dimanche 4 mai 2025

5èmes Voix du Prieuré au Bourget du Lac (73). Art vocal Du 27 mai au 11 juin 2008

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5èmes Voix du Prieuré
au Bourget du Lac
(73)

Rendez-vous d’art vocal
Du 27 mai au 11 juin 2008

9 groupes vocaux français et allemand sur le thème du sacré. C’est un grand rendez-vous choral, initié et conduit par Bernard Tétu qui rassemble ses Solistes de Lyon, les Neue Solisten de Stuttgart, Le Jeune Chœur de Paris et 6 autres chœurs régionaux, pour faire vivre « la musique au présent ». Mais en partant de Gesualdo pour aboutir aux partitions de 9 jeunes compositeurs, et en s’interrogeant sur la notion de sacré dans l’écriture musicale.

Schiller, Hölderlin, Char et le sacré
C’est drôle, la culture enlacée au souvenir. Petits travaux pratiques : vérifiez avant de consulter cet article que le sacré figure bien en toutes lettres (allemandes) dans une certaine Ode à la Joie d’un certain Schiller reprise par un encore moins incertain Beethoven pour clore sa IXe Symphonie. Elémentaire, cher Ludwig ! « Joie, étincelle divine et sacrée… », à peu près… N’est-ce-pas ? E h bien non, à moins de soudoyer les Belles Infidèles de la Traduction, Sacré il n’y a pas, textuellement parlant. Revoyez la copie, Monsieur le rédacteur. Qui tente de se rattraper en allant du côté d’un poète indispensable et de son édition- Pléiade : René Char. Cherchez bien, là encore ; Le terme « sacré » n’est pas si aisé à dénicher, bonne récompense à qui me le rapportera. A propos de son cher Hölderlin, bien sûr, qu’il cite : « Nommerai-je le Haut ? Pour le saisir notre joie presque est trop petite. Souvent il faut nous taire. Ils manquent, les noms sacrés… » . Et le mystérieux : « Tout proche et difficile à saisir le dieu. » Donc, en René Char (tiens on le cite aussi en 2008, parce que c’est le 20e anniversaire de sa mort, et surtout parce que sa pensée demeure essentielle), le sacré s’embusque partout, y compris dans sa réponse à un questionnaire « pourquoi ne croyez-vous pas en Dieu » : « Si par extraordinaire, la mort ne mettait pas le point final, c’est probablement devant autre chose que ce Dieu inventé par les hommes, à leur mesure,et ajuste (plutôt mal que bien) à leurs contradictions, que nous nous trouverions. » Et encore, à propos des dessinateurs de Lascaux : « Et si j’avais leurs yeux, dans l’instant où j’espère ? »

Vivez la musique au présent !
On vous met en éveil, chers lecteurs, parce que le festival des Voix du Prieuré, initié par Bernard Tétu, s’imprègne musicalement du terme, explicitement cité par le fondateur et conseiller artistique, dans la déclaration d’intentions 2008 : « Je souhaite que le Prieuré soit un lieu de création privilégie dans le domaine de la musique vocale, notamment en relation avec le sacré… »En effet, au Bourget (église Saint Laurent), au cœur des paysages du Lac (lamartinien, on ne saurait l’oublier en raison de ce Poème du Temps qui certes, en sa facture, date un peu, mais romantise si intimément, et de façon si totalement musicienne) et sous les montagnes, le sacré semble à « ses places », ainsi que l’Allemand Friedrich le disait pour les roseaux de sa peinture, abris d’un concept divin…L’autre devise des Voix, c’est « vivez la musique au présent », ce qu’a toujours su faire Bernard Tétu dans son enseignement et sa direction de chœurs ou d’ensembles instrumentaux, dans « l’exaltation du présent et un dépassement du temps ». Ainsi la résidence d’ensembles, l’ouverture au public des répétitions, notamment celles qui concernent les œuvres en création et commandées, les interventions en milieux scolaires universitaires et formateurs-musicaux font partie de la doctrine appliquée.

De Bible en Lao Zi et Lamartine, de Kagel en Schuehmacher
Une ouverture « Solistes de Lyon » donne les écarts chronologiques de l’éventail : B.Tétu y dirige Un (la précision voulue par l’auteur est importante) Requiem Allemand, de Brahms, dans la version avec deux pianos (Didier Puntos, Valérie Pley), qui répondra en écho au prologue conduit par l’Ensemble 20.21 (Cyrille Colombier), où l’irrévérencieux Mauricio Kagel inscrit ses 41 pièces au nom commençant par Rrrrr (dont un Requiem, évidemment)…Puis l’union du 20-21 et de la Résonance Contemporaine d’Alain Goudard, – si attaché à l’insertion en musique des enfants, des amateurs et des personnes en situation de handicap ou d’incarcération- permettra d’explorer l’univers poétique en arc-en-ciel (Bible, Lao Zi, les baroques espagnols, Blake, les absurdes francophones…) auquel le Canadien (né en Espagne) José Evangelista emprunte ses méditations. Après des chœurs en création (les ensembles régionaux Music’Yenne et Saltarelle), en direction de lma pratique amateur, les Solistes de Lyon et la harpe entremêlent leurs voix pour un programme du XIXe au XXIe. Lamartine « prie le matin » en compagnie de Berlioz, qui célèbre avec Shakespeare la mort d’Ophélie, Gustav Holst et André Caplet « travaillent » du côté du Ring Veda ou de la Renaissance française. Ce programme est conçu « comme une grande berceuse », et donne ensuite l’occasion au compositeur suisse Michaël Jarrell de proposer aux thèmes du festival et au « gongorisme » espagnol son Eco III, et d’ouvrir le jeu à deux « jeune génération ». L’Argentin Fernando Garnero est venu de son continent sud-américain pour travailler en Suisse (M.Jarrell, Klaus Huber, Gérard Pesson, Helmut Lachenmann…), et il est membre fondateur de Vortex.. Le Français Gilles Schuehmacher, formé à Lyon et Paris (Emmanuel Nunes, Michèle Reverdy…), œuvre « dans l’abstraction lyrique et l’expression du spirituel au moyen de la forme ». Les deux compositeurs créent ici pour les voix et la harpe.

Babylonien et ninivite
Autre domaine du spirituel avec les basses profondes de l’orthodoxie russe (Bortnianski, Tchaïkovski, Rachmaninov) et l’ajout de l Anglais contemporain, John Tavener, avec le Chœur départemental de Savoie (J.R.Lavandier) et le Chœur d’Alexandre Diakoff. Leur succèdent « les vagues vocales », montées de la pratique pédagogique pour une triade « un chœur, un chef, un compositeur », où l’on écoutera des œuvres de Philippe Forget, Ludovic Thirvaudey et Boris Clouteau. Laurence Equilbey (Accentus, Accentus…) et Geoffroy Jourdain (le Jeune Chœur de Paris) entrent dans les eaux de l’imaginaire biblique, « en pleurs sur les rives de Babylone », pour confronter un Te Deum de Mendelssohn, des partitions peu connues de Telemann et une œuvre du peu connu Johann Philip Kirnberger aux créations « babyloniennes » (sinon ninivites, comme on les aurait dites au temps berliozien : alors quoi, géantes, aujourd’hui ?) de l’Argentin Oscar Strasnoy (influencé par M.Levinas,G.Reibel et H.Zender) et du Français déjà très en vue Bruno Mantovani. Et c’est aux très européens Neue Vocalsolisten de Stuttgart que revient de clôturer, cette fois en italien dans le texte, la session 2008. En amont, l’ésotérique et fascinant Carlo Gesualdo, prince de la Renaissance, assassin des femmes mais créateur d’un langage à part du monde (madrigaux) ; en aval, un dialogue entre l’alpha et l’omega chez Luciano Berio ( A Ronne) et l’Alibi della parola, expérimentation de Salvatore Sciarrino.

Les Voix du Prieuré, Eglise Saint Laurent au Bourget, Espace Malraux à Chambéry. Mardi 27 (Chambéry), et vendredi 30 mai (comme tous les autres concerts, au Bourget), 20h30 ; Dimanche 1er juin, 19h ; lundi 2, 14h30 ; mardi 3, vendredi 6, 20h30 ; samedi 7, 18h et 19h30 ; dimanche 8, 19h ; mercredi 11, 20h30. Oeuvres de Carlo Gesualdo (1560-1613), G.P.Telemann (1681-1767), J.P.Kirnberger (1721-1783) F.Mendelssohn (1809-1847), Hector Berlioz (1803-1869), J.Brahms (1833-1897), L.Berio (1925-2003), M.Kagel (né en 1931), J.Evangelista (1943), J.Tavener (1944), M.Jarrell (1958), B.Clouteau (1971), O.Strasnoy (1970), B.Mantovani (1974), F.Garnero (1976), P.Forget (1970), L.Thirvaudey (1980), G.Schuehmacher (1978)…. Informations et réservations: 04 79 25 01 99 et www.bourgetdulac.com

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