dimanche 27 avril 2025

Grand concert Shakespeare

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shakespeare_portraitTOURS, Gd Théâtre. Concert Shakespeare, les 10 et 11 décembre 2016. Pour célébrer les 400 ans de William Shakespeare en 2016 (le dramaturge et poète élizabéthain est mort en 1616), l’Opéra de Tours propose un exceptionnel concert symphonique, soulignant combien l’harmonie produite par la musique reste essentielle dans le théâtre shakespearien. Musique apaisante pour le duc Orsino dans La nuit des rois (composée par Purcell), musique amoureuse pour Roméo et Juliette (référence à la musique, propice à l’effusion des choeurs dans la scène du balcon, acte II), sans compter les accents fantastiques et surnaturels pour Macbeth, The Tempest (La Tempête) et A Midsummer Night’s Dream (Le Songe d’une nuit d’été), comme les climats plus tendus, proches de la folie dans Otello. Qu’il ait imaginé dans le déroulement de ses propres pièces des intermèdes musicaux, ou que les compositeurs s’inspirent des héros shakespeariens, à l’opéra, la musique et Shakespeare pose une équation propice à bien des développements. L’intérêt du programme est la sélection des pièces retenues, d’essence principalement symphonique, véritable poèmes dramatiques, ou opéras pour instruments dont beaucoup seront une découverte heureuse, tels l’Othello de Dvorak, le Macbeth de Sullivan, La Tempête de Tchaikovsky et de Sibelius, aux côtés de la plus connue Symphonie dramatique « Roméo et Juliette » de Berlioz. Les 10 et 11 décembre 2016, c’est à une sublime immersion symphonique, éclectique, inédite à laquelle convie l’Opéra de Tours, nouvellement dirigé par Benjamin Pionnier. 

En 1888, Sir Arthur Sullivan compose la musique de scène de la reprise de la pièce de Shakespeare, Macbeth, alors mise en scène par Henry Irving. L’ouverture amorcée par 3 grands coups (ceux du destin tragique que les sorcières prédisent à Macbeth s’il suit les intentions de son épouse pour assassiner le roi d’Ecosse Duncan…) évoque le climat fantastique et surnaturel qui imprime à la pièce, son caractère envoûtant et sauvage (même le fantôme de Banquo, l’ex ami de Macbeth qu’il fait assassiner lui aussi, paraît dans l’esprit de plus en plus fou du meurtrier)… Très efficace, l’écriture de Sullivan éclaire son génie de la composition dramatique sur un sujet hautement épique et tragique voire lugubre, alors que Sullivan est surtout connu pour ses opérettes délurées, légères et insouciantes.

shakespeare william portraitA partir de la pièce amoureuse et elle aussi tragique, Roméo et Juliette écrite en 1597 par Shakespeare, le romantique Berlioz, passionné comme Verdi par le théâtre shakespearien, imagine malgré l’antagonisme insoluble qui oppose leur deux familles, Montaigus contre Capulets; un couple de jeunes amants, éperdus, inspirés par une grâce qui dépasse leur condition terrestre ; musique envoûtante et d’une sensualité tendre, qui fut créé à Paris en 1839 au Conservatoire de Paris, où était présent Wagner, totalement saisi par la force du drame berliozien. En Juliette, Hector n’a cessé de voir l’ombre de l’actrice admirée, aimée : l’irlandaise Harriet Smithson qui lui inspira aussi la trame de sa Symphonie Fantastique de 1830 (l’aimée inaccessible). La partition captive aussi par sa forme, toujours nouvelle voire expérimentale de la part de Berlioz : malgré la présence et le rôle important des voix, non pas cantate, ni opéra, mais « symphonie dramatique », d’un nouveau genre et plutôt ambitieuse (dont les effectifs purent être rassemblés grâce à l’aide financière concrète du virtuose Paganini), c’est à dire symphonie avec choeurs, solos de chant et prologue en récitatif choral,… rien de moins pour honorer le génie de Shakespeare (et aussi respecter en 6 sections, son plan dramaturgique). L’orchestre installe un climat propre, chante l’amour des deux amants tragiques. Clé de voûte de l’ensemble, la 3è scène d’amour où, après que les Capulets sortent de la fête, laissant Roméo et Juliette s’abandonner à leur étreinte, les instruments (surtout les violoncelles) sont seuls les plus aptes à exprimer le sentiment qui unie les deux coeurs passionnés.

Créée le 19 décembre 1874, la Fantaisie symphonique, La Tempête de Tchaikovski s’inspire de la pièce éponyme de Shakespeare. On y retrouve les agissements du mage Prospero qui bien qu’exilé dans son île reculée, commandant aux éléments de l’air (Uriel) et de la terre (Caliban), suscite une tempête au large qui conduit un bateau à faire naufrage sur ses côtes : c’est justement le navire du prince Ferdinand de Naples, son propre frère… Située entre Roméo et Juliette et Hamlet, la Fantaisie La tempête synthétise toutes les forces en présence, celles produites par la magie de Prospero (les flots déchainés, le naufrage, l’esprit engagé d’Uriel et de Caliban…) mais aussi les épisodes qui échappent évidemment à l’activité du magicien démiurge : entre autres, l’amour naissant entre Ferdinand et la fille de Prospero, Miranda.
Dans l’ouverture de concert Othello de 1892, Dvorak s’intéresse au développement tragique de l’amour : tendre, puis suspicieux enfin criminel, une métamorphose cynique qui pilote le cœur et l’esprit du Maure, capable car manipulé par Iago, de tuer jusqu’à sa propre épouse adorée, Desdemone…
Poète de la nature, et symphoniste exigeant, Sibelius compose une musique de scène pour la pièce La Tempête de Shakespeare, lors d’une représentation donnée en 1926. Contemporaine de son dernier poème symphonique Tapiola, la partition de La Tempête indique les derniers éléments de l’esthétique sibélienne : synthèse, épure, mystère… où harpes et percussions dessinent en demi teintes, la figure énigmatique du créateur destructeur Prospero. Ici l’ombre et l’allusif supplantent toute autre forme musicale. Et si Prospero était Sibelius lui-même, mage et sorcier, pilotant l’orchestre jusqu’à l’inaudible et l’ineffable ?

Houlihan robert RHC1_SNul doute que le chef irlandais Robert HOULIHAN, d’une sensibilité filigranée, saura conduire les instrumentistes de l’Orchestre Symphonique Région Centre Val de Loire / Tours au delà des nuances et des accents habituels, répondant au raffinement de pages orchestrales parmi les plus suggestives et contrastées qui soient. Le genre du poème symphonique, de la Symphonie dramatique ou de l’ouverture comme de la Fantaisie pour orchestre exige de nouveaux défis qui devraient dans ce programme en particulier, enrichir encore l’expérience de l’orchestre, et susciter l’attention du public par de nouvelles colorations dans la texture orchestrale. Depuis 1989, Robert Houlihan enseigne pendant 2 semaines d’août, au sein de la Sherborne Summer School of Music, en Angleterre, aux côtés de George Hurst qui fut le professeur et le maître de Benjamin Pionnier, nouveau directeur général et artistique de l’Opéra de Tours.

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TOURS, Grand Théatre / Opéra
Concert SHAKESPEARE 2016
Samedi 10 décembre 2016 à 20h
Dimanche 11 décembre 2016 à 17h

1ère partie
Sir Arthur Sullivan : Macbeth, Overture
Hector Berlioz : Scène d’amour de Roméo et Juliette
Piotr Illitch Tchaikovsky : La Tempête, fantaisie symphonique
d’après Shakespeare – Op.18

2ème partie
Otto Nicolai : Les joyeuses commères de Windsor (Ouverture)
Anton Dvořak : Othello (Ouverture de concert) – Op.93
Jean Sibelius : La Tempête – Op.109 (extraits)

Orchestre Symphonique Région Centre / Val de Loire / Tours
Direction musicale : Robert HOULIHAN

Réservez votre place :
Téléphone réservations : 02 47 60 20 00
[email protected]
www.operadetours.fr

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LIRE aussi notre présentation des temps forts de la nouvelle saison 2016 – 2017 de l’Opéra de Tours

 

 

Illustrations : 2 portraits de William Shakespeare, Robert Houlihan (DR)

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