mercredi 14 mai 2025

Hector Berlioz: Les soirées de l’orchestreéditions Symétrie

A lire aussi
critique livres
Hector Berlioz: Les soirées de l’orchestre

Editions Symétrie

Au total 25 soirées de l’orchestre (et deux épilogues) disent cette frustration féconde qui fait de Berlioz le compositeur écrivain le plus passionnant de son temps. S’il n’ a pas convaincu en son pays, Hector a manié la plume comme personne, s’inventant, idéalisant, fantasmant une société parisienne différente à celle qui l’a éprouvé sans vraiment mesurer ni comprendre son génie visionnaire.

Des articles et textes parus dans le Journal des Débats dont il fut un rédacteur régulier, Berlioz recycle, reprend certains passages et pour exprimer sa propre vision de ce que serait alors un monde nouveau où la musique, « sa » musique serait vénérée, l’auteur invente une correspondance littéraire, adressée aux instrumentistes d’un orchestre lui aussi idéal.


Berlioz écrivain

A ses correspondants imaginés, le chroniqueur restitue l’ambiance de la bonne société si critiquable, qui reste sa proie la plus attrayante. Témoin de la misère musicale qui sévit à Paris, assistant aux opéras et aux concerts dont le public aveugle et sourd se délecte, Berlioz rend compte des anecdotes, situations, réalisations qui nourrissent son ressentiment.
Voici les fragments d’une pensée critique insatiable, à l’égo demultiplié tant il aurait pu déclaré: « la musique, c’est moi… » Sa sincérité l’excuse; sa passion le disculpe de toute pensée calculatrice car Berlioz aime surtout la musique avant lui-même.
L’amertume n’est jamais loin de la dénonciation et Berlioz aiguise toujours et toujours la pointe de son esprit frustré. A Londres, en Allemagne et jusqu’en Russie, ses œuvres sont applaudies… sauf en France et à Paris. Ces 25 soirées, parfaites divagations d’une imagination solitaire, trop écartée, lance souvent sous les mots et les scènes recomposées, un cri ultime, la rage jalouse d’un lion blessé.

L’écrivain fascine par son vocabulaire, sa pointe bien trempée dans un acide teinté d’humour, d’ironie voire de cynisme. Tout au long de son écriture, sa grande culture enrichit sa prose et l’écarte d’un strict règlement de comptes. La vie musicale à Paris sous de nombreux régimes, quelques essais biographiques sur certains compositeurs et musiciens(Spontini, Paganini, Méhul, …), le goût de Napoléon…), les références permanentes à Gluck, Shakespeare, Shiller…, la situation de l’Opéra de Paris, les théâtres à Londres, la cité utopique et rêvée d’Euphonia (une société de citoyens mélomanes fortement disciplinés) … sont quelques sujets d’un cycle éclectique où au milieu des années 1850, l’esprit agile, le coeur à la fois lourd mais curieux, Berlioz raconte, ou plutôt se raconte. Sur le goût de ses contemporains, sur les oeuvres applaudies et d’autres qu’il aime et analyse, sur ses compatriotes et ses amitiés, le grand romantique se montre tel que sa légende l’a célébré: lyrique, imaginatif, mobile; acerbe parfois, souvent passionné… donc passionnant. Réédition événement. Lecture incontournable.

Hector Berlioz: les soirées de l’orchestre. Préface de Bruno Messina. Editions Symétrie, en collaboration avec le Palazzetto Bru Zane Centre de musique romantique française. 450 pages. ISBN: 978 2 914373 89 0. Parution: juillet 2012.

Derniers articles

COFFRET CD événement, annonce. BRUCKNER : Symphonies 1 – 9. Lü Jia / China NCPA Orchestra

Un nouveau Bruckner, profond, dense, contemplatif venu de Pékin... Lü Jia et l'Orchestre NCPA de Pékin signent une intégrale...

Découvrez d'autres articles similaires

- Espace publicitaire -spot_img