CD, coffret. Compte rendu critique : Elisabeth Schwarzkopf : The complete recitals 1952-1974. 31 cd Warner classics. Timbre affûté comme un diamant, sens inouï de la nuance vocale qui en fait une immense diseuse chez Schubert, Schumann, Wolf, la soprano polonaise née en 1915 qui demanda sa carte du parti nazi, Elisabeth Schwarzkopf (1915-2006) décolle véritablement au lendemain de la guerre après son procès en dénazification soit à l’automne 1946. C’est alors que la mozartienne (divine Elvira dans Don Giovanni en 1947 à Vienne) fait une trentenaire aux aigus rayonnants, à la diction précise et fluide, d’une sophistication ultime, ciselée comme un instrument à vent. Le coffret édité par Warner classics et qui regroupe tous ces récitals avec piano et orchestre, qui comprend aussi sur un seul disque, plusieurs extraits d’un même opéra (dont Troilus and Cressida de Walton sous la direction du compositeur en mai 1955), affirme à travers ces 31 cd, une distinction royale, artificielle et hautaine pour ses détracteurs ; millimétrée, subtile, idéale pour ses admirateurs. Voici « La Schwarzkopf » dans ses récitals intimistes ou orchestraux, de 1952 à 1974, soit jusqu’à presque 60 ans, preuve que l’intelligence de l’interprète a su affirmer en plus de la qualité de la voix, par une gestion de carrière et des prises de rôles réfléchies, une longévité légendaire.
Pour son centenaire en 2015, Warner réédite tous les récitals de la diva mozartienne
Elisabeth Schwarzkopf, diseuse, straussienne et mozartienne
Ses compositeurs d’élection sont présents, et bien défendus : Mozart et Richard Strauss, Schubert, Schumann, Wolf, Brahms et aussi l’opérette viennoise où son style précieux (minaudant diraient les moins bien pensants) fait miracle. A plusieurs reprises, grâce à cette intégrale des récitals, l’entente et la complicité avec ses pianistes favoris (Gerald Moore, Geoffrey Parsons principalement) se réalisent pour l’éternité. Voix pure et cristalline, parfaitement canalisée jusque dans les moindres détails, Schwarzkopf la pointilliste et la miniaturiste, cherche et capte le détail, distille une leçon de chant maîtrisé, taillé comme les faces d’un diamant. Pour son centenaire, la diva de langue germanique méritait bien au moment des fêtes de la fin 2015, ce somptueux cycle où la perfection de l’intonation le dispute à l’éclat de l’intelligibilité. Parmi les perles du coffret : mentionnons les indémodables versions (deux) des Quatre derniers lieder de Richard Strauss (Ackermann en 1953, puis Szell de septembre 1965, ce dernier à pleurer autant grâce au legato de la soliste que celui de l’orchestre avec des phrasés parfaits des deux côtés) : les scènes d’Arabella sous la direction de Lovro von Matacic (mono remastérisé comme tous les monos de la présente compilation, d’octobre 1954) ; le récital à deux voix avec la soprano sa consoeur Irmgard Seefried (comprenant des inédits baroques dont Monteverdi, Carissimi et Dvorak, de mai 1955); les 3 volumes de son intégrale dédiée à Hugo Wolf (1957, 1959, 1962) ; et puis pour entendre l’expérience de la dernière diva, celle de 1974 : le récital dédiée à Schumann, d’une noblesse intérieure à la pureté intacte (Frauenliebe und leben opus 42 et Liederkreis opus 39, avec Geoffrey Parsons, enregistré à Berlin en avril 1974). Enfin, rien ne peut effacer de la mémoire à celui et celle qui l’a écoutée dans Mozart, l’inépuisable source et ce baume pour le chanteur, son sublime récital consacrée aux mélodies du divin Wolfgang dont elle exprime l’innocence désarmante et bouleversante (dont deux mélodies en français : Oiseaux, si tous les ans.. et Dans un bois solitaire..., avec Walter Gieseking, Abbey Road, avril 1955) : 60 ans après sa réalisation, le récital dans sa totalité demeure un classique indémodable d’une probité artistique exemplaire. Diva assoluta, la quintessence d’un timbre d’une sophistication poétique inégalée.
CD, coffret. Compte rendu critique : Elisabeth Schwarzkopf : The complete recitals 1952-1974. 31 cd Warner classics 0825646026050. CLIC de classiquenews de décembre 2015