Hier soir, le Théâtre Auditorium de Poitiers accueillait l’ensemble Pygmalion qui, depuis sa création en 2005, défend avec bonheur l’oeuvre de Jean Sébastien Bach (1685 1750). Depuis 2010, l’ensemble Pygmalion ajoute à son arc une nouvelle corde en passant commande d’une oeuvre au jeune compositeur Vincent Manac’h né en 1973. Composé de jeunes artistes, l’ensemble Pygmalion, dirigé par le tout jeune chef Raphaël Pichon a choisi de présenter lors de ce concert deux cantates du cantor de Leipzig; l’ensemble a également créé la cantate Wolkengensang de Vincent Manac’h qui a composé sa musique sur un poème de Paul Celan (1920 1970).
Concert de très belle tenue
L’ensemble Pygmalion composé de jeunes artistes exécute avec bonheur deux très belles cantates choisies parmi les deux cent de Bach qui nous sont parvenues (même si l’on peut penser qu’il en a composé une centaine de plus). Pour cette soirée, peut-être un peu courte au vu de la très belle qualité de l’interprétation de ces jeunes artistes pleins de talent, le thème choisi était l’attente de la mort d’où le choix des cantates BWV8 [(Liebster Gott, wenn werd ich sterben ? (Dieu d’amour, quand mourrai-je ?)], composée en 1724 et la cantate BWV 27 [(Wer weiss, wie nahe mir mein Ende? (Qui sait combien ma fin est proche?)]. Dans cette optique Vincent Manac’h a composé sa cantate Wolkengensang sur un poème de Paul Celan suite à la commande de Raphaël Pichon pour l’ensemble Pygmalion. Si l’on peut être un peu étonné du style particulier de la musique, il faut reconnaitre qu’elle est très bien servie par l’ensemble Pygmalion accompagné ici par quatre solistes confirmés qui se sont beaucoup investis dans la création de cette oeuvre encore que la jeune Sabine Devieilhe a semblé mal à l’aise dans sa première intervention couverte par le choeur et l’orchestre; néanmoins la voix est très belle et pleine de promesses et la jeune femme se sent visiblement bien plus à son aise dans les deux cantates de Bach, malgré deux interventions plutôt brèves. Lucile Richardeaut dont la voix est plus proche de l’alto que du mezzo a certes une jolie voix mais reste en retrait par rapport à ses collègues et si elle chante assez peu dans Wolkengensang ses interventions (un récitatif et un aria) dans les deux cantates de Bach sont crânement assurées. Ce sont cependant les deux voix masculines qui tirent leur épingle du jeu dans les deux cantates de Bach. Doyen de la soirée, le ténor anglais James Gilchrist offre sa musicalité rayonnante dans les deux cantates de Bach mais demeure peu présent dans Wolkengensang. Benoit Arnould est l’un des espoirs de sa génération; le jeune homme a été excellent dans les trois oeuvres présentées et l’air de basse accompagné avec talent par Jean Brégnac à la flûte traversière dans la cantate BWV 27, est de toute beauté.
Un jeune chef passionné et volontaire
Raphaël Pichon fondateur et directeur musical de l’ensemble Pygmalion dirige ses musiciens avec la maitrise des grands chefs et dans l’oeuvre de Manac’h, l’on ne peut qu’apprécier la passion qu’il met à servir le répertoire baroque et la volonté affichée de donner leur chance à de jeunes compositeurs (la création de Wolkengensang est la première d’une longue série puisque plusieurs commandes ont été passées en 2010 avec le désir d’encourager les compositeurs dans l’écriture avec instruments anciens). Et si le public ne s’y est pas trompé en réservant un accueil très chaleureux aux artistes et à leur chef, le seule regret que nous ayons est de ne pas avoir pu écouter plus d’oeuvres de Bach dont le répertoire est pourtant si riche.
Poitiers. Auditorium, le 16 Février 2011. Jean Sébastien Bach (1685 1750) : cantate BWV8 ; cantate BWV 27. Vincent Manac’h (né en 1973) : cantate wolkengensang. Sabine Devieilhe (soprano); Lucile Richardeaut (mezzo soprano); James Gilchrist (ténor); Benoit Arnoult (basse); ensemble Pygmalion; Raphaël Pichon, direction.