Angela Gheorghiu chante Butterfly
Angela Gheorghiu chante Butterfly aux côtés du ténor Jonas
Kaufmann, sous la direction d’Antonio Pappano, pour Emi Classics
(parution: début mars 2009). A l’initiative d’Emi Classics et en pleine crise du disque physique,
Puccini suscite un nouvel enregistrement discographique qui dans la
carrière de la chanteuse maison, véritable star de la scène lyrique,
la roumaine Angela Gheorghiu, pourrait être un nouvel aboutissement dans son
parcours puccinien. L’album est annoncé début mars 2009: le 9
précisément.
150 ans après la naissance de Puccini, les interprètes de Madama
Butterfly se retrouvent à Rome, en juillet 2008 pour jouer l’opéra du
compositeur. Parmi eux, la soprano roumaine Angela Gheorghiu dont la
carrière s’est réalisée, pour partie, grâce à l’incarnation des héroïnes
pucciniennes dont Tosca n’est pas la moindre (immortalisée par le film
de Benoît Jacquot en 2000).
Rome, été 2008
A l’heure où les enregistrements en studio sont rares, Emi Classics
récidive l’expérience avec d’autant plus d’intérêt que sa dernière
production de Butterfly remonte à 1966: Sir John Barbirolli dirigeait à
Rome également Renata Scotto (Cio Cio San) et Carlo Bergonzi
(Pinkerton).
Leur succèdent le ténor allemand, né à Munich, aussi puissant que
sensible, Jonas Kaufmann aux côtés d’Angela Gheorghiu (les deux ont
chanté à Covent Garden, La Rondine), sous la baguette d’Antonio Pappano
(l’un des chefs préférés de la soprano).
La soprano roumaine, épouse de Roberto Alagna avec qui elle a
enregistré chez Emi, La Rondine, opéra abordé récemment au Metropolitan
Opera de New York (janvier 2009, retransmis en direct dans les salles
de cinéma), a été révélé dans La Traviata à Covent Garden en 1994. Son
timbre et sa tessiture de lirico-spinto, claire et sombre, intense et
dramatique, se révèle idéale dans le chant puccinien, souvent tragique,
propre aux héroïnes sacrifiées.
Du roman de Long à l’opéra de Puccini
La diva n’a-t-elle pas déclarée: « Si Puccini était en vie aujourd’hui, je serais amoureuse de lui ».
L’histoire propre aux comédies sentimentales mêle légèreté et tragédie.
Si Cio Cio San, jeune femme de 15 ans épouse le jeune marin américain,
Pinkerton, en station à Nagasaki, au début du XXème siècle, c’est par
amour et don total de sa personne. Or le marin ne croît pas à cette
comédie illusoire qui n’est pour lui qu’une mascarade exotique. Le
jeune militaire demeure un macho irresponsable, qui manque foncièrement
d’élégance. De toute évidence, le regard de Puccini s’attendrit plutôt
du côté de son héroïne… même s’il faut la faire souffrir jusqu’à la
mort.
Après la noce, Pinkerton abandonne la belle adolescente japonaise qui
tombe enceinte, accouche d’un fils, et attend son aimé, … 3 années
durant. Quand paraît Pinkerton, il a épousé une américaine et réclame
la garde du fils né de son premier mais faux mariage. Cio Cio San âgée
de 18 ans, se suicide de douleur. Seule, abandonnée, trahie, amoureuse:
voici, le prototype des héroïnes pucciniennes.
Butterfly, à Milan puis Brescia

la culture japonaise, grâce à la multiplication des échanges
commerciaux Asie-Europe-Amérique, l’auteur américain John Luther Long
écrit en 1898 sa nouvelle Madame Butterfly, dont le texte plus tard
adapté pour le théâtre par l’imprésario David Belasco, enflammera
l’imagination de Puccini, qui voit la pièce à Londres. L’opéra est créé
à Milan en février 1904: aucun succès! Puccini révise alors sa première
mouture. Il attendrit le portrait de Pinkerton, suggère même un soupçon
de regret chez le marin infidèle et cynique (« Addio fiorito asil »),
surtout coupe le second acte, jugé trop long, et désormais séparé par
le choeur murmuré…
Créé dans sa seconde version, Madama Butterfly, en mai 1904, à Brescia, (3 mois après la première milanaise), remporte un triomphe.
Le profil psychologique de Madame Butterfly, aussi jeune et fragile que
puissante et déterminée, hante Angela Gheorghiu depuis son premier rôle
puccinien, en 1996 (La Rondine).
Madama Butterfly. Avec Angela Gheorghiu, Jonas Kaufmann, Enkelejda Shkosa (Suzuki), Fabio Maria Capitanucci (Sharpless, le consul américain), Orchestre de l’Académie nationale de Sainte-Cécile. Antonio Pappano, direction. Parution: début mars 2009. Prochaine critique développée dans le mag cd de classiquenews.com
Illustrations: Angela Gheorghiu © G.Hennessey 2008