Vendredi 22 décembre 2006 à 15h
Prima la musica
Hommage à Armin Jordan
Franz Lehar
Airs d’opérettes
Mahler
Chant du compagnon errant
Bo Skovhus, baryton
Orchestre de la Suisse Romande
Armin Jordan, direction
L’ancien footballeur qui joua Amfortas
Hélas, Armin Jordan nous a donc quitté le 20 septembre 2006. La perte d’un immense musicien, chef d’orchestre subtil et fin, est une perte irréparable. Il faut, comme toujours, l’adieu puis l’absence pour mesurer le talent de celui qui n’est plus. Ce footballeur aguerri, n’eut pas le bonheur de poursuivre l’automne de sa vie, au demeurant fort occupée : la perte du souffle et un corps abîmé l’empêchèrent de poursuivre. L’exercice de la douleur lui fut-il à ce point familier que le chef incarna Amfortas à l’écran, maniant déjà la baguette pour la bande-originale du film de Hans Jürgen Syberberg : Parsifal d’après Wagner ? Mais douloureux, l’helvète avait plus d’un tour dans son sac pour relever le défi de la vie et de la maladie : l’humour. Sportif, Armin Jordan se passionna pour la culture viennoise du début du siècle : jouant comme personne avant lui, Zemlinsky, Korngold. Et d’ailleurs, son élégance et sa direction racée, à la fois discrète mais rayonnante, cite absolument l’esprit et la grâce viennoise.
Il a commencé comme pianiste; puis, démangé par la direction, manie la baguette à l’Opéra de Zurich, surtout Bâle, jusqu’en 1989. Auparavant, il relevait à un niveau international, l’orchestre de la Suisse romande dont il devint le directeur en 1985. L’ensemble orchestral de Paris lui doit de s’être maintenu musicalement et administrativement. Voyageur poète, il aima diriger en invité les phalanges européennes : l’Orchestre symphonique de Bâle, et aussi le Philharmonique de Monte-Carlo. Il nous laisse une discographie où s’imposent l’opéra français, de Chausson (Le roi Arthus), Debussy (Pelléas), à Dukas (Ariane et Barbe-Bleue) et Ravel (L’enfant et les sortilèges). Tous ces enregistrements sont parus chez le label aujourd’hui disparu, Erato ; Zemlinsky (Une tragédie Florentine, Naïve), Mahler ou encore Wagner (Parsifal, Erato), surtout Wagner dont le récent Tristan und Isolde paru en dvd chez Bel Air classiques (en provenance de l’Opéra de Lausanne 2005) : sa direction, intimiste et fluide, permet à la mise en d’Olivier Py de déployer sa magie dévastatrice et vénéneuse.