LIVRE, critique. C. GINOT-SLACIK / M. NICCOLAI : Musiques dans l’Italie fasciste (1922-1943) – FAYARD. Les deux auteures présentent un panorama détaillé de l’activité musicale en Italie pendant le régime fasciste de Mussolini, soit de 1922 (marche sur Rome), à 1943 (chute du duce). La période est longue et modifie en profondeur l’organisation de la culture en Italie à seule fin de glorifier l’histoire nationale et ce qui fonde le prestige de l’art italien (réforme de l’enseignement de la musique…). « Aviateurs et tyrans de la Rome antique hantent alors les scènes d’opéra, tandis que musiques de film et chansons se font l’écho des conquêtes coloniales. Ni les musiques savantes ni les genres populaires ne sont étrangers au fascisme : sans imposer de canons esthétiques, le régime accompagne la réforme des conservatoires et subventionne des événements majeurs tels la Biennale de Venise ou le Mai musical florentin. »
Ainsi s’affirment comme « Prémisses – 1918 – 1924 », les déclarations d’intention de Gabriele d’Annunzio, la glorification d’un passé prestigieux où se distingue le génie du Vénitien Monteverdi, revisité, réinterprété par Malipiero)…
Il reste encore actifs plusieurs événements culturels qui attestent encore du rayonnement de l’art italien aujourd’hui : Maggio fiorentino…
A l’époque du totalitarisme mussolinien, la majorité des compositeurs cultive une ambiguité permanente dans sa relation au pouvoir afin de continuer à être joués et à composer (ainsi l’activité des Carri di Tespi Lirici jusqu’en 1942 ; l’activité parfois zélée de Malipiero et de Casella). « L’opéra sous le régime » met à l’honneur les oeuvres de Mascagni, entre autres ; des sujets s’affirment Rome impériale plutôt la Grêce Antique ; la figure libératrice, d’une virilité triomphante celle de l’aviateur fasciste, avec à la clé l’exaltation de la Guerre d’Ethiopie, le renouveau de l’oratorio… les musiques de films et même la chanson comme l’opérette ne sont pas omises ; autant de vecteurs d’une propagande parfaitement affinée par le pouvoir de Rome pour créer le héros italien.
Cependant, entre autres, certains auteurs Dallapiccola (Le Prisonnier) ou Petrassi (Coro di Morti) font rupture et s’écartent de l’allégeance avec l’adoption des lois antisémites. Au final, de manière profitable, l’auteure offre une vision élargie de la période à travers l’analyse des profils de chaque compositeur : sensibilités particulières, genres musicaux (essor du poème symphonique… avec trame narrative précise ; régénération du madrigalisme…), commentaires sur des partitions emblématiques (« Le Prisonnier : une charge politique » / L’Inquisition comme métaphore du régime fasciste).
Il s’agit de mesurer l’admiration suscitée par le fascisme puis les divisions que le régime politique dans ses applications suscite au sein de la nation italienne. La conclusion mesure les manifestations toujours vivaces de cette « mémoire problématique ». Lumineux.
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LIVRE, critique. C. GINOT-SLACIK / M. NICCOLAI : Musiques dans l’Italie fasciste (1922-1943) – éditions FAYARD. – EAN :
9782213704975 – Prix 24 euros – Parution : février 2019.
https://www.fayard.fr/musique/musiques-dans-litalie-fasciste-1922-1943-9782213704975
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Les auteures Charlotte GINOT-SLACIK et Michela NICCOLAI. Biographies présentées par l’éditeur Fayard. Titulaire d’un doctorat en musicologie, Charlotte Ginot-Slacik est actuellement professeur au Conservatoire national supérieur de Musique et de Danse de Lyon, et collabore régulièrement avec l’Orchestre national du Capitole de Toulouse, l’Opéra de Lyon, la Philharmonie de Paris…
Après un double cursus de doctorat en Musicologie à Saint-Étienne et à Crémone, Michela Niccolai a effectué deux post-doctorats à l’Université de Pavie et à l’Université de Montréal. Elle enseigne à l’Université Paris 4 et à Paris 3 et est membre associé au laboratoire IHRIM (Lyon2) et au LaM (ULB).
Bourse d’écriture 2016 de la Fondation Francis et Mica Salabert
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