Bruno Mantovani: création d’Akhmatova à l’Opéra Bastille
L’opéra en trois actes suit les événements historiques, traversant l’histoire de l’Union Soviétique dans ce qu’elle eut de plus inhumain: sous la terreur stalinienne (I), pendant la deuxième guerre mondiale quand la poétesse est déportée à Tashkent, enfin à l’époque de la mort de Staline en 1953 puis au delà (III)…
Akhmatova est une âme silencieuse, inquiétée, voire menacée… Qui résiste à sa façon dans l’ombre, à l’écart de toute action tapageuse… Où le poids et la force du verbe car elle est poète, engagent et portent l’intégrité de l’esprit. Si Akhmatova semble ne pas souffrir ni agir, elle préserve avant tout l’acuité d’une conscience qui n’oublie pas. Son premier mari Goumilev, fusillé en 1921… l’arrestation répétée de son propre fils, Lev… qui lui reproche assez de ne rien faire pour lui… obscurcissent un tableau marqué par la tragédie. Akhmatova est une femme incapable d’ assumer la barbarie ordinaire de la vie. C’est pourquoi figure centrale de l’opéra, le chant de la mezzo fait basculer l’ouvrage dans une action intérieure et plutôt psychologique, où la complicité de l’écrivain Lydie Tchoukovskaia qui est une sorte de double et de confidente, prend une importance croissante: elle dévoile la poétesse à sa propre blessure…imposant peu à peu la force d’un combat dans le silence, pleinement assumé et reconstruit dans sa propre création poétique.
Sur la scène, les portraits que le peintre Modigliani réalisa à Paris pendant le séjour d’Akhmatova se multiplient aux murs, de part et d’autres de la scène comme autant de facettes d’un miroir brisé qui au fur et à mesure de l’action se recompose pour ne former qu’un seul, le plus essentiel. Production événement.

Bruno Mantovani
Akhmatova
création mondiale
Paris, Opéra Bastille
Du 28 mars au 13 avril 2011
Pascal Rophé, direction
Nicolas Joel, mise en scène