Les MĂ©tamorphoses de Strauss par l’Orchestre National de Lille

BLOCH alexandre ON LILLE metamorphosesLILLE, ON LILLE : 7 et 8 oct 2020 : MĂ©tamorphoses. Les 23 cordes solistes requises pour rĂ©aliser l’une des ultimes partitions du compositeur bavarois Richard Strauss (10 violons, 5 altos, 5 violoncelles, 3 contrebasses), tĂ©moignent de la difficultĂ© et des dĂ©fis multiples pour la rĂ©ussir : après le bombardement de l’opĂ©ra de Munich, le 2 oct 1943, Strauss anĂ©anti semble recueillir toute la dĂ©solation d’un monde en perdition. Lui qui a dĂ©jĂ  vĂ©cu les horreurs de la première guerre (l’orchestre cosmique tellurique de son opĂ©ra La Femme sans ombre, en tĂ©moigne) se concentre dans une nouvelle Ĺ“uvre chambriste rĂ©servĂ©e aux seules cordes. MĂ©ditation, lamentation, « deuil de Munich », citĂ© natale oĂą furent créés tous ses chefs d’œuvres, les MĂ©tamorphoses sont aussi portĂ©es par un esprit supĂ©rieur, universel et humaniste qui absorbe les vertiges et les secousses d’une civilisation certes ruinĂ©e mais dĂ©jĂ  promise Ă  se rĂ©gĂ©nĂ©rer, en une mĂ©tamorphose inĂ©luctable et probablement profitable : c’est dĂ©jĂ  une thĂ©matique de la continuitĂ© et du passage dĂ©jĂ  abordĂ©e dans l’opĂ©ra Ariane Ă  Naxos (oĂą l’hĂ©roĂŻne aux portes de la mort, renaĂ®t miraculeusement grâce Ă  sa rencontre avec ….Bacchus).

 

 

 Les MĂ©tamorphoses de Strauss : le nouveau dĂ©fi des cordes de l’ONL

 

Dans sa villa de Garmisch, en mars et avril 1945, Richard Strauss compose ce chef d’œuvre Ă  la texture dense, mais claire et profonde, créées ensuite Ă  Zurich (Tonhalle, en janvier 1946) pour ne plus jamais richard-strauss.jpgquittĂ© l’affiche. Tous les pupitres de cordes des grands orchestres au monde aiment affronter la polyphonie inquiète et sinueuse, enveloppante et hypnotique des MĂ©tamorphoses. C’est pour les instrumentistes du National de Lille, un travail qui prolonge l’engagement et l’exigence abordĂ©s en ouverture de la nouvelle saison 2020 2021 avec le Divertimento pour cordes de Bartok (concert d’ouverture du 24 sept dernier / couplĂ© avec le Concerto pour violoncelle n°1 de Haydn / Soliste : Edgar Moreau, violoncelle : lire ici notre compte rendu critique du concert). En effectif rĂ©duit, les musiciens sous la direction d’Alexandre Bloch, directeur musical du National de Lille cultivent une curiositĂ© et une vitalitĂ© partagĂ©e Ă  l’échelle du collectif (concert prĂ©sentĂ©e Ă  Lille, Nouveau Siècle puis Ă  la Philharmonie de Paris).

Ce second programme dirigĂ©e par Alexandre Bloch comprend aux cĂ´tĂ©s des MĂ©tamorphoses (autour de 27 mn selon les versions), les Nocturnes de Bruch et Tchaikovski, Variations sur un thème rococo du mĂŞme Tchaikovsky, avec la complicitĂ© du violoncelliste russe Mischa Maisky. Photos : Alexandre Bloch, directeur musical de l’ON LILLE Orchestre National de Lille / Richard Strauss (DR).

 

 

 

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Programme

TCHAÏKOVSKI : Nocturne opus 19 n°4
BRUCH : Kol Nidrei pour violoncelle et orchestre opus 47
TCHAÏKOVSKI : Variations sur un thème rococo pour violoncelle et orchestre opus 33
R. STRAUSS : Métamorphoses pour 23 cordes solistes opus 142

Mischa Maisky, violoncelleboutonreservation
Orchestre National de Lille
Alexandre Bloch, direction

 

 

 

LILLE, Auditorium du Nouveau Siècle
Mercredi 7, jeudi 8 octobre 2020, 20h

RÉSERVATIONS, INFOS :
https://www.onlille.com/saison_20-21/concert/metamorphoses/

 

 

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Diffusion en direct sur la chaîne YOUTUBE de l’ON LILLE
ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE
Jeudi 8 octobre 2020, 20h
https://www.youtube.com/user/ONLille

Tarifs : 6 Ă  55 euros
Réservations sur www.onlille.com
à la boutique de l’Orchestre national de Lille
3 place Mendès France – Lille
Renseignements : 03 20 12 82 40
Du lundi au vendredi : 10h – 18h

 

 

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PARIS, Philharmonie
Vendredi 9 octobre 2020, 20h30
RÉSERVATIONS, INFOS : https://philharmoniedeparis.fr/fr/activite/concert-symphonique/21495-metamorphoses?date=1602268200

 

 

 

APPROFONDIR

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LIRE notre présentation de la nouvelle saison 2020 2021 de l’ON LILLE
ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE :
http://www.classiquenews.com/on-lille-orchestre-national-de-lille-concerts-douverture-saison-2020-2021/

SAISON 2020 2021 de l'Orchestre National de LILLEON LILLE : saison 2020 – 2021 / ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE. A partir des 24 et 25 sept prochains, l’Orchestre National de Lille fait sa rentrĂ©e… Somptueux Ă©clectisme qui grâce Ă  plusieurs fils rouges approfondit encore ce geste dĂ©sormais caractĂ©risĂ©, acquis sous la direction du chef Alexandre Bloch, directeur musical depuis 2016. La saison dernière, lâ€Ă©popĂ©e mahlĂ©rienne (Symphonies de Mahler) a ciselĂ© un son et une articulation passionnante Ă  suivre, dont classiquenews s’est fait l’écho (reportage spĂ©cial Symphonie n°8 de Mahler). Sur le thème gĂ©nĂ©rique du HÉROS, l’Orchestre lillois interroge la fabuleuse odyssĂ©e des compositeurs « hĂ©roĂŻques », de Berlioz (Symphonie Fantastique, le 18 fĂ©v 2021) Ă  Richard Strauss (Ein Heldenleben / une vie de hĂ©ros, 11 et 12 fĂ©vrier 2021)… de Beethoven (Eroica par Alexandre Bloch, le 18 nov ; 5è symph par JC Casadesus, les 20 et 21 avril 2021) Ă  Poulenc et Bartok… hymne flamboyant exprimant comme en miroir les mystères de l’être humain – vertiges et espoirs, tout en permettant Ă  la formidable forge orchestrale de se dĂ©voiler… mais la richesse de cette nouvelle saison 2020 2021 s’affirme aussi par la prĂ©sence de nombreuses femmes chefs d’orchestre, invitĂ©es Ă  diriger l’ON LILLE Orchestre National de Lille ; les Ĺ“uvres de Mozart, le nouveau principe des artistes en rĂ©sidence, l’anniversaire du chef fondateur Jean-Claude Casadesus, le renouvellement permanent des formes de concerts pour une expĂ©rience orchestrale de plus en plus captivante au fil des programmes prĂ©sentĂ©s, malgrĂ© la pandĂ©mie actuelle, et dans le strict respect des mesures sanitaires… EN LIRE PLUS

COMPTE RENDU, concert. VIENNE. CONCERT DU NOUVEL AN, Wiener Philharmoniker / CHRISTIAN THIELEMANN (1er janvier 2019)

COMPTE RENDU, concert. VIENNE, Musikverein, le 1er janvier 2019. CONCERT DU NOUVEL AN, Wiener Philharmoniker / CHRISTIAN THIELEMANN. A 59 ans, le wagnĂ©rien et straussien (Richard), Christian Thielemann, plus habituĂ© de Dresde et de Bayreuth que de Vienne, affecte un geste un rien prussien, … possède-t-il rĂ©ellement le sens de l’élĂ©gance viennoise, celle des Johann Strauss fils et père, Josef et Edouard aussi ? Car les valses et Ă©pisodes symphoniques de Johann fils, vedette viennoise majeure pour cet esprit lĂ©ger, et davantage, appellent un caractère spĂ©cifique entre abandon et allusion, suggestion et subtilitĂ© qui doit Ă©blouir non pas dans cette « lĂ©gèreté » partout annoncĂ©e (qu’est ce que cette musique dite “lĂ©gère” en rĂ©alitĂ© ? Le vocable comprend une infinitĂ© d’acceptations…). Ici, dans l’écrin dĂ©signĂ© du rituel Straussien, le Musikverein, il ne doit ĂŞtre question que de finesse, subtilitĂ© mĂ©lodique, orchestration raffinĂ©e, ivresse Ă©vocatoire…

 

 

 

thielemann-christian-maestro-wiener-philharmoniker-concert-nouvel-an-2019-critique-review

 

 

 

Après les Welser-Möst, Dudamel, Jansons, … voici Thielemann : cravatte rayĂ©e, le directeur du festival de Pâques de Salzbourg (les directeurs du Festival estival autrichien Ă©taient prĂ©sents dans la salle), qui est aussi le directeur musical de la Staatskapelle de Dresde, retrouve le Wiener Philharmoniker pour ce programme festif. Les connaisseurs retrouvent dans la disposition typiquement viennoise de l’orchestre, les 6 contrebasses placĂ©es en fond, face au chef sous l’orgue du Musikverein de Vienne, vĂ©ritable colonne sonore assurant une structure et une carrure emblĂ©matiques. Le chef a dĂ©jĂ  dirigĂ© les Wiener Philharmoniker : on ne peut donc pas parler de baptĂŞme orchestral. Le programme d’emblĂ©e est très classique : rien que des valses et des polkas ; pas d’étrangers, ni de chanteurs invitĂ©s (comme l’a fait Karajan Ă  son Ă©poque, Ă  la fin des annĂ©es 1980). Mis Ă  l’honneur aux cĂ´tĂ©s des frères Strauss (Johann II, Josef et Edouard), une autre dynastie de compositeurs et musiciens viennois, les Hellmesberger, père et fils…

Thielemann : UN GESTE UN RIEN MARTIAL ? Le programme annoncĂ© rĂ©solument austro-hongrois, commence par la Schönfeld March op. 422 de Carl Michael Ziehrer: le ton est donnĂ©, martial et un rien sec et tendu dans la scansion rythmique. Ziehrer a composĂ© opĂ©rettes et ballets (comme Johann Strauss II) : l’écriture est assez quelconque, dĂ©ployant un caractère ronflant, fort en panache dĂ©monstratif, Ă  la façon d’une marche militaire, ou d’une parade appuyĂ©e, rythme et accents prussiens Ă  l’envi; baguette Ă©paisse et ronde, d’une martialitĂ© trop revendiquĂ©e, Thielemann n’est guère dans le style Ă©lĂ©gantissime qui a fait les meilleurs fait qui l’ont prĂ©cĂ©dĂ© dans cet exercice. Pourtant le Musikverein est plus connu pour l’élĂ©gance de sa programmation et la finesse des auteurs programmĂ©s. On craint le pire pour la suite…

strauss josef portrait classiquenewsHeureusement, le chef respecte le code et l’esprit du rituel de l’an neuf Ă  Vienne avec la très belle valse qui suit, la première du programme : « Transactions Waltz » op. 184 de Josef StrauĂź: Josef est le premier cadet malheureux de Johann : mort en 1870 (Ă  43 ans) : l’ingĂ©nieur qui rejoint l’entreprise familiale et orchestral en 1850 (Ă  23 ans car son ainĂ© Johann est lui-mĂŞme Ă©puisĂ©) – mort Ă©reintĂ© en tournĂ©e en Pologne…  Or le gĂ©nie de Josef musicalement est aussi Ă©levĂ© que celui de Johann : on s’en aperçoit Ă  chaque session de ce concert du nouvel an. Josef serait mĂŞme souvent plus sombre et ambivalent, riche et profond que son ainé… De fait, Transactions Wazl s’affiche immĂ©diatement plus sombre, et grave au dĂ©but, pour mieux faire surgir le thème principal, dans le raffinement des timbres des bois, Ă©noncĂ© par les cordes et des flĂ»tes aĂ©riennes : la finesse s’invite enfin, enivrĂ©e dans cette sĂ©quence, qui s’avance Ă  pas feutrĂ©e en pleine magie… saluons l’intelligence des climats, le raffinement de l’orchestration, la caresse de la mĂ©lodie principale, dĂ©licate nostalgie grâce Ă  un Ă©quilibre très subtil entre cordes et les bois… avec la harpe, d’une ineffable nostalgie. Soulignons la profondeur et la sensibilitĂ© Ă©tonnante de Josef Strauss fauchĂ© trop tĂ´t, son aptitude spĂ©cifique pour le dĂ©veloppement symphonique, Ă  la fois dramatique et allusif, et aussi de façon gĂ©nĂ©ral, une rĂ©flexion sur le sens mĂŞme de la valse, entre dĂ©sir et mort. Josef nous paraĂ®t plus sombre encore que Johann II. Un maĂ®tre Ă  mieux connaĂ®tre et plus Ă©couter assurĂ©ment.

Thielemann nous rĂ©serve ensuite une surprise qui pourrait ĂŞtre rĂ©vĂ©lation : de Josef Hellmesberger (fils): Elfin Dance. ImmĂ©diatement saisissante, la finesse Ă©tincelante grâce aux nuances aiguĂ«s, vibrĂ©es, rondes du « xylophone »d’une partition inscrite dans les nuages. Hellmesberger fut professeur de violon au Conservatoire de Vienne et aussi fondateur avec son fils du Quatuor Hellmesberger (1849). Avouons que le compositeur ne manque pas d’inspiration ni de subtilitĂ©. ÉthĂ©rĂ© et aĂ©rien est cet elfe, un pur esprit – le style et l’écriture sont très sensuels (pizz des cordes, doublĂ©es par les flĂ»tes) – comme Mendelssohn dans Le Songe d’une nuit d’étĂ© (envol et boucle aĂ©rienne de Puck)? Thielemann est dans son Ă©lĂ©ment : ambassadeur d’une musique pleine d’élĂ©gance et de finesse, rĂ©solument et littĂ©ralement « lĂ©gère ».

Enfin voici le premier morceau du compositeur vedette : Johann STRAUSS II (fils): sur un rythme effrĂ©nĂ©, l’Express, polka schnell op. 311 est bien une Polka rapide – on regrette cependant la nervositĂ© un peu sèche ; un rien hystĂ©rique (lĂ  encore systĂ©matique et trop appuyĂ©e) de Thielemann qui dirige comme un prussien, vif, nerveux, droit. de toute Ă©vidence, et dans ce tableau prĂ©cis, il manque de souplesse comme de retenue.

Du même Strauss fils, « Pictures of the North Sea », waltz op. 390 / Images de la mer du nord développe écriture et texture orchestrales. L’épisode symphonique à l’essence poétique et chorégraphique débute dans le sombre … déroulant un premier tapis envoûté, quasi tragique, puis un souffle profond grave pour que surgisse enfin l’éblouissante mélodie (wagnérien dans sa houle et ses phrases continues : d’emblée Thielemann le wagnérien est à son affaire ici) : on admire le métier du chef, capable d’heureux équilibres sonores, la finesse des flûtes, le chant ciselé des clarinettes parfaitement détaillées, comme enivrées, caressantes…
Pourtant à l’inverse, et dans le même temps, regrettons quelques écarts de conduite dans la direction : des contrastes trop marqués, et appuyés : la frénésie du geste empoigne la valse avec une dureté prussienne propre au chef berlinois : il n’a pas la finesse de son aîné le regretté Nikolaus Harnoncourt (né en 1929 et décédé en 2016), spécialiste et passionné de valses viennoise qui dirigea le Wiener en de nombreuses occasions les Philharmoniker et le Concert du Nouvel An, à 2 reprises : 2001 et 2003. Ronflant, sec, Thielemann déçoit globalement, malgré les trouvailles sonores évoquées précédemment. Sa baguette manque de fluidité malgré le sujet aquatique de la valse choisie.

Autre frère, pas assez connu et mis dans l’ombre de Johann, leur ainé : Eduard Strauß: « Post-Haste », est une polka schnell op. 259, pour laquelle Thielemann cisèle la coupe et l’esprit de syncope (évocation de la course de la diligence) ; ici encore, on remarque les limites du chef car Thielemann détaille certes l’instrumentation mais manque de précision comme d’imagination: sa direction relève d’un système métrique, militaire dans cette cadence au galop, trépidant, trop mécanique…
STRAUSS eduard edouard classiquenews valses de viennes concert nouvel an vienne 2019 220px-EduardStrauss edouard syraussFotoUn petit mot sur Edouard, le dernier fils Strauss et l’héritier de la dynastie. Il est mort en 1916, en pleine guerre, trouve sa voie spécifique, comparée à celle de ses deux frères ainés, par une écriture plus frénétique, qui s’est spécialisé dans les polkas rapides / ainsi cette « Polka-schnell ». Rongé par le ressentiment contre ses frères, et pourtant héritier enviable de la dynastie familiale (et orchestrale), il dissout cependant en 1901, l’orchestre Strauss et, surtout, pendant trois journées (honteuses) d’octobre 1907, brûle nombre de papiers, manuscrits et forcément partitions de ses frères Strauss : destruction catastrophique d’un héritier insensé devenu fou. Nombre de documents et de partitions de Josef et de Johann seraient ainsi partis en fumée.  L’histoire de la famille Strauss relève d’un roman feuilleton, et l’on s’étonne malgré le succès populaire de leurs valses et mazurkas, qu’aucune série télévisée ne soit encore emparé de leur saga. A suivre…

Après la pause de la mi journée (le concert a commencé à 11h), reprise avec l’évocation du Johann compositeur d’opérettes : c’est Offenbach qui pourtant son rival en France, aurait exhorté le Viennois à composer des opérettes. Grand bien que cette proposition confraternelle et constructive. Ainsi l’ouverture du Baron Tzigane… la plus célèbre avec celle de La Chauve Souris, … ainsi le motif de la valse dépasse la seule occurrence épisodique, pour atteindre une évocation pleine de nostalgie … tzigane et purement symphonique (par le motif ourlé de la clarinette) ; dans cette pièce de caractère, à l’ambition dramatique manifeste, Thielemann soigne le panache sombre et grave, avec un très bel effet de texture caressant chaque motif, en particulier au hautbois, sinueux et pastoral. Là encore on peut regretter le geste un peu lourd du chef plus prussien que viennois.

Pourtant, se dĂ©tache ensuite finesse et lĂ©gèretĂ© dans « La Ballerine » opus 227 de Josef StrauĂź, polka française, et ses fin de phrases, suspendues en deux accents, dĂ©tachĂ©s, retenus… vĂ©ritable hymne Ă  la souplesse Ă©lastique. Avec La vie d’artiste opus 316, de Johann II, le ballet de l’OpĂ©ra de Vienne s’invite au concert : comme un rĂ©veil au matin, le premier couple du corps de ballet de l’OpĂ©ra (Wiener Staatsballet) s’ébranle sur la terrasse et dans les couloirs et circulations du bâtiment : l’élĂ©gance et la facĂ©tie (gestuelles des mains) des 5 couples en blanc et noir imposent une leçon de souplesse acrobatique, – un moment de raffinement collectif magnifiĂ© Ă©videmment pas la somptueuse musique, moins allusive que descriptive, dans la cadre des dĂ©cors et intĂ©rieurs de l’OpĂ©ra viennois. L’institution fĂŞte ses 150 ans en 2019, ayant Ă©tĂ© inaugurĂ© en 1869. Prestige revendiquĂ© et histoire cĂ©lĂ©brĂ©e au moment oĂą ce sont deux français qui dirigent la Maison, Dominique Meyer, intendant gĂ©nĂ©ral et l’ex danseur Ă©toile Ă  Paris, Manuel Legris, directeur de la danse. Johann Strauss redouble de tendresse feutrĂ©e dans cette page très raffinĂ©e qui est l’objet d’une rĂ©alisation tĂ©lĂ©visuelle audacieuse (plans inclinĂ©s de la camĂ©ra dont jouent les danseurs, très complices).

Puis, d’Eduard StrauĂź: « Opera SoirĂ©e » / Une soirĂ©e Ă  l’opĂ©ra est une polka française op. 162 (Ă  deux temps), polka assez lente, au rythme plus appuyĂ© que la polka mazurka qui est encore plus lente et ralentie avec des temps suspendus…  : Une soirĂ©e Ă  l’opĂ©ra semble mieux convenir Ă  la carrure prussienne de Thielemann – sans Ă©carter facĂ©tie ni dĂ©licatesse avec une palette de nuances (piccolo) très finement dĂ©taillĂ©es ; voici la sĂ©quence oĂą le chef dĂ©voile une direction plus nettement enjouĂ©e, pleine de sous entendue comme d’élĂ©gance.

De Johann STRAUSS II (fils): « Eva Waltz », la valse d’Eva extrait de l’opĂ©ra Le Chevalier Pazman se distingue en un dĂ©but magnifique (somptuositĂ© profonde et noble des cors, puis en dialogue avec les contrebasses – valse attĂ©nuĂ©e comme un rĂŞve, une rĂ©itĂ©ration onirique liĂ©e au personnage d’Eva dans l’opĂ©rette de Johann II. C’est Cendrillon rĂ©inventĂ©e, sa prĂ©sentation au bal… puis du mĂŞme opĂ©ra, Thielemann a sĂ©lectionnĂ© une nouvelle pièce de caractère, extrait du mĂŞme opĂ©ra : « Csárdás ». Comme celle de la sublime Chauve Souris, celle qui permet Ă  la comtesse hongroise de s’alanguir jusqu’à la pâmoison, et aussi Ă  la soprano requise, d’éblouir par sa virtuositĂ© profonde, voici une autre facette du gĂ©nie de Johann II, pleine de facĂ©tie heureuse, d’intelligence sauve et lumineuse, de grâce et de finesse. Le Concert tĂ©lĂ©visĂ© Ă©tant aussi une carte postale soulignant les trĂ©sors patrimoniaux autochtones, voici les danseurs du Ballet de l’OpĂ©ra de Vienne, soit dans un château de basse Autriche, un couple de touristes, parodique, dĂ©calĂ© qui s’ennuie puis s’éveille Ă  la pure danse, en rejoignant 3 autres couples de danseurs dans la galerie haute Renaissance. LĂ  encore reconnaissons que la rĂ©alisation comme l’alliance de Strauss et de la danse sont idĂ©alement complĂ©mentaire, dans un tableau qui s’achève en extĂ©rieur, sur une collection de rythmes et de folklores bien trempĂ©s, oĂą règne la noblesse du thème hongrois principal (la czardas est de style aristocratique), jouĂ© selon la tradition par les paysans pour les moissons ou les noces villageoises.

Johann fils règne en maĂ®tre absolu avec la Marche Ă©gyptienne op. 335 : festival de timbres et d’effets orientalisants et rutilants, parfaitement caractĂ©risĂ©s et utilisĂ©s Ă  bon escient : d’abord grosse caisse, clarinette mystĂ©rieuse, cordes voluptueuse : c’est une sĂ©quence entonnĂ©e comme une marche militaire, mais enchantĂ©e – panache onirique des trompettes et des cors, au souffle inouĂŻ, qui Ă©gale le meilleur Saint-SaĂ«ns, celui oriental de l’orgie / bacchanale dans Samson et Dalila. Thielemann est chez lui, dirigeant sans baguette avec une dĂ©contraction affichĂ©e, assumĂ©e ; lorsque les instrumentistes viennois entonnent en « la la la », le chĹ“ur du motif Ă©gyptien (qui rappelle aussi Verdi dans ses ballets d’Aida). Tout s’achève dans le lointain en second plan, superbe effet de spatialisation : festif et interactif, le tableau suscite l’enthousiasme de la salle, et la joie des musiciens, heureux d’avoir ainsi surpris l’audience internationale.

Enfin, après “la Valse entracte” de Joseph Hellmesberger fils: d’une dĂ©licatesse soyeuse et enivrante (les pizzicati dĂ©licats des violons), celle d’un rĂŞve Ă©veillĂ©, auquel Thielemann rĂ©serve son attention la plus nuancĂ©, ce sont deux pages parmi les plus raffinĂ©es des fils Strauss, Johann II, l’incontournable : « In Praise of Women », polka mazur op. 310 / Eloge des femmes : hymne fĂ©ministe qui tombe Ă  pic après nos hontes contemporaines (cf les mouvements #Metoo, et #balancetonporc) oĂą règnent flĂ»tes, piccolo, clarinettes et bassons : (finesse d’élocution, irrĂ©sistible Ă©lĂ©gance et souveraine retenue… en un Ă©quilibre impeccable cordes et cuivres)… et le rythme très lent, le plus lent, de la polka mazurka ; puis la musique des sphères opus 235 du cadet tout aussi gĂ©nial, Josef : grande valse, et la plus inspirĂ©e du compositeur, oĂą flĂ»tes / harpe se dĂ©tachent, signifiant lĂ  aussi une aube qui se lève… pourtant, le bas blesse : Ă  la dĂ©licatesse suggestive de la partition, nous regrettons l’enflure qui finit par ĂŞtre ennuyeuse, et mĂŞme agaçante du chef, … trop pompier, ignorant volontaire de toute lĂ©gèretĂ©. Quel dommage.
nouvel-an-2019-concert-vienne-new-year-s-concert-2019-vienna-philharmonia-christian-thielemann-concert-cd-critique-par-classiquenews-582-the_vienna_philharmonic_and_chri_55-1Enfin c’est le rituel de fin, pour tout concert du nouvel An qui se respecte. Après proclamer les vĹ“ux de l’Orchestre, chef et musiciens jouent d’un seul tenant et sans interruption – quand les prĂ©dĂ©cesseurs commençaient les premières mesures, puis prononçaient les vĹ“urs, enfin reprenaient Ă  son dĂ©but la partition : voici l’extase fluviale promise et tant attendue, emblème de l’art de vivre viennois : Le Beau Danube Bleu (Johann STRAUSS fils) : avouons que Thielemann sait Ă©carter toute Ă©paisseur et boursoufflure, instillant ce climat du rĂŞve qui fait briller les cors, recherche les effets de textures moins la transparence, d’oĂą ce sentiment d’opulence, de grain sensuel (les clarinettes) – sommet de naturel et de grâce – la partition d’abord chorale, finit ainsi sa course d’une Ă©loquence et sublime manière, comme chant lĂ©gitimement cĂ©lĂ©brĂ© de l’élĂ©gance viennoise Ă  l’international.

Oui certains nous rĂ©torquerons : pourquoi boudez ainsi son plaisir ? Le Beau Danube Bleu suffit Ă  rĂ©pondre et militer finalement en faveur de la baguette explicitement symphonique de Thielemann. Nous ne parlons pas sciemment de La marche de Radetsky de Johann Strauss le père : bonus pour amuser un public qui souhaite participer en claquant des mains, soulignant encore et encore la frĂ©nĂ©sie rythmique d’un tube plus que cĂ©lĂ©brĂ©. Daniel Barenboim avait bien raison de bouder cette sĂ©quence car la partition fut composĂ©e pour cĂ©lĂ©brer la victoire sur des manifestants et Ă©tudiants tuĂ©s outrageusement contre leur appel Ă  libertĂ©. Qu’on se le dise.

Carrure prussienne mais sensibilitĂ© instrumentale d’un gourmand gourmet, Christian Thielemann nous ravit quand mĂŞme, dans ce concert qui sans ĂŞtre mĂ©morable – ceux de Georges PrĂŞte, Nikolaus Harnoncourt, Gustavo Dudamel, Mariss Jansons (2016) l’ont Ă©tĂ© – , nous permet de marquer dans la lĂ©gèretĂ© moyenne, Ă  dĂ©faut d’exquise finesse, ce 1er jour de l’annĂ©e nouvelle 2019.

Retrouvez le cd et le dvd du CONCERT DU NOUVEL AN à VIENNE, 1er janvier 2019, sous la direction de Christian Thielemann, à paraître mi janvier chez Sony classical.

 

 

 

 

 

 

 

 

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COMPTE RENDU, concert. VIENNE, Musikverein. CONCERT DU NOUVEL AN, Wiener Philhamroniker / CHRISTIAN THIELEMANN (1er janvier 2019) : Valses, polkas, extraits d’opĂ©ras, ouverture de Johann STRAUSS II, Josef STRAUSS, Edouard STRAUSS, Josef Hellmesberger…

 

 

 

 

 

 

 

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 Nos autres comptes rendus et critiques des CONCERTS DU NOUVEL AN à VIENNE :

 

Concert, compte rendu critique. Vienne, Concert du Nouvel An 2016. En direct sur France 2. Vendredi 1er janvier 2016. Wiener Philharmoniker, Mariss Jansons, direction. Valses de Strauss johann I, II; Josef ; Eduard. Waldtaufel…

mariss-jansons_c_jpg_681x349_crop_upscale_q95Concert, compte rendu critique. Vienne, Concert du Nouvel An 2016. En direct sur France 2. Vendredi 1er janvier 2016. En direct de la Philharmonie viennoise, le Konzerthaus, le concert du nouvel An réalise un rêve cathodique et solidaire : succès planétaire depuis des décennies pour ce rendez vous diffusé en direct par toutes les chaînes nationales du monde et qui le temps des fêtes, rassemblent toutes les espérances du monde, en une très large diffusion pour le plus grand nombre (les places sont vendues à un prix exorbitant destiné aux fortunés de la planète) pour un temps meilleur riche en promesses de bonheur. Cette année c’est le chef Mariss Jansons, maestro letton (résident à Saint-Pétersbourg), autant lyrique que symphonique bien trempé qui dirige les divins instrumentistes viennois, ceux du plus subtil des orchestres mondiaux et qui pour l’événement célèbre l’insouciance par la finesse et l’élégance, celle des valses des Strauss, Johann père et fils bien sûr, ce dernier particulièrement à l’honneur, et aussi Joef et Eduard ses frères (tout aussi talentueux que leur ainé), Eduard dont 2016 marque le centenaire.

 

gustavo-dudamel-dirigiert vignette maestro classiquenews -erstmals-wiener-neujahrskonzertCompte-rendu critique, concert. VIENNE, Musikverein, dimanche 1er janvier 2017. Wiener Philharmoniker.  Gustavo Dudamel, direction. Depuis 1958, le concert du Nouvel An au Musikverein de Vienne est retransmis en direct par les télévisions du monde entier soit 50 millions de spectateurs ; voilà assurément à un moment important de célébration collective, le moment musical et symphonique le plus médiatisé au monde. En plus des talents déjà avérés des instrumentistes du Philharmonique de Vienne, c’est évidemment le nouvel invité, pilote de la séquence, Gustavo Dudamel, pas encore quadra, qui est sous le feu des projecteurs (et des critiques). A presque 36 ans, ce 1er janvier 2017, le jeune maestro vénézuélien a concocté un programme pour le moins original qui en plus de sa jeunesse – c’est le plus jeune chef invité à conduire l’orchestre dans son histoire médiatique, crée une rupture : moins de polkas et de valses tonitruantes, voire trépidantes, mais un choix qui place l’introspection et une certaine retenue intérieure au premier plan ; pas d’esbroufe, mais un contrôle optimal des nuances expressives, et aussi, regard au delà de l’orchestre, comme habité par une claire idée de la sonorité ciblée, une couleur très suggestive, mesurée, intérieure qui s’inscrit dans la réflexion et la nostalgie…? Voilà qui apporte une lecture personnelle et finalement passionnante de l’exercice 2017 : Gustavo Dudamel dont on met souvent en avant la fougue et le tempérament débridé, affirme ici, en complicité explicite avec les musiciens du Philharmonique de Vienne, une direction millimétrée, infiniment suggestive, d’une subtilité absolue, qui colore l’entrain et l’ivresse des valses, polkas et marches des Strauss et autres, par une nouvelle sensibilité introspective. De toute évidence, le maestro vénézuélien, enfant du Sistema, nous épate et convainc de bout en bout. Relevons quelques réussites emblématiques de sa maestrià viennoise. En lire PLUS

 

 

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Zubin Mehta / Concert du Nouvel An Ă  VIENNE 2015
L’hommage au génie de Josef Strauss
http://www.classiquenews.com/cd-concert-du-nouvel-an-a-vienne-2015-philharmonique-de-vienne-zubin-mehta-1-cd-sony-classical/

 

Daniel Barenboim / Concert du Nouvel An Ă  VIENNE 2014
http://www.classiquenews.com/compte-rendu-vienne-konzerthaus-le-1er-janvier-2014-concert-du-nouvel-an-oeuvres-de-johann-strauss-i-et-ii-edouard-josef-et-richard-strauss-avec-les-danseurs-de-lopera-de-vienne-wiener-phil/

 

Franz Welser-Möst / Concert du Nouvel An à VIENNE 2013
http://www.classiquenews.com/neujahrskonzert-new-years-concert-concert-du-nouvel-an-vienne-2013franz-welser-mst-1-cd-sony-classical/

 

Mariss Jansons / Concert du Nouvel An Ă  VIENNE 2012
http://www.classiquenews.com/vienne-musikverein-le-1er-janvier-2012-concert-du-nouvel-an-wiener-philharmoniker-mariss-jansons-direction/

 

Georges PrĂŞtre / Concert du nouvel AN Ă  VIENNE 2010

 

ONL,VALSES de STRAUSS par l’Orchestre National de Lille

©matheuz_328px_18-19LILLE, NORD, les Valses des Strauss, ONL,13 déc>5 janv 2019. Le père né en 1804, le dernier fils mort en 1899… la famille STRAUSS couvre ainsi tout un siècle, que l’on dit romantique et qui fut aussi marqué par l’essor formidable de l’écriture orchestrale, adaptée au cadre stimulant de la Valse. La Vienne fin de siècle, semble donner le ton et le diapason de l’élégance et du raffinement social et mondain.

 

 

 

strauss-johann-II-petit-portrait-298-294-640px-Johann_Strauss_II_by_August_Eisenmenger_1888Parfum impérial et fané, mais terriblement raffiné, comme singulièrement sensuel – malgré un puritanisme de façade, comme en Angleterre (autre Empire), où le corseté des robes et des costumes masculins se devaient de craquer, dans la danse sublimée par les Strauss, père et fils : la sulfureuse valse à trois temps s’impose toujours à nous comme une ivresse irrésistible, codifiée mais sublimée par les timbres de l’orchestre symphonique.
Pour donner corps à cette jubilation des sens, en couleurs et en rythmes contrastés et spécifiques, selon l’écriture du père ou des fils (Johann, Edouard, Josef…), l’Orchestre National de Lille invite le chef Diego Matheus pour un cycle enivrant de concerts festifs et raffinés, qui comprend 3 dates à Lille, les 13, 16 et 18 déc (Auditorium du Nouveau Siècle), et aussi rayonnant en région, pour 6 dates, les 14 (Carvin), 15 (Sainghin-en-Mélantois, 19 (Valenciennes), 20 décembre (Maubeuge), puis 4 janvier (Sin-le-Noble), et 5 janvier 2019 (Longuenesse). Illustration : Johann II Strauss (DR)

 

diego-matheuz-concert-orchestre-national-de-lille-concert-annonce-classiquenews-582

 

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Cycle BAL DE L’EMPEREURboutonreservation
La Marche de Radetzky (Johann père)
Le Beau Danube bleu (Johann fils)
Valses et polkas des Strauss, père et fils
(Johann, Josef, Eduard, Hellmesberger, Lanner, Suppé, Waldteufel…)

LILLE, Nouveau Siècle
jeudi 13 déc 2018, 20h
dim 16 déc 2018, 17h
mardi 18 déc 2018, 20h

Toutes les infos sur le site de l’Orchestre National de Lille
http://www.onlille.com/saison_18-19/concert/bal-de-lempereur/

 
 
 
 
PUIS,
 
 
 
SIN LE NOBLE, Salle Henri Martel, vendredi 4 janvier 2019, 20h

LONGUENESSE, Scenen, samedi 5 janvier 2019, 20h  
 
   
 
 

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A NOTER
ThĂ© dansant, dim 16 dĂ©c 2018, 15h (Lille, Nouveau Siècle). Pour danseurs tous niveaux, chevronnĂ©s, amateurs, novices : « partagez un tour de piste » – accès gratuit selon disponibilitĂ© (rĂ©servations, informations conseillĂ©es)

Pour la billetterie des concerts en rĂ©gion, consultez la page BAL DE L â€EMPEREUR sur le site de l’Orchestre National de Lille : les rĂ©servations se font directement auprès des salles

Orchestre National de Lille
30 Place Mendès France BP 70119 / 59027 Lille cedex
+33 (0)3 20 12 82 40
Accueil-billetterie : 3 place Mendès France
Ouvert du lundi au vendredi de 10h Ă  18h

 
 
 
 
 

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UNE AFFAIRE DE FAMILLE… D’un gĂ©nie orchestrateur, Ă©mergent les pĂ©pites du fils (Johann II) : Le Beau Danube bleu (1867), La valse de l’Empereur : vĂ©ritable manifeste esthĂ©tique de la Vienne impĂ©riale de François-Joseph et de son Ă©pouse « Sissi ». Si les trois temps assurent le rebond et l’élan (du dĂ©sir ainsi amorcĂ©, cultivĂ©, porté…), le quatrième qui en est dĂ©duit, se fait toujours attendre… car il ne vient pas. Cette irrĂ©solution cristallise la pulsion première, viscĂ©rale d’une danse – transe, Ă  l’érotisme Ă©vident et qui en son temps, fut taxĂ© d’abord, de perversitĂ©, d’immoralitĂ©, d’indĂ©cence.

Mais le fils bénéficia de la gloire déjà établie du nom Strauss, affirmé par son père avant lui (Johnn I); après avoir enfanté d’un chef d’oeuvre qui évoque aussi l’esprit de toute une époque, la fameuse Marche de Radetsky (pour la fête de la réconciliation, le 22 sept 1849, pour le retour d’Italie du fameux maréchal), Johann père meurt le 25 septembre 1849 à … 45 ans. Une gloire chasse l’autre,… c’est ensuite dans la seconde moitié du XIXè, que le fils détrôna le père, redoublant de raffinement orchestral, de verve et d’imagination ciselées (à partir d’un concert tremplin au Casino Dommayer, le 15 octobre 1844), réécrivant désormais le roman familial aussi, car c’et bien Johann Strauss II qui supplanta tous les autres, obligeant même son frère Josef à reprendre la direction de l’orchestre du clan, pilotant les tournées de plus en plus éreintantes, il devait mourir de surmenage à 43 ans…

 

 

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LIRE aussi notre critique complète de l’excellent ouvrage JOHANN STRAUSS (Actes Sud / oct 2017)

http://www.classiquenews.com/livre-critique-compte-rendu-johann-strauss-le-pere-le-fils-et-lesprit-de-la-valse-par-alain-duault-collection-classica-actes-sud/

 
 
 
 
 

LILLE, VALSES de NoĂ«l par l’Orchestre National de Lille

©matheuz_328px_18-19LILLE, NORD, les Valses des Strauss, ONL,13 déc>15 janv 2019. Le père né en 1804, le dernier fils mort en 1899… la famille STRAUSS couvre ainsi tout un siècle, que l’on dit romantique et qui fut aussi marqué par l’essor formidable de l’écriture orchestrale, adaptée au cadre stimulant de la Valse. La Vienne fin de siècle, semble donner le ton et le diapason de l’élégance et du raffinement social et mondain.

 

 

 

strauss-johann-II-petit-portrait-298-294-640px-Johann_Strauss_II_by_August_Eisenmenger_1888Parfum impérial et fané, mais terriblement raffiné, comme singulièrement sensuel – malgré un puritanisme de façade, comme en Angleterre (autre Empire), où le corseté des robes et des costumes masculins se devaient de craquer, dans la danse sublimée par les Strauss, père et fils : la sulfureuse valse à trois temps s’impose toujours à nous comme une ivresse irrésistible, codifiée mais sublimée par les timbres de l’orchestre symphonique.
Pour donner corps à cette jubilation des sens, en couleurs et en rythmes contrastés et spécifiques, selon l’écriture du père ou des fils (Johann, Edouard, Josef…), l’Orchestre National de Lille invite le chef Diego Matheus pour un cycle enivrant de concerts festifs et raffinés, qui comprend 3 dates à Lille, les 13, 16 et 18 déc (Auditorium du Nouveau Siècle), et aussi rayonnant en région, pour 6 dates, les 14 (Carvin), 15 (Sainghin-en-Mélantois, 19 (Valenciennes), 20 décembre (Maubeuge), puis 4 janvier (Sin-le-Noble), et 5 janvier 2019 (Longuenesse). Illustration : Johann II Strauss (DR)

 

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Cycle BAL DE L’EMPEREURboutonreservation
La Marche de Radetzky (Johann père)
Le Beau Danube bleu (Johann fils)
Valses et polkas des Strauss, père et fils
(Johann, Josef, Eduard, Hellmesberger, Lanner, Suppé, Waldteufel…)

LILLE, Nouveau Siècle
jeudi 13 déc 2018, 20h
dim 16 déc 2018, 17h
mardi 18 déc 2018, 20h

Toutes les infos sur le site de l’Orchestre National de Lille
http://www.onlille.com/saison_18-19/concert/bal-de-lempereur/

 

 

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A NOTER
ThĂ© dansant, dim 16 dĂ©c 2018, 15h (Lille, Nouveau Siècle). Pour danseurs tous niveaux, chevronnĂ©s, amateurs, novices : « partagez un tour de piste » – accès gratuit selon disponibilitĂ© (rĂ©servations, informations conseillĂ©es)

Pour la billetterie des concerts en rĂ©gion, consultez la page BAL DE L â€EMPEREUR sur le site de l’Orchestre National de Lille : les rĂ©servations se font directement auprès des salles

Orchestre National de Lille
30 Place Mendès France BP 70119 / 59027 Lille cedex
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Accueil-billetterie : 3 place Mendès France
Ouvert du lundi au vendredi de 10h Ă  18h

 

 

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UNE AFFAIRE DE FAMILLE… D’un gĂ©nie orchestrateur, Ă©mergent les pĂ©pites du fils (Johann II) : Le Beau Danube bleu (1867), La valse de l’Empereur : vĂ©ritable manifeste esthĂ©tique de la Vienne impĂ©riale de François-Joseph et de son Ă©pouse « Sissi ». Si les trois temps assurent le rebond et l’élan (du dĂ©sir ainsi amorcĂ©, cultivĂ©, porté…), le quatrième qui en est dĂ©duit, se fait toujours attendre… car il ne vient pas. Cette irrĂ©solution cristallise la pulsion première, viscĂ©rale d’une danse – transe, Ă  l’érotisme Ă©vident et qui en son temps, fut taxĂ© d’abord, de perversitĂ©, d’immoralitĂ©, d’indĂ©cence.

Mais le fils bénéficia de la gloire déjà établie du nom Strauss, affirmé par son père avant lui (Johnn I); après avoir enfanté d’un chef d’oeuvre qui évoque aussi l’esprit de toute une époque, la fameuse Marche de Radetsky (pour la fête de la réconciliation, le 22 sept 1849, pour le retour d’Italie du fameux maréchal), Johann père meurt le 25 septembre 1849 à … 45 ans. Une gloire chasse l’autre,… c’est ensuite dans la seconde moitié du XIXè, que le fils détrôna le père, redoublant de raffinement orchestral, de verve et d’imagination ciselées (à partir d’un concert tremplin au Casino Dommayer, le 15 octobre 1844), réécrivant désormais le roman familial aussi, car c’et bien Johann Strauss II qui supplanta tous les autres, obligeant même son frère Josef à reprendre la direction de l’orchestre du clan, pilotant les tournées de plus en plus éreintantes, il devait mourir de surmenage à 43 ans…

 

 

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LIRE aussi notre critique complète de l’excellent ouvrage JOHANN STRAUSS (Actes Sud / oct 2017)

http://www.classiquenews.com/livre-critique-compte-rendu-johann-strauss-le-pere-le-fils-et-lesprit-de-la-valse-par-alain-duault-collection-classica-actes-sud/

 

 

LILLE, l’Orchestre national de Lille joue les Valses de Vienne

©matheuz_328px_18-19LILLE, NORD, les Valses des Strauss, ONL,13 déc>15 janv 2019. Le père né en 1804, le dernier fils mort en 1899… la famille STRAUSS couvre ainsi tout un siècle, que l’on dit romantique et qui fut aussi marqué par l’essor formidable de l’écriture orchestrale, adaptée au cadre stimulant de la Valse. La Vienne fin de siècle, semble donner le ton et le diapason de l’élégance et du raffinement social et mondain.

 

 

 

strauss-johann-II-petit-portrait-298-294-640px-Johann_Strauss_II_by_August_Eisenmenger_1888Parfum impérial et fané, mais terriblement raffiné, comme singulièrement sensuel – malgré un puritanisme de façade, comme en Angleterre (autre Empire), où le corseté des robes et des costumes masculins se devaient de craquer, dans la danse sublimée par les Strauss, père et fils : la sulfureuse valse à trois temps s’impose toujours à nous comme une ivresse irrésistible, codifiée mais sublimée par les timbres de l’orchestre symphonique.
Pour donner corps à cette jubilation des sens, en couleurs et en rythmes contrastés et spécifiques, selon l’écriture du père ou des fils (Johann, Edouard, Josef…), l’Orchestre National de Lille invite le chef Diego Matheus pour un cycle enivrant de concerts festifs et raffinés, qui comprend 3 dates à Lille, les 13, 16 et 18 déc (Auditorium du Nouveau Siècle), et aussi rayonnant en région, pour 6 dates, les 14 (Carvin), 15 (Sainghin-en-Mélantois, 19 (Valenciennes), 20 décembre (Maubeuge), puis 4 janvier (Sin-le-Noble), et 5 janvier 2019 (Longuenesse). Illustration : Johann II Strauss (DR)

  

 

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Cycle BAL DE L’EMPEREURboutonreservation
La Marche de Radetzky (Johann père)
Le Beau Danube bleu (Johann fils)
Valses et polkas des Strauss, père et fils
(Johann, Josef, Eduard, Hellmesberger, Lanner, Suppé, Waldteufel…)

LILLE, Nouveau Siècle
jeudi 13 déc 2018, 20h
dim 16 déc 2018, 17h
mardi 18 déc 2018, 20h

Toutes les infos sur le site de l’Orchestre National de Lille
http://www.onlille.com/saison_18-19/concert/bal-de-lempereur/

 

 

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A NOTER
ThĂ© dansant, dim 16 dĂ©c 2018, 15h (Lille, Nouveau Siècle). Pour danseurs tous niveaux, chevronnĂ©s, amateurs, novices : « partagez un tour de piste » – accès gratuit selon disponibilitĂ© (rĂ©servations, informations conseillĂ©es)

Pour la billetterie des concerts en rĂ©gion, consultez la page BAL DE L â€EMPEREUR sur le site de l’Orchestre National de Lille : les rĂ©servations se font directement auprès des salles

Orchestre National de Lille
30 Place Mendès France BP 70119 / 59027 Lille cedex
+33 (0)3 20 12 82 40
Accueil-billetterie : 3 place Mendès France
Ouvert du lundi au vendredi de 10h Ă  18h

 

 

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UNE AFFAIRE DE FAMILLE… D’un gĂ©nie orchestrateur, Ă©mergent les pĂ©pites du fils (Johann II) : Le Beau Danube bleu (1867), La valse de l’Empereur : vĂ©ritable manifeste esthĂ©tique de la Vienne impĂ©riale de François-Joseph et de son Ă©pouse « Sissi ». Si les trois temps assurent le rebond et l’élan (du dĂ©sir ainsi amorcĂ©, cultivĂ©, porté…), le quatrième qui en est dĂ©duit, se fait toujours attendre… car il ne vient pas. Cette irrĂ©solution cristallise la pulsion première, viscĂ©rale d’une danse – transe, Ă  l’érotisme Ă©vident et qui en son temps, fut taxĂ© d’abord, de perversitĂ©, d’immoralitĂ©, d’indĂ©cence.

Mais le fils bénéficia de la gloire déjà établie du nom Strauss, affirmé par son père avant lui (Johnn I); après avoir enfanté d’un chef d’oeuvre qui évoque aussi l’esprit de toute une époque, la fameuse Marche de Radetsky (pour la fête de la réconciliation, le 22 sept 1849, pour le retour d’Italie du fameux maréchal), Johann père meurt le 25 septembre 1849 à … 45 ans. Une gloire chasse l’autre,… c’est ensuite dans la seconde moitié du XIXè, que le fils détrôna le père, redoublant de raffinement orchestral, de verve et d’imagination ciselées (à partir d’un concert tremplin au Casino Dommayer, le 15 octobre 1844), réécrivant désormais le roman familial aussi, car c’et bien Johann Strauss II qui supplanta tous les autres, obligeant même son frère Josef à reprendre la direction de l’orchestre du clan, pilotant les tournées de plus en plus éreintantes, il devait mourir de surmenage à 43 ans…

 

 

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LIRE aussi notre critique complète de l’excellent ouvrage JOHANN STRAUSS (Actes Sud / oct 2017)

http://www.classiquenews.com/livre-critique-compte-rendu-johann-strauss-le-pere-le-fils-et-lesprit-de-la-valse-par-alain-duault-collection-classica-actes-sud/

 

  

 

Ariadne auf Naxos Ă  Budapest

hofmannsthal Hugo_von_Hofmannsthal richard straussBudapest. Hungarian State Opera (Hongrie). Strauss: Ariadne auf Naxos. Les 20,22,27,29 mars 2015. Créé juste avant la première guerre (crĂ©ation Ă  Stuttgart en octobre 1912, puis dans sa version dĂ©finitive Ă  Vienne en octobre 1916 pendant le conflit), Ariadne est d’abord une comĂ©die dĂ©licatement irrĂ©vĂ©rencieuse, oĂą le duo Strauss et son librettiste Hugo von Hofmmansthal rivalise avec l’intelligence Ă  quatre mains de Molière et Lully. Les deux germaniques ont toujours cultivĂ© leur admiration pour le Baroque Français : ils y ont puisĂ© une source formellement crĂ©ative pour jouer avec les forme théâtrales et lyriques.

Il s’agit d’associer une troupe de comĂ©diens italiens plutĂ´t comiques, Ă  l’action tragique d’Arianne abandonnĂ©e par ThĂ©sĂ©e sur l’Ă®le de Naxos puis ressuscitĂ©e Ă  la vie grâce Ă  sa rencontre avec Bacchus… le lamento d’Arianne rencontre l’insouciance ivre et Ă©chevelĂ©e de Zerbinette ; voici deux figures fĂ©minines apparemment opposĂ©es et contradictoires mais pas tant que cela : Ariane reste inconsolable après avoir Ă©tĂ© trahie par ThĂ©sĂ©e ; Zerbinette l’exhorte Ă  jouir de l’instant prĂ©sent et de multiplier les aventures tant que le coeur le lui inspire. Seul le vĂ©ritable amour se fera connaĂ®tre…

La Femme sans ombre de Richard StraussThéâtre dans le théâtre, les auteurs imaginent la prĂ©paration de l’opĂ©ra dans les coulisses, brossant une galerie de portrait dĂ©jantĂ© des interprètes hors scène : la primadonna, les acteurs secondaires, surtout le compositeur (sorte de jeune Mozart), passionnĂ© et dĂ©fenseur radical de son art… La première version de 1912 Ă©tait encore maladroite : il s’agissait de faire succĂ©der Ă  la pièce du Bourgeois gentilhomme de Molière, le divertissement chantĂ© conçu par Strauss et Hofmannsthal. Dans le version finale de 1916, les deux fusionnent totalement et l’opĂ©ra reprend ses droits infĂ©odant Ă  l’architecture globale, ses règles de dĂ©veloppement habituel.  Mais avec un sens du timing recouvrĂ© : Monsieur Jourdain devenu le plus riche mĂ©cène de la ville, ordonne que la reprĂ©sentation commence sans dĂ©lai afin que l’on donne le feu d’artifice programmĂ© de la longue date et Ă  l’heure annoncĂ©e. Soit un prologue qui rĂ©unit tous les artistes de la troupe avant la reprĂ©sentation, puis la soirĂ©e lyrique proprement dite oĂą trouvaille gĂ©niale, troupe comique et personnages tragiques sont imbriquĂ©s avec une rare science poĂ©tique.

boutonreservationAriadne auf Naxos / Arianne Ă  Naxos de Strauss Ă  l’OpĂ©ra d’Ă©tat de Budapest
Budapest. Hungarian State Opera (Hongrie).
Les 20,22,27,29 mars 2015

Der Haushofmeister – Franz Tscherne
Die Music Master – Tamás Busa
Der Komponist – ViktĂłria Vizin
Der Tenor, Bacchus – István Kovácsházi
Die Dancing Master – Zoltán Megyesi
Der PerĂĽckenmacher – RĂłbert Rezsnyák
Ein Lakai – Tamás Szule
Zerbinetta – Erika MiklĂłsa
Die Prima Donna, Ariadne – TĂĽnde SzabĂłki
Harlekin – Csaba Szegedi
Scaramuccio – Dániel Vadász
Truffaldin – Krisztián Cser
Brighella – István Horváth
Najade – Zita Váradi
Dryad – Atala Schöck
Echo – Eszter Wierdl

Illustrations : Hofmannsthal et Strauss, duo miraculeux Ă  l’opĂ©ra (DR)

Nouveau Chevalier Ă  la rose Ă  Baden Baden

Richard Strauss, un "gĂ©nie contestĂ©"Baden Baden. Strauss : Der Rosenkavalier, les 27,30 mars, 2 avril 2015. Dans le cadre de son festival de Pâques du 27 mars au 6 avril 2015. Simon Rattle et le Berliner Philharmoniker jouent l’opĂ©ra de Richard Strauss et Hugo von Hofmannsthal : le Chevalier Ă  la rose. L’œuvre créé Ă  Vienne en 1911 quelques annĂ©es avant la première guerre synthĂ©tise toute la grâce mozartienne dont est capable Strauss, Ă  laquelle il ajoute l’anachronisme des valses, emblème de la Vienne de Johann Strauss quand Le chevalier Ă  la rose se dĂ©roule au XVIIIè Ă  l’époque de l’impĂ©ratrice Marie-ThĂ©rèse. Protagoniste, La MarĂ©chale amour amant Quinquin, c’est Ă  dire Octavian (magnifique emploi travesti pour mezzo); mĂŞme trentenaire, la jeune princesse doit renoncer bientĂ´t face Ă  la jeunesse insouciante et volage : Octavian aimera bientĂ´t Sophie, plus jeune, plus jolie. Ochs, le cousin de La MarĂ©chale est son double masculin : moins rustaud caricatural comme on le voit souvent dans nombre de productions, que trentenaire lui aussi, dĂ©passĂ© par les intrigues des femmes qui le piègent toujours. Le trio final met en scène les trois voix fĂ©minines de l’opĂ©ra : La MarĂ©chale, Octavian, Sophie en une scène d’un flamboiement sensuel, au spectre instrumental, littĂ©ralement iridiscent. Alors que le Phiharmonique de Vienne est souvent Ă©coutĂ© et plĂ©biscitĂ© dans une Ĺ“uvre emblĂ©matique de l’OpĂ©ra d’état, il est plus rare d’écouter le Phiharmonique de Berlin. C’est l’ex chanteuse vedette dans le rĂ´le travesti d’Octavian, Brigitte Fassbaender qui rĂ©alise la mise en scène de cette nouvelle production straussienne Ă  Baden Baden.

Vanités des plaisirs, illusions de la vie…

Nattier jeune femme Jean-Marc-Nattier-8759561-1Comédie de moeurs à la façon des peintures de William Hogarth (lequel inspirera aussi Igor Strawinsky pour son Rake’s progress), mais aussi évocation nostalgique de la Vienne baroque à l’époque de l’Impératrice Marie-Thérèse, le Chevalier à la rose, est surtout, un opéra né de l’accord exemplaire entre un compositeur et son librettiste: Richard Strauss et Hugo von Hoffmannsthal. Ce dernier n’hésite pas à solliciter la connaissance des convenances aristocratiques de l’Ancien Régime auprès du Comte Harry von Kessler, afin de renforcer la vraisemblance de la fresque historique. Mais l’art transcende l’anecdote et même si la remise d’une rose d’argent à la jeune fiancée Sophie, élue par le Baron Ochs, n’est que pure fiction, la partition et le livret produisent un ouvrage d’une rare subtilité psychologique. Les auteurs interrogent les rapports des êtres les uns vis à vis des autres, la fuite du temps et la quête (vaine) de chacun pour s’en défaire et trouver un (impossible) bonheur, bien éphémère.

 

 

 

hofmannsthal Hugo_von_Hofmannsthal richard straussVanité des plaisirs, illusion de la vie, tout en ciselant chaque tableau social, la musique exprime la quête éperdue et déjà futile d’une identité fragile. “Qui suis-je réellement? Que suis je pour les autres? Tout passe et tout s’efface”, semble se dire à elle-même La Maréchale. Même jeune, tout juste trentenaire, la jeune femme exprime la vanité de toute chose, y compris l’amour ardent que lui voue son jeune amant, “Quinquin” (Octavian). Son cousin le Baron Ochs est lui aussi un aristocrate assez “rustique” mais moins épais qu’on veut bien le chanter ordinairement. Reste, le portrait en triptyque de La Maréchale, Octavian et Sophie qui sous la plume du compositeur demeure le plus bouleversant trio final, écrit pour trois voix de femme, porté sur la scène d’un théâtre lyrique.

 

 

 

rose-nattierJean-Marc-Nattier-8759561-1Le Chevalier à la rose, créé à Dresde le 26 janvier 1911, est le cinquième opéra de Richard Strauss, après Guntram, Feuersnot, Salomé et Elektra. C’est le second ouvrage né de la collaboration avec le poète Hofmannsthal. Du même duo créateur naîtront ensuite, Ariane à Naxos (1912), La Femme sans ombre (1919), Hélène d’Egypte (1928) et Arabella (1933)…

 

 

 

boutonreservationLe Chevalier Ă  la Rose de Strauss Ă  Baden Baden
3 dates au Festival de Pâques de Baden Baden

Le 27 mars 2015 Ă  18h
Le 30 mars 2015 Ă  18h
Le 2 avril 2015 Ă  18h

Sir Simon Rattle, direction musicale
Brigitte Fassbaender, mise en scène

Anja Harteros, la Maréchale
Peter Rose, Ochs
Magdalena Kožená, Octavian
Anna Prohaska, Sophie
Carole Wilson, Annina
Clemens Unterreiner, Faninal
Elisabeth-Maria Wachutka, Marianne
Lawrence Brownlee, un chanteur

Philharmonia Chor Wien
Berliner Philharmoniker

Illustrations : Richard Strauss, portrait de jeune femme par Nattier, Hofmannsthal (DR)

 

 

 

Paris, Bastille : Karita Mattila chante Ariadne auf Naxos

strauss-hofmansthal-ariadne-auf-naxos-ariane-a-naxos-opera-bastille-paris-laurent-pelly-janvier-fevrier-2015Paris. OpĂ©ra Bastille. Strauss : Ariane Ă  Naxos : 22 janvier>17 fĂ©vrier 2015. Karita Mattila. Si l’on regrette le manque de poĂ©sie de la mise en scène de Laurent Pelly (l’une des moins inspirĂ©es qu’il ait faite : oĂą se lisent ici les rĂ©fĂ©rences si subtiles au baroque de Lully et de Molière voulues par Hofmannsthal et Strauss ?), la reprise de cette produciton dĂ©jĂ  vue, offre des promesses sĂ©duisantes grâce Ă  la prĂ©sence de la soprano incandescente Karita Mattila dans le rĂ´le de la primadonna au I, puis d’Ariadne au II. Aucun autre opĂ©ra, sur le mode chambrisme et parodique, n’illustre le mieux le thème de l’identitĂ© et de la mĂ©tamorphose : abandonnĂ©e par ThĂ©sĂ©e sur l’Ă®le de Naxos, la belle Arianne s’abandonne Ă  la mort jusqu’Ă  ce qu’elle croise le chemin du sensuel et hypnotique Bacchus dont la transe est gage de rĂ©surrection. Les romains avaient fait de l’ivresse bacchique la voie de l’Ă©ternitĂ© après la mort… Dans l’opĂ©ra de Hofmannsthal et de Strauss, Arianne Ă©prouve chaque Ă©tape d’une longue quĂŞte rĂ©gĂ©nĂ©ratrice : depuis sa caverne solitaire, grâce Ă  la complicitĂ© de l’insouciante mais subtile Zerbinette (pour laquelle chaque instant est une promesse amoureuse), par la rencontre finale avec le dieu de lumière, Bacchus, l’hĂ©roĂŻne retrouve enfin l’appĂ©tit de vivre. Un miracle dramatique qui la fait renaĂ®tre et s’ouvrir au monde plutĂ´t que de s’en Ă©carter pour mourir. VoilĂ  une hĂ©roĂŻne qui rĂ©aise un itinĂ©raire contraire Ă  celui de DaphnĂ© (pĂ©trifiĂ©e donc absente au monde et aux autres, comme l’Empereur dans La Femme sans ombre, en fin de parcours) : âme condamnĂ©e, languissante au dĂ©but, Ariane vit une renaissance : peu de cantatrices aujourd’hui peuvent offrir une telle expĂ©rience sur la scène, avec la conscience de ce qui se joue profondĂ©ment. Sous l’univers dĂ©jantĂ© de la comĂ©die du I (oĂą l’on assiste aux prĂ©paratifs de la troupe rĂ©unie avant l’opĂ©ra proprement dit), Strauss et son librettiste Hofmannsthal Ă©crivent l’un des drames les plus significatifs de leur travail Ă  quatre mains : s’y interpĂ©nètrent les notions diffuses d’art, de culture et de nature, d’Eros et de Thanatos, de dĂ©sir et de mort : si Ariane est d’emblĂ©e tragique et gĂ©missante, opposĂ©e par effet recherchĂ© des contrastes Ă  la figure de la piquante Zerbinette (qui malgrĂ© ce qu’on lit d’elle ici et lĂ , a mesurĂ© toute la profondeur de l’amour), Strauss rĂ©serve Ă  la diva tĂ©nĂ©breuse et trahie, une rĂ©mission : la promesse et la rĂ©alisation de sa rĂ©surrection.

 

 

 

le nouveau dĂ©fi de Karita Mattila Ă  l’OpĂ©ra Bastille

Arianne Ă  Naxos par karita

 

Il n’en faut pas moins pour inspirer la soprano Karita Mattila dans un rĂ´le que l’on attend Ă  Paris comme un Ă©vĂ©nement : son timbre intense et introspectif devrait Ă©clairer d’une ferveur tendre nouvelle le personnage d’Arianne, l’un des plus captivants imaginĂ©s par Strauss et Hofmannsthal.

mattila-karita-soprano-diva-ariadne-auf-Naxos-home-portrait-582-594A Paris, la cantatrice nordique, Ă©lève de la Sibelius Academy, fut Elisabeth (Don Carlo de Verdi) puis Lisa dans La Dame de Pique de Tchaikovsky : deux rĂ´les rĂ©vĂ©lant / confirmant son sens de la performance vocale autant que corporelle. Sa silhouette de star hollywoodienne (celle des films de Cukor par exemple car son blond mĂ©tallique sait particulièrement bien capter la lumière… : mĂŞme effet magnĂ©tique sous les feux de la rampe lyrique). Athlète autant que diva fine et vĂ©hĂ©mente (!), “La Mattila” devrait comme pour le rĂ´le voluptueux et fĂ©lin de SalomĂ© (du mĂŞme Strauss), redĂ©finir un standard vocal pour Ariane : blessĂ© mais sublime amoureuse. Saluons la diva finnoise pour sa prise de position contre Gergiev et ses dĂ©clarations douteuses sur la question homosexuelle. Elle ne chantera plus sous sa direction. en plus d’ĂŞtre artiste admirable, Karita Mattila est une diva humaniste, aux engagements exemplaires.

 

 

 

Pourquoi ne pas manquer la reprise d’Ariane Ă  Naxos Ă  l’OpĂ©ra Bastille en janvier et fĂ©vrier 2015 ?

Les 2 plus de la reprise d’Ariadne auf Naxos (1916) Ă  l’OpĂ©ra Bastille en janvier et fĂ©vrier 2015 :

1- Sophie Koch dans le rĂ´le du compositeur Ă  l’acte I (la mezzo française aura indiscutablement marquĂ© le rĂ´le)

2- le duo sublime et donc très prometteur de Klaus Florian Vogt  et de Karita Mattila dans les rĂ´les respectifs de Bacchus et d’Ariane pour une rencontre… miraculeuse ?

 

 

 

Paris. Opéra Bastille. Strauss : Ariane à Naxos : 22 janvier>17 février 2015.  Avec Karita Mattila.

 

 

DVD. Strauss : Ariadne auf Naxos, 1912 (Kaufmann, Harding, 2012)

strauss ariadne 1912 salzbourg sazlburg 2012, jonas kaufmann emily magee dvd Sony classicalDVD. Strauss : Ariadne auf Naxos, 1912 (Kaufmann, Harding, 2012). Salzbourg 2012. Sous la direction articulée très fluide et résolument chambriste de Daniel Harding, la réalisation du metteur en scène, Sven-Eric Bechtolf, déploie d’indiscutables arguments, au service de la version originale d’Ariadne (1912) qui diffère de celle plus tardive et plus familièrement choisie de 1916 : perceptible entre autres pour les connaisseurs, dans les interventions insolentes et brutales du commanditaire perruqué pendant le lamento d’Ariadne (qu’il juge ennuyeux et lisse), mais aussi dans les époustouflantes variations dévolues à l’air de Zerbinette, vocalises impressionnantes et interminables qui se terminent en orgasme vocal délirant, des plus élégants, et enchanteurs.

 

 

 

 

Ariadne, somptueuse version de 1912

 

CLIC_macaron_2014Toute la verve des deux auteurs (Strauss et son librettiste Hofmannstahl, rappelons le, fondateurs du festival autrichien en 1922) est lĂ  : entre comique bouffon (première partie savoureuse entre théâtre et scène chantĂ©e) et dĂ©clamation tragique (lâ€opĂ©ra proprement dit dans la seconde partie), deux mondes qui cependant, malgrĂ© leur antinomie, faisaient contraste, rĂ©alisent un théâtre jubilatoire, et mĂŞme ici d’une irrĂ©sistible cohĂ©rence. Hofmannsthal est d’ailleurs prĂ©sent sur scène accompagnant les chanteurs acteurs comme s’il s’agissait en prĂ©sence du commanditaire, d’une rĂ©pĂ©tition gĂ©nĂ©rale.
ariadne auf naxos kaufmann magee salzbourg sazlburg 2012Saluons la tenue excellente des comĂ©diens italiens, quatre chanteurs impeccables ; de mĂŞme,  la Zerbinette parfois vocifĂ©rante et imprĂ©cise dans sa coloratoure infinie, mais prĂ©sente et puissante d’Elena Mosuc dont l’habit entre la fraise tagada et le pouf Second Empire restera mĂ©morable ; l’Ariane d’Emily Magge, dont les basses absentes, et la ligne lisse, empĂŞchent une pleine incarnation troublante et rĂ©ellement dĂ©chirante de l’amoureuse abandonnĂ©e par ThĂ©sĂ©e, sur son rocher de Naxos. L’attente se fait sentir quand paraĂ®t finalement l’époustouflant Bacchus de Jonas Kaufmann : le libĂ©rateur, le salvateur, prototype du hĂ©ros providentiel, celui dont le chant dionysiaque et exaltĂ©, fĂ©lin, animal, assure la rĂ©surrection d’Ariadne tragique qui s’était vouĂ©e Ă  la mort. Leur rencontre est un instant magique, inscrit au coeur de la mythique hofmannsthalienne. Les spectateurs s’accordent Ă  la langueur pâmĂ©e de la princesse : ils se laissent totalement hypnotiser par le chant ardent et voluptueux, tendu, viril, osons le dire… Ă©rotique, du tĂ©nor germanique. L’impact est total. Et la rĂ©ussite de son apparition, suprĂŞme. C’est en dĂ©finitive par un subtil jeu de mise en abĂ®me tout au long du spectacle, une rĂ©fĂ©rence allusive Ă  la relation trouble d’Hoffmannsthal et de la jeune veuve Ottonie von Degenfeld, liaison ou attraction que rĂ©vèle la correspondance de l’intĂ©ressĂ©.

 

 

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Ariadne auf NaxosL’engagement de tous les interprètes (les 3 nymphes accompagnant  et contrepointant Adriadne sont d’une rare éclat vocal comme scénique), la version retenue ici (donc celle des origines soit 1912), les couleurs somptueuses du Wiener Philharmoniker, le plateau vocal globalement passionnant, révèlent dans la scénographie très efficace de Sven-Eric Bechtolf, le raffinement de cette comédie douce amère qui renoue avec le Cosi fan gutte de Mozart, entre verve délirante, délicieuse ivresse, profondeur poétique.  Une remarquable production salzbourgeoise heureusement transférée en DVD.

DVD. Strauss / Hofmannsthal : Ariadne auf Naxos, 1912. Emily Magge, Elena Mosuc, Jonas Kaufmann… Wiener Philharmoniker. Daniel Harding, direction. 2 dvd Sony classical.  Enregistré au festival de Salzbourg à l’été 2012.

L’amour de DanaĂ© de Strauss Ă  Frankfurt

Kimt danaeFrankfurt, OpĂ©ra. L’Amour de DanaĂ© de Strauss: 7,9,10 juin 2014. L’avant dernier opĂ©ra de Strauss, avant DaphnĂ©, L’amour de Danae permet Ă  Strauss de renouer avec la lyre mythologique qu’il a si magistralement illustrĂ©e entre registre poĂ©tique, comique, tragique, hĂ©roĂŻque dans Ariane Ă  Naxos : comme HĂ©lène Ă©gyptienne, le compositeur entend y dĂ©velopper une comĂ©die antique, d’une Ă©criture libre et inventive avec ce sprächgesang (parlĂ© chantĂ© continu, proche de la parole) qui exprime la palpitation de la vie elle-mĂŞme. La lĂ©gèretĂ© est inscrite dans l’écriture de la partition dont Strauss voulait faire une opĂ©rette. Le compositeur et son librettiste (Gregor) reprennent une ancienne idĂ©e de Hugo von Hofmannsthal (le librettiste disparu du Chevalier Ă  la rose ou de La Femme sans ombre…) : un scĂ©nario mĂŞlant des destins sĂ©parĂ©s, – selon une formule allopathique magnifiquement appliquĂ©e dans La Femme sans ombre-, ici (chaque sort est liĂ© Ă  la rĂ©ussite de l’autre) : DanaĂ©, Midas, Jupiter. Gregor n’ayant pas les mĂŞmes facilitĂ©s que Hofmannsthal (ce que Strauss ne manquera pas de lui reprocher), deux actions se superposent sans vraiment s’accorder : l’action entre DanaĂ© et Midas qui forment un couple fusionnel malgrĂ© les pĂ©ripĂ©ties ; DanaĂ© et Jupiter : le dieu des dieux, sur la fin (portrait de Strauss lui-mĂŞme ?) exprime ses Ă©tats d’âmes dans un monde qui lui Ă©chappe d’autant plus qu’il doit renoncer Ă  la belle DanaĂ©e, que jadis il a visitĂ© Ă  son insu (la fameuse fĂ©condation sous la forme d’une pluie d’or que tous les peintres, de Titien, Tintoret Ă  Klimt ont illustrĂ©). Pourtant, en dĂ©pit de la diversitĂ© irrĂ©solue des intrigues confrontĂ©es, la vivacitĂ© et l’esprit de comĂ©die s’imposent dans cette oeuvre aussi symphonique que celles antĂ©rieures. Strauss fait chanter ses protagonistes comme les personnages d’un drame contemporain. Fidèles Ă  l’esprit d’Hofmannsthal, malgrĂ© les avatars de la composition du livret, le compositeur soigne le principe de la mĂ©tamorphose : DanaĂ© et Jupiter y vivent et Ă©prouvent un changement profond de leur ĂŞtre : par amour pour Midas qui dĂ©possĂ©dĂ© de son don de tout changer en or, est devenu finalement un pauvre muletier, Danae est guĂ©rie de sa soif primaire d’or et de mĂ©tal prĂ©cieux ; Jupiter lui aussi dĂ©couvrant le miracle de l’amour humain reconnaĂ®t ĂŞtre impuissant face au phĂ©nomène dont il est tĂ©moin, et accepte de renoncer Ă  l’objet de son dĂ©sir.

Richard Strauss
L’Amour de Danaé
Die liebe der Danae
Frankfurt, Oper
Les 15 et 19 juin 2014
Sebastian Weigle, direction. Marco Buhrmeister, Marsch, Gibson, Schwanewilms, Vuong, Ryan (version de concert)

http://www.oper-frankfurt.de/

Lire aussi notre dossier Les femmes dans les opéras de Richard Strauss

 

Feuersnot de Richard Strauss Ă  Dresde

150 ème anniversaire de Richard StraussDresde. Semperoper. R. Strauss: Feuersnot. 7,9,10 juin 2014. Munich, à une époque indéterminée. L’histoire pourrait être une anecdote : Kunrad, l’héritier du magicien Reichart, profite de la nuit de la Saint-Jean où les enfants recueillent le bois du grand feu, de maison en maison, pour déclarer sa flamme à la jeune Diemut, qu’il embrasse en public. Pour se venger d’une telle audace, la jeune fille le piège et le fait suspendre depuis le balcon de sa chambre, où le jeune homme espérait bien la conquérir.
Usant de ses pouvoirs, Kunrad plonge la ville (Munich) dans l’obscurité, disposé à rétablir l’ordre que si Diemut lui ouvre son cœur … ce qui advient en fin d’action. Strauss poursuit musicalement la leçon de Wagner, exploite toutes les ressources dramatiques du livret pour enflammer son orchestre et profite ici des situations pour épingler la pensée étroite des munichois bien conformes (n’avaient-ils pas chassé Wagner et Cosima ?) De sorte que l’on voit en général une allusion et défense de Wagner dans le personnage du maître de Kunrad, Reichart.

Kunrad, le double vengeur de Richard Strauss …
Comme dans son (premier) opĂ©ra antĂ©rieur, Guntram, le hĂ©ros de Feuersnot (créé Ă  Munich en novembre 1895), Kunrad, apprenti magicien, exprime sa relation aux forces sublimes et supĂ©rieures de la nature en un chant admiratif cĂ©lĂ©brant le miracle du printemps – comme d’ailleurs Wagner dans ses MaĂ®tres Chanteurs, faisait chanter son propre hĂ©ros Walter, initiĂ© par Hans Sachs – le dĂ©tenteur du savoir et de l’art-, «  la loi du printemps ». De fait, proche de l’esprit nietzschĂ©en de Till l’Espiègle (ample et savoureux poème symphonique), Kunrad, vĂ©ritable double du compositeur, comme investi d’une mission remarquable, Ă©pingle aussi sans les mĂ©nager, l’imbĂ©cilitĂ© crasse des « honnĂŞtes » et bourgeoises gens du bourg de Munich. Comme Verdi dans La Traviata et Wagner dans ses mĂŞmes MaĂ®tres-Chanteurs, Strauss rĂ©ussit un portrait satirique et vitriolĂ© de la bĂŞtise collective humaine Ă  son Ă©poque ou de toutes les Ă©poques : Strauss y règle ses comptes avec les Munichois qui avaient si mal accueilli Guntram… ; une dĂ©nonciation sociale qu’exacerbe la construction de l’ouvrage qui confronte le hĂ©ros et le reste de la sociĂ©tĂ©.
Strauss s’est déclaré très proche de ce deuxième ouvrage lyrique dont il a aimé souligné la part autobiographique. D’autant que Kunrad serait la face comique sarcastique de la tragique silhouette de Guntram. En somme au début de l’oeuvre lyrique de Strauss, déjà un portrait ambivalent et complet de lui-même. Comme Guntram, Kunrad oppose le destin de l’individu contre la société des hommes, et même s’il réussit en fin d’action son intégration supposée, elle relève plus d’un effet propre au canevas comique que d’un accomplissement psychologique naturel et longuement muri.
Après l’échec de Guntram, Strauss espérait se refaire une réputation comme auteur lyrique… grâce à Feuersnot. Rien n’y fait : le second opéra est taxé de wagnérisme excessif, trop parsifalien, trop lourd et pompeux, maladroit même dans son schéma dramatique. Un nouvel échec.
Feuersnot est une farce certes, habilement tissĂ©e dont le climat nocturne (acte unique le temps de la Saint-Jean) ressuscite l’acte II des MaĂ®tres Chanteurs de Nuremberg de Wagner (qui se dĂ©roule la nuit). En fait le propos drĂ´latique est l’écrin d’un hymne très sĂ©rieux voire acerbe pour l’art comme moteur de dĂ©passement de la sociĂ©tĂ©. La malĂ©diction que le jeune Kunrad rĂ©alise contre les Munichois (superbe et ample air dramatique, l’épine dorsal de l’opĂ©ra) est la vengeance de Strauss – et de son librettiste, Wolzogen-, Ă  l’endroit d’un auditoire sourd Ă  ses conceptions lyriques et dramatiques. Kunrad/Strauss y dĂ©fend le principe d’un art libre et moralement exigeant qui Ă©lève la fange collective vers un destin et une conscience supĂ©rieure. Les rĂ©fĂ©rences du modèle Wagner y sont Ă  peine masquĂ©es. Feuersnot est donc plus qu’une simple comĂ©die : la partition d’un compositeur qui y transmet sa connaissance profonde de Wagner, en particulier du sens philosophique et esthĂ©tique des MaĂ®tres Chanteurs…

Dresde. Semperoper
R. Strauss: Feuersnot
Les 7,9,10 juin 2014

Daphné de Strauss à Toulouse

strauss_richard_570_richardsreauss-592x333Toulouse. DaphnĂ© de Strauss. Les 15,19,22,25,29 juin 2014. Temp fort de l’annĂ©e Strauss en France, le Capitole de Toulouse prĂ©sente une nouvelle production de l’opĂ©ra antique mythologique de Richard Strauss, DaphnĂ©. L’ouvrage créé Ă  l’aube de la guerre (1938) confirme l’inspiration classique du compositeur bavarois, entre Mozart et Wagner : une manière inspirĂ©e esthĂ©tiquement atemporelle et pourtant investie d’une conscience morale très aiguĂ«. La musique orchestrale y est d’une raffinement Ă©blouissant, synthèse entre le chambrisme ardent d’Ariane Ă  Naxos et le psychisme flamboyant, crĂ©pusculaire, de Capriccio. Sur le thème lĂ©guĂ© par Ovide (Les MĂ©tamorphoses), Strauss au sommet de sa carrière lyrique aborde le thème de l’identitĂ© profonde des ĂŞtres hors de l’amour : pourtant aimĂ©e par le bouvier Leucipos et Apollon lui-mĂŞme (qui va jusqu’Ă  tuer son rival mortel), la nymphe DaphnĂ© choisit de s’abstraire du monde des hommes et des dieux, de renoncer Ă  l’amour en une forme incarnĂ©e palpitante… elle choisit d’ĂŞtre pĂ©trifiĂ©e : changĂ©e en laurier (anecdotiquement pour Ă©chapper aux assauts d’Apollon selon la reprĂ©sentation du sculpteur gĂ©nial Bernin).  En rĂ©alitĂ©, culpabilisant après avoir tuer Leucippos, Apollon regrette son crime indigne d’un dieu : il concède Ă  l’aimĂ©e d’exaucer son voeu le plus cher : devenir laurier pour Ă©chapper au monde du dĂ©sir. A l’inverse des hĂ©roĂŻnes qui choisissent d’ĂŞtre finalement intĂ©grĂ©es au monde, tel l’ImpĂ©ratrice de La Femme sans ombre, d’Ariane, d’HĂ©lène, DaphnĂ© rĂ©alise le chemin Ă  rebours… rompre le lien avec l’humanitĂ© et la chair, le dĂ©sir et l’amour. En une page symphonique inouĂŻe, Strauss dĂ©veloppe toutes les ressources de l’orchestre pour exprimer la lente mĂ©tamorphose de DaphnĂ©, d’ĂŞtre dĂ©sirĂ© mais souffrant Ă  celui d’une souche vĂ©gĂ©tale sans âme…. mais dĂ©sormais dĂ©livrĂ© des souffrances du sentiment.

Richard Strauss : Daphné
Toulouse, Capitole
Les 15,19,22,25,29 juin 2014

Tragédie bucolique en un acte, op. 82 sur un livret de Joseph Gregor 
créée le 15 octobre 1938 à la Staatsoper de Dresde. Diffusion sur France Musique

Hartmut Haenchen, Direction musicale
Patrick Kinmonth, Mise en scène, décors, costumes
Fernando Melo, Chorégraphie
Zerlina Hughes, Lumières

Franz-Josef Selig, Peneios
Anna Larsson, Gæa
Claudia Barainsky, Daphne
Maximilian Schmitt, Leukippos
Alfred Kim, Apollo
Patricio Sabaté, Premier Pâtre
Paul Kaufmann, Deuxième Pâtre
Thomas Stimmel, Troisième Pâtre
Thomas Dear, Quatrième Pâtre
Marie-Bénédicte Souquet, Première Servante
Hélène Delalande, Deuxième Servante

Orchestre national du Capitole
Chœur du Capitole 
Alfonso Caiani Direction

Toutes les modalités de réservation, les informations sur le site du Capitole de Toulouse

logo_francemusiqueDiffusion sur France Musique, soirée lyrique dès 19h, samedi 28 juin 2014 (représentation enregistrée du 15 juin 2014)

 

 

Daphné de Strauss sur France Musique

 

 
Illustrations : Richard Strauss, Daphné métamorphosé par Nicolas Poussin (DR)

Concerto pour hautbois de R. Strauss et RhĂ©nane de Schumann par l’Orchestre de chambre de Paris

schumann_robertParis, TCE. Orchestre de chambre de Paris. Strauss, Schumann : le 26 avril 2014, 20h. Suisse, Automne 1945 : au moment de la capitulation nazie, Strauss un temps instrumentalisé par le régime hitlérien, exprime son chant personnel, regrettant les dommages infligés par la guerre. Pour l’orchestre de la Tonhalle de Zürich, le compositeur écrit son Concerto pour hautbois (créé le 26 février 1946), réminiscence du style classique viennois, à la fois mesuré et rococo. L’instrument soliste y dialogue en batifolant avec l’orchestre en effectif réduit. Les trois mouvements s’enchaînent : dès le commencement, le hautbois est particulièrement sollicité, alliant fantaisie, humeur burlesque, vraie élégance de ton (Allegro moderato) ; l’Andante, de forme lied, déploie un chant cantabile d’une tranquillité (alliant tendresse et parfois gravité) toute mozartienne ; dans le dernier épisode (Vivace-allegro), le soliste est invité à démontrer toute sa brillante élocution, versatilité et liberté étant de mise, en particulier dans la Sicilienne finale.

Symphonie n°3 Rhénane de Robert Schumann. L’Orchestre de chambre de Paris poursuit son cycle Schumann avec la Rhénane, l’une de plus lyrique et exaltante du corpus des 4 Symphonies composées par le Romantique. Créée en février 1851, la partition s’écoule comme un fleuve impétueux, riches en images et en couleurs qui affirme encore et toujours, un esprit rageur et combattif. Celui d’un Schumann démiurge à l’échelle de la nature. Les indications en allemand soulignent la germanité du plan d’ensemble dont la vitalité revisite Mendelssohn, et l’ambition structurelle, le maître à tous : Beethoven. Paysages d’Allemagne honorés et brossés avec panache et lyrisme depuis les rives du Rhin, la Rhénane doit s’affirmer par son souffle suggestif. En particulier, le Scherzo : la houle généreuse des violoncelles, aux crêtes soulignées par les flûtes, y évoquerait (selon Schumann lui-même) une « matinée sur le Rhin », comme l’indique le superbe contrechant des cors dialoguant avec les hautbois aux couleurs élégantes dont l’activité gagne les cordes. Le Nicht schnell baigne dans une tranquillité pastorale qui met en lumière le très beau dialogue dans l’exposition des pupitres entre eux, surtout cordes et vents. Le point d’orgue de la Rhénane demeure le 3ème épisode « Feierlich » (maestoso): Schumann inscrit comme un emblème la grave noblesse et la solennité majestueuse de l’ensemble. L’ampleur Beethovénienne de l’écriture impose une conscience élargie comme foudroyée … et ce n’est pas les fanfares souhaitant renouer avec l’aisance triomphale par un ample portique qui effacent les langueurs éteintes comme décomposées. Le caractère du mouvement est celui d’un anéantissement, aboutissement d’un repli dépressif exténué… avant que ne retentissent, comme l’indice d’un salut recouvré, les accents haletants, dansants, irrépressibles du Lebahft final.

Orchestre de chambre de Paris
saison 2013-2014

Samedi 26 avril 2014, 20h
Paris, Théâtre des Champs Elysées TCE

Philippe Manoury: Strange Ritual
Strauss : Concerto pour hautbois et orchestre en ré majeur
Schumann : Symphonie n°3 «  Rhénane » en mi bémol majeur

Thomas Zehetmair, direction
François Leleux, hautbois

illustration : Robert Schumann

L’incandescente Elektra de ChĂ©reau sur Arte

Télé,  Arte. Strauss : Elektra par Chéreau. Dimanche 16 mars 2014, 23h25. Dans une arène dépouillée qui laisse tout voir du mouvement des figures sur la scène, l’action tragique aux accents expressionnistes hystériques se dévoile retrouvant la noblesse épurée et la grandeur austère des drames d’Eschyle et de Sophocle. Patrice Chéreau nous laisse une vision personnelle et très engagée de la mise en scène à l’opéra. Il reste l’un des plus récents réformateurs du théâtre lyrique. Dans cette production du troisième opéra de Richard Strauss (et son premier ouvrage avec l’immense poète Hugo van Hofmannsthal), Chéreau travaille le corps de ses interprètes comme s’il s’agissait d’une facette de l’âme. Sans a priori le metteur en scène redéfinit les enjeux psychologiques de chacun des protagonistes, en fouillant en particulier le livret parvenu, en interrogeant chaque mot du texte d’Hofmannsthal.

 

 

 Télé, Arte. La fulgurante ELEKTRA de Patrice Chéreau

 

 

Patrice Chéreau laisse avec Elektra (créé en 1909),  son ultime scénographie à l’opéra,  l’une de ses réalisations les plus abouties.  Fille tiraillée entre le désir de vengeance de celui qui lui a donné l’amour -son père Agamemnon-, et la volonté de tuer celle qui ne lui a rien donné,  sa mère Clytemnestre (qui a tué le père), la pauvre fille crie son impuissante volonté, elle hurle sa douleur solitaire (car sa sœur Chrysostémis elle veut tourner la page et vivre), c’est d’abord une victime blessée,  une ombre errante en quête d’identité;  en s’appuyant sur les intentions de Strauss et de son librettiste, Chéreau brosse un nouveau portrait d’Elektra en éclairant sa relation avec la mère… Interprète familière et qui connaît idéalement le rôle de Clytemnestre, la mezzo incandescente Waltraud Meier répond magnifiquement au travail de Chéreau. .. c’est aussi aux côtés de la fille,  la figure ambiguë et bouleversante de la mère qui frappe immédiatement.
Créée à l’été 2013 (festival d’Aix en Provence juillet 2013), la production d’Elektra que diffuse Arte montre combien Chereau décédé en octobre 2013, plaçait l’humain au centre de son travail avec un sens de l’économie et du rythme sans équivalent (sauf peut être Pina Baush, celle du Sacre du printemps….). Même ivresse fulgurante, même fascination pour le chant du corps embrasé dont la danse/transe relaie la vocalité de la musique quand cette dernière ne suffit plus. Production événement d’autant plus opportune pour l’année 2014 du 150 ème anniversaire de Strass et aussi comme hommage à l’apport de Patrice Chereau à la scène lyrique. En lire +, lire notre critique du spectacle Elektra de Strauss par Chéreau (Aix 2013)

 

Télé,  Arte. Dimanche 16 mars 2014, 23h25. 

 

 

R. Strauss : Ariadne auf naxos. Le portrait d’Ariane

Ariane_zerbinette_bacchus_785px-Bacchus_Ariane_and_Venus-Domenico_Tintoret_mg_9990Ariane : le miracle de la renaissance. LĂ  oĂą Elektra incarnait la tragĂ©die d’une âme solitaire pĂ©trifiĂ©e par son enchaĂ®nement Ă  l’image d’un seul ĂŞtre : Agamemnon, le père mort Ă  venger, Ariane est de la mĂŞme façon emprisonnĂ©e par le seul amour de sa vie (croĂ®t-elle), ThĂ©sĂ©e, qui l’obsède d’autant plus qu’il l’a abandonnĂ©e. Trahie, dĂ©truite, Ariane erre depuis la caverne des origines, rĂ©gression symbolique oĂą elle attend la mort. Sur l’Ă®le de Naxos, l’humiliĂ©e solitaire, sombre et impuissante, dĂ©sespère …
C’est en croisant la figure de Bacchus que l’amoureuse tragique renaĂ®t d’elle mĂŞme. Hofmannsthal exploite le symbolisme de l’ivresse bacchique comme l’Ă©noncĂ© et la rĂ©alisation de la mĂ©tamorphose : la promesse d’une nouvelle vie. La rencontre avec le dieu juvĂ©nil du vin marque dans la vie d’Ariane un miracle salavateur.
Pour accentuer encore l’Ă©tat vĂ©gĂ©tatif dans lequel demeurait Ariane, Strauss et Hofmannsthal imaginent la figure opposĂ©e (jusque dans sa tessiture) de Zerbinette, âme volage et mobile de soprano coloratoura, quand Ariane, tragique et esseulĂ©e est un soprano dramatique plus sombre.
Captivant, le duo fĂ©minin agit comme la double face d’une mĂŞme idĂ©al car chacune aspire finalement Ă  l’excellence morale : fusionner avec cet autre qui satisfasse leur attente psychique et spirituelle. Et fidèle Ă  ses thèmes chers, Hofmannsthal n’omet pas le pouvoir rĂ©dempteur de la rencontre : en croisant le chemin de Bacchus, le destin d’Ariane est profondĂ©ment modifiĂ©, comme Zerbinette elle aussi au contact du visage tragique d’Ariane se modifie : volage certes au I (face au compositeur, elle prĂ´ne l’oubli, le mouvement perpĂ©tuel et l’irresponsabilitĂ©), Zerbinette gagne une profondeur nouvelle ensuite dans son grand air de plus de 10 mn de flamboyantes vocalises : elle chante l’amour le plus pur tout en espĂ©rant rencontrer elle aussi celui qui lui inspirera une fidĂ©litĂ© totale… En dĂ©finitive l’itinĂ©raire d’Ariane prolonge le destin d’Elektra : lĂ  oĂą la fille d’Agamemnon ne pouvait concevoir de vivre pour elle-mĂŞme, Ariane apporte la preuve qu’il est possible de dĂ©passer ce qui semblait insurmontable. L’autre est un salut. Et la rencontre, l’expĂ©rience la plus exaltante qui puisse se prĂ©senter, que l’on puisse vivre.

 

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Illustrations : Ariane et Bacchus par le Tintoret (DR). Dans le second tableau de Tintoret, le peintre Ă  travers l’oeuvre de Bacchus, rend Ă  Ariane blessĂ©e, sa dignitĂ© psychique, honore sa beautĂ© et lui permet de renaĂ®tre Ă  elle mĂŞme. L’Ă©pisode peint les noces des deux ĂŞtres grâce Ă  l’entremise de Venus, volant dans le ciel, tandis que le dieu d’amour tient l’anneau de leur union.

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CHANTER ARIANE
jessye-norman-ariane-auf-naxos-diva-opera-classiquenews-critiqueFigure de la continuité, Ariane est pour Jessye Norman qui aura marqué le rôle par la finesse enivrée de son interprétation (Metropolitan opera 1984, James Levine), une amoureuse fidèle pour laquelle la mort (incarné à la fin de l’opéra, par Bacchus) n’est ni une fin ni une rupture mais un passage dans la continuité, d’une vie (celle avec Thésée) à l’autre (celle avec l’inouï de sa rencontre avec le beau et l’enivrant Bacchus). Jessye Norman a parlé de leur duo qui est un quiproquo inédit pour un couple d’amoureux : un terrible « malentendu » Ariane pense rencontré (retrouver) Thésée (celui qui l’a abandonnée), et Bacchus pense rencontré … Circé. De ce quiproquo découle un enchantement à deux voix où c’est moins la vérité de la rencontre qui compte que ce que chacun pense vivre individuellement. Qui suis je à moi-même ? Qui suis je pour l’autre ? La vérité est celle que j’incarne dans la durée malgré les doutes et les impressions de coupures. Ariane abandonnée par Thésée, se vouait à la mort par dépit, par désespoir : c’est le tableau initial d’Ariane sur son rocher à Naxos, démunie, endeuillée, détruite. Puis surgit dans la lumière d’une résurrection, la nouvelle Ariane, celle que « ressuscite » Bacchus, dieu du vin (donc de l’ivresse par laquelle la métamorphose se réalise). Personnage sincère, Ariane dans l’opéra incarne les valeurs défendues par le compositeur/Komponist (qui donc présent de cette façon, n’y apparaît pas) : du ariane-auf-naxos-jessye-norman-opera-critique-classiquenewsKomponist, Ariane prolonge les valeurs tendres d’amour et de loyauté. C’est pourquoi quand elle chantait dans la première partie, le personnage de la Prima donna, Jessye Norman veillait à caractériser différemment son interprétation de l’une à l’autre ; car ce sont bien deux personnalités qui n’ont rien à voir. La Prima Donna est une caricature parodique de la chanteuse capricieuse hystérique, égoïste ; Ariane est pur amour, pur désir, tourné vers l’autre. Rien à voir. Donc pour la diva invitée à les incarner toutes deux, un défi dramatique vertigineux.

Richard Strauss : Hélène égyptienne (1928-1933)

Poussin_la-sacre-d-apollon_strauss-helene-egypteLa quĂŞte d’HĂ©lène Ă©gyptienne … Dernier opĂ©ra conçu par Hofmannsthal et Strauss, HĂ©lène Ă©gyptienne créé en 1928 confirme l’AntiquitĂ© comme une source rĂ©gulière et inĂ©puisable : après Elektra, Arianne, voici donc HĂ©lène mais dans un Ă©pisode moins connu, celui indirectement lĂ©guĂ© par Euripide. Homère retrouve HĂ©lène et MĂ©nĂ©las, heureux comme rĂ©conciliĂ©s, malgrĂ© la sĂ©quence d’HĂ©lène enlevĂ© par Paris jusqu’Ă  Troie… Or selon Euripide, soucieux d’expliquer les retrouvailles des Ă©poux, imagine qu’en rĂ©alitĂ©, Pâris aurait enlevĂ© le fantĂ´me d’HĂ©lène ; la vraie HĂ©lène se serait enfuie en Egypte Ă  la cour du ProtĂ©e oĂą l’Ă©poux dubitatif et d’abord trompĂ©, la retrouve ; elle lui aurait toujours Ă©tĂ© loyale.
HĂ©lène Ă©gyptienne raconte l’histoire d’une femme en quĂŞte de son Ă©poux, cherchant Ă  rĂ©tablir la confiance dans leur couple en dĂ©pit d’une rĂ©putation tronquĂ©e mais nĂ©faste… en dĂ©pit de l’infidĂ©litĂ© dont elle s’est rendue coupable. Contre la fatalitĂ© et le poison du soupçon, HĂ©lène veut croire au serment du mariage : ĂŞtre fidèle Ă  son Ă©poux, c’est enfin accomplir son destin. Il n’est jamais trop tard. Voici encore une fois, la figure d’une femme admirable qui souffrante dĂ©sire ĂŞtre sauvĂ©e.

 

 

Vaincre le soupçon, honorer la vérité

 

Pour Hofmannshtal l’idĂ©e des retrouvailles est excellente mais il n’accepte pas le truchement (artificiel) du fantĂ´me. Quand commence l’opĂ©ra, les deux Ă©poux voguent sur un bateau, MĂ©nĂ©las est prĂŞt Ă  tuer sa femme : l’enchanteresse AĂŻthra par solidaritĂ©, suscite une tempĂŞte, et fait Ă©chouer les hĂ©ros sur son Ă®le ; grâce Ă  ses philtres, elle fait croire Ă  MĂ©nĂ©las que HĂ©lène pendant la guerre de Troie, est toujours demeurĂ©e avec elle hors des conflits, sur son Ă®le…
Ainsi se rĂ©alise l’action de l’acte I. Mais pour HĂ©lène qui regrette sa dĂ©loyautĂ©, il s’agit de reconquĂ©rir MĂ©nĂ©las sur un pacte de vĂ©ritĂ© ; cette exigence morale structure tout le second acte. Tout charme est annulĂ© et HĂ©lène veut affronter les reproches de son Ă©poux… qui furieux menace de la tuer, puis renonce et lui pardonne. La vĂ©ritĂ© a payĂ© et HĂ©lène est rachetĂ©e.

Fidèle Ă  ses valeurs, le librettiste nourrit l’action de ce qui n’aurait pu ĂŞtre qu’une comĂ©die lĂ©gère : plus opĂ©rette que grand opĂ©ra, HĂ©lène d’Egypte (ou HĂ©lène Ă©gyptienne) est d’abord une conversation en musique Ă  la façon de ce que sera Capriccio ; le drame, le verbe, la psychologie avant toute Ă©vocation grandiose. Mais Strauss ne sacrifie pas pour autant les accents furieusement et sensuellement orientaliste de la partition qui inscrit dans la comĂ©die lyrique les parfums d’une Égypte bien prĂ©sente. L’AntiquitĂ© sous le filtre des deux concepteurs est un huit clos domestique, souvent proche d’un vaudeville. Mais la finesse de l’orchestration, l’architecture des scènes et la progression des Ă©pisodes comme l’Ă©volution des caractères, MĂ©nĂ©las transfigurĂ©, HĂ©lène mĂ©tamorphosĂ©e entre espĂ©rance et culpabilitĂ©, portĂ©e par la complicitĂ© d’AĂŻthra … composent in fine une oeuvre maĂ®tresse dans la carrière lyrique de Strauss… hĂ©las constamment absente des scènes d’opĂ©ras en raison de la difficultĂ© du rĂ´le titre (n’est pas Gwyneth Jones qui veut… l’auditeur se reportera ainsi avec bĂ©nĂ©fice sur le seul enregistrement disponible et valable chez Decca).

AidĂ© de Klemens Krauss, Strauss opère une nouvelle version pour l’acte II en 1933 : plus directe moins circulaire et rĂ©pĂ©titive, l’action psychologique se resserre sur la relation complexe des deux Ă©poux vers leur rĂ©conciliation salvatrice; au final, MĂ©nĂ©las efface toute aspiration vengeresse et stĂ©rile, accepte d’ĂŞtre sauvĂ© de sa folie meurtrière… HĂ©lène rĂ©ussit dans son Ĺ“uvre d’expiation. De beautĂ© fatale et Ă©gocentrique, souhaitant le pardon de son mari, la jeune femme tend vers l’humanitĂ©, l’amour, l’humilitĂ©. C’est de ce point de vue l’une des mĂ©tamorphoses fĂ©minines la plus aboutie dans le théâtre de Strauss et Hofmannsthal. Ici le salut de chaque Ă©poux ne peut ĂŞtre rĂ©alisĂ© sans l’accord des deux dans le processus parallèle de leur salut progressif. Pour qu’HĂ©lène soit sauvĂ©e, il faut que MĂ©nĂ©las accepte de l’ĂŞtre aussi. Une thĂ©rapie Ă  deux en quelque sorte. C’est Ă  nouveau l’application du principe allomatique dĂ©jĂ  abordĂ© dans La Femme sans ombre, oĂą lĂ  aussi, le salut des quatre protagonistes ne peut se produire que si tous sont sauvĂ©s, car leur destin est indissociable.

DVD. R. Strauss : La Femme sans ombre (Gergiev, 2011)

Frau-ohne-schatten-richard-strauss-valery-gergiev-dvd-mariinskyDVD. R. Strauss : La Femme sans ombre (Gergiev, 2011). Qui a dit que La Femme sans ombre, l’opĂ©ra féérique et fantastique de Strauss et Hofmannsthal Ă©tait impossible Ă  monter et produire ? Il est vrai que son sujet qui relève de la fable philosophique et initiatique (le principe allomatique y est souverain, reliant les destins croisĂ©s du couple impĂ©rial aux simples mortels composĂ© par le teinturier Barak et son Ă©pouse…) se prĂŞte mal Ă  une adaptation scĂ©nique et théâtrale classique, un peu comme La damnation de Faust (moins opĂ©ra, plus ” lĂ©gende dramatique ” selon les propre termes de Berlioz). OpĂ©ra humaniste, conte magique et spirituel, La femme sans ombre reste pourtant une formidable expĂ©rience musicale et lyrique. VoilĂ  une production emportĂ©e par la rage flamboyante de Gergiev qui mĂŞme dans sa rĂ©alisation scĂ©nographique et visuelle emporte l’adhĂ©sion. Depuis sa direction au Mariinski en 1996, Gergiev s’est fait une spĂ©cialitĂ© des oeuvres complexes qui exigent surtout un flamboiement Ă©ruptif voire sauvage Ă  l’orchestre et des voix puissantes mais articulĂ©es.

Flamboiements du Gergiev straussien

Créé en novembre 2009, la production passe sans problème ni faiblesse le transfert de la scène au petit Ă©cran : dans la mise en scène de Jonathan Kent, les images féériques du monde de l’Empereur et de l’ImpĂ©ratrice  voisinent par leur decorum mesurĂ© et orientalisant Ă  cet univers russe, bigarrĂ© et hautement colorĂ©, citant ici le Sacre (dans la version du ballet originel), ou les opĂ©ras asiatiques et fantastiques  Sadko ou  Kitège. Le contraste avec la cuisine plĂ©bĂ©ienne d’un HLM miteux, propre au couple mortel du Teinturier fonctionne Ă  merveille : la femme desperate housewife dĂ©sespère dans les tâches mĂ©nagères ; sa coquetterie Ă©goiste l’empĂŞche d’Ă©couter son mari qui ne souhaite que de la voir heureuse en mère de leurs enfants qui tardent Ă  venir…  cette lisibilitĂ© donne Ă  comprendre parfaitement la juxtaposition des mondes, qui doivent dialoguer, s’entendre et se comprendre pour ĂŞtre sauvĂ© chacun.
Allusivement, Hofmannshtal conçoit une vĂ©ritable dĂ©fense du couple en exhortant l’auditeur Ă  dĂ©tecter ce qui dans le couple de Barak bat de l’aile : l’absence d’une vĂ©ritable entente.

Pour sauver l’empereur condamnĂ© Ă  ĂŞtre pĂ©trifiĂ©, l’ImpĂ©ratrice et sa gouvernante doit approcher le monde humain, surtout s’Ă©mouvoir du sort de Barak : sans cette compassion salvatrice pas de salut, ni de rĂ©mission pour l’ImpĂ©ratrice comme pour la teinturière.
Les chanteurs de la troupe, dans cette captation de dĂ©cembre 2011 font montre d’un bel engagement, d’autant plus mĂ©ritoire que les rĂ´les sont redoutables. August Amonov (L’Empereur) peine dans les aigus, comme le Barak de Edem Umerov dont le chant et le style manque de subtilitĂ©. Plus Ă©vidente les deux femmes protagonistes: l’ImpĂ©ratrice de Mlada Khudolev aux aigus faciles, au chant soyeux, mais manquant de contrĂ´le, ses fins de phrases restent floues et jamais parfaites, et la gouvernante ardente, fiĂ©vreuse, incarnĂ©e avec intelligence et plus sĂ»re techniquement de Olga Savova.
Orchestre sauvage et flamboyant (Gergiev rĂ©ussit Ă  combiner foudres guerrriers et accents chambristes), scĂ©nographie claire et onirique, plateau engagĂ© Ă  dĂ©faut d’ĂŞtre parfait, voici assurĂ©ment un dvd tout Ă  fait recommandable dans la dvdthèque straussienne pas si importante que cela s’agissant de La Femme sans ombre (Die Frau Ohne Schatten).

Richard Strauss (1864-1949) : Die Frau ohne Schatten / La femme sans ombre, opĂ©ra en trois actes. Mise en scène : Jonathan Kent. ScĂ©nographie et costumes : Paul Brown. Lumières : Tim Mitchell. VidĂ©ographie : Sven Ortel et Nina Dunn. ChorĂ©graphie : Denni Sayers. Distribution : Avgust Amonov : Der Kaiser ; Mlada Khudoley, Die Kaiserin ; Olga Savova, Die Amme ; Edem Umerov, Barak, der Färber ; Olga Sergeeva, Sein Weib ; Evgeny Ulanov, Der Geisterbote ; Liudmila Dudinova, Der HĂĽtter der Sshwelle des Tempels ; Alexander Timchenko, Erscheinung eines JĂĽnglings ; Tatiana Kravtsova, Die Stimme des Falken ; Lydia Bobokhina, Eine Stimme von oben ; Andrei Spekhov, Nikolai Kamenski et Andrei Popov, Des Färbers BrĂĽder. ChĹ“urs, chĹ“ur d’enfant, ballet, figurants et orchestre du Théâtre Mariinsky de Saint-PĂ©tersbourg, direction : Valery Gergiev. RĂ©alisation pour la captation video : Henning Kasten. EnregistrĂ© les 5 et 6 dĂ©cembre 2011 au Théâtre Mariinsky de Saint-PĂ©tersbourg. Format image : NTSC SD (720Ă—480) – 16:9. 2 dvd Mariinsky MAR0543. DurĂ©e : 136’19’’ + 67’13’’.

Evasion Ă  Salzbourg

Salzbourg_KulturGrossesfestspielhausEvasion Ă  Salzbourg pour l’annĂ©e Richard Strauss 2014. DĂ©couvrez la citĂ© mozartienne traversĂ©e par la Salz Ă  l’occasion de l’annĂ©e Richard Strauss (nĂ© en 1864)… Pour le 150ème anniversaire de la naissance de Richard Strauss, offrez-vous un sĂ©jour dans la ville de naissance de Wolfgang Amadeus Mozart. L’idĂ©e n’est pas si saugrenue si l’on se rappelle que Richard Strauss, – avec le poète et librettiste Hugo von Hofmannsthal et l’homme de théâtre Max Reinhardt ont fondĂ© en 1922, le festival d’Ă©tĂ© de Salbourg : y règnent l’opĂ©ra et le théâtre, surtout Mozart Ă©videmment et les opĂ©ras de Strauss, depuis toujours interprĂ©tĂ©s par l’orchestre idoine, le Wiener Philharmoniker qui fait le dĂ©placement attendu, espĂ©rĂ© chaque Ă©tĂ©, de Vienne Ă  salzbourg : rien n’Ă©gale le raffinement hĂ©doniste de l’orchestre viennois dans Aridane auf Naxos ou justement (programmĂ© cette annĂ©e : lire notre agenda ci après), Le chevalier Ă  la rose (Der rosenkavalier. Cf l’admirable version de Solti chez Decca en 1968, dĂ©jĂ , avec le miracle viennois des Wiener Philharmoniker).
EvĂ©nement majeur de l’agenda musical et lyrique en Europe, le festival de Salzbourg, l’un des plus anciens et des plus prestigieux, offre chaque Ă©tĂ© une programmation Ă©blouissante. L’annĂ©e Strauss peut ĂŞtre un excellent moyen d’en dĂ©couvrir toutes les facettes et les nombreux attraits (certes musical, mais aussi patrimonial et touristique, gastronomique et culturel : les plus enhardis profiteront par exemple de leur escapade Ă  Salzbourg pour aller aussi Ă  Hellbrunn, merveille baroque et son jardin d’eau qui fut l’Ă©crin de l’Orfeo de Monteverdi dès le dĂ©but du XVIIème siècle). L’Autriche est une nation mĂ©lomane : les deux sites de Salzbourg et Hellbrunn, facilement accessible le temps d’un long week end (4 jours par exemple) vous le dĂ©montreront. Pour cĂ©lĂ©brer son co fondateur, le festival estival de Salbzourg 2014 affiche plusieurs Ă©vĂ©nements Richard Strauss que classiquenews rĂ©capitule ici:

 

 

 

5 événements Richard Strauss à Salzbourg

du 1er au 31 août 2014

 

 

Les Métamorphoses : Metamorphosen
pour sextuor de cordes
Mozarteum, grosser Saal, le 1er août 2014, 19h30
Gringolts Quartett & friends

Der Rosenkavalier
Le chevalier Ă  la rose
Grosses Festpielhauss, les 1,5,8,11,14,17,20 et 23 août 2014
Avec Krassimira Stoyanova, Sophie Koch, Mojca Erdmann, GĂĽnther Groissböck, Wiebke Lehmkuhl… Wiener Philharmoniker. Zubin Mehta, direction. Harry Kupfer, mise en scène

Quatre derniers lieder
Grosses Haus, le 7 août 2014, 20h
Eva Maria Westbroek, soprano. Philharmonia Orchestra. Christoph Eschenbach, direction
Couplés avec la Symphonie n°9 de Bruckner

Concerts Symphoniques

Mort et transfiguration, Also sprach Zarathustra.
Grosses Haus, les 23 et 24 août 2014 à 11h
Wiener Philharmoniker. Gustavo Dudamel, direction

Une vie de héros : ein Heldenleben opus 40
Grosses Haus, le 31 août 2014, 11h
Concertgebouw Amsterdam. Mariss Jansons, direction

les infos et les modalités pratiques, billetterie sur le site du festival de Salzbourg 2014

 

 

Strauss : HĂ©lène d’Egypte (1928)

STRAUSS_R_moustache_juene_golden_age_composer_straussDossier opĂ©ra. Richard Strauss : HĂ©lène d’Egypte (1928). Genèse, enjeux, synopsis. HĂ©lène d’Egypte ou HĂ©lène Egyptienne … Avec Elektra, DaphnĂ©, L’Amour de DanĂ©e,  HĂ©lène Ă©gypienne raconte un Ă©pisode (inĂ©dit voire imaginaire) de l’histoire antique. Strauss n’a cessĂ© d’illustrer la force et la violence des mythes inspirĂ©s par l’AntiquitĂ© et la mythologie grecque. Mais dans deux directions apparemment antinomiques qui ne manquent pas d’enrichir la tension de chaque ouvrage : d’une part, la flamboyance d’une orchestre suractif, philharmonie permanente exprimant, commentant, infirmant parfois le chant des protagonistes sur la scène ;  d’autre part, l’intimisme ardent d’une Ă©criture ciselĂ©e qui, mettant en avant le verbe (au point d’ĂŞtre taxĂ© souvent de bavardage), sert surtout les dialogues entre les hĂ©ros. Entre comĂ©die verbale oĂą règne le chambrisme du chant, et de superbes Ă©vocations orchestrales qui convoquent la profondeur de sentiments sertis ou qui rendent tangibles souffle et spectaculaire de l’Ă©popĂ©e hĂ©roĂŻque et lĂ©gendaire, chaque chef doit trouver le juste Ă©quilibre comme la bonne dynamique pour prĂ©server,  la solennitĂ© des tableaux, l’intelligibilitĂ© du texte et la continuitĂ© de l’action théâtrale.

 

 

HĂ©lène d’Egypte,
opéra psychologique

 

Hofmannsthal_portraitEn outre, au moment de la conception théâtrale, Strauss et son librettiste entendent Ă©clairer la cohĂ©rence psychologique de chaque personnage et aussi servir un thème que le compositeur aime illustrer sous l’influence du poète Hugo von Hofmannsthal avec lequel il a constituĂ© un duo miraculeux : la mĂ©tamorphose qui rĂ©vèle le hĂ©ros ou l’hĂ©roĂŻne Ă  leur vĂ©ritable identitĂ©, dyonisienne ou apollinienne, introspective et solitaire ou compatissante, altruiste et fraternelle. Exclusion ou intĂ©gration, chaque protagoniste fait l’expĂ©rience d’une ” catastrophe ” qu’il partage avec le spectateur tout au long du drame jusqu’Ă  l’accomplissement de la scène finale qui en est la rĂ©solution ultime. Le cas le plus flagrant ici en est la dernière scène de DaphnĂ© oĂą la nymphe fusionne avec la nature en se mĂ©tamorphosant en arbre laurier, car depuis le dĂ©but pourtant sollicitĂ©e par le dĂ©sir du berger Leucippe et d’Apollon dans un premier temps, DaphnĂ© n’aspire qu’Ă  rĂ©aliser sa nature contemplative et apollinienne, Ă©cartant dĂ©finitivement toute sensualitĂ© charnelle. En fin d’action, elle rĂ©alise parfaitement son essence solitaire et abstraite. Elle se pĂ©trifie (au sens premier du terme) : quittant son enveloppe humaine et organique pour un Ă©tat non Ă©motionnel.

 

révélation de sa nature profonde

Il s’agit dans tous les cas d’effacer l’oeuvre des artifices et des intrigues pour affronter en un rituel irrĂ©versible et dĂ©cisif voire salvateur, la vĂ©ritĂ© pour chacun. Cette rĂ©vĂ©lation ne peut se rĂ©aliser sans le concours de l’autre : rencontre, confrontation, comprĂ©hension profonde …  Tel serait le sens profond de l’opĂ©ra HĂ©lène d’Egypte, une  clĂ© de comprĂ©hension qui explique la structure et la dramaturgie de l’opĂ©ra conçu par Hofmannsthal et Strauss. L’ouvrage sera ensuite rĂ©visĂ© par le chef Clemens Kraus avec l’aval du compositeur en 1933.  Il s’agit de la dernière oeuvre recueillant les fruits d’une prodigieuse collaboration, celle de Strauss et de son librettiste, le poète Hofmannsthal qui devait mourir en 1929.

 

le salut d’HĂ©lène passe par la conscience de MĂ©nĂ©las

Poussin_muse_apollon_sireneHofmansthal choisit de faire d’HĂ©lène une anti Isolde, femme sĂ©ductrice (douĂ©e de toutes les sĂ©ductions orientales) tournĂ©e non vers la nuit extatique, en une ivresse nocturne qui dissout toute conscience (Isolde au II)èe acte de Tristan und Isolde de Wagner), mais vers la lumière pour affronter le regard de l’Ă©poux qu’elle a trompĂ© (avec Paris) : MĂ©nĂ©las voit ainsi sa femme revenir Ă  lui : saura-t-il lui pardonner ? La volontĂ© d’assumer sa faute fait d’HĂ©lène une figure admirable de loyautĂ© recouvrĂ©e ; elle permet surtout Ă  MĂ©nĂ©las d’Ă©voluer au delĂ  de ses propres limites. Le couple se trouve sublimĂ© et transfigurĂ© par cette expĂ©rience dĂ©sormais vĂ©cue Ă  2. Les deux concepteurs inventent l’Ă©pisode d’HĂ©lène en Egypte (après l’Ă©pisode homĂ©rique qui Ă©voque surtout le siège de Troie pour y dĂ©livrer la belle retenue captive).
Revenue de son amour pour Pâris jĂ  Troie, HĂ©lène paraĂ®t ici comme coupable et fautive, souhaitant s’amender vis Ă  vis de son Ă©poux de l’infidĂ©litĂ© qui la ronge et la dĂ©truit. L’Ă©pisode Ă©gyptien est pour HĂ©lène, l’histoire de sa rĂ©demption non plus comme sirène sensuelle mais comme Ă©pouse et femme loyale.

 

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A ses cĂ´tĂ©s, MĂ©nĂ©las (qui incarne comme l’ordre moral un rien psychorigide : la raison, le mariage, les lois de la famille) Ă©prouve aussi les Ă©tapes d’un itinĂ©raire en mĂ©tamorphoses qui le mène du mari cocufiĂ© pĂ©trifiĂ© dans son humiliation vers un ĂŞtre nouveau capable de se rĂ©gĂ©nĂ©rer et de pardonner Ă  HĂ©lène. Strauss et Hofmannsthal permettent donc deux carrières simultanĂ©es et presque parallèles dont l’une permet la rĂ©demption de l’autre, et vice versa. MĂ©nĂ©las tente de se dĂ©faire de la collectivitĂ© masculine (conforme, absente au changement) pour atteindre cette individualitĂ© absente au dĂ©part, qui lui permet ensuite d’exprimer et de vivre enfin le salut du pardon. HĂ©lène, l’HĂ©lène polygame de l’Orient, sĂ©ductrice collectionneuse d’aventures et de conquĂŞtes souhaite elle aussi un nouveau statut ou une nouvelle conscience, appartenir entièrement Ă  son Ă©poux, ĂŞtre reconnue de lui, ĂŞtre pardonnĂ© de ses fautes passĂ©es.
Il y a bien un parallèle avec La femme sans ombre : contrairement Ă  l’Empereur, MĂ©nĂ©las ici Ă©volue et change spirituellement, passant de la pĂ©trification psychique au pardon, MĂ©nĂ©las peut enfin comprendre son Ă©pouse et l’aimant pour ce qu’elle est viscĂ©ralement, refonder leur mariage contre le mensonge d’une frivolitĂ© sensuelle. De mĂŞme, les personnages clĂ©s de l’ImpĂ©ratrice comme de la Teinturière illustrent ce passage de l’Ă©goĂŻsme narcissique (la première veut une ombre, la seconde veut s’enivrer au bras du jeune homme fantomatique) Ă  l’amour pur rĂ©conciliant les Ă©poux. C’est aussi l’application du principe de l’allomatie : chaque destin se trouve dĂ©pendant les uns des autres. Aucun ĂŞtre ne peut rĂ©aliser son salut sans le concours de l’autre. Une belle allĂ©gorie de la compassion et de la fraternitĂ©.

 

LĂ  encore, la fresque antiquisante sert un drame construit comme l’approfondissement d’une reconnaissance partagĂ©e (qui s’achève par l’apologie du couple comme La Femme sans ombre), d’un humanisme individuel aussi (car la rĂ©ussite des deux dĂ©pend de la transformation individuelle de chaque) ; une rĂ©vĂ©lation vĂ©cue Ă  deux qui prend souvent la forme d’un théâtre domestique car comme c’est le cas de beaucoup d’opĂ©ras de Strauss, contredisant la flamboyance symphonique de la fosse (ou plutĂ´t la complĂ©tant et l’enrichissant), l’ouvrage est très bavard, imposant toujours la force et la tension du texte, un verbe souvent symbolique et spirituel, propre Ă  l’idĂ©al fraternel et humaniste de Hugo von Hofmannsthal.  Ici le mythe rejoint le rĂ©alisme d’un fait divers.

 

 

Synopsis

Acte I. Les sortilèges d’AĂŻthra sauve HĂ©lène de MĂ©nĂ©las. Sur son Ă®le non loin du littoral Ă©gyptien, AĂŻthra attend le retour de son amant PosĂ©idon. La conque omnisciente lui dĂ©voile alors ce que se trame sur l’ocĂ©an : sur un navire proche de l’Ă®le, MĂ©nĂ©las furieux tente de tuer son Ă©pouse traĂ®tresse HĂ©lène. AĂŻthra suscite une terrible tempĂŞte pour sauver la femme ; le couple fait naufrage sur l’Ă®le. AĂŻthra pour tromper MĂ©nĂ©las lui fait boire la coupe de l’oubli : la magicienne l’informe que la guerre de Troie reprend et qu’HĂ©lène l’attend toujours en son palais Ă©gyptien. En outre, HĂ©lène rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e (Ă  qui AĂŻthra a fait boire un filtre de jouvence !) paraĂ®t dans toute sa beautĂ© saisissante : MĂ©nĂ©las pense alors avoir rĂ©llement tuer HĂ©lène et Paris ; son Ă©pouse fidèle l’attend toujours, alors qu’Ă  Troie, il s’agissait d’une illusion fantomatique.

 

Acte II. Une oasis dans une palmeraie de l’Atlas. MĂ©nĂ©las et HĂ©lène sont accueillis par les vassaux d’AĂŻthra : AltaĂŻr, prince de l’Atlas et son fils Da-ud ; ces deux derniers Ă©blouis par la beautĂ© d’HĂ©lène lui font aussitĂ´t une cour assidue. MĂ©nĂ©las qui pense cependant avoir tuĂ© HĂ©lène et Paris, doute de l’identitĂ© de celle qui prĂ©tend ĂŞtre HĂ©lène. La jeune beautĂ© dĂ©cide alors d’affronter son destin : elle fera boire le philtre du souvenir Ă  son Ă©poux soupçonneux pour qu’il comprenne ce qu’elle a fait, pour qu’il lui pardonne, comprenant enfin son dĂ©sarroi et sa volontĂ© refonder leur couple dans la fidĂ©litĂ© et le mariage. Le miracle se produit : MĂ©nĂ©las reconnaĂ®t sa femme et l’accepte par amour. MĂ©nĂ©las tue Da-ud et AlthaĂŻr doit se soumettre après l’intervention de PosĂ©idon priĂ© par AĂŻthra. Apologie du couple refondĂ©, le tableau final voit leur fille, Hermione, conduire ses parents pacifiĂ©s, MĂ©nĂ©las et HĂ©lène jusqu’Ă  Sparte.

 

CD
strauss_helene_egypte_egyptienne_decca_cdLa seule version digne d’intĂ©rĂŞt demeure la lecture d’Antal Dorati, Ă  la tĂŞte du Detroit Symphony Orchestra (dont il fut directeur musical de 1977 Ă  1981), enregistrĂ©e Ă  Detroit en 1979. Inimaginable aujourd’hui depuis la crise financière, le projet s’avère aussi somptueux que pertinent, Ă  la mesure d’une partition autant vocale que symphonique. La distribution Ă©tonne par sa fine caractĂ©risation : Barbara Hendricks (AĂŻthra fĂ©minine et complice d’HĂ©lène, entre amoureuses, le courant passe  et cette Aithra est bien une fidèle protectrice pour la jeune grecque ; en dĂ©pit d’un piètre allemand, la soprano offre d’Aithra un portrait tendre et ardent); Ă  ses cĂ´tĂ©s, l’HĂ©lène de Gwyneth Jones est stupĂ©fiante, d’embrasement lyrique, une muse hollywoodienne qui se montre de plus en plus proche de MĂ©nĂ©las (honnĂŞte Matti Kastu aux aigus trop faibles et savonnĂ©s). DĂ©jĂ  l’Altair de Willard White accroche l’Ă©coute par sa noblesse dĂ©bordante : arrogance et nervositĂ© du prince oriental, vite Ă©conduit. Les mille couleurs de l’orchestre offrent une fresque toute en accents, vitalitĂ©, rugissements, mais aussi ivresse flamboyante (les deux finals) sont ici passionnants. Une nuance d’humanitĂ© cependant manque Ă  cette intĂ©grale très recommandable. 2 cd Decca.

 

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Ariane Ă  Naxos de Strauss Ă  Toulon

toulon_582_ariane_toulonToulon, OpĂ©ra. Ariane Ă  Naxos : 14, 16, 18 mars 2014. Sur son rocher (sur l’Ă®le de Naxos), la belle mais tragique Ariane, abandonnĂ©e par ThĂ©sĂ©e (qu’elle a pourtant sauvĂ© du labyrinthe et des griffes du Minotaure) se lamente: coeur Ă©perdu, trahi, sans espoir, sans avenir ; âme vouĂ©e Ă  la mort.

 

 

Richard Strauss
Ariane Ă  Naxos
Toulon, Opéra
Les 14, 16, 18 mars 2014

Direction musicale :  Rani Calderon
Mise en scène  : Mireille Larroche
Décors :  Nicolas de Lajartre
Costumes :  Danièle Barraud
Lumières :  Jean-Yves Courcoux

Ariane,  Jennifer Check
Zerbinetta,  Julia Novikova
Le compositeur,  Christina Carvin
Naïade,  Léonie Renaud
Dryade,  Charlotte Labaki
Echo,  Marion Grange
Bacchus,  Kor-Jan Dusseljee
Arlequin / Le maître de musique,  Charles Rice
Truffaldino,  Pierre Bessière
Le maître de ballet / Brighella,  Cyrille Dubois
Scaramouche,  Loïc Félix
Un laquais,  Fabien Leriche
Un perruquier,  Jacques Catalayud
Le majordome,  Martin Turba

 

 

 

 

Amour tragique, amour comique

 

 

Strauss richardA ses cĂ´tĂ©s, Zerbinette sa suivante qui ne partage pas cette vision sombre et grave de la vie et s’amuse des peines amoureuses, prĂ©fĂ©rant cultiver les aventures, collectionne amants et rencontres d’un jour, avec cette lĂ©gèretĂ©, bouclier et masque contre l’angoisse et la dĂ©pression… Strauss et Hoffmansthal mĂŞlent les genres : sĂ©rieux, hĂ©roĂŻque et comique badin. Heureusement, Ariane rencontre Bacchus qui l’invite Ă  une ivresse salvatrice : la princesse affligĂ©e ressuscite enfin, illuminĂ©e par l’amour du jeune dieu du vin. Saine mĂ©tamorphose d’une amoureuse rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e.

Dans l’ouvrage, Strauss et son poète librettiste Hugo von Hoffmansthal, l’un des duos opĂ©ratiques les plus miraculeux de l’histoire de l’opĂ©ra, comme l’incarnent aussi Mozart et Da Ponte, ou avant au XVIIè, Monteverdi et Busenello; pour l’heure, Strauss et Hofmannsthal imaginent la reprĂ©sentation dans la maison du plus riche parti de Vienne : c’est la première partie de l’ouvrage, un théâtre dans l’opĂ©ra oĂą les trĂ©teaux sont plantĂ©s pour que, auprès des hĂ©ros antiques, s’aiment et rient les acteurs italiens de la Commedia dell’arte.

Jamais opĂ©ra ne fut plus subtil, plus riche, plus subtil et poĂ©tique: hommage aux comĂ©dies-ballets de Molière et de Lully, Ariane Ă  Naxos (Ariadne auf Naxos) est rĂ©visĂ©e après sa crĂ©ation, recoupĂ©e, retravaillĂ©e : au prĂ©lude, le compositeur imagine la prĂ©paration des acteurs et chanteurs pour la reprĂ©sentation proprement dite (agitation, heurts entre artistes, dĂ©lire et angoisse mais aussi manifeste esthĂ©tique du jeune compositeur sur la scène); puis, dans l’opĂ©ra proprement dit : action mythologique Ă  laquelle Strauss et Hoffmannsthal associent le rire rĂ©enchanteur des comĂ©diens comiques (Arlequin, Zerbinette, Truffaldino, Scaramuccio…) autant de gentils clowns dont le chant contraste avec le lamento d’une Ariane en crise dĂ©pressive…  mais heureusement pas pour longtemps car Hofmannsthal sait cultiver un thème particulièrement cher : la salut des âmes douloureuses, la mĂ©tamorphose qui peut encore sauver les hommes et le monde. Beau message humaniste. Le rĂ©sultat est Ă©clatant.

 

 

Elektra de Richard Strauss

elektra_opera_bastille_2013Elekra de Strauss … Paris, OpĂ©ra Bastille, jusqu’au 1er dĂ©cembre 2013  …   La pièce de Wilde, Elektra cimente l’une des collaborations les plus fructueuses Ă  l’opĂ©ra, après celle de Mozart et Da Ponte ou avant eux, Monteverdu et Busenello, Richard Strauss et Hugo von Hofmannsthal : ils se rencontrent pour produire d’après la pièce de théâtre de Oscar Wilde, un opĂ©ra efficace, fulgurant, sauvage, dès 1906.
Orchestre gigantesque, voix poussĂ©es dans leurs derniers retranchements, le post-wagnĂ©risme flambe une dernière fois dans cette tragĂ©die en un acte d’une violence et d’une noirceur inouĂŻes. Dans Elektra, les forces de la psychĂ© sont Ă  l’oeuvre : comment une fille peut-elle rompre le lien Ă  la mère ? C’est Ă  dire achever de rĂ©aliser sa vengeance sur celle qui a fait assassiner son père pour en Ă©pouser un autre… Ivre d’impuissance, Ă©prouvant Ă  son comble le sentiment de l’injustice, l’hystĂ©rique ne parvient pas Ă  surmonter l’horreur d’un drame familial. Et tout est lĂ , dans les rugissements fauves d’un orchestre apocalyptique qui pourtant expriment l’insoutenable folie d’une seule âme Ă©prouvĂ©e. Un orchestre ocĂ©an, miroir d’une solitude apeurĂ©e… Avec Elektra, Richard Strauss dĂ©montre qu’il est dĂ©sormais possible de composer un opĂ©ra après Wagner.

Richard Strauss (1864-1949)
Elektra, 1909
LIVRET DE HUGO VON HOFMANNSTHAL
TRAGÉDIE EN UN ACTE, OP. 58 (1909)

Robert Carsen, mise en scène

Paris, Opéra Bastille, du 27 octobre au 1er décembre 2013.

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