mardi 29 avril 2025

CRITIQUE, opéra. LYON, opéra national, le 18 mars 2025. BATTISTELLI : 7 minutes. N. Petrinsky, N. Beller-Carbone, J. Daviet… Pauline Bayle/ Miguel Perez Inesta.

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André Peyrègne
André Peyrègne
André PEYREGNE est Président d’honneur de la Fédération Française d’Enseignement Artistique, Chroniqueur en Histoire et Musique de Nice-Matin, Collaborateur de Radio France et France Télévision et Ecrivain (son dernier livre paru : « Petites histoires de la grande musique » / Editions Desclée de Brouwer)

Que vont décider les 11 ouvrières à qui leur patron propose de renoncer à leur pause quotidienne de 7 minutes pour sauver leur usine ? Cette angoissante question est le sujet de l’opéra précisément intitulé « 7 minutes » de Giorgio Battistelli – qui est donné à l’Opéra Lyon comme 3ème ouvrage dans le cadre de son Festival de Printemps (aux côtés de La Forza del destino et de L’Avenir nous le dira de Diana Soh). Comme si on était dans un exercice de télé-réalité, le compositeur a voulu mettre en musique les échanges verbaux « réels » entre les onze femmes en colère. Mais l’exercice est difficile. En effet, le débit du chant n’est pas aussi rapide que celui de la parole. Les dialogues n’ont pas la vigueur attendue. Ils ne nous accrochent pas. Ce n’est que vers la fin que le spectacle acquiert une certaine intensité. Et cela permet finalement de soulever les applaudissements.  

 

L’histoire de ces « 7 minutes » est inspirée de celle, réelle, de la révolte des employées de l’entreprise Lejaby à Yssingeaux en 2012. On se souvient des larmes de leur déléguée au journal de 20 heures de France 2. L’histoire a été transposée sur scène par un auteur de théâtre, Stefano Massini. De là s’en est suivi l’opéra de Giorgio Battistelli. Mais la différence entre le théâtre et l’opéra c’est que, dans le premier cas, on peut reproduire avec exactitude le dialogue parlé. Pas dans le second. Le compositeur a eu beau utiliser des mélodies hachées, avec des changements brusques d’intervalles, on ne perçoit pas vraiment la violence des débats, des insultes, des invectives. Dans l’expression musicale, il ne fait pas de différence entre une phrase banale comme « Donnes moi une cigarette » et une exclamation angoissée comme « Ils vont toutes nous virer ! »  

Les chanteuses font leur maximum pour défendre leurs personnages, en particulier l’interprète du rôle de Mireille, Jenny Daviet, qui nous est apparue la plus combative du groupe. Notre admiration va aussi à Natascha Petrinsky qui, chantant quasiment en permanence, incarne Blanche, la déléguée du personnel. Elle appuie ses arguments sur de beaux sons graves. Vive comme un feu follet, la benjamine du groupe, Elisabeth Boudreault (Sophie), fait briller l’éclat de sa jeunesse par son soprano colorature. Annoncée souffrante, Shaked Bar a néanmoins parfaitement assuré son rôle de Rachel. Giulia Scopelliti, vêtue d’une robe de cocktail, au milieu de ses camarades en pantalon, incarne une Agnieszka touchante, terrorisée par l’idée de perdre son emploi. Anne-Marie Stanley impose dans son solo du III son personnage de Mahtab. (« Mon sentiment c’est que vous, vous commencez à connaître la peur... »). Cette belle distribution est complétée par Sophia Burgos, Eva Langeland Gjerde, Jenny Anne Floryn et Lara Lagni. 

Tout cela est bien mis en scène par Pauline Bayle, dans un décor unique qui est un coin  d’usine, tandis que Miguel Pérez Iñesta dirige efficacement l’orchestre – ainsi que le Chœur de l’Opéra national de Lyon… mais là, pas de problème, le choeur a été enregistré et est diffusé par bande !

A la fin, dans l’histoire, les votes pour la reprise du travail étant équilibrés, tout dépend de la dernière votante, Odette, laquelle est efficacement interprétée par Nicola Beller Carbone. Le suspens est à son comble. Si elle vote oui, l’usine reste ouverte, si elle vote non, elle ferme. Que va-t-il se passer ? Le rideau tombe… Deux heures se sont écoulées. Ces « 7 minutes » ont, en effet, duré deux heures… 

 

 

 

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CRITIQUE, opéra. LYON, opéra national, le 18 mars 2025. BATTISTELLI : 7 minutes. N. Petrinsky, N. Beller-Carbone, J. Daviet… Pauline Bayle/ Miguel Perez Inesta. Crédit photo © Jean-Louis Fernandez
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