lundi 12 mai 2025

Siwan : Jon Balke, Amina Alaoui (1 cd Ecm, à paraître le 15 juin 2009)

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Siwan: équilibre humaniste
La rencontre du pianiste norvégien Jon Balke et
de la chanteuse marocaine Amina Alaoui

Siwan signifie « équilibre » dans la langue mi-romane, mi-arabe que l’on parlait dans l’Andalousie médiévale où juifs, chrétiens et musulmans savaient vivre ensemble, des temps de paix que l’Inquisition a savamment détruit. Dans ce nouveau disque, intitulé « équilibre », à paraître le juin 2009 chez ECM, le pianiste norvégien Jon Balke désire retrouver cette alliance miraculeuse en compagnie de la chanteuse marocaine Amina Alaoui : équilibre entre la voix et la musique, entre l’écriture et l’improvisation, entre la mélodie et l’ornementation, entre l’Orient et l’Occident, entre le présent et le passé. Autour de Jon Balke et d’Amina Alaoui, des virtuoses de la musique orientale (Kheir Eddine M’Kachiche au violon…), des aventuriers du jazz contemporain (le trompettiste Jon Hassell, notamment), et des solistes… baroques de haut niveau… Tous oeuvrent pour une utopie musicale et spirituelle d’union, de ferveur et de partage. Une utopie musicale, poétique, spirituelle, une utopie humaine, ailleurs défendue avec la même conviction par Jordi Savall et ses fidèles compagnons.


Carrefour salutaire


Jon Balke fait se coïncider mythes et réalités, époques et lieux différents pour imaginer une humanité différente. Siwan est le rêve d’un carrefour entre l’Andalousie médiévale – cette terre où Occident et Orient cohabitaient dans chaque luth et dans chaque voix –, temps baroques et jazz modal. Une rencontre hors de l’histoire entre le chant arabo-andalou, l’électronique, le clavecin et le zarb…
Jon Balke, qui s’est aventuré déjà dans de nombreux territoires peu explorés de la musique d’aujourd’hui, il a éprouvé une manière de révélation en découvrant Amina Alaoui. La chanteuse marocaine formée dans la tradition gharnati, aime porter cet art de haute mémoire dans des rencontres tout en audace et en respect (avec Angélique Ionatos, Hughes de Courson, Djamchid Chemirani, Henri Agnel, Pedro Soler ou Pablo Cueco). Elle y poursuit son idée de réinventer des liens non seulement entre des cultures mais aussi entre des époques. C’est un art des métissages et de la rencontre que la musique porte sans limite et avec poésie.


Siwan, entre jazz et baroque


Siwan signifie donc équilibre, ou balance, en aljamiado. Cette langue elle-même est comme une promesse métisse, puisqu’elle naît de l’écriture en graphie arabe des langues romanes d’Andalousie. Latin tardif, mozarabe, ladino s’écrivent ainsi de droite à gauche, jusqu’à ce qu’au XVIe siècle les rois de la Très Catholique Espagne en interdisent l’usage – et alors le mot siwan disparaît de la langue… Ce qui passionne Jon Balke, c’est que la musique d’Al Andalus, en mêlant traditions et apports des trois religions monothéistes cohabitant sur la terre d’Espagne, a un fonctionnement parent de la musique baroque née quelques siècles plus tard, mais aussi du jazz européen d’aujourd’hui : l’inspiration modale, la liberté des ornementations… il a alors rassemblé pour le disque, autour de son clavier, des musiciens d’univers radicalement différents : le trompettiste et musicien électronique américain Jon Hassel, le violoniste algérien Kheir Eddine M’Kachiche, le percussionniste iranien Pedram Khavar Zamini, le luthiste Andreas Arend, le percussionniste norvégien Helge Norbakken, les Barokksolisten conduits par le violoniste Bjarte Eike.

Siwan mèle les langues arabe et espagnole avec des textes mystiques du martyr Al-Hallaj et de saint Jean de la Croix. On entend la trompette de Jon Hassel dialoguant avec le luth ancien et le clavecin, les musiciens baroques accompagnant le chant arabo-andalou d’Amina Alaoui, le zarb iranien croisant violon oriental et violon classique occidental… Assemblée de rêves, cohorte d’anges musiciens chantant un humanisme renouvelé, rencontres et carrefours multiples, diagonales enchevêtrées mais lumineuses : rencontres et témoignages.

L’orchestre unique, singulier de l’aventure Siwan n’a existé que pour les sessions d’enregistrement dont le disque témoigne, entre septembre 2007 et mai 2008, et pour quelques rares concerts à Bergen, Stavander, au Caire. Prochaine critique développée de Siwan par Jon Balke et Amina Alaoui, dans le mag cd de classiquenews.com. Sortie annoncée de Siwan: le 15 juin 2009.

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