dimanche 4 mai 2025

Compte-rendu critique, Opéra. Bolshoï de Minsk, le 15 mai 2018. Tchaïkovski : Eugène Onéguine. Valery Shishov / Oleg Lesun

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Emmanuel Andrieu
Emmanuel Andrieu
Après des études d’histoire de l’art et d’archéologie à l’université de Montpellier, Emmanuel Andrieu a notamment dirigé la boutique Harmonia Mundi dans cette même ville. Aujourd’hui, il collabore avec différents sites internet consacrés à la musique classique, la danse et l’opéra - mais essentiellement avec ClassiqueNews.com dont il est le rédacteur en chef.

Compte-rendu critique, Opéra. Bolshoï de Minsk, le 15 mai 2018. Tchaïkovski : Eugène Onéguine. Valery Shishov / Oleg Lesun. C’est au Bolshoï de Minsk, capitale de la méconnue Biélorussie, que nos pas de baroudeur lyrique nous ont cette fois menés, et pas pour n’importe quel opéra, mais pour l’un des fleurons de l’opéra russe : Eugène Onéguine. Las, cette production – signée par Valery Shishov et qui accuse ses trente années d’existence (1986) – nous laissera sur notre faim à plus d’un titre : du théâtre sans théâtre, où règnent les toiles peintes poussiéreuses, les décors de carton-pâte… ou de lourdes tentures qui en font office.

 

 

 

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Tout est par ailleurs littéral et sans imagination, et tout se passe dans le lieu et dans le temps prévu par le livret. Reprise ici par Alexander Prokhorenko, la production paraît oublier ce que « direction d’acteurs » veut dire, et aucun des personnages n’est pourvu de la moindre caractérisation, chacun d’entre eux ne faisant qu’être présent en scène au moment de chanter, avec le strict minimum de déplacement et d’expressions.
Les chanteurs réunis pour cet Onéguine font tous partie de la troupe de la maison biélorusse, certains depuis longtemps, trop peut-être… Il en est ainsi de la Madame Larina de Natalia Akinina et de la Filipievna de Marina Aksentseva, dont l’heure de gloire semble passée, avec des voix désormais entachées par un trop large vibrato. La Tatiana de Elena Bundeleva ne soulève guère plus d’enthousiasme à cause d’une voix serrée, et d’aigus assez acides. Une magnifique gamme de nuances éclate, en revanche, chez Denis Yantsevich, un Onéguine à la voix royale, large et égale, qui tempère son ennui de vivre par une humanité très touchante dans sa première relation avec Tatiana. Le Lenski de Alexander Mikhnuyk est digne des meilleurs : sa voix de ténor, typiquement russe dans son timbre et son mordant, et brillante dans les aigus, vous arrache des larmes dans le fameux air du duel « Kuda, kuda… ». Oleg Melnikov confère sa haute stature et ses graves insondables au Prince Grémine, tandis que Criscentia Stasenko chante Olga avec les moyens adéquats. Enfin, à rebours du livret qui veut que Monsieur Triquet chante sa chanson en français, c’est en russe que Yanosh Nelepa la délivre ici, avec une voix malheureuseument nasillarde et fatiguée.
A la tête de l’Orchestre du Bolshoï de Minsk, dont la bonne tenue n’est pas  à mettre en cause, le chef Oleg Lesun dissèque la partition de Tchaïkovski avec une retenue excessive, et au mépris d’une flamboyance romantique qui en est pourtant l’âme. On espère revenir pour donner une seconde chance à ce théâtre par ailleurs attachant…

 

 

 

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Compte-rendu critique, Opéra. Bolshoï de Minsk, le 15 mai 2018. Piotr Illitch Tchaïkovski : Eugène Onéguine. Valery Shishov, direction. Oleg Lesun, mise en scène.

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