mardi 13 mai 2025

CRITIQUE, festival. DEAUVILLE, 28ème Festival de Pâques (Salle Elie de Brignac-Arqana), le 13 avril 2024. Haydn / Beethoven / Fauré. QUATUOR AROD.

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Emmanuel Andrieu
Emmanuel Andrieu
Après des études d’histoire de l’art et d’archéologie à l’université de Montpellier, Emmanuel Andrieu a notamment dirigé la boutique Harmonia Mundi dans cette même ville. Aujourd’hui, il collabore avec différents sites internet consacrés à la musique classique, la danse et l’opéra - mais essentiellement avec ClassiqueNews.com dont il est le rédacteur en chef.

Débutée le 6 avril, la 28ème édition du Festival de Pâques de Deauville court cette année sur trois semaines, et s’achèvera le dimanche 27 avril, avec pas moins de huit concerts de musique chambriste sur la période, puisque c’est la spécificité de la manifestation normande. En près de 30 ans, ce ne sont ainsi pas moins de trois générations de musiciens qui ont fait leurs débuts, puis ont confirmé leurs carrières dans la superbe Salle Elie de Brignac-Arqana, à l’acoustique parfaite.

 

En ce second we de concerts, après une soirée consacrée à la musique de Telemann et Bach la veille (avec rien moins que Julien Chauvin au violon et Justin Taylor au clavecin…), celle du 13 avril accueillait les jeunes instrumentistes de l’excellent Quatuor Arod. Il consacre la première partie du concert à la première École de Vienne, en débutant par une exécution de l’avant‑dernier des six quatuors de l’Opus 76 (1799) de Joseph Haydn (1732‑1809). D’emblée, l’on sent une intense complicité dans l’interprétation qui laisse chaque protagoniste s’exprimer en pensant à l’unité de la formation. La maîtrise de l’œuvre est au rendez-vous, et l’on ne décèle aucune exagération dans les phrasés techniques de chacun des interprètes que nous écoutons avec une rare élégance. Mais c’est aussi le génie du compositeur qui leur donne le droit de s’exprimer pleinement.

Suit le Quatuor à cordes n°14 en do dièse mineur op. 131 de Ludwig van Beethoven. Si l’on devait définir l’exécution de cette pièce par les Arod en quelques mots : ce seraient finesse, subtilité et harmonie. Quelle délicatesse dans les piani, quelle douceur dans la mise en place des harmonies, quelle musicalité dans les phrasés ! Chaque musicien paraît ici suspendu à la ligne mélodique des trois autres, dans une respiration commune, et le public normand ose à peine respirer de peur de briser ces instants magiques… mais il serait bien réducteur de s’arrêter seulement à cela. Ce serait oublier la fougue avec laquelle ils interprètent, par exemple, le septième (et dernier) mouvement de cette pièce, délivrée avec une énergie tout simplement exceptionnelle !

 

 

Changement de style et d’époque, après l’entracte – où le Quatuor Arod est rejoint par le pianiste Kojiro Okada pour une interprétation du Quintette pour piano et cordes n°1 en ré mineur op. 89 (1906) de Gabriel Fauré, dont on fête cette année le centenaire de la disparition. Dans cet ouvrage de large dimension, les cinq hommes parviennent à conjuguer finesse et carrure, générosité et sens de la construction, expression et hauteur de vue. Même si une fort belle sonorité d’ensemble ne remet pas en cause le souci de faire prévaloir la progression du discours, les qualités individuelles – expansivité du premier violon de Jordan Victoria, précision de l’altiste Tanguy Parisot, autorité du violoncelliste Jérémy Garbarg – ressortent cependant avec éclat. Les musiciens trouvent en outre dans le pianiste bordelais (né de parents japonais) Kojiro Okada – qui ne se met jamais trop en avant mais n’en offre pas moins, par exemple, le toucher idéalement cristallin pour énoncer le thème de l’Allegretto moderato final avec maestria.

 

La Salle Elie de Brignac, dont l’usage et l’utilité n’est pas d’y exécuter des concerts, va maintenant retrouver sa vocation première, qui est la vente de chevaux de courses (elle se trouve en plein milieu d’un haras, lui-même situé en bordure du célèbre Hippodrome de Deauville) : mais dès le 30 juillet (et jusqu’au 10 août), la musique y résonnera à nouveau avec l’ouverture du 23ème Août musical de Deauville dont le programme sera bientôt consultable ici : https://musiqueadeauville.com/.

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CRITIQUE, festival. DEAUVILLE, 40ème Festival de Pâques (Salle Elie de Brignac-Arqana), le 13 avril 2024. QUATUOR AROD. Haydn / Beethoven / Fauré.

 

VIDEO : le Quatuor Arod interprète le Quatuor n°1 de l’op. 76 de Josef Haydn

 

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