ARTE. Jeudi 12 juillet 2018, 22h : PURCELL : Didon et Enée, direct. Purcell, génie du baroque britannique, dit aussi l’Orpheus Britannicus ne cesse de captiver grâce en particulier au petit opéra qu’il a composé entre 1684 et 1689 : soit 5 années inscrites dans la dernière partie de sa courte vie (il meurt en 1695) : sur le thème des amours tragiques et funèbres même, de la reine de Carthage, Dido / Didon. Le compositeur s’inspire de L’Énéïde de Virgile. Les peintres ont abondamment traité le sujet emprunté à l’histoire troyenne, celle du héros Enée qui après la chute de Troie, fuit vers l’Italie, et avant de fonder Rome, passe par Carthage (actuelle Tunisie) où il vit une passion hélas éphémère avec la belle Didon, reine de Carthage. L’histoire (et les peintres) ont surtout célébré le don total d’une souveraine amoureuse qui offre tout à cette passion qui la consume : devoir, responsabilité sont écartés en faveur de son amour pour Enée le troyen, qui lui ne fait pas le même choix, obligé à son destin qui est de quitter la reine, traverser la Méditerranée pour rejoindre la péninsule italienne et donc fonder Rome.
En fin d’action, Didon abandonnée (comme une autre figure tragique de l’amour, Arianne) s’effondre et se suicide, se destinant à un vaste bucher. Purcell traite et développe la facette douloureuse de Didon dont il fait une double victime : proie de la jalouse haine de la magicienne au II – entité noire et ténébreuse qui est chantée soit par une mezzo-alto, soit un contre-ténor ; victime surtout de la trop coupable lâcheté de son amant Enée, qui n’hésite pas à la quitter pour réaliser son devoir. Fonder Rome plutôt que d’aimer Didon.
Les deux temps forts de l’opéra de Purcell, ne concernent pas les duos, très rapides entre les deux amants, mais plutôt, l’invocation infernale de la magicienne, arbitre du destin de Didon et sa meilleure ennemie ; puis, le dernier tableau, celui lacrymal et tragique de la Reine, son lamento puissant et profond, véritable sommet du baroque anglais et du lyrique tout court, qui conclut l’ouvrage.
Que donnera cette nouvelle production aixoise, avec les chanteurs de l’Académie du Festival ? D’un côté on craint le pire : avec l’écriture d’un nouveau prologue (l’originel ayant disparu), réécrit pour l’occasion et explorant avant l’opéra de Purcell, la psychologie et le passé de la Reine avec le concours de la chanteuse Rokya Traoré (alors, inclusion étrangère réussie ou ajout « confusionant » ?)… Le choix de Lucile Richardot dans le rôle de la magicienne, celui des instruments anciens… promettent d’un autre côté, un spectacle convaincant. A suivre évidemment.
—————————————————————————————————————————————————
ARTE, France Musique. Le 12 juillet 2018, 22h30. PURCELL : Didon et Enée. En direct d’Aix en Provence. A l’affiche du 70è Festival d’Aix en Provence : DIDO AND ÆNEAS, LES 7, 10, 12, 13, 17, 18, 20 ET 23 JUILLET À 22h / Illustration : Didon, tenant le casque d’Enée (Dosso Dossi).
Durée : 1h20
Opéra en un prologue et trois actes
Livret de Nahum Tate
Texte du prologue de Maylis de Kerangal
Créé en décembre 1689 au Pensionnat pour jeunes filles de Chelsea
Direction musicale : Václav Luks
Mise en scène : Vincent Huguet*
Dido : Kelebogile Pearl Besong
Femme de Chypre : Rokia Traoré
Æneas : Tobias Greenhalgh
Belinda : Sophia Burgos
Sorceress / Spirit : Lucile Richardot
Second Woman : Rachel Redmond
First Witch : Fleur Barron*
Second Witch : Majdouline Zerari*
Sailor : Peter Kirk
Chœur et orchestre : Ensemble Pygmalion
—————————————————————————————————————————————————
LIRE notre compte rendu critique de DIDON ET ENEE de Purcell : Vaclav Luks / Vincent Haguet / Aix en Provence, le 7 juillet 2018 – AFFLIGEANTE PRODUCTION AIXOISE…