vendredi 19 avril 2024

Haendel, Teseo. Opéra de Nice. Les 18, 20, 22 mars 2007

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Haendel l’Européen

Né le 23 février 1685 à Halle, au Nord est de l’Allemagne, Haendel montre très tôt des dispositions créatrices sur le plan musical. Son père accepte qu’il suive ses premières leçons auprès de Friedrich Wilhelm Zachow, organiste au sein de la paroisse familiale, la Liebenfrauenkirche (église Notre-Dame). Pratique régulière de l’orgue, contrepoint, maîtrise des chorals dans la tradition luthérienne… sont les bases « classiques » de la pédagogie de Zachow, auxquelles le professeur ajoute la connaissance tout autant assidue des styles européens contemporains: italien et français. Haendel doit écrire ainsi à la manière de Lully, entre autres. L’opéra, genre très en vogue dans les cours princières germaniques, en particulier italien, est la source d’une découverte et bientôt d’une passion croissante. Compositeur, Haendel sera surtout un homme de théâtre, exigeant sur l’interaction de l’action, du chant, de la musique.
Après un périple italien où il s’illustre sur la scène comme le meilleur des compositeurs lyriques italien, Haendel fait représenter son Teseo avec une maîtrise exemplaire. Il est à la fois, italien, germanique, français et londonien: de Purcell, compositeur illustre de l’Angleterre du XVII ème siècle, il poursuit le sens de la clarté mélodique.
Haendel acclimate la tradition théâtrale du masque où priment la danse, le chant et, comme dans la tragédie lyrique française, l’hommage rendu à la Monarchie. Conscient de la dimension moralisatrice et politique de l’action scénique, d’autant plus favorisée si elle s’adresse à l’élite princière et à la Cour, Haendel acclimate la forme de l’opera seria, action digne des héros tragiques et vertueux, avec fin heureuse (de rigueur) exposant une morale rassurante. Le héros que peint l’opéra haendélien est un hommage au Souverain dont les vertus humaines sont exposées et habilement mises en avant dans l’action représentée. Le génie du compositeur est d’apporter dans un cadre de « servitude » ou d’allégeance, la perfection de sa musique qui exprime la sensation palpitante des passions humaines. On sait avec quelle énergie il renvoya à ses écritures, son librettiste Thomas Morell, auteur des livrets des derniers oratorios, lequel avait eu l’audace de critiquer la musique parce qu’elle n’avait pas bien mis en avant, la force d’un mot. Or Haendel, conscient de sa valeur, marqua très nettement la supériorité de son art, sur celui de son collaborateur.

Londres, 1713

Fraîchement arrivé à Londres, fort du succès obtenu avec son Rinaldo (1711), Haendel se rapproche des compagnies et des théâtres qui soutiennent les productions d’opéra italien. Cosmopolite, dramaturge ambitieux, il puise dans la tragédie antique, les ressorts d’une action exemplaire qui s’appuie surtout sur l’intensité des principaux caractères. Thésée offre un prétexte idéal. Le héros a déjà été évoqué au siècle précédent en France, dans la tragédie lyrique que Lully et son versificateur de génie, Philippe Quinault, conçoivent pour Louis XIV. Leur ouvrage nourri de mesure et d’éloquence propre au Grand Siècle français, est créé devant le Roi, le 11 janvier 1675. Haendel s’inspire du livret dont il réalise une adaptation cependant grâce à la collaboration de son librettiste Nicolas Francesco Haym. Haendel impose son écriture musicale pour illustrer la grandeur édifiante et exemplaire des personnages de l’action. Les hautbois confèrent à l’ensemble une couleur « pastorale ». Rien n’est négligé pour frapper les esprits. Soucieux de susciter un nouveau succès, Haendel sacrifie à la mode de l’époque, il écrit le rôle principal, Teseo pour un castrat. La tessiture irréelle de ce type de chanteur accentuait la magie fantastique et l’irréalité de la création théâtrale. En homme de théâtre, Haendel devait certainement mesurer l’étendue féerique qu’apportaient alors les « stars » du chant.
Aujourd’hui, le rôle est tenu par une mezzo-soprano. La virilité à notre époque s’entend plus bas. Egeo et Arcane sont alto, contre-ténor ou haute-contre.
Le compositeur semble s’être passionné pour l’expression musicale de Médée, enchanteresse défaite, femme trahie, magicienne impuissante. Afin d’inscrire explicitement le désarroi du personnage, Haendel a choisi de doubler sa voix avec le timbre du hautbois dont on sait qu’il évoque comme nul autre la solitude de la voix, son errance et son impossibilité. Haendel n’a pas 30 ans lorsqu’il compose ce premier chef d’oeuvre. Teseo par sa maîtrise et sa profondeur psychologique, annonce les oeuvres de la maturité, Giulio Cesare, Alcina.

Illustrations

Haendel (DR)
Décors de la production de Teseo à l’Opéra de Nice, en mars 2007 (DR)

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