Parmi les arguments de poids de cette intégrale incontournable pour l’année 2025 (les 150 ans de Maurice Ravel), plusieurs artistes labellisés DG / DECCA dont la subtilité et les affinités évidentes avec Ravel font mouche : évidemment Martha Argerich (Concerto en sol sous la direction de Claudio Abbado, les Valses nobles et sentimentales pour piano seul) ; comme le Gaspard de la nuit d’Ivo Pogorelich ne manque pas d’attraits ; autres pianistes majeurs sollicités ici : Pierre-Laurent Aimard (Miroirs), Jean-Yves Thibaudet (tout le CD 1 : de Sérénade grostesque et Menuet antique … à la Sonatine et au Tombeau de Couperin).
Côté musique de chambre, on ne se lasse pas du Trio par le Beaux Arts Trio dont le clavier exquis de Menahem Pressler… Le grand symphonisme de Ravel s’invite aussi avec classe et intensité ; il est défendu avec cette tenue claire et lumineuse par le chef Charles Dutoit et « son » Orchestre Symphonique de Montréal (Daphnis et Chloé, La valse, CD 9 ; Boléro, Alborada del gracioso, Ma mère l’Oye au menu du CD 11).
Distinguons aussi le dramatisme incisif de l’Enfant et les sortilèges par une distribution idéale (Françoise Ogéas,l’enfant / Jeanine Collard, Maman et une tasse chinoise), Michel Sénéchal, Jane Berbié… sous la baguette du très élégant et précis Lorin Maazel (avec les choeurs, la Maîtrise et l’Orchestre national de la RTF / CD 12) : la cohérence de la réalisation ciselée dans sa forme, proche du texte aussi rend la lecture indiscutable. Même enthousiasme pour L’Heure Espagnole par le même chef et le même orchestre et une distribution qui a marqué l’âge d’or du chant français dans l’opéra français : Jane Berbié (Concepcion), Gabriel Bacquier (Ramiro), José van Dam (Inigo), Michel Sénéchal (Gonzalve) : CD 13.
Complément remarquable, le CD 14 s’impose en particulier car il dévoile de façon magistrale la passion dramatique du jeune Ravel, doué d’un immense sens théâtral couplé à une orchestration des plus raffinées (fusionnant Wagner, Frank, Dukas, Massenet…). Sa contribution au Prix de Rome est d’un immense apport, hélas inversement apprécié par le jury de l’Institution Académique française, bien peu ouverte aux tempérament trop originaux. Preuve en est faite encore ici, : le cas Ravel souligne l’indigence artistique de l’Institution parisienne et le plus grand scandale de son histoire… L’écoute des 3 cantates abordées s’avère très féconde. L’évocation éthérée et magicienne d’Alyssa (Véronique Gens) suscite le plein amour foudroyé de l’excellent ténor Yann Beuron (Braïzil) ; puis c’est la sensualité océane d’Alcyone (très impliquée Mireille Delunsch) aux mélismes mélodiques ensorcelés qui convoque aussi une très belle partie pour ténor (Paul groves en Cévyx) ; d’une couleur plus tragique encore, Myrrha, évoque la figure de Sardanapale (superbe rôle pour ténor, ici le même Paul Groves)…
Les 3 cantates romaines ainsi restituées n‘ont pas pris une ride tant l’intelligence dans la caractérisation et la justesse des solistes requis, associés à l’excellence de l’Orchestre du Capitole de Toulouse font mouche sous la direction détaillée et intense d’un ardent francophile et ravélien convaincu, Michel Plasson. Le coffret est un must absolu. D’autant plus avecson cahier livret de 184 pages présentant / commentant les enregistrements et les œuvres regroupés dans cette intégrale. CLIC de CLASSIQUENEWS printemps 2025
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CRITIQUE, CD coffret événement. Ravel: The Complete Edition (14 cd Decca classics). Plus d’infos sur le site de l’éditeur DECCA classics : https://store.deccaclassics.com/products/ravel-the-complete-edition?srsltid=AfmBOoqamN7ETL2iJoxwp-hYlf8jmzs-V2WCnrs440JO3IGvfkqqDhU5
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