Hector Berlioz: critique musicale
Volume 6 (1845-1848)
Les 4 années concernées par le présent 6ème volume, sont passionnantes: le lecteur y découvre la flamme et les attentes souvent déçues d’un créateur quadra, (la période couverte concerne un homme au centre de sa vie âgé entre 42 et 46 ans), résolu, actif, tendu… Il retrouve tous les aspects d’une âme exigeante, affûtée, curieuse, facile en jugements sentis, réfléchis, quoique souvent partiale, subjective donc originale et captivante. D’autant que le compositeur enrichit par sa connaissance interne de la musique, la prose déjà précise et nuancée du prosateur.
Déjà à l’époque précédent les révolutions européennes, Paris regorge de saisons et cycles de concerts et d’opéras: Berlioz s’en plaint car le nombre ne produit pas forcément la qualité. La période est celle de la création de La Damnation de Faust (Opéra-Comique, 6-12 décembre 1846) qui est un sévère échec, de surcroît catastrophique pour ses finances personnelles; heureusement les voyages, déjà cités, permettent au créateur de sentir le degré d’enthousiasme et de compréhension que son oeuvre suscite: les hongrois l’accueille en héros, comme les Saint-Pétersbourgeois. C’est aussi le témoignage d’un créateur qui se cherche encore une bonne place au sein de l’Institution, comme ce poste de chef de chant à l’Opéra… qui traîne et l’amène à prendre la fonction de chef d’orchestre à Londres au Drury Lane, jusqu’en avril 1848, contraint de regagner Paris parce que l’entreprise a fait faillite.
Voilà bien la figure, édifiante, insatisfaite, mais toujours passionnée dans sa prose naturellement ciselée et lyrique, du romantique, « maudit », décalé dans la société (qui le rejette)… Berlioz écrit non sans raison, habité par un désir de voyage autour du monde: « et j’ai un mépris indomptable et toujours croissant pour ces idées françaises, que les uatres peuples ne connaissent seulement pas…(…) Je n’ai donc rien de mieux à faire que ce que je fais; je suis un sauvage, je garde ma liberté, ja vais tant que la terre me porte, tant que les bois ont des daims et des élans, et si je souffre bien souvent de fatigue, l’insomnie, le froid, la disette, les injures des visages pâles, au moins, puis-je rêver à loisir au bord des cataractes et dans le silence des bois; adorer la grande nature et remercier Dieu de m’avoir laissé le sentiment de ses beautés(…) »
Les textes de Berlioz sont selon la ligne éditoriale, publiés dans leur intégralité, avec une orthographe modernisée et enrichis de nombreuses notes, en liaison avec les événements de la vie du musicien. Chaque compte rendus est présentés chronologiquement par mois et par année, de février 1845 à décembre 1848.
Cet ouvrage est le sixième des dix volumes du vaste projet de publication, en édition critique, de l’intégralité des articles qu’Hector Berlioz a écrits dans la presse (dans le Journal des Débats comme dans la Gazette Musicale), entre 1823 et 1863. Passionnant.
Hector Berlioz: critique musicale Volume 6 (1845-1848). Editions Buchet/Chastel. 542 pages. Parution : 8 janvier 2009.