PARIS, Palais Garnier : A QUIET PLACE de Bernstein

PARIS, GARNIER. BERNSTEIN : A QUIET PLACE – 9-30 mars 2022  -  EntrĂ©e au rĂ©pertoire attendue : A Quiet Place de Leonard Bernstein, mis en scĂšne par Krzysztof Warlikowski et dirigĂ© par Kent Nagano. La nouvelle production est d’autant plus prometteuse que le chef s’est dĂ©jĂ  distinguĂ© par une excellente lecture du dernier opĂ©ra de Bernstein (rĂ©alisĂ©e pour Decca Ă  Montreal en 2017 : LIRE notre critique de A Quiet Place de Leonard Bernstein, avec une distribution remarquable dont les barytons Gordon Bintner (remarquable Junior, si fin si trouble et d’une franchise dĂ©sarmante, annoncĂ© Ă  PARIS dans le mĂȘme rĂŽle qu’il tenait en 2017), Lucas Meachem (photo ci dessous : exceptionnel Sam en pĂšre d’abord pĂ©trifiĂ© et monolithique, puis peu Ă  peu humanisĂ© Ă  mesure que la leçon de la dĂ©cĂ©dĂ©e se prĂ©cise et s’illumine dans le III)


http://www.classiquenews.com/cd-evenement-critique-bernstein-a-quiet-place-nagano-osm-2-cd-decca-2017/

Directeur musical de l’OSM Orchestre Symphonique de Montreal, KENT NAGANO y a donc Ă©blouit littĂ©ralement dans une version surtout chambriste, premiĂšre au disque, oĂč scintille l’intelligence du chant dialoguĂ©, l’équilibre d’un orchestre complice et suractif mais jamais couvrant, et un plateau superlatif de solistes (dont les chanteurs diseurs somptueusement articulĂ©s : Gordon Bintner et Lucas Meachen, dĂ©jĂ  mentionnĂ©s, dans les rĂŽles clĂ©s du fils et du pĂšre, Junior et Sam), qui savent dessiner avec beaucoup de finesse comme d’humanitĂ©, le profil de chaque protagoniste, dont surtout la famille des proches : Sam le pĂšre et ses deux enfants, la fille Dede et Junior le garçon “atypique”
 De sorte qu’au dĂ©but, la mosaĂŻque sociale bruyante et bavarde, devient conversation intime, d’une sincĂ©ritĂ© dĂ©chirante, un théùtre dĂ©pouillĂ© des artifices du dĂ©but / un lieu tranquille dont le terreau des incomprĂ©hensions passĂ©es peut enfin se rĂ©soudre et s’accomplir : la satire collective devient dans le dernier acte (III), thĂ©rapie familiale, hymne Ă  l’amour et Ă  la rĂ©conciliation. En somme, un drame familial qui vaut mĂ©taphore universel, propre Ă  l’humanisme fraternel de Bernstein. L’auteur de West Side Story (1957) signe avec A Quiet Place (1983), une Ă©pure qui saisit par sa simplicitĂ© active, sa fausse lĂ©gĂšretĂ©, et pourtant sa sincĂ©ritĂ© psychologique dans une galerie de portraits frappants par leur vĂ©ritĂ©. Que fera le metteur en scĂšne dĂ©jantĂ©, souvent confus, Krzysztof Warlikowski de cette Ă©vocation d’une famille amĂ©ricaine endeuillĂ©e dont la souffrance dĂ©voile les secrets intimes ?
Autre argument de la production parisienne, outre le chef, la prĂ©sence de la soprano Patricia Petibon, attendue dans le rĂŽle de Dede). Kent Nagano, qui fut proche de Bernstein au moment de l’écriture d’A Quiet place, dirige Ă  Paris, la version condensĂ©e (livret et orchestration resserrĂ©s) qu’il a créé Ă  Berlin en 2013 puis enregistrĂ© avec la rĂ©ussite que l’on sait en 2017.

 

 

 

 

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BERNSTEIN : A Quiet Place (1983) – version 2013bernstein oepra de paris a quiet place annonce critique classiquenews
Livret : Stephen Wadsworth / Adaptation livret, orchestration : Garth Edwin Sunderland
PARIS, Palais Garnier
Du mercredi 9 mars au mercredi 30 mars 2022
Les 9, 10, 16, 18, 21, 23, 24, 26, 29 et 30 mars Ă  20h, dimanche 13 mars Ă  14h30 ;
avant-premiĂšre pour les moins de 28 ans le 7 mars Ă  20h.
RÉSERVEZ VOS PLACESboutonreservation
directement sur le site de l’OpĂ©ra de Paris / Palais Garnier
https://www.operadeparis.fr/saison-21-22/opera/a-quiet-place
Tél. : 08 92 89 90 90.

 

 

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DIFFUSION sur France Musique
A quiet Place sera diffusĂ© sur France Musique le samedi 23 avril Ă  20h dans l’Ă©mission “Samedi Ă  l’OpĂ©ra”,

WAGNER READINGS. Kent NAGANO ressuscite un Wagner, instrumentalement historique

REPENSER WAGNER... Marek Janowski Ă  l'Ă©preuve du RingWAGNER READINGS – Wagner sur instruments historiques : L’Or du Rhin sur instruments d’époque, dirigĂ© par Kent Nagano. La phalange Concerto Köln s’engage dans un projet musical de premiĂšre valeur : jouer Wagner sur instruments d’époque. VoilĂ  une approche historiquement informĂ©e que l’on attendait depuis longtemps et qui tordera le cou aux partisans d’un Wagner plus sonore et puissant que chambriste et dĂ©taillĂ©. Pourtant Karajan en son temps (pour DG Deutsche Grammophon) avait rĂ©volutionnĂ© totalement notre perception de Wagner, « osant » alors en dĂ©c 1969, une tĂ©tralogie dĂ©taillĂ©e, finement timbrĂ©es, aux Ă©quilibres orchestraux tĂ©nus qui a fait surgir l’Ɠuvre psychologique et la finesse suggestive d’un Wagner dĂ©jĂ  psychanalytique.

PremiÚres sessions de ce Ring événement
Le 18 nov 2021 à Cologne / Kölner Philharmonie
Le 20 nov 2021 Ă  Amsterdam / Concertgebouw Amsterdam

nagano kent maestro classiquenewsPour Kent Nagano, le Ring de Wagner est « l’une des partitions les plus complexes » mais « une approche rĂ©flĂ©chie et historiquement informĂ©e n’avait encore jamais Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e. Nous travaillons sur cette nouvelle version depuis 4 ans. Je suis trĂšs heureux que notre Rheingold soit bientĂŽt jouĂ©e ». De fait, la recherche sur le matĂ©riel de rĂ©pĂ©tition laissĂ© par Wagner, la connaissance des tempos d’époque, de ses instruments prĂ©fĂ©rĂ©s comme l’étude de la prononciation des chanteurs Ă  l’époque du compositeur produisent un rĂ©sultat sonore et stylistique surprenant.
Depuis 2017, une sĂ©rie d’études scientifiques conduites par « the Association of Freunde von Concerto Köln » a produit ses conclusions dont les premiers rĂ©sultats ont Ă©tĂ© Ă©ditĂ©s et peuvent ĂȘtre consultĂ©s sur le site https://wagner-lesarten.de.

PLUS D’INFOSwagner grand format
https://wagner-lesarten.de/project.html
https://www.concerto-koeln.de/1787.html

November 18, 2021, 20h, Kölner Philharmonie
November 20, 2021, 13h, Concertgebouw Amsterdam

Richard Wagner
Das Rheingold WWV 86A
OpĂ©ra en 4 scĂšnes. Vorabend zu dem BĂŒhnenfestspiel “Der Ring des Nibelungen” WWV 86 (1848–74)

Derek Welton (Bass-baritone) | Wotan
Johannes Kammler (Bass-baritone) | Donner
Julian Prégardien (Tenor) | Loge
Tansel Akzeybek (Tenor) | Froh
Stefanie IrĂĄnyi (Mezzo-soprano) | Fricka
Sarah Wegener (Soprano) | Freia
Gerhild Romberger (Mezzo-soprano) | Erda
Daniel Schmutzhard (Baritone) | Alberich
Thomas Ebenstein (Tenor) | Mime
Tijl Faveyts (Basso) | Fasolt
Christoph Seidl (Basso) | Fafner
Carina Schmieger (Soprano) | Woglinde
Ida Adrian (Soprano) | Wellgunde
Eva Vogel (Mezzo-soprano) | Floßhilde

Concerto Köln
Kent Nagano, conductor/ direction musicale

CD, critique. WIDMANN : ARCH (Nagano, 2017 2 cd ECM New Series)

widmann arche nagano cd reiwe critique cd classiquenews ECM-2605-06-240x240CD, critique. WIDMANN : ARCH (Nagano, 2017 2 cd ECM New Series). HAMBOURG janvier 2017. AprĂšs Rihm (créé par le NDR Elbphilharmonie Orchester), Widmann propose en janvier 2017, sa nouvelle oeuvre, un oratorio monumental pour inaugurer la Philharmonie de l’Elbe / Elbphilharmonie, salle de concert au profil design qui souhaite ĂȘtre Ă  la pointe de l’innovation musicale. Ainsi «  Arche », nouvelle partition a Ă©tĂ© créée en janvier 2016 : Kent Nagano (ordinairement pilote du Symphonique de MontrĂ©al) conduit pour se faire l’orchestre local en Allemagne (et en rĂ©sidence dans l’institution), le Philharmonisches Staatsorchester Hamburg, pour la crĂ©ation de la piĂšce qu’il a commandĂ©e : oratorio en grand format pour soli, 3 choeurs, choeurs d’enfants et (trĂšs) grand orchestre (avec orgue) : soit 300 participants.
RĂ©ponse contemporaine aux Gurrelieder de Schoenberg, ou mieux Ă  la 8Ăšme Symphonie de Mahler (dite «Symphonie des Mille »), Arche assume son gigantisme (avec effet de lumiĂšre pour ceux qui ont assistĂ© Ă  la piĂšce, en particulier pour le Fiat Lux), et aussi sa signification par rĂ©fĂ©rence Ă  l’Ancien Testament : le vaisseau de NoĂ© indique un nouveau « commencement », point de dĂ©part de la Philharmonie de l’Elbe elle-mĂȘme. D’autant que l’architecture du bĂątiment cite elle, une proue de bateau.
La piĂšce compte 5 Ă©pisodes : Fiat lux, le DĂ©luge, l’Amour, Dies Irae, Dona nobis pacem avec citations et rĂ©fĂ©rences Ă  Michel-Ange, Heine, Schiller. Musicalement, c’est une mosaĂŻque de parodies, reprenant les mĂ©lodies de Boradway, surtout la Fantaisie pour piano chƓur et orchestre op.80 de Beethoven, repĂšres facilement comprĂ©hensible par la public. Le principe est facile mais fonctionne. Chacun s’amuse ici Ă  reconnaĂźtre l’oeuvre citĂ©e.
Les solistes dĂ©fendent avec engagement une partition plĂ©thorique et grandiloquente on l’a compris : la soprano Marlis Petersen se distingue par son chant assurĂ©, dĂ©clamatoire, emphatique; le baryton Thomas E.Bauer paraĂźt parfois serrĂ©, « petit »; Ă  leur cĂŽtĂ©, les enfants semblent plus Ă  leur aise (en voix parlĂ©es ou chantĂ©es). Le texte glouton comme la mise en musique, cite une foi triomphante en l’homme
 une autoconfiance dans une monde globalisĂ© et interdĂ©pendant, de moins moins sensible Ă  son salut collectif. Cette oeuvre qui proclame la foi en internet et dans les rĂ©unions politiques internationales type G8 ou G7 montre surtout les limites d’une humanitĂ© qui doute profondĂ©ment d’elle-mĂȘme et se bloque dans sa capacitĂ© Ă  assurer son futur. Il est bien dommage que le texte ne soit pas Ă  la mesure de l’enjeu : aucune rĂ©fĂ©rence au dĂ©rĂšglement climatique, Ă  l’agonie des espĂšces animales, bientĂŽt des espĂšces vĂ©gĂ©tales et des arbres
 avant l’espĂšce humaine. Un texte engagĂ©, plus directement connectĂ© avec la rĂ©alitĂ© de la planĂšte aurait eu infiniment plus d’impact.
Widman de son cĂŽtĂ©, dĂ©ploie une musique habile car théùtrale et rythmique, contrastĂ©e et caractĂ©risĂ©e. Jamais ennuyeuse, mais pas troublante non plus. Mahler savait autrement porter, conduire, exalter, sublimer, transfigurer collectivement. Et toucher malgrĂ© le nombre et l’effectif. Jörg Widmann se borne Ă  une dĂ©monstration virtuose qui peine Ă  dĂ©passer son ampleur, sa dĂ©mesure, .
 osons dire une vacuitĂ© spectaculaire bien dans l’ùre du temps.
 
 
 
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Californien analytique, Nagano dĂ©taille, comme Ă  son habitude, souligne mĂȘme la finesse d’une orchestration plutĂŽt fouillĂ©e : mais dont le sens manque de profondeur rĂ©elle. Cette gravitĂ© parfois prenante rĂ©sonne vainement, dĂ©pourvue d’un vrai texte de prise de conscience sur notre monde et le dĂ©sarroi des sociĂ©tĂ©s modernes. PlĂ©thorique, gigantesque, la partition manque Ă  notre avis son but car ne dĂ©nonce rien, dans notre monde proche de l’apocalypse.

 
 
 

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CD, critique. Jörg Widmann : Arche, oratorio créé Ă  Hambourg en janvier 2017 – 2 cd ECM New Series 4817007

Marlis Petersen, soprano / Thomas E.Bauer, baryton
Knabensopran: Soliste du chƓur d’enfants de la Chorakademie Dortmund / RĂ©citant (enfant): Antonius Hentschel / RĂ©citante (enfant): Jonna Plate / Orgue: Iveta Apkalna
Hamburger Alsterspatzen (Chef de chƓur: JĂŒrgen Luhn)
Audi Jugendchorakademie (Chef de chƓur: Martin Steidler)
Chor der Hamburgischen Staatsoper (Chef de chƓur: Eberhard Friedrich)
Philharmonisches Staatsorchester Hamburg
Direction musicale: Kent Nagano

Programme de l’oratorio ARCHE :

CD 1
1 FIAT LUX / ES WERDE LICHT – 18:58
2 SINTFLUT – 29:03
3 DIE LIEBE – 26:55

CD 2
1 DIES IRAE – 16:52
2 DONA NOBIS PACEM – 09:16

 
 
 

CD, compte rendu critique, opĂ©ra. Honegger, Ibert : L’Aiglon (2 cd, Nagano, 2015)

aiglon-honegger-ibert-kent-nagano-decca-clic-de-classiquenews-reportage-video-lausanne-tours-ossonceCD, compte rendu critique, opĂ©ra. Honegger, Ibert : L’Aiglon (2 cd, Nagano, 2015). RĂ©cemment exhumĂ© sur les scĂšnes francophones, Lausanne puis Tours, sous la direction de Jean-Yves Ossonce, en mai 2013, – et plus rĂ©cemment encore Ă  Marseille (avec D’Oustrac dans le rĂŽle-titre, fĂ©vrier 2016) l’opĂ©ra Ă  deux tĂȘtes, L’Aiglon de Arthur Honegger et Jacques Ibert, sort en disque, mais Ă  l’initiative de nos confrĂšres quĂ©bĂ©cois, depuis MontrĂ©al, prolongement d’une sĂ©rie de recrĂ©ations trĂšs applaudies (en mars 2015) sous la direction de Kent Nagano, ardent dĂ©fricheur Ă  la posture globale, impliquĂ©e donc convaincante.

Kent Nagano rend justice au drame lyrique de 1937, signĂ© par Jacques Ibert et Arthur Honegger…

Deux plumes inspirées pour un Aiglon sacrifié

Aux cĂŽtĂ©s de Cyrano, Rostand laisse avec L’Aiglon créé en 1900 avec la coopĂ©ration lĂ©gendaire de Sara Bernhardt, un drame historique glaçant, qui retrace Ă  travers la relation sadique Metternich et le jeune prince impĂ©rial et Duc de Reichstag, l’Ă©popĂ©e malheureuse et tragique d’une destinĂ©e avortĂ©e. La partition datĂ©e de 193Ăš (créée Ă  Monte Carlo) s’empare en pleine Europe insouciante et dĂ©jĂ  terre de tensions exacerbĂ©e, de la figure du fils unique de NapolĂ©on Ier, otage odieusement traitĂ© Ă  Vienne, Prince de papier, vraie victime sacrifiĂ©e, dont le sort le destinait directement Ă  l’opĂ©ra. Evidemment, c’est un drame rĂ©trospectif, dont la couleur nostalgique, ressuscite l’ancien lustre impĂ©rial, alors dĂ©finitivement effacĂ© : c’est tout le jeu et le charme de la relation de Flambeau (superbe Marc Barrard qui profite de sa connaissance antĂ©rieure du personnage Ă  Tours et Ă  Lausanne justement : son aisance, le souffle du chant, l’intelligence expressive s’en ressentent Ă©videmment) et du Prince, jouant aux soldats sur une carte, convoquant l’ivresse conquĂ©rante de son pĂšre… (fin du II) ; mĂȘme Ă©vocation subtilement conduite pour la bataille victorieuse de Wagram. Le souci prosodique des deux auteurs contemporains construit cependant un opĂ©ra français d’une rĂ©elle force Ă©pique, oĂč le portrait d’un jeune homme trop frĂȘle Ă  porter le costume lĂ©guĂ© par son pĂšre demeure fin et d’une belle intelligence : sa faiblesse par nature Ă©tant parfaitement exprimĂ©e dans le fameux duo, implacable et terrible oĂč il trouve son geĂŽlier Ă  peine dĂ©guisĂ©, en la personne du ministre Metternich, d’une glaciale et cynique froideur dominatrice.
kent nagano l aiglon honegger ibert cd decca montrealJustement, le choix des solistes Ă©taye globalement la rĂ©ussite de l’interprĂ©tation oĂč rayonne la clartĂ© d’un français toujours audible : Anne-Catherine Gillet, qui chante Juliette chez Gounod, Ă©blouit dans le rĂŽle-titre, en souligne l’angĂ©lisme enivrĂ©, la droiture morale, l’esprit d’espĂ©rance… d’autant plus flamboyant qu’elle est “cassĂ©e” minutieusement par le chant ombrĂ©, sarcastique, souterrain du tĂ©nĂ©breux Prince de Metternich (excellent Etienne Dupuy dont on avait pu il y a quelques annĂ©es mesurer le beau chant français romantique chez Massenet dans une lecture de ThĂ©rĂšse, singuliĂšre et imprĂ©vue et caractĂ©risation ciselĂ©e aux cĂŽtĂ©s de Charles Castronovo). Seule rĂ©serve, le manque d’ampleur de Gillet qui la trouve dans les aigus Ă  soutenir dans la hauteur comme l’intensitĂ©, parfois Ă  la limite de ses justes possibilitĂ©s (il est vrai que le rĂŽle de l’Aiglon, rĂŽle travesti, est chantĂ© par des mezzos Ă  Lausanne comme Ă  Tours : Carine SĂ©chay avait relevĂ© les defis d’une partition redoutable pour la voix avec constance et finesse ; repris aussi Ă  Marseille avec D’Oustrac…). La crĂ©atrice du rĂŽle central Ă©tait Fanny Heldy, cantatrice aux tempĂ©rament explosif et aux ressources phĂ©nomĂ©nales, car elle chantait ThaĂŻs de Massenet, entre autres… c’est dire.

Ici mĂȘme sens du verbe, mĂȘme approche dramatique nuancĂ©e : Honegger et Ibert sont deux contemporains nĂ©s dans les annĂ©es 1890, qui quarantenaires en 1935, signent une parfaite comprĂ©hension du souffle théùtral chez Rostand, lui-mĂȘme respectĂ© par Henri Cain qui signe le livret.
Au mĂ©rite de Kent Nagano, revient tout l’art de rendre une partition Belle Epoque et Modern style, expressive et palpitante sans affectation (parfois idĂ©alement suave : la valse du III). TrĂšs belle rĂ©ussite globale, et belle redĂ©couverte d’un opĂ©ra trĂšs peu jouĂ©.

CLIC_macaron_2014CD, compte rendu critique, opĂ©ra. Ibert, Honegger : L’Aiglon (1935) d’aprĂšs Rostand. Anne-Catherine Gillet (L’Aiglon, Duc de Reichstag), Etienne Dupuis (Meternich), Marc Barrard( SĂ©raphin, Flambeau), Marie-Nicole Lemieux (Marie-Louise), … Choeur et Orchestre Symphonique de MontrĂ©al. Kent Nagano, direction (2 cd Decca 478 9502, enregistrĂ© en mars 2015)

 

LIRE aussi notre DOSSIER L’AIGLON d’Ibert et Honnegger