Saint-Etienne, Opéra
Vendredi 22 octobre 2010 à 20h
Massimo Botter
And at the end… the scream!
Michaël Jarrel
Mais les images restent pour pinao seul
Harisson Birtwistle
Secret Theatre pour ensemble
Edison Denisov
Symphonie de chambre n°2 pour ensemble
Raffinement sonore de Denisov, mouvements et spatialisation requis pour Secret Theatre de Birtwistle…, hautbois en phase critique pour And at the end, the… Scream de Botter… le concert de l’EOC Ensemble Orchestral Contemporain , premier volet de sa nouvelle implantation à l’Opéra de Saint-Etienne, ne manque pas d’attraits. Son éclectisme recèle plusieurs joyaux de la musique contemporaine qui sont au coeur de la démarche et du répertoire de l’orchestre fondé et dirigé par l’excellent Daniel Kawka, toujours aussi passionné que convaincant dans la défense des oeuvres modernes et contemporaines. L’élément clé en est assurément la Symphonie n°2 d’Edison Denisov…
Massimo Botter: And at the end…the scream ! (2007). Oeuvre courte (13 mn), pour hautbois solo, flûte, 2 clarinettes, basson, cor, trompette, trombone, percussion, 2 violons, alto, violoncelle et contrebasse, And at the end… est une partition qui a mis son temps pour se préciser dans l’esprit de Massimo Botter (9 mois): 9 mouvements regroupés en 3 mouvements racontent la solitude initiale du hautbois, écarté par les autres instruments; son abdication bercée par le collectif auquel il était opposé (série de variations très douces); enfin, le retour de l’instrument soliste comme revigoré, prêt à en découdre pour amorcer une nouvelle vie (final en forme d’explosion de joie).
Michaël Jarrell : Mais les images restent (2003). Pour piano solo (15mn). …mais les images restent…est tiré du concerto pour piano Abschied créé au festival de Salzbourg en août 2001.
Ce concerto de Jarell demeure lié à la mort du père du compositeur qui s’est éteint pendant son écriture. Dans la mémoire du musicien restent les images de son père… d’où le titre de la pièce. Michael Jarrell qui n’aimait pas écrire pour le clavier avoue avoir forcé sa nature pour répondre à l’amitié du pianiste dédicataire Marino Formenti
Harisson Birtwistle : Secret Theatre. Pour flûte, hautbois, clarinette, basson, cor, trompette, trombone, percussion, piano, 2 violons, alto, violoncelle et contrebasse. Secret Theatre écrit et créé en 1984 (octobre) l’année des 50 ans du compositeur, interroge l’alliance théâtre-musique. Le dramatisme de la pièce qui dure presque une demi heure, met en scène les instruments comme s’il s’agissait d’acteurs sur une scène d’opéra (indications vocales sur la partition du type Colla voce)… A la suite de Haendel, Birtwistle cite aussi l’effectif concertant du Concerto Grosso baroque (XVIIIè) alternant petit groupe de solistes et reste du collectif: soit le concertino et le ripieno.
Mais le compositeur varie encore ses effets opératiques car la composition du Concertino évolue en cours de jeu. D’abord Cantus distribué à l’unique flûte puis rejointe par les vents… L’action se déplace ainsi entre les groupes d’instruments.
Le titre de l’œuvre est tiré du poème Secret Theatre de Robert Graves.
When from your sleepy mind the day’s burden
Falls like a bushel sack on a barn floor
Be prepared for music, for naturel mirages
And for night’s incomparable parade of colour.
It is hours past midnight now : a flute signals
Far off : we mount the stage as though at random,
Boldly ring down the certain, then dance out our love.
Edison Denisov : Symphonie de chambre n°2 (1994, 20 min). Pour flûte, hautbois, clarinette, basson, cor, trompette, trombone, percussion, piano, harpe, 2 violons, alto, violoncelle et contrebasse. Créée à Tokyo, en juillet 1994, soit 2 semaines après l’achèvement de la sa composition, la Symphonie de chambre n°2 de Denisov est étroitement liée à la catastrophe qui devait emporter le compositeur: un terrible accident affecta Edison Denisov qui se rendait à la répétition de l’oeuvre. Il devait s’éteindre 2 ans plus tard en novembre 1996. Voici la 3è et dernière manière de Denisov dont la profondeur et la concision de l’écriture retrouve les meilleures compositions de Prokofiev et de Chostakovitch.
Edison Denisov. Biographie: Compositeur de l’avant garde russe mort à Paris en 1996, où il vivait depuis 1994, Edison Denisov est né en 1929 à Tomsk (Sibérie). Elève en mathématiques et physique mais aussi, simultanément, en classe de composition, il reçoit très tôt les encouragements de Chostakovitch et rejoint naturellement le Conservatoire de Moscou.
De 1951 à 1956 il travaille la compositon avec Chébaline, l’orchestration avec Rakov, le piano avec Belov, l’analyse musicale avec Zuckerman et découvre les œuvres de la Nouvelle Ecole Viennoise, tout en s’intéressant aux traditions folkloriques sibériennes.
En 1959, il est nommé professeur au Conservatoire. Denisov fait alors partie du groupe des nouveaux compositeurs dit avant-gardistes et évidemment rejeté par le régime soviétique, qui réunit entre autres Volkonski, Schnittke, Karetnikov, Goubaïdoulina, Silvestrov. En dépit du silence auquel les autorités aimeraient confiné l’oeuvre de Denisov, quelques unes de ses partitions maîtresses sont jouées (
Le Soleil des Incas, pour voix et ensemble instrumental par Guennadi Rojdestvenski en 1964 à Léningrad). Mais très vite, la reconnaissance du génie musical de Denisov dépasse les frontières natales et Pierre Boulez sera un soutien fidèle pour le confrère russe qu’il invitera à l’Ircam… le français joue dès 1965 au Domaine Musical,
Le Soleil des Incas.
Postsériel mais aussi postromantique, Denisov ne cesse d’enrichir son vocabulaire, jusqu’au milieu des années 1980 qui marquent le sommet de sa maturité stylistique.
Le Requiem mais aussi l’opéra d’après Boris Vian
L’Ecume des jours, en français, (Opéra-Comique, 1986), ou
Quatre jeunes fille d’après la pièce de Picasso (Moscou, 1990), en témoignent.
L’amateur et le connaisseur de poètes français de Baudelaire à Vian (qu’il met donc en musique), qui parlait aussi parfaitement le français, fonde en 1990, une nouvelle association de musique à Moscou afin de réaffirmer la vitalité des auteurs contemporains en matière musicale. Denisov réalise l’orchestration de l’opéra inachevé de Debussy Rodrigue et Chimène.