Beethoven bien sonnant
Célèbre pianiste hollandais, ayant largement enregistré Beethoven sur pianoforte et concertiste accompli, nous savions que Ronald Brautigam ne pouvait que proposer un Beethoven accompli. Le public s’est donc pressé pour ce programme de sonates parmi les plus connues du musicien de Bonn. Car il faut oser proposer des sonates que tout le monde a entendu, et souvent connaît par cœur. Manches retroussées, cheveux blancs au vent, en cette chaude soirée d’été indien toulousain le pianiste n’a pas ménagé sa peine, ni ses efforts. Avec une énergie considérable, il a interprété une « Pathétique » tonitruante, peu nuancée mais très impressionnante. Ses doigts d’airain n’ont pas cillé. Et les tempi ont été vifs, les phrasés larges et emportés. C’est une vision du pathétique beethovénien sans surprise. La sonate « Pastorale » a été plus séduisante, voire émouvante. Expert de la construction sur divers plans du discours beethovenien Ronald Brautigam a permis une lisibilité sans ombres de la partition. La souplesse et l’esprit de la danse ont été porteurs de beaucoup de plaisir musical, car laissant un peu imaginer la sensibilité du compositeur et surtout enfin celle de l’interprète. C’est incontestablement cette sonate qui en cette interprétation assez nuancée à marqué la première partie. La sonate « Clair de lune » ne peut trouver lieu plus propice que ce cloître des Jacobins pour exprimer sa charge poétique. Le jeu solide et engagé de Ronald Brautigam, se révèle un peu trop analytique pour provoquer le frisson poétique de l’astre de Diane dans la nuit d’été. Pour finir le programme, reconnaissons que dans sa construction parfaitement maîtrisée et très charpentée de « l’Appassionata » le pianiste hollandais a provoqué l’enthousiasme du public avec tout particulièrement un final pris dans un tempo vertigineux. Au total ce pianiste impressionne par sa maîtrise technique en force, même si quelques doigts ont pu riper.
Avec sa folle chevelure blanche, même physiquement, Ronald Brautigam a été un beethovenien convaincant sans surprise. Des concerts bien assis dans une certaine tradition forte et solide ont ainsi du bon. Assumant ce qui nous apparaît comme un quasi-conformisme Ronald Brautigam a poursuivi sa leçon de piano bien pensant en offrant en bis, la lettre à Elise et la Marche Turque ! Pièces rabachées par tant de mains plus ou moins adroites ont été ici conduites à l’évidence sans discussion possible par une écrasante perfection. Nous oserons toutefois signaler que la dernière pièce de Mozart n’a pas bénéficié de la moindre pointe d’humour…
Toulouse. Cloître des Jacobins. 14 septembre 2011. Ludwig Van Beethoven (1770-1827) : Sonates, n° 8 en ut mineur « Pathétique », op.13 ; n° 15 en ré majeur « Pastorale op.28 ; n° 14 en ut dièse mineur « Claire de lune », op.27 n°2 ; n° 23 en fa mineur « Appassionata » op.57. Ronald Brautigam, piano.