samedi 3 mai 2025

Festival de Simiane-la-Rotonde (04)Du 5 au 17 août 2007

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Simiane-la-Rotonde (04) ,
« voyages et cousinages musicaux »
Du 5 au 17 août 2007

Une Rotonde à l’acoustique parfaite dans un donjon du XIIe, un village perché de la Provence très intérieure, un 25e anniversaire pour un Festival exigeant qui relie musique médiévale et fastes baroques ; c’est Simiane la Rotonde en six concerts d’août.

Entre Giono et Char

Pour Simiane, on peut insister sur le milieu naturel : un village perché, en demi-montagne, mais une montagne à la provençale, calcinée par l’été ardent, desséchée par les vents brûlants ou glacés. Au sud-est, c’est le pays de Giono. A l’ouest et sud-ouest, par delà les monts de Vaucluse, celui de René Char : « La beauté naît du dialogue, de la rupture du silence et du regain de ce silence. La durée que ton cœur réclame existe ici en dehors de toi. La nuit et la chaleur, le ciel et la verdure se rendent invisibles pour être mieux sentis. » Plus touristiquement, on rappellera que tout près se tient « le Colorado de Rustel », au nom idéal pour tourner quelque « eastern ». On dira aussi « le pays bleu de lavandes », la « capitale des huiles essentielles », là où se donne sans entracte « une symphonie d’odeurs ». Le site est exceptionnel, et l’intérêt de la visite est constamment renouvelé, au gré des rues tournoyantes :l’église Sainte-Victoire, la place couverte aux Vieilles Halles, le Clocher Saint-Jean (tout un ensemble Renaissance, début classicisme), auquel il faut ajouter les hôtels particuliers des notables de cette époque. Parmi les chirurgiens, verriers et gens de robe, on rencontre les fantômes d’une famille Ponson, qui d’une solide position notariale fera au romantisme populaire don d’un certain du Terrail. Ponson du Terrail, c’est l’écrivain qui pouvait écrire cinq romans en même temps, qui fut le père de Rocambole, et n’était pas trop regardant côté continuité du récit ni stylistique, ne cite-t-on pas en emblème du négligé cette formule mal relue : « Sa main était froide comme celle d’un serpent » ? Le saint patron d’un journalisme hâtif dont il est évident que classiquenews le fuit comme la peste, mais enfin on ne sait jamais, n’hésitez pas à nous alerter ponctuellement, chers lecteurs…

Voyages d’Olympe en Enfer

Et puis il y a la Rotonde, donjon et cœur architectural du château des Agoult, seigneurs de Simiane) : « un joyau de l’art roman, une salle sous coupole à l’admirable pureté de lignes et de réfraction sonore» (XIIe), qui abrite depuis un quart de siècle un festival d’août aux programmes choisis en accord avec la rareté harmonieuse du lieu, et regroupés en une thématique significative. Pour le 25e anniversaire, « la manifestation locale, pluridisciplinaire et bien modeste en ses débuts, qui s’est imposée comme un des événements culturels de la région provençale » se met sous le signe « des voyages et cousinages musicaux ». Et pour commencer, l’itinérance mythologique là où il n’existe pas de réservations ou d’assurances : « de l’une à l’autre rive » (et de l’Olympe aux Enfers). Le Concerto Soave vous y mène, un groupe spécialisé dans la musique italienne du XVIIe, dont le directeur artistique Jean-Marc Aymes, cofondateur de la Fenice avec Jean Tubéry, a travaillé depuis l’origine avec la chanteuse Maria Cristina Kiehr, elle-même tournée vers cette musique italienne et celle de l’âge d’or espagnol (La Colombina, son quatuor vocal). Cavalli, Domenico Gabrieli, Frescobaldi, Caccini, le rare et subtil Sigismondo d’India, Rossi ou Cesti jalonnent ce chemin périlleux où l’on rencontre Euridice, Orfeo, Proserpine (l’épouse du taulier des enfers -pardon pour cette formule trop familière – , Pluton, alias Hadès) ou Dafne (qui fut changée en laurier par Apollon furieux de sa résistance à la séduction)…

Merveilles de Marco Polo

Voyage historique encore que merveilleux, avec le Trio des percussions de Jacqui Detraz, le sitar de Ashok Pathak et la parole d’Alain Carré, un comédien qui se met en scène pour explorer la découverte « du Levant de la terre » à partir du « Devisement du monde », autrement exprimé le Livre qui fit rêver de l’Italien Marco Polo à la fin du XIIIe. Ici, non chronologique, mais géographique dans le récit : Moyen-Orient, Chine, Inde, et retour à la case vénitienne du départ…De Venise justement, l’ensemble Vallotti (des Lyonnais – de terre natale ou d’études musicales – réunis depuis 2004 autour du flûtiste Matthieu Bertaud) vous adresse avec clin d’œil ses « bons baisers de la Sérénissime », sur cartes de correspondance et vedute sonores dues à Giovanni Gabrieli, Dario Castello, Antonio Caldara, Barbara Strozzi et bien sûr Antonio Vivaldi. Et on retrouve – qui itinère beaucoup cet été – le Baroque Nomade (Jean-Christophe Frisch, la soprano Cyrille Gerstenhaber) dans les « carnets d’un gentilhomme romain », ce Pietro Della Valle qui fit retour (XVIIe) de ses aventureux voyages en son palais italien, « désormais entouré de musiciens et d’instruments orientaux, d’une femme géorgienne et des nostalgies échappées des Mille et une Nuits » : c’est à travers Schütz, Purcell, mais encore Barbara Strozzi (deux fois nommée), Charles Tessier (chansons turquesques), Lezgui (pièces persanes) ou Hassan Skaf (Semaai), tout de même moins connus de vous, chers mélomanes…Vous goûterez aux douceurs « calissonnes » proposées par quatre musiciennes baroques ayant choisi ce titre de patisserie provençale pour symboliser leur rencontre à Aix autour de la piano-fortiste et claveciniste Russe Natalia Cherachova : les bons baisers de Russie sont cette fois envoyés par la Grande Catherine qui à la fin du XVIIIe fit succéder un courant musical « national » à la domination musicale des Italiens. Donc autour de Mozart, les compositeurs Maxim Berezovski et Dmitri Bortnianski (celui-ci un peu moins mal connu en Europe d’ouest à cause de ses œuvres religieuses). Enfin, on écoutera avec la ferveur que mérite un 300e anniversaire la musique du grand Européen-du-nord-ouest Dietrich Buxtehude par le Caecilia Concert, quatre instrumentistes néerlandais rassemblés depuis 2001.

Dimanche 5, mardi 7, jeudi 9, dimanche 12, mardi 14, vendredi 17 août 2007, à 21h. Informations et réservations : t. 04 92 75 90 ou www.festival-simiane.com

Crédit photographique
Jean-Christophe Frisch (DR)

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