vendredi 29 mars 2024

CD, compte-rendu critique. RACHMANINOV, SCRIABINE… Jean-Paul Gasparian (1 cd Evidence classics)

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Cover-EVCD048-Jean-Paul-Gasparian-1024x1024CD, compte-rendu critique. RACHMANINOV, SCRIABINE… Jean-Paul Gasparian (1 cd Evidence classics). Aimez-vous Rachmaninov? Si vous n’en êtes pas encore certain, écoutez ce CD. Le jeune pianiste Jean-Paul Gasparian aura tôt fait de vous convaincre.
Jean-Paul Gasparian a seulement 22 ans, et son nom se détache déjà dans la sphère ô combien élevée aujourd’hui des jeunes pianistes de sa génération. Son premier disque est un coup de maître et ce mot n’est pas trop fort. Consacré à Rachmaninov, Scriabine et Prokofiev, un répertoire qu’il joue depuis « longtemps », il offre une très belle cohérence tout en mettant en valeur les identités respectives des trois compositeurs. On conçoit immédiatement à son écoute qu’il ne s’agit pas là d’une tentation, d’une envie de démontrer, mais bien de réelles affinités du pianiste avec la musique russe. Le choix et l’enchaînement des œuvres sont admirablement pensés, et l’on est sidéré par la maturité avec laquelle le jeune homme aborde ce répertoire.

 

 

 

Jean-Paul Gasparian joue Rachmaninov, Scriabine…

COUP DE MAÎTRE

 

 

 

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Tout y est maîtrisé: la technique est sûre, le style impeccable, élégant, l’expression et les timbres caractérisés dans tous les registres. Gasparian réussit cet équilibre qui fait défaut à certains interprètes de Rachmaninov, versant pour les uns dans l’épanchement, et pour les autres dans le détachement … trop objectif. Chez lui, ni épanchement ni détachement. Il concilie une lecture claire de son écriture polyphonique, une construction soigneusement définie, avec un art du chant constamment présent, la rondeur d’un toucher qui n’est jamais sec, magnifié par une prise de son dont on salue au passage la qualité et l’intelligence, et enfin avec un sens et une volonté esthétique remarqués au concert qu’il confirme au disque.

L’artiste nous fait entrer dans l’univers complexe, dense, des déclinaisons sombres de l’opus 39, de ses nuances du gris au noir, de ses bouillonnements, ses fulgurances (première étude), de sa pudique mélancolie (seconde étude). Des cloches éperdues tintent à toute volée (troisième étude) et font resplendir les coupoles dorées de Moscou, l’émotion tenue mais pas contenue de la submergeante cinquième étude précède une sixième étude où les doigts du pianiste dessinent avec mordant et frénésie, une danse démoniaque. D’indéfinissables pensées voguent dans le ciel changeant de la huitième étude. Gasparian, en peintre du clavier, nourri de culture russe au sens large, donne sans conteste à ces pièces leur dimension de « tableaux », parfois oubliée par d’autres au profit du vernis technique.

La Sonate de Scriabine aux deux mouvements si contrastés est superbe de poésie comme de délicatesse (premier mouvement), comme de souffle lyrique (deuxième mouvement). Encore d’esprit romantique, elle s’articule avec la modernité des études opus 65 admirablement servies par un sens de la sonorité et de leurs couleurs si particulières, aussi abouti que celui du mouvement dynamique. La sonate de Prokofiev, qui s’enchaîne naturellement, pêcherait presque par trop d’esthétisme, trop belle pour lui! Peut-être, et ce n’est qu’une toute petite réserve, par endroits pourrait-on la souhaiter un peu plus râpeuse, un peu plus insolente, même si le pianiste nous démontre que le compositeur excelle dans l’art de la mélodie (premier mouvement), et si l’esprit du jeu est là (2ème mouvement) comme la vivacité facétieuse (dernier mouvement).

Saluons l’ensemble du programme et la personnalité de cet interprète au talent à suivre absolument, qui nous offre, pour ce qui est de Rachmaninov, une version passionnante, heureuse alternative à la fascinante radicalité moderniste d’Ovchinikov, et au flamboyant et subjuguant pianisme de Lugansky.

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CLIC D'OR macaron 200CD, compte-rendu critique. RACHMANINOV, SCRIABINE… Jean-Paul Gasparian, piano (1 cd Evidence classics). Rachmaninov : Études-tableaux opus 39. Scriabine : Sonate n°2 opus 19 et trois études opus 65. Prokofiev : Sonate n°2 opus 14. Jean-Paul Gasparian, piano (1 cd Evidence classics).

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