lundi 5 mai 2025

Biennale des Voix du Prieuré, Bourget du Lac (73). Du 1er au 12 juin 2007

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Biennale des
Voix du Prieuré du Lac


Du 1er au 12 juin 2007

Une Biennale de musique vocale sacrée a de nouveau lieu cette année au
Prieuré et à l’église du Bourget du Lac. Bernard Tétu rassemble ses
Solistes de Lyon, Résonance contemporaine, l’ensemble Gilles Binchois
et des groupes régionaux pour des manifestations qui varient le thème
des voix du sacré, notamment à travers la création contemporaine (9
compositeurs d’aujourd’hui). Concerts et répétitions publiques : vendredi 1er, samedi 2, dimanche 3 ; puis tous les jours du 6 au 12 ; concerts mardi 5, jeudi 7, samedi 9, mardi 12 juin 2007.

La dignité d’être homme

« Cette manifestation biennale a pour objectif de faire découvrir au plus grand nombre la musique vocale contemporaine notamment dans son rapport au sacré », dit la déclaration d’intentions des Voix du Prieuré. Mais que nous dit le sacré, dans ses définitions du dictionnaire et dans ce que nous en éprouvons ? On ne s’avance pas trop en énonçant son appartenance à une plus haute dimension de l’esprit humain, sa présence frémissante aux barrières de l’organisation sociale et mentale. Ce en quoi et pourquoi l’humain « peut surmonter sa solitude et son errance au sein de l’univers », et en tout cas s’interroge sur le sens de la vie, les angoisses devant la perspective de la mort ? Séparé et circonscrit par les rites des religions, il ne saurait se réduire à celles-ci, qui pourtant le canalisent vers Dieu ou leurs dieux, par l’intermédiaire des délégués aux cultes que sont les prêtres. Et d’ailleurs, entre deux proclamations historiques de la mort de Dieu ou des dieux, il réapparaît sous une forme en quelque sorte laïque, et porte les valeurs de la dignité d’être homme…La musique demeure l’un des vecteurs privilégiés de cette dimension, et l’on constate même que dans les expressions récentes du sacré, elle est davantage écoutée, ou avec moins de défiance, peut-être parce qu’elle bénéficie de l’aura spirituelle et méditative des expériences antérieures.
En ce sens, Les Voix du Prieuré – ainsi appelées parce qu’elles ont élu domicile dans un territoire chrétien du Moyen-Age, devenu monument historique, au Bourget du Lac – « travaillent » sur une sensibilité ouverte et contemporaine, ce qui ne leur interdit justement pas le retour en arrière et en miroir, ni le recours « aux harmonies d’autres cultures ».

De Jesu meine Freude à Falling Star

La démarche est tout à fait à l’image de son conseiller artistique, Bernard Tétu, « patron » des Solistes Vocaux de Lyon et enseignant au Conservatoire Supérieur de Lyon, partisan déterminé des musiques d’aujourd’hui et multi-créateur de partitions. La Biennale elle-même est préparée et diffusée tout au long de l’année scolaire par des actions pédagogiques dans les écoles, les collèges, les chorales et ensembles vocaux de Savoie, ce qui se traduit aussi par des concerts. Les Vagues Vocales, réunion de chorales régionales créent des œuvres de 3 des 9 compositeurs inscrits au programme général. Les Chœurs amateurs en création » interviennent, de Scelsi à François Rossé et à des improvisations. Les deux groupes en résidence – Solistes de Lyon ; Résonance Contemporaine, d’Alain Goudard – sont rejoints pour la Biennale par l’ensemble Gilles Binchois, et ouvrent au public leurs répétitions. Dans cet état d’esprit, le concert d’ouverture dirigé par Bernard Tétu associe le motet « Jesu meine Freude » de J.S.Bach (Ensemble 20-21, Cyrille Colombier) au désormais classique-du-XXe, Ligeti, et à Philippe Hersant (« Chemins de Jerusalem »), qui rend aussi hommage dans Falling Star à l’un des compositeurs fétiches des Voix du Prieuré, Olivier Greif, dont la mort prématurée et le Requiem avaient ému la Biennale de 2005. Les Gilles Binchois mélangent la restitution de partitions médiévales et la messe « Laudes Deo », un contrepoint actuel du compositeur et interprète majeur des musiques anciennes, Dominique Vellard. Ainsi encore, Bernard Tétu dirige pour la clôture un « Cantique des cantiques », réunissant des extraits de la Selva Morale monteverdienne, les Domaines de Boulez et deux créations. Edith Canat de Chizy – la 1ère femme compositeur entrée au club sélect-masculin de l’Institut de France…- , élève d’Ivo Malec et de Maurice Ohana, « Victorieuse de la musique » en 2000 et Grand Prix SACEM en 2004, et Philippe Fénelon, multiplement lauréat de prix internationaux, ce qui ne l’empêche pas de se tourner « vers une extrême pureté de l’écriture et le dialogue avec le silence », sont les « orateurs » de ce concert.

Ecoute le bambou qui pleure

Avec « Résonance contemporaine », prière est adressée par titre au spectateur : « Ecoute le bambou qui pleure ». Ce bambou symbolise « la vie musicale d’un peuple du Pacifique Sud, les histoires , les mythes de création » : les musiciens Aré aré, Warousu et Namohani dialoguent, depuis l’Océan si lointain, avec 4 compositeurs européens, et avec l’ombre inspiratrice pour le Festival de Luciano Berio. Le Grec Alexandros Markeas, les Français Robert Pascal (entre autres enseignant au CNSM de Lyon),Karl Naegelen (lui-même encore « enseigné » dans cet établissement), et Jean-René Combes-Damien (sur les traces de Messiaen et Henri Dutilleux) sont les voix d’ici, en écho au bord du Lac. Car n’en parlez pas constamment mais pensez-y toujours, n’est-ce pas dans ce territoire qu’il y a 190 ans, injonction fut faite par Lamartine au Temps : « Suspends ton vol !…Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire, que tout ce qu’on entend…tout dise : ils ont aimé. » ? Et ne s’agissait-il pas des voix amoureuses du sacré ?

Œuvres de J.S.Bach ( 1685-1750) ; Giorgy Ligeti (1928-2006) ; Edith Canat de Chizy (née en 1950) ; Alexandros Markeas (1965) ; Karl Naegelen (1983) ; Philippe Fénelon (1952) ; Robert Pascal (1952) ; J.R.Combes-Damien (1957) ; Ludovic Thirvaudey (1980) ; Boris Clouteau (1971)… Tél.: 04 79 25 29 65 et www.bourgetdulac.com (rubrique: « événements »)

Crédits photographiques
Dominique Vellard, directeur musical de l’Ensemble Gilles Binchois (DR)
Luciano Berio (DR)

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