FRANCE MUSIQUE, dim 10 juin 2018, 16h. FRANCK : Sonate violon / piano. La Tribune des critiques s’intéresse au sommet de la musique de chambre en France en 1886. Depuis 16 ans, le compositeur est le pilier d’un renouveau de la musique française, membre fondateur de la Société nationale de musique avec Saint-Saëns, sursaut artistique après la défaite de 1870. Le chef d’oeuvre est créé à Bruxelles en décembre 1886, puis 1887 à la Société nationale, défendue par le violoniste Eugène Ysaye son dédicataire et créateur. Proust après une écoute, en déduisit sa célèbre petite phrase « s’élevant pendant quelques instants au dessus des ondes sonores »… emblème de la Sonate de Vinteuil (Du côté de chez Swann), clé de son cycle A la recherche du temps perdu. Après Lalo, saint-Saëns, Fauré, Franck apporte à la musique de chambre française ses lettres de nobleses, des accomplissements qui égalent la littérature germanique. Avec son Quintette et son futur Quatuor, la Sonate en la majeur cristallise l’esprit de recherche (expérimental) et l’équilibre (volupté dont parle Proust) qui fusionnent étonnamment chez Franck. Fidèle à lui-même, le compositeur né à Liège, utilise l’idée cyclique (un simple intervalle de tierce) qui revient régulièrement mais sans jamais s’imposer nettement au motif secondaire, de façon plus allusive et toujours renouvelée.
Quatre mouvements en marque le développement. L’Allegro 1 est court, expose 2 motifs sans les développer, puis les fusionne dans l’esprit d’une berceuse sereine. L’Allegro 2 est construit comme un lied en 3 partie (D’Indy). S’y affirme par contraste, une blessure tragique, qu’exacerbent des accents nerveux, sur un rythme haletant et syncopé : la passion échevelée, noire et sombre s’impose ici. Sans cadre véritable, le 3è mouvement noté « Recitativo fantasia, ben moderato » est le plus novateur, porté par le seul lyrisme de son thème : un récitatif libre dérivé de l’idée cyclique et qui se conclut piano. L’Allegro 3 (finale), est poco mosso : c’est rondeau français, alternant refrain et couplets dans des tonalités différentes.
Il est urgent de réestimer l’écriture de Franck, l’un des rares compositeurs qui à l’époque où s’impose le wagnérisme, sait trouver sa voie propre, puissante, originale, capable de recycler et retraiter, voire sublimer le modèle du ténébrisme wagnérien en France. Après une carrière sage et laborieuse comme organiste réputé, vénéré (sainte-Clotilde dès 1858), le génie de César Franck se dévoile dans les années 1880, avec son Quintette, sa Sonate, et aussi sa sublime Symphonie en ré mineur de 1889.
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FRANCE MUSIQUE, dim 10 juin 2018, 16h. La tribune des critiques. Sonate pour violon piano en la majeur (1886) de César Franck / chef d’oeuvre de la musique de chambre française qui a inspiré à Marcel Proust sa fameuse Sonate de Vinteuil…
