Joseph Haydn
1732-1809
Haydn à Esterhaza

D’ailleurs en relation avec le goût de son employeur, Haydn écrit nombre d’opéras, en particulier bouffa, d’une cocasserie souvent audacieuse que la musique sert avec une imagination féconde. Ainsi en témoigne, l’opéra buffa, perle révélée par Jérémie Rhorer et le Cercle de l’Harmonie (Festival d’Aix en Provence, 2008), L’infedelta delusa (1773).
Pour Nicolas Ier, Haydn sélectionne les oeuvres de ses contemporains et des maîtres anciens, les réécrit ou les adapte pour les représentations à Esterhaza, le palais d’été du Prince. Ainsi connaît-il excellemment les oeuvres de, entre autres, Anfossi, Traetta, Sarti, Piccinni, Grétry, Paisiello, Cimarosa. Pour plaire au Prince, Haydn simplifie souvent son écriture qui devient plus mélodique et sujette à variations décoratives.
Musicien européen


registres expressifs : le grotesque buffo et
la tragédie passionnelle s’y mêlent pour évoquer une fresque déjantée
de la guerre amoureuse. Entre fable romanesque et scène comique,
Orlando incarne un héros d’un nouveau type,
intermédiaire entre les deux mondes, éclectique, à la frontière des
deux versants émotionnels : fantasques, fougueux, irritable,
hypersensible… L’opéra a été récemment (Graz, 2005) dévoilé par Nikolaus Harnoncourt.
Ses affaires sont cependant florissantes en particulier en Espagne: Haydn signe un contrat (1783) avec Maria Josafa de la Soledad (1732-1834), Duchesse d’Osuna – que Goya a portraiturée en 1785-, première Dame d’honneur à la Cour de Madrid, à laquelle il ne tarde pas à livrer, ce pendant 6 ans, de nombreuses partitions.
Haydn et Mozart, 1784

Haydn et Mozart ne pouvaient que s’entendre: tous deux engagés par la musique, ne vivant que pour elle, tout en occupant des territoires différents et complémentaires: pour Haydn, le perfectionnement de la Symphonie, du Quatuor à cordes et bientôt de l’oratorio; pour son cadet, l’opéra et le Concerto pour piano. Toujours inspiré, Haydn compose 18 Quatuors (opus 50, 54, 55 et 64) entre 1787 et 1790.
En 1787, Haydn célébré tel le «Shakespeare de la musique» est toujours souhaité à Londres. Mais pour le prince Esterhazy, il mène une activité continuelle, presque 100 représentations d’opéra sont données à Eszterháza. C’est lui qui dirige, sélectionne comme nous l’avons dit, les partitions et fait jouer évidemment ses propres oeuvres.
1790, un nouveau départ à Vienne

Le Roi de Naples lui offre un poste mais Haydn décline, préférant -enfin- réaliser ce séjour à Londres qui lui plaît tant: après une visite chez Mozart, Haydn part le 15 décembre 1790 à Londres, accompagné par Johan Peter Salomon (compositeur, violoniste et impresario, 1745-1815). Charles Burney, l’un des ses plus grands admirateurs à Londres, l’accueille: son séjour est un triomphe. Haydn reste à Londres jusqu’en juillet 1792: il est fait Doctor of Music honoris causa à Oxford, après avoir créé sa Symphonie n°92 (« la surprise »). Sur le chemin du retour, il passe par Bonn (y croise Beethoven auquel il professe quelques conseils). Beethoven lui rendra ensuite visite à Vienne pour recueillir son enseignement.
Londres II: les 12 Symphonies Londoniennes

Il compose surtout les fameuses 12 Symphonies londoniennes. Ce sont les Symphonies les plus jouées aujourd’hui, même si on leur dispute à juste titre celles non moins capitales dans la maturation du genre et l’évolution de l’écriture, les Parisiennes et les opus plus nettement marqués par l’esthétique Sturm und Drang.
C’est que les Londoniennes (1787-1790) s’éloignent de leurs soeurs antérieures, plus mozartiennes: complexité accrue, synthèse opérée et réussie entre divers styles, suprême virtuosité, intériorité, sincérité, forme inventive voire expérimentale, cohérence de l’architecture et même audace visionnaire… Jamais Haydn n’a semblé plus tenté par la permanente remise en question du cadre classique. Etonnant de la part d’un musicien que l’on étiquette tranquille voire ennuyeux! Même saveur originale pour ses canzonette anglaises et écossaises conçues à la même période. La véritable découverte de son séjour à Londres demeure, comme le vivra aussi Mendelssohn, Haendel. Revenu à Esterhaza, Haydn souhaitera mettre en oeuvre son inspiration dans le genre où s’est illustré avant lui, et ce magnifiquement, le compositeur baroque, né Saxon.
Messes et oratorios

De 1796, date son amirable Concerto pour trompette en mi bémol majeur. En 1797, il compose l’hymne national autrichien (Gott, erhalte Franz den Kaiser). L’autre grande oeuvre de la fin demeure La Création, (« Die Shöpfung ») emblème de la pensée chrétienne et humaniste qui vaut à l’auteur une véritable gloire de son vivant (première viennoise, en avril 1798). Mais l’auteur génial dans l’oratorio a aussi laissé un ultime opéra, très vite retiré de l’affiche à cause de malheureuses circonstances: L’anima del filosofo ossia Orfeo ed Euridice. Dramma per musica 1791, ouvrage atypique, d’une funeste résolution, à la fois poétique, philosophique et spirituel: la relecture que nous offre Haydn du mythe d’Orphée (et à travers lui du musicien et de l’artiste) s’avère stupéfiante. L’opéra vient d’être repris par Jean-Claude Malgoire à Tourcoing (mars 2009).
Véritable trésor national, héros de la musique aristocratique et populaire, portant les valeurs héritées du Siècle des Lumières, Haydn paraît pour la dernière fois en public le 27 mars 1808 à l’occasion de la représentation de La Création, dirigée par Salieri.
Admiré comme peu avant lui, Haydn meurt le 31 mai 1809.