Tours, OpĂ©ra. Puccini : Il Trittico, le Triptyque. Les 13, 15, 17 mars 2015. Il y eut Ă l’opĂ©ra, au XVIIIĂš, ce goĂ»t particulier pour les opĂ©ras ballets de Rameau en un Prologue et 3 entrĂ©es : chacune depuis Les Indes Galantes (1735), ayant son propre climat et son sujet particulier. Puccini semble reprendre ce principe du “3 en 1″ (mais sans les ballets Ă©videmment, avec un orchestre aussi somptueux). Avec cette subtile relation des actes sĂ©parĂ©s entre eux : il y a bien une secrĂšte unitĂ© dramatique entre les 3 volets. La dĂ©sillusion les relie allusivement.
3 drames en 1 soirée
Giorgetta dans il Tabarro, comme Angelica dans Suor Angelica Ă©prouvent chacune la brĂ»lure tragique : toute deux sont abonnĂ©es Ă l’accablement le plus cynique. La premiĂšre doit voir le visage de son aimĂ© mort (sortant de la houppelande oĂč l’avait enseveli le mari de Giorgetta, Michele) ; de mĂȘme, Ă Angelica, il n’est rien Ă©pargnĂ© : recluse dans le couvent oĂč elle se consume, elle apprend que son propre enfant est mort… de surcroĂźt sa famille lui fait payer encore le fruit de cet adultĂšre en exigeant d’elle qu’elle renonce Ă tout hĂ©ritage… seule l’apparition de la Vierge en fin de drame lui apporte un soulagement bien prĂ©caire dans le suicide qu’elle rĂ©alise alors. Il est plus difficile de relier le dernier drame, Gianni Schicchi, aux deux derniers : car ici le rusĂ© filou trompe une famille entiĂšre qui se rend coupable de réécrire le testament de leur riche patriarche. L’espĂ©rance déçue pourrait ĂȘtre un lien apparemment : condamnĂ©e de fait, et Giorgetta et Angelica ; déçue et dindon de la farce qui se retourne contre elle, grĂące au stratagĂšme de Schicchi, la famille du riche Buoso Donati. Victimes absolues, Giorgetta et Angelica ont notre compassion. Par contre Gianni Schicchi est bien inspirĂ© de donner une leçon aux hĂ©ritiers Donati…
Puccini, Ă travers la diversitĂ© des Ă©poques et des situations : une pĂ©niche amarrĂ©e Ă Paris pour Il Tabarro ; un couvent itlaien au XVIIĂš pour Suor Angelica, enfin la demeure d’un riche marchant Ă Florence en 1299… pour Gianni Schicci, s’intĂ©resse principalement Ă raffiner l’orchestration de chaque Ă©pisode. Peintre et mĂȘme alchimiste des harmonies subtiles (ambiance parisienne sur la Seine d’Il Tabarro ou la Florence mĂ©diĂ©vale et sentimentale de Gioanni Schicchi), il ose tout, sachant toujours ĂȘtre au service de la sensualitĂ© et de la tendresse : les rĂȘves perdues de Giorgetta (aprĂšs la mort de son fils) ; le lyrisme tragique et humble de Suor Angelica, surtout, l’amour tendre des protĂ©gĂ©s de Schicchi, Rinuccio et Lauretta qui peuvent en effet en fin d’action se marier. Ici, le compositeur Ă©pingle l’hypocrisie familiale, l’Ă©tau affectif dĂ©cidĂ© par des clans stupides. En exploitant toutes les ressources expressives de chaque tableau, Puccini crĂ©e pour la scĂšne new yorkaise (les 3 drames ont Ă©tĂ© conçus pour le metropolitan Opera en dĂ©cembre 1918) une nouvelle langue : aussi raffinĂ©e que Tosca, La BohĂšme, Madama Butterfly mais sur un ton lĂ©ger, resserrĂ©, d’une dĂ©licatesse intimiste rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e. Le ton comique de Gianni Schicchi n’oublie jamais la gravitĂ© des sentiments, l’ivresse sincĂšre des dĂ©sirs…
Pourquoi ne pas manquer Il Trittico Ă Tours ?
Outre l’Ă©loquence de l’orchestre flamboyant, Il Trittico / Le Triptyque sĂ©duit aussi grĂące Ă la cohĂ©rence dĂ©fendu entre les drames par le seul choix d’une mĂȘme interprĂšte entre les diffĂ©rents actes. A Tours, l’argument demeure la participation de l’excellente soprano Vannina Santoni dans les rĂŽles d’Angelica et de Lauretta, dĂ©jĂ remarquĂ©e dans une convaincante production de La Chauve Souris prĂ©sentĂ©e en dĂ©cembre 2014 (elle y interprĂ©tait la dĂ©licieuse servante AdĂšle) . A ses cĂŽtĂ©s, le non moins engagĂ© et superbe acteur, Tassis Christoyannis (il y a peu de temps Don Giovanni sur la mĂȘme scĂšne) prĂȘte son baryton subtile et dramatique aux rĂŽles de Michele (Il Tabarro) puis surtout Ă Gianni Schicchi. Nouvelle production Ă©vĂ©nement.
Puccini: Il Trittico, Le Triptyque (1918) Ă l’OpĂ©ra de Tours
Paul-Emile Fourny, mise en scĂšne
Jean-Yves Ossonce, direction
Vendredi 13 mars, 20h
Dimanche 15 mars, 15h
Mardi 17 mars, 20h
distributions :
Il TABARRO
Opéra en un acte
Livret de Giuseppe Adami
Création le 14 décembre 1918 à New-York
Editions Ricordi
Direction : Jean-Yves Ossonce
Mise en scĂšne : Paul-Emile Fourny
DĂ©cors et LumiĂšres : Patrick MĂ©eĂŒs
Costumes :Â Giovanna Fiorentini
Giorgetta : Giuseppina Piunti *
La Frugola : Cécile Galois
Michele : Tassis Christoyannis
Luigi : Florian Laconi
Il Tinca : Antoine Normand
Il Talpa : Franck Leguérinel
SOEUR ANGELIQUE
Opéra en un acte
Livret de Giovacchino Forzano
Création le 14 décembre 1918 à New-York
Editions Ricordi
Direction : Jean-Yves Ossonce
Mise en scĂšne : Paul-Emile Fourny
DĂ©cors et LumiĂšres : Patrick MĂ©eĂŒs
Costumes : Giovanna Fiorentini
Soeur Angelica : Vannina Santoni
Tante Princesse : Cécile Galois
L’Abbesse : Delphine Haidan
Soeur Genovieffa : Aurélie Fargues
Soeur Osmina : Chloé Chaume
GIANNI SCHICCHI
Opéra en un acte
Livret de Giovacchino Forzano
Création le 14 décembre 1918 à New-York
Editions Ricordi
Direction : Jean-Yves Ossonce
Mise en scĂšne : Paul-Emile Fourny
DĂ©cors et LumiĂšres : Patrick MĂ©eĂŒs
Costumes : Giovanna Fiorentini
Gianni Schicchi : Tassis Christoyannis
Lauretta : Vannina Santoni
Zita : Cécile Galois
Rinuccio : Florian Laconi
Gherardo : Antoine Normand
Nella : Chloé Chaume
Marco : Franck Leguérinel
La Ciesca : Delphine Haidan
Betto : Nicolas Rigas
Simone : Ronan Nédélec
Spinelloccio : Jacques Lemaire
Notaro : François Bazola