L’histoire narre les mésaventures du paysan Nemorino, éperdument amoureux de la belle Adina, et qui, la voyant prête à épouser le fanfaron Belcore, cherche de l’aide auprès du docteur Dulcamara, bonimenteur célèbre, qui lui remet un philtre d’amour, en fait une bouteille de… vin rouge.
La nouvelle production présentée ici, après Lille, voyagera à travers la France, et fera halte à Rouen en février, à Saint-Etienne en mars, et à Angers-Nantes en avril 2011.
Elixir léger et pétillant
D’un modernisme simple et évocateur, la mise en scène de Richard Brunel sert l’œuvre avec finesse et humour. Elle fait de Dulcamara le personnage central de l’intrigue, ouvrant et fermant la représentation. Loin de tomber dans un comique facile, cette scénographie met à nu la mélancolie que contient la pièce, notamment à la fin du premier acte, où Nemorino est transformé par les villageois en épouvantail, image forte et poignante.
Saluons la qualité de la distribution : le ténor turc Bülent Bezdüz met son art du chant au service de ce Nemorino qu’il connaît bien. Le timbre est beau, l’émission remarquable de liberté et le musicien sensible. Seule petite réserve, la voix sonne un peu petite et peine parfois à se faire entendre.
Formée au style belcantiste, Olga Peretyatko offre une véritable leçon de chant.
La voix est fine et légère, sa technique accomplie lui permettant une agilité sans faille, des trilles impeccables, des aigus et suraigus riches et lumineux, et des messe di voce d’un grand raffinement. La comédienne est en outre d’un naturel confondant et semble prendre plaisir à incarner son personnage de coquette insaisissable.
Elève du légendaire Sesto Bruscantini, la basse italienne Renato Girolami a été formé à la meilleure école qui soit. Son Dulcamara est épatant de vie, débonnaire et attachant, occupant la scène dès son entrée. L’instrument est large et puissant, emplissant sans effort toute la salle, doté d’un sillabato de grande école et d’aigus percutants. Il semble réellement porter le spectacle sur ses épaules, et on s’incline bien bas devant cet artiste qui semble s’identifier totalement à son rôle.
En Belcore, Guido Loconsolo fait sonner sa voix sonore, mais au style fruste et souvent engorgée. Malgré tout, ce manque de raffinement dans le chant se révèle peu gênant dans ce rôle de militaire brutal et finalement secondaire.
La Giannetta de la jeune Anna Bayodi-Hirt, quant à elle, n’appelle que des éloges pour son chant franc et précis, et son dynamisme scénique.
A la tête de l’Orchestre de Picardie, Antonello Allemandi cisèle un accompagnement instrumental virevoltant et brillant, soulignant parfaitement le vent de folie qui souffle sur scène.
Spécialement prévue pour les familles, cette représentation s’est achevée sous les bravi d’un public enthousiaste, visiblement conquis.
Lille. Opéra, 15 janvier 2011. Gaetano Donizetti : L’Elisir d’Amore. Livret de Felice Romani. Avec Nemorino : Bülent Bezdüz ; Adina : Olga Peretyatko ; Dulcamara : Renato Girolami ; Belcore : Guido Loconsolo ; Giannetta : Anna Bayodi-Hirt. Choeur de l’Opéra de Lille. Orchestre de Picardie. Antonello Allemandi, direction musicale ; Mise en scène : Richard Brunel. Assistant à la mise en scène : Matthieu Roy ; Scénographie : Marc Lainé ; Costumes : Claire Risterucci ; Lumières : Mathias Roche ; Dramaturgie : Catherine Ailloud-Nicolas ; Chef de chœur : Yves Parmentier ; Chef de chant : Bertrand Halary