jeudi 18 avril 2024

Compte-rendu, opéra. SANXAY, le 9 août 2018. Puccini : Tosca. Hull / Vizioli

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DVD. Puccini: un séduisant Trittico (Opus Arte)COMPTE-RENDU, opéra. Sanxay. Théâtre gallo-romain, le 9 août 2018. Puccini : Tosca. Anna Pirozzi, Azer Zada, Carlos Almaguer. Eric Hull, direction musicale. Stefano Vizioli, mise en scène. C’est avec un plaisir non dissimulé que nous retournons une nouvelle fois dans les ruines du théâtre gallo-romain de Sanxay pour retrouver les Soirées Lyriques à l’occasion de leur 19e édition et du retour à l’affiche de la Tosca puccinienne après 14 ans d’absence.
Ces retrouvailles doivent pourtant se mériter, car le ciel déjà chargé en début de soirée, déverse soudain des trombes d’eau sur le site moins d’une demi-heure avant le début de la représentation, faisant planer l’ombre d’une annulation pure et simple de cette première.

 

 

 

 

TOSCA 3 sanxay 2018 par classiquenews 

 

 

 

 

 

Tosca à Sanxay, par notre envoyé spécial Narcisso Fiordaliso

Bellissima Tosca

Heureusement, l’averse n’est que de courte durée, les nuages finissent par se dissiper, et le spectacle est finalement maintenu, pour la plus grande joie des spectateurs.
Comme pour la Flûte Enchantée l’été dernier, la mise en scène a été confiée à Stefano Vizioli, qui a imaginé un décor unique composé d’un grand mur noir sur lequel sont écrits, en immenses lettres d’or, les mots « Deus Omnis Terra Veneratur ». Lors de l’entrée de Scarpia, des pans du mur s’ouvrent, formant une croix, pour livrer passage au chef de la police. Autre image forte, celle du Te Deum, où les choristes, vêtus et cagoulés de rouge, forment autant de figures inquiétantes et spectrales, semblant représenter le désir brûlant et inassouvi du baron.
Les deux actes suivants, de facture plus traditionnelle, racontent l’intrigue telle que le livret la décrit. Notre seul regret concerne les trois accords écrits par Puccini à l’issue du deuxième acte en rapport avec la cérémonie funèbre offerte par Tosca au cadavre de Scarpia, et qui ce soir ne bénéficient d’aucune traduction visuelle. Arpentant fébrilement le mur pendant de longues minutes, Tosca cherche simplement la sortie, proposition manquant selon nous de force dramatique.
Pour le reste, tout fonctionne superbement, une très belle production, sobre et efficace.
Comme toujours à Sanxay, la distribution a été particulièrement soignée par Christophe Blugeon, directeur de la manifestation.

 

 

 

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Voilà quatre ans, la soprano napolitaine Anna Pirozzi faisait ses débuts en France grâce aux Soirées Lyriques, qui plus est dans son rôle de prédilection : Abigaille dans Nabucco. Elle revient cette année dans le rôle de Floria Tosca, faisant même de cet engagement une histoire de famille : son mari violoniste joue dans la fosse parmi l’orchestre, et sa fille fait partie du chœur d’enfants. Bien entourée, heureuse et sereine, la soprano peut ainsi donner le meilleur d’elle-même dans ce personnage qu’elle connaît bien et dont l’écriture lui tombe dans la voix. Durant le premier acte, elle passe tout naturellement du badinage amoureux à la jalousie à peine contenue, déployant lentement toute l’ampleur de sa grande voix. L’acte suivant, intensément vécu, culmine dans un « Vissi d’arte » de haute école, chanté archet à la corde, aigu dardé et pianissimi longuement filés. La dernière partie la voit tendre et langoureuse, presque aveuglée par l’espoir et se prenant au jeu du simulacre d’exécution, avant de clore la soirée par un « Avanti a Dio » fier et insolent, de ceux qui font les grandes Tosca. Une fois encore, la cantatrice transalpine nous confirme sa place au firmament des grandes interprètes de notre époque.
A ses côtés, on découvre le tout jeune ténor Azar Zada, originaire d’Azerbaïdjan. Agé de seulement 28 ans, le chanteur révèle des moyens déjà conséquents, à la mesure de son allure, grande et solide. Un peu intimidé à son entrée, il prend peu à peu confiance, notamment grâce au soutien sans faille de sa partenaire et délivre surtout un « E lucevan le stelle » de très belle tenue, aigus aisés et nuances amoureusement distillées. Toutefois, on souhaiterait conseiller à cet artiste plus que prometteur de ne pas abuser de rôles trop lourds, le médium semblant déjà parfois plus robuste que de raison et l’aigu manquant ainsi de squillo. Pourquoi ne pas tenter le Duc de Mantoue et Edgardo dans Lucia di Lammermoor ?
Fidèle des Soirées Lyriques, où il interprétait déjà le même rôle voilà 14 ans, Carlos Almaguer revêt à nouveau les habits de Scarpia avec bonheur, faisant admirer sa voix généreuse et sonore ainsi que son superbe sens du texte. Seuls des accents parfois trop véristes entachent selon nous ce remarquable portrait, et un « Ebben » perfidement susurré pianissimo à l’oreille de sa proie, laisse imaginer ce que pourrait donner une interprétation moins expressionniste de la part du baryton mexicain.
Aux côtés de l’Angelotti convaincant d’Emanuele Cordaro, les seconds rôles assurent tous impeccablement leur partie, avec une mention spéciale pour le Geôlier solidement campé par Jesus De Burgos et le Berger très poétique du tout jeune Gaspard Lys.
Impeccablement préparé, comme chaque année, le chœur du festival ne mérite que des éloges.

 

 

 

TOSCA 2 sanxay par classiquenews

 

 

 

A la tête de l’excellent orchestre constitué pour l’occasion, Eric Hull convainc par sa direction d’un impeccable professionnalisme, à laquelle manquent seulement des couleurs parfois plus fortes et une personnalité plus marquée pour laisser un souvenir durable. Toutefois, le travail du chef canadien est à saluer.
Encore une magnifique représentation qu’on doit aux Soirées Lyriques de Sanxay. Rendez-vous l’été prochain pour la vingtième édition, un anniversaire qu’on ne manquera sous aucun prétexte.

 

 

 

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Compte-rendu, opéra. Sanxay. Théâtre gallo-romain, 9 août 2018. Giacomo Puccini : Tosca. Livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica d’après Victorien Sardou.
Avec Floria Tosca : Anna Pirozzi ; Mario Cavaradossi : Azer Zada ; Baron Scarpia : Carlos Almaguer ; Cesare Angelotti : Emanuele Cordaro ; Le Sacristain : Armen Karapetyan ; Spoletta : Alfred Bironien ; Sciarrone : Vincent Pavesi ; Le Geôlier : Jesus De Burgos ; Un Berger : Gaspard Lys. Académie de Chant Chœur d’enfants des Soirées Lyriques de Sanxay ; Chœur des Soirées Lyriques de Sanxay ; Chef de chœur : Stefano Visconti. Orchestre des Soirées Lyriques de Sanxay. Direction musicale : Eric Hull. Mise en scène : Stefano Vizioli ; Scénographie : Mauro Tinti : Lumières : Nevio Cavina / illustrations : © Sanxay 2018

 

 

 

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