jeudi 28 mars 2024

Igor Stravinsky: Le Sacre du Printemps, 1913 (version Nijinsky) Arte. Le 22 juin 2008 à 19h

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Igor Stravinsky
Le sacre du printemps

(version Nijinsky, 1913)


Arte
Le 22 juin 2008 à 19h

Ballet. Réalisation : Denis Caiozzi. Coproduction : Arte France, Bel Air Media (2008, 43mn). Enregistré au Théâtre du Mariinsky le 20 juin 2008. Igor Stravinsky: Le Sacre du printemps. Livret : Igor Stravinsky et Alexandre Benois. Chorégraphie : Vaslav Nijinsky. Sous la direction musicale de Valéry Gerguiev. A l’occasion des « Nuits Blanches », véritable fête populaire à Saint-Pétersbourg pour célébrer les premiers jours de l’été, le Mariinsky a imaginé une soirée en hommage à Igor Stravinsky. Sous la baguette de Valéry Gerguiev, le ballet du Mariinsky interprète Le Sacre du printemps dans une chorégraphie de Nijinsky.

Version originale de 1913
Travail remarquable que celui du chef du Mariinski, Valery Gergiev qui non seulement redore la riche tradition chorégraphique et musicale du Théâtre Mari, mais aussi lui restitue ses chef-d’oeuvres russes, comme Le Sacre du Printemps de Stravinsky, même si l’oeuvre fut scandaleusement créée à Paris en 1913 (8 représentations mémorables au Théâtre des Champs Elysées). L’approche du chef d’origine ossète, comme son cadet le brillant Tugan Sokhiev, a d’autant plus de valeur qu’il a reconstitué après un cycle de recherche philologique, les conditions et le dispositif original de la création parisienne avec le regard révolutionnaire du danseur Vaslav Nijinsky, en 1913. La force sauvage, ce primitivisme sacrificiel et réformateur de la partition n’en sont que plus rehaussés. Saluons Arte de diffuser cette production événement pour la fête de la musique.
Le Sacre du printemps présente des « Tableaux de la Russie païenne ». Intitulé « Adoration de la terre », le premier tableau figure une adoration du dieu de la naissance du printemps menée jusqu’à l’extase ; le second, « le Sacrifice », glorifie l’élue jusqu’à son immolation. La création de la chorégraphie de Nijinsky au Théâtre des Champs-Élysées à Paris en 1913 a provoqué un véritable scandale. Le public est heurté par la violence primitive de la pièce. Le rejet est si radical que le ballet disparaît de l’affiche après huit représentations. Oubliée, la chorégraphie originale de Nijinsky a pu être reconstituée grâce au travail acharné de Millicent Hodson. Après quinze années de recherches, elle est parvenue, avec l’aide notamment de Marie Rambert, qui avait été l’assistante de Nijinski à recomposer le Sacre originel, présenté une première fois, le 30 septembre 1987 par le Joffrey ballet à Los Angeles.

Rites païens de l’ancienne Russie

En deux tableaux, Le Sacre du Printemps, dans la chorégraphie de Vaslav Nijinski pour les Ballets russes de Serge de Diaghilev, en provoquant l’un des plus grands scandales de la scène parisienne, au Théâtre des Champs-Élysées à Paris, le 29 mai 1913, marque par la violence primitive de la musique comme de son déploiment visuel, le passage dans la modernité. Après L’Oiseau de feu et Petrouchka, Stravinsky amplifie la sauvagerie rythmique de son écriture.

C’est un rite païen fortement imprégné par l’esprit de la terre et de l’enracinement qui naît dans l’esprit du compositeur dès 1910, alors qu’il achève L’Oiseau de feu. En 1911, sous la pression de Diaghilev, le ballet prend forme sur un livret final de Roerich et Stravinsky. Programmé pour la saison 1911, la partition est retardée à 1912, en raison du décalage de présentation de l’Après midi d’un faune, chorégraphie révolutionnaire révélant le jeu atypique de Nijinsky. Stravinsky finit l’orchestration définitive début mars 1912. A l’affiche des célèbres Ballets Russes de Diaghilev, qui mêlent exotisme (slave) et modernité, la première soulève une réaction vive du public dont Stravinsky a laissé un témoignage éloquent dans Chroniques de ma vie: foule hystérique et moqueuse, houle des opposants que Diaghilev tentait de calmer en éteignant et allumant les lumières de la salle, cris de Nijinsky à l’adresse des danseurs qui sous les hurlements du public déchaîné, n’entendaient plus l’orchestre…!

Stravinsky critique
Plus intéressante, l’appréciation du compositeur vis à vis de la chorégraphie de Nijinsky: Stravinsky, qui avait été convaincu dès 1913 par la formulation dansée, n’y voit après coups, qu’une formule inaboutie révélant l’incapacité du danseur et maître de ballet à exprimer et suivre les indications de modernité de Diaghilev. L’oeuvre finit par s’imposer: Londres l’accueille chaleureusement en juillet 1913. De retour à Paris, spectacle et musique sont triomphalement applaudis (avril 1914).

Comme l’a exprimé la chorégraphe Pina Bausch au Palais Garnier, où de la terre avait été déposée sur les planches, maculant le corps suant des danseurs à mesure du déroulement de l’action, Le Sacre ne comprend pas véritablement d’intrigue. Il s’agit en une sorte de crescendo physique, d’une succession de tableaux (deux volets principaux) aux rites païens primitifs, invocations et célébrations ou « cérémonies de l’ancienne Russie » selon les mots du compositeur: d’abord, l’Adoration de la terre: extase au printemps. Les hommes piétinent le sol pleins de promesses végétales, terre nourricière qui accueille leur pas exaltés (déroulement: Augures printaniers, danses des adolescentes, jeu de rapt, rondes printanières, Jeu des cités rivales, cortège du Sage, danse de la terre). Ensuite, le Sacrifice: après minuit, scène du sacrifice à Iarilo, « le magnifique, le flamboyant » (déroulement: Cercles mystérieux des adlescentes, Glorification de l’élue, Évocation des ancêtres, Action rituelle des ancêtres, Danse sacrale). Pour exprimer la sonorité païenne requise, Stravinsky utilise un orchestre important où rayonnent les percussions (parmi les cuivres figure la trompette basse en mi bémol majeur) et aussi les bois, par deux voire par trois (bassons, hautbois qui ouvre les festivités, clarinettes par trois…).

Illustrations: Vaslav Nijinsky, Igor Stravinsky (DR)

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