La Fida Ninfa, 1732
Vérone, temple de l’opéra
La création de l’opéra de Vivaldi est lié à 2 événements spectaculaires: un court séisme en janvier 1732 à Vérone, alors mégapole de Vénétie (50.000 âmes), et l’inauguration du nouveau théâtre Filarmonico, le 6 exactement, d’après des plans dessinés par Bibiena, génie du baroque architectural.
La ville est mélomane et même lyricomane, depuis 1651 quand est inauguré son premier opéra public (le Capitano). Les Véronais passionnés par les voix et le beau chant dès le Seicento, attendent au début du XVIIIème, leur nouveau théâtre d’opéra: le Filarmonico, inauguré avec l’opéra de Vivaldi en 1732, La Fida Ninfa. Le texte bucolique est l’oeuvre du lettré local, le Marquis Maffei. Alors engagé à défendre l’opéra vénitien contre la concurrence napolitaine, Vivaldi se passionne pour une oeuvre poétiquement limitée, aux possibilités dramaturgiques sans ampleur, mais dont les conditions de création, (engagement des grands solistes, orchestre important réputé, luxe de la réalisation scénique…) retiennent particulièrement son attention et stimulent son inspiration.
Vocalità maîtrisée
Les 3 actes enchaînent les airs da capo de solistes mais aussi les ensembles, comme le trio vocal qui conclue l’acte I (d’une vitalité tendre) ou le quatuor final du II. L’imagination instrumentale de Vivaldi fait feu de toutes les phrases poétiques, qui renouvelle le foisonnement expressif des Quatre Saisons. L’écriture vocale atteint en maints endroits une virtuosité superlative car elle reste proche du texte et des sentiments vécus par les protagonistes. En particulier, ceux de Licori, jeune amoureuse qui a perdu son fiancé Osmino, (créés en 1732 par la soprano Giovanna Gasperini) et de Morasto, son aimé justement rabaptisé ainsi après moules péripéties, (tenus par le castrat soprano Giuseppe Valentini).
Les Académiciens véronais auxquels revient la conception et les choix de la programmation musicale du Filarmonico se montrent satisfaits de l’opéra de Vivaldi qui est à nouveau sollicité en 1734: la mezzo protégée et muse du compositeur, Anna Giro, chante plusieurs de ses airs dans l’opéra Arsace de Giacomelli. Mieux, en 1735, le Pretre Rosso devient impresario du théâtre. Bajazet, Adelaide, Catone in Utica seront ainsi créés à Vérone, nouvelle scène pour Vivaldi qui a trouvé après Venise, une nouvelle cité, capable de comprendre son théâtre.
Illustrations: Allégorie par Laurent de la Hyre, Antonio Vivaldi (DR)
