vendredi 29 mars 2024

CD événement, compte rendu critique. MIRAGES / Sabine Devieilhe, soprano (1 cd ERATO)

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DEVIEILHE soprano cd mirages concert critique review cd par classiquenews Sabine-Devieilhe-Mirages_actu-imageCD événement, compte rendu critique. MIRAGES / Sabine Devieilhe, soprano (1 cd ERATO). En couverture sur un azur d’ange incarné, la jeune femme sourit, yeux levés au ciel : en signe de satisfaction et de plénitude ; augures d’une ivresse lyrique permise aux auditeurs, d’une intensité juste rarement écoutée jusque là. Hier Rameau (dont elle chante la passion et ses vertiges baroques) puis Mozart (à travers la figure des sœurs Weber, sujets de la passion de Wolfgang), voici venir le temps du romantisme français, c’est à dire ce style vocal et cette période musicale où l’art d’articuler la fameuse déclamation française héritée de l’âge baroque et des Lumières, s’est accordée à la riche texture de l’orchestre, souvent brillamment coloré. Il faut une diseuse mais aussi une voix puissante et claire capable de porter un texte au dessus, et à travers de l’orchestre. Pari relevé, et chant vainqueur pour ce nouvel album « Mirages » où la voix maîtrisée, rayonnante de la soprano coloratoure Sabine Devieilhe réalise un tour de force, en subtilité, couleur, nuances; justesse d’intonation. Enregistré en février et mars 2017 pour Erato, ce récital en impose autant par la sureté et l’intelligence de la diva actrice et chanteuse, que la sélection des pièces choisies en un programme cohérent qui joue d’heureuses transitions. On se délecte de la finesse de Madame Chrysanthème ; de l’ivresse sensuelle et amoureuse des héroïnes prêtes à mourir : Lakmé (air des clochettes), Mélisande, pour l’amour qui les portent au delà d’eux-mêmes. Parmi les mélodies, on reste saisi par l’énigmatique mélopée, à la fois envoûtante et bien incarnée de La Mort d’Ophélie de Berlioz, sommet de la littérature poétique, de l’ère romantique à ses débuts.
CLIC_macaron_2014La jeune diva déploie une aisance expressive, une précision nuancée qui accompagnée au piano ou par l’orchestre se montre d’une exceptionnelle acuité : ciselant le texte autant que la note, cherchant, explorant, trouvant et colorant chaque caractère. Jamais maniérée ni forcée, le chant se montre allusif, naturel, percutant. Par l’étoffe veloutée de son timbre, des suraigus jamais démonstratifs et toujours charnus, « la Devieilhe » surclasse son aînée Dessay, dans Delibes, pour une Lakmé éblouissante d’intensité humaine (dans ce sens aussi touchante par cette tendresse à hauteur humaine et qui s’enfonce déjà dans la mort), aussi crédible que sa consœur, – autre jeune diva à suivre désormais, Jodie Devos dont CLASSIQUENEWS avait témoigné de son excellente prise de rôle dans Lakmé justement en janvier 2017 : VOIR notre reportage Lakmé à l’Opéra de Tours par Benjamin Pionnier et Jodie Devos). Sa vérité sublime le rôle par son épaisseur et sa simplicité écartant de fait toute virtuosité stratosphérique et artificielle. Ainsi l’on comprend que Lakmé ne se réduit pas uniquement à son air virtuose et décoratif des clochettes… loin s’en faut. Sabine Devieilhe, comme dans sa Mélisande diaphane et pourtant très présente, souligne la vérité du personnage, sa profondeur, son épaisseur, sa mémoire.
Et d’ailleurs Jodie Devos paraît ici pour la séquence extraite de l’acte II de Thaïs, autre âme foudroyée par l’amour, mais celui ci sacré et spirituel, jusqu’à l’immatérialité sensuelle et le renoncement total. On regrettera cependant le choix des Siècles, orchestre certes aux timbres d’époque, mais un peu trop court et infiniment moins nuancé que la diseuse Devieilhe, plus riche en accents fins et subtilement caractérisés. Orchestre et chanteuse avaient réalisé déjà Lakmé à Paris en 2014, et la phalange de FX Roth nous avait paru étrangement percussive et sèche. Heureusement, la juvénilité tout en nuances de la soprano coloratoure française, – rappelons le, révélée il y a quelques années, par Jean-Claude Malgoire à Tourcoing et qui l’avait invité pour une fascinante Mélisande justement, confirme un tempérament à la fois sûr, puissant et très ciselé. Pour la voix et le chant intelligent de la diva : ce programme est un must absolu. VOIR aussi notre reportage vidéo PELLEAS et MELISANDE de DEBUSSY par Sabine Devieilhe, sous la direction de Jean-CLaude Malgoire, avril 2015

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CD, compte-rendu, critique. MIRAGES : opera arias and songs. Sabine Devieilhe, soprano. Durée : 1h03mn – 1 cd ERATO.

• MESSAGER, Madame Chrysanthème, « Le jour sous le soleil béni »
• DEBUSSY, Pelléas et Mélisande, « Mes longs cheveux descendent »
• DELIBES, Lakmé, « Où va la jeune hindoue » (Air des clochettes)
• DELAGE, 4 Poèmes hindous
• DEBUSSY, La Romance d’Ariel
• DELIBES, Lakmé, « Viens, Malika » (Duo des fleurs)
• STRAVINSKI, Le Rossignol, Chanson du Rossignol
• THOMAS, Hamlet, « A vos jeux, mes amis »
• BERLIOZ, La Mort d’Ophélie
• MASSENET, Thaïs, « Celle qui vient est plus belle »
• KOECHLIN, Le Voyage
• DELIBES, Lakmé, « Tu m’as donné le plus doux rêve »

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