dimanche 27 avril 2025

Berlioz: les grotesques de la musique (Editions Symétrie Palazzetto Bru Zane)

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Jeune lecteur assidu de la Biographie Universelle de Michaud où il pouvait imaginer à loisir les vocations de Gluck, Haydn, Dalayrac, Berlioz cultive simultanément son goût littéraire et musical. Polémiste et critique affûté, le musicien avait le désir de ferrailler par la plume, celle d’un chroniqueur soucieux de vérité comme de discernement… contre les dilettanti parisiens qui n’aiment que le Théâtre-Italien, s’émeuvent d’une séquence de la Gazza ladra tout en méprisant une phrase de Mozart, de Gluck et de Spontini, Berlioz critique combat les postures sociales et mondaines, indifférentes aux valeurs de l’art, comme tous ceux qui se servent de la musique pour briller et se pavaner; d’une verve satirique assez exceptionnelle, maniant le verbe avec une vivacité tranchante, Berlioz « châtie les moeurs en riant ». Il rejoint ainsi la trempe d’un Weber qui lui aussi savait polir l’articulation comme le sens de la phrase… Rédacteur des journaux à la mode (La Quotidienne dont Michaud était rédacteur en chef; Le Corsaire, et surtout Le Journal des débats fondé par Bertin et clairement républicain, proche de Louis-Philippe…), Hector feuilletoniste se dévoile non sans esprit tout en relatant l’actualité musicale de son temps.
Ses papiers pour la Revue et Gazette musicale de Paris, lue par les professionnels, lui permet d’être davantage technique et musicologue argumenté et pertinent. C’est tout cela dont témoigne le recueil des articles regroupés ici et qui laisse à penser que Belrioz de son vivant eut plus de lecteurs que d’auditeurs convaincus.


Urbanité comique et critique du parisien Berlioz

Berlioz administre lui-même l’ensemble de ce corpus divers et toujours passionné; ayant fini ses Mémoires, il collecte une majorité d’articles destinés aux Débats et à la Gazette. C’est ainsi que sont nés en 1859, Les Grotesques de la musique. L’auteur à l’occasion de la réédition des feuilletons et articles, les reprend, les corrige même, les agence surtout selon leur impact comique. La verve, le culte du bon mot (parisianisme auquel Berlioz a cédé comme malgré lui…) s’expriment librement en une fantaisie habile et soucieuse de sa forme (Lamentations de Jérémie). Mais l’éloquence verbale introduit des papiers passionnants et personnels sur les oeuvres de l’époque, créations pour la plupart dont Berlioz en connaisseur et compositeur démantèle la mécanique indigne ou admirable (Le Médecin malgré lui de Gounod, Jaguarita l’indienne et La Magicienne de Halévy…). Ainsi démasqué par un brillant rhéteur, les personnalités ciblées deviennent des types propres au milieu parisien, ces exhibitionnistes ou Grotesques magnifiques dont Hector dessine le profil, et parfois célèbre avec sincérité l’indicible génie (Beethoven, Spontini…).

Bref, comme le précise le Prologue de la Revue en 1859:  » C’est sous une apparence frivole, une critique mordante des idées, des coutumes, des préjugés répandus aujourd’hui dans le monde musical de Paris, entremêlée d’anecdotes vraies, bien qu’à peine vraisemblables, qui font connaître les opinions étranges, les bouffonnes aberrations de goût du peuple des amateurs. » On ne saurait mieux souligner la richesse du style de Berlioz, feuilletoniste et critique avisé.

Hector Berlioz: Les Grotesques de la musique. Préface de Gérard Condé. ISBN: 978 2 914373 77 7. 252 pages. Editions Symétrie Palazzetto Bru Zane.

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