piccini, Perez,… Romina Basso (Megacle), Franziska Gottwald (Licida), Karina Gauvin (Argene), Nicholas Phan (Clistene), Ruth Rosique (Aristea), Nicholas Spanos (Aminta)
Venice Baroque Orchestra. Markellos Chryssicos, direction. 2 cd Naïve V 5295. 2h03 mn. Note: @@@