vendredi 29 mars 2024

DVD. Mozart : La flûte enchantée (Harnoncourt, Salzbourg 2012)

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Die-Zauberflote-Sony-BD_155x225DVD. Mozart : La flûte enchantée (Harnoncourt, Salzbourg 2012). Confirmation : Nikolaus Harnoncourt est un immense mozartien. Il n’a cessé de le montrer à … Salzbourg. Cette Flûte en donne une nouvelle preuve tant par sa profondeur, son humanité, sa joie théâtrale aussi car il s’agit d’un opéra populaire dans la meillure acceptation du terme : accessible, enchanteur, où le charme et l’innocence font mouche. Le Tamino de Bernard Richter convainc dans une production qui rejoint les meilleures réalisations salzbourgeoises : pari réussi donc pour l’ouverture du festival 2012. Simultanément à la sortie de ce dvd miraculeux, Sony classical édite aussi une manière de testament musical et mozartien : les 3 dernières Symphonies conçues comme un « oratorio instrumental ». Lire notre critique des 3 dernières symphonies de Mozart par Nikolaus Harnoncourt, CLIC de classiquenews.

Divin Harnoncourt

Kleiter-Richter-Zauberflote-SalzburgDavantage que la réalisation scénique, c’est essentiellement l’interprétation musicale qui force l’admiration. Nikolaus Harnoncourt renouvelle le scintillement instrumental, souligne des combinaisons, des accents, rend compte d’une richesse d’écriture inouï que le chef régénère avec un appétit de premier venu, d’autant que la maestro pétillant et profond peut compter sur la complicité superlative des instrumentistes de son orchestre sur instruments anciens : le Concentus Musicus de Vienne, fondé en 1953-, modèle des ensembles baroques : le sens des phrasés, la précisions des attaques comme des ornements, le timbre, la couleur, le format original du son… tout œuvre à un nouveau spectre musical, plus caractérisé, plus nuancé ; certes moins puissant mais d’une teinte rare qui produit de nouvelles sonorités. Alexander Pereira a réussi à obtenir le retour du grand Nikolaus à Salzbourg car leur relation de travail remonte à Zurich quand le directeur du Festival était directeur de l’Opéra. Réinvestie par de tels orfèvres (et même des vétérans de la pratique « historiquement informée », réactualisant les coups d’archet entre autres-, Alice Harnoncourt, épouse de Nikolaus est comme lui … octogénaire-, la partition éblouit de nouveaux feux, frappant dans l’interaction entre musique et situations, par l’intelligence de l’écriture mozartienne. Harnoncourt s’entend à merveille à exprimer la part si humaine d’un Mozart touché par la grâce, ému aussi, surtout face au destin autant tragique que comique de ses personnages (Pamina, Papageno ne vont-ils pas tenté de sa donner la mort par dépit existentiel ?)…

Et le plateau vocal ? Bon Sarastro de Georg Zeppenfeld ; donc le Tamino (ardent, de plus en plus lumineux) de Bernard Richter, la Pamina de Julia Kleiter hélas tendue dans les aigus. Le Papageno de Markus Werba apporte une contribution sans défaillance, un peu raide (la Papagena est immédiatement mieux chantante, plus naturelle et exaltée), et la Reine de la nuit de Mandy Friedrich très engagée délivre un portrait éruptif d’une mère honteusement manipulatrice.

Schwarz-Kleiter-Richter-WerbaSur les planches, Jens-Daniel Her­zog accumule des idées sans beaucoup de cohérence ni d’esthétisme : son approche théâtrale relève de l’atelier expérimental, un bazar illustré qui combine par fragments des séquences et des visuels plutôt éclectiques. Se fondant sur la volonté de Mozart de développer un opéra populaire, le scénographe garde un œil réducteur sur le fil de l’histoire, schématisant à l’extrême une histoire plus complexe entre le bien et le mal sur la manipulation au nom d’un idéal, où les vieilles haines générationnelles – Sarastro et sa secte (ici satanique) et la Reine de la nuit-, s’affrontent, sacrifiant leurs enfants dans un labyrinthe désenchanté, sans issue. La musique comme le sens du conte maçonnique expriment une toute autre réalité que cette lecture prosaïque et linéaire aux costumes laids (palmes de l’horreur pour les blouses et les uniformes en cosmonautes des prêtres de la fratrie de Sarastro ; passons par ailleurs, l’option des 3 garçons vieillis artificiellement, – ne sont-ils pas de vrais sages, guides utiles dans l’initiation de Tamino). Tout cela manque et d’humour léger et d’onirisme enchanteur. S’il n’était la musique divinement dirigée, le spectacle d’ouverture de Salzbourg 2012 manquerait singulièrement de poésie visuelle, d’enchantement. Après tout ne s’agit-il pas de la Flûte d’enchantée ?

Nouvelle production de la Flûte enchantée de Mozart dans une mise en scène de Jens-Daniel Herzog et sous la direction de Nikolaus Harnoncourt, festival de Salzbourg 2012.

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Die Zauberflöte, opéra en deux actes KV 620 (1791). Livret d’Emanuel Schikaneder d’après Lulu ou la Flûte enchantée d’August Jacob Liebeskind

Konzertvereinigung Wiener Staatsopernchor
Concentus Musicus Wien
Nikolaus Harnoncourt, direction
Jens-Daniel Herzog, mise en scène
décors & costumes : Mathis Neidhardt
éclairages : Stefan Bolliger
préparation des chœurs : Ernst Raffelsberger
Avec Georg Zeppenfeld (Sarastro), Bernard Richter (Tamino), Mandy Fredrich (Königin der Nacht), Julia Kleiter (Pamina), Sandra Trattnigg (Erste Dame), Anja Schlosser (Zweite Dame), Wiebke Lehmkuhl (Dritte Dame), Tölzer Knaben (Drei Knaben), Markus Werba (Papageno), Elisabeth Schwarz (Papagena), Rudolf Schasching (Manostatos), Martin Gantner (Sprecher), Lucian Krasznec (Erster Geharnischter / Erster Priester), Andreas Hörl (Zweiter Geharnischter). 2 dvd Sony classical. Parution : octobre 2014.

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