samedi 3 mai 2025

Toulouse. Halle Aux Grains. 14 janvier 2011. Igor Stravinski, Joseph Haydn, Béla Bartók… Budapest Festival Orchestra ; Direction : Ivan Fischer.

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Le Budapest Festival Orchestra à Toulouse

En résidence à Toulouse pour trois jours Le Budapest Festival Orchestra et Ivan Fischer ont subjugué le public toulousain par une musicalité rare dans un programme de musique d’Europe centrale (Autriche, Hongrie, Russie) admirablement construit. La création du Cercle des Grands Interprètes a permis cette résidence et le concert pour les lycéens en après-midi.

Dans les activités humaines ce n’est pas d’avoir des idées qui représente le génie mais bel et bien la constance et la détermination afin de rien céder sur son désir, dans un combat avec la réalité qui peut être féroce. Ivan Fischer aurait pu courir la planète, couvert d’éloges largement méritées, invité par les orchestres les plus prestigieux et les maisons d’opéra à la meilleur notoriété. Sans y renoncer tout à fait, car sa carrière personnelle est considérable, il a décidé de créer avec Zoltan Kocsis un orchestre à Budapest en 1983. Musiciens du plus grand talent, méthodes de répétition nouvelles, vaste programme de concerts ouverts sur l’audace ont été un travail constant depuis 28 ans. Le succès a été progressif, d’abord public à Budapest et lors des tournées. Puis de nombreux CD ont été couronnés par des distinctions suprêmes dans le monde entier. Aujourd’ hui le Budapest Festival Orchestra compte parmi les meilleurs du monde. En résidence pour deux concerts et une animation-concert pour les jeunes, la phalange roumaine et son chef charismatique ont subjugué la ville rose. Les deux concert faisant quasiment salle comble et bien plus rare : taire les tousseurs !

Constance d’Ivan Fischer

Le début du concert avec de très courtes pièces de Stravinski nous livré de belles surprises. D’abord un chef surgissant de l’orchestre sans accepter d’être applaudi et qui dirige de suite. D’emblée le sens du tactus, l’organisation des plans sonores , l’humour et la fine musicalité ouvrent l’esprit avec un Stravinski enchanteur. Puis pour le Tango un altiste et une violoniste se débarrassent de leur instrument pour se livrer à un tango de salon de la plus grande élégance avec des portés suggestifs. L’humour envahit la salle et le public est d’emblé séduit par ce mélange de perfection stylistique et instrumentale et un plaisir à faire la musique ensemble communicatif. Durant tout le concert, les sourires diffusent entre le chef et l‘orchestre et entre les musiciens. Ce ne sont pas les qualités instrumentales qui font de cet orchestre une merveille mais la cohésion, la musicalité inouïe qui se retrouve dans le plus petit motif. On sent un travail accompli dans le plaisir du partage qui jamais n’est oublié. Le son de cet orchestre est très attachant car il est vrai. Quand tant d’orchestres recherchent un son lisse, parfait et passe partout, le Budapest festival Orchestre a une personnalité par une multitudes de couleurs assumée. Ainsi les symphonies de Haydn sont pour votre serviteur souvent semblables en un ennuie admiratif distant. Avec de tels interprètes, la vie diffuse par une mise en place impeccable, quelques petites variations de tempo, des phrasés subtilement amenés, mais surtout des couleurs admirablement variées. La moindre note de cor, de hautbois, de trompette, parfois juste dans un accord, éveille l’esprit et fait dresser l’oreille. Élégance, classe, précision et humour sont les qualités de la direction d’Ivan Fischer.

Bela Bartok idiomatique

Après cette première partie de concert spirituelle ayant ouvert l’esprit, le concerto pour orchestre de Bartok en deuxième partie, a été un moment de grâce rare. Fond et forme, esprit et respect du texte n’ont fait qu’un tout admirable qu’il paraît vain de détailler. On ne peut rêver interprétation plus aboutie, ne cédant en rien sur la splendeur sonore, la mise en valeur du talent d’orchestrateur de Bartok, le sens d’une partition en forme de manifeste pour la vie. La musique circule entre tous les musiciens, tout se répond se cherche, se cache pour mieux surprendre. La spacialisation est parfaitement lisible avec la disposition orchestrale « viennoise ». Ivan Fischer connaît la partition par cœur et dans un état de bonheur partagé nous ouvre l’âme à celle de Bela Bartok. Dépassant la dureté de sa condition (comment le lugubre du troisième mouvement nous a fendu le cœur !), le compositeur nous offre une coda rayonnante de force et de puissance. Tous les instrumentistes font honneur aux exigences de la partition, sans jamais tirer la couverture à soi, toujours dans le partage, l’écoute admirative. Le collectif au service du plaisir individuel prodigué a chaque membre du public. Un très grand moment de musicalité intensément vécu par des auditeurs très concentrés. En bis l’originalité et la puissance de l’interprétation de l’Intermezzo de Cavaliera Rusticana nous a rappelé quel chef de théâtre est Ivan Fischer et quel orchestre de fosse le Budapest Festival Orchestra peut être. Toujours au sommet !

Toulouse. Halle Aux Grains. 14 janvier 2011. Igor Stravinski (1882-1971) : Scherzo à la russe ; Tango. Joseph Haydn (1732-1809) : Symphonie n°92, « Oxford », Hob.I : 92 ; Béla Bartók (1891-1946) : Concerto pour Orchestre, Sz 116,BB 123. Budapest Festival Orchestra ; Direction : Ivan Fischer.

Illustration: Ivan Fischer (DR)
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