Meyerbeer
Les Huguenots, 1836
Olivier Py, mise en scène
Marc Minkowski, direction
Bruxelles, La Monnaie
Du 11 au 30 juin 2011
Opéra légendaire s’il en est (modèle parfois pompeux du grand opéra à la française, dans la lignée transmise par Guillaume Tell de Rossini), Les Huguenots restent un opéra extrêmement difficile à monter tant pas l’ampleur des effectifs à distribuer que du quatuor de solistes à regrouper (écriture très savante des airs solistes, entre virtuosité et déclamation). A noter à Bruxelles, la prise de rôle de Mireille Delunsch pour la catholique Valentine; en alternance John Osborn et Eric Cutler pour Raoul le protestant, Julia Lezhneva et Blandine Stakiewicz pour Urbain, sans omettre Jérôme Varnier (Marcel), Philippe Rouillon (Saint-Bris) et Jean-François Lapointe (Nevers).
Paris, 1572. 3000 protestants se font égorger pendant la nuit de la Saint-Barthémény, une nuit de massacre qui est le contexte de l’opéra de Giacomo Meyerbeer…
Contemporain des grands classiques romantiques italiens de Donizzetti à Bellini, Les Huguenots créé à l’Opéra de Paris le 29 février 1836, alors Académie royale de musique incarne sur le mode historique, le dernier aspect du grand opéra français, en 5 actes (livret de Scribe et Deschamps) avec choeurs, ballets, scènes dramatiques de solistes. Entre fresque collective au souffle indiscutable et prière individuelle, Les Huguenots s’impose comme un modèle lyrique français.
A la création, l’opéra bénéficie de la présence de solistes légendaires tels Dorus-Gras, Cornélie Falcon, Flécheux et surtout Adolphe Nourrit, ténor inoubliable pour les spectateurs, et aussi metteur en scène de cet événement parisien… L’action se déroule en Touraine puis à Paris en 1572.
Au centre de l’action se situe évidemment un couple amoureux que les origines familiales et les confessions opposent. La Reine Marguerite de Navarre aurait souhaité (II) que la chrétienne Valentine, fille de du chef catholique Saint-Bris épouse Raoul de Nangis, protestant… Or la jeune femme épouse Nevers, un catholique tout en demeurant éprise de Raoul. Au moment sombre de la conjuration des poignards (IV) qui décide du massacre des huguenots, Valentine reste tiraillé entre son époux qui refuse de tuer des innocents par fanatisme et Raoul, le seul élu de son coeur. Le massacre commence cependant que Valentine déjà veuve de son époux (Nevers est tué par les membres de sa propre confession) a rejoint le parti des Huguenots pour retrouver Raoul: elle est tuée par son propre père… lequel massacre aussi Raoul. Pas d’échappatoires contre la montée de la barbarie fanatique. Les Huguenots sont un plaidoyer éloquent contre l’inhumanité et l’horreur de l’intégrisme. La loi du père (inflexible Saint-Bris) se dresse contre le chant de l’amour et de la fraternité, incarné par Marguerite de Navarre, Valentine et Raoul…
Après près de 1.000 représentations sans discontinuité, assurant pour l’oeuvre et son auteur un prestige inédit, l’ouvrage tombe dans l’oubli. La nouvelle production bruxelloise met les moyens dans ce qui s’annonce comme la recréation la plus ambitieuse des Huguenots. Même l’Opéra national de Paris ne s’y est pas risqué, depuis des années… Production reprise à Strasbourg en 2012. A Bruxelles: durée, 5h, avec 2 entractes. Les soirées à partir de 18h.